Désolation

Environs 10 ans plus tard, quelque part dans l'univers ...

Un paysage dévasté s’étendait à perte de vue. Le ciel gris et brun se confondait avec la terre, les ruines de pierre avec les arbres morts. Un vent fétide soufflait continuellement et impitoyablement sur les décombres, soulevant un nuage de fumée nauséabond.

La solitude, la désolation, la mort, voilà ce que criait ce paysage. On avait vécu ici, on avait rêvé, cru, voulu, combattu. Et on s’était détruit.

Mais ce pays oublié n’était plus désert. Des bottes foulaient la terre, une silhouette avançait contre le vent. Son manteau de toile la couvrait entièrement, et son visage était caché par un masque de protection respiratoire et de grosses lunettes d’aviateur. Elle marchait sans forcer, comme s’il n’y avait pas plus qu’une légère brise, alors que la puissance des bourrasques arrachait presque les maigres arbres encore debout. L'individu tenait une main levée devant lui comme un bouclier. Et par une magie mystérieuse Le vent se séparait devant lui comme la mer devant Moïse.

Lentement mais sûrement, la silhouette avançait vers une ruine en meilleur état que les autres, offrant un abri de fortune. C’était une tour de pierre grossière, mais solide. Arrivée enfin à l’abri, la personne masquée passa l’entrée sans porte. A l’intérieur, une autre silhouette portant manteau et masque attendait, couchée par terre.

« Tu n’as rien trouvé ici non plus ? Demanda-t-elle. Personne ?

-Non, tout a été détruit. Les habitants ont dû avoir recours à une arme bien dévastatrice pour en arriver là. Je crois qu’il n’est vraiment pas nécessaire de rester plus. Ça n’a rien à voir avec ce que nous cherchons.

-Ou s’il y a eu un indice quelconque, il est maintenant détruit. Et c’était notre seule piste … »

La silhouette venant du dehors se rapprocha de l’autre et s’assit près d’elle. Maintenant qu’ils étaient côte à côte, les deux individus se démarquaient l’un de l’autre. Celui qui était couché semblait plus grand et un peu plus massif que l’autre. Sa voix, déformée par le masque, était plus grave également.

« Hona, dit la silhouette masculine, partons. L’air est de moins en moins respirable.

-Où est-ce qu’on va ? Interrogea l’autre en imitant son ami qui se relevait. Je propose Fergeron. J’en ai entendu beaucoup de bien !

-C’est proche d’ici, Fergeron ? N’oublie pas qu’on ne choisit pas vraiment où on va.

-C’est à quelques années lumières au nord d’ici. Trois ou quatre systèmes nous en séparent, c’est faisable, non ? Et puis il paraît que c’est habité par d’autres Mürr et ça fait une éternité que je veux en rencontrer ! Aller, Lulu !

La grande silhouette se balança d’un pied sur l’autre, évitant le regard brûlant que lui assénait Hona. Mais c’était inutile. Aluke le savait, il ne pouvait rien lui refuser.

-Mh, on va tenter, mais je ne te promets rien.»

 Hona sauta de joie et attrapa les mains d'Aluke. Ensemble, ils commencèrent à psalmodier dans une langue étrange, faisant claquer leurs langues en rythme. Leurs mains liées se mirent à briller jusqu’à devenir blanches. La lumière remonta de leurs bras à leurs épaules et les enveloppa tout entiers. Dans un grand flash lumineux, ils quittèrent la tour et cette planète dépeuplée.