Lorsque Camille se réveilla, il trouva Chris habillée, prête à sortir, mais assise près de la porte et l’air indécis. Son sac de la Brigade était posé à ses pieds, plein à craquer. Il se tourna d’abord vers la cafetière fumante, se servit, puis la rejoignit.
— Qu’est-ce que tu fais ? demanda-t-il.
— Tu t’occupes de la livraison ?
— Qu’est-ce que c’est et pour qui ?
— Le minerai de Bellem.
Camille haussa un sourcil surpris.
— Ah oui, pour son moule… Bon…
Il souleva le sac et gémit en le reposant.
— Je vais aller emprunter une brouette à Jean et je reviens.
— Oh pitié, Camille, râla-t-elle. Et ça, tu peux t’en occuper ?
Elle lui tendit la boite en polystyrène.
— Qu’est-ce que…
Ses mains se mirent à trembler et elle le vit pâlir à vue d’œil. Elle lui reprit aussitôt, observant la sueur qui s’amoncelait au-dessus de ses sourcils.
— C’est dingue, tu sers à rien, souffla-t-elle.
— Désolé, se défendit-il. Mais tu sais, je peux y arriver. J’ai quand même pas peur d’un petit bout de… d’un tout petit bout de… de machin… tiré des limbes.
— Laisse tomber. J’y vais.
— Attends, soupira-t-il. Je viens. Faut qu’on parle à Layla. La chambre de spectre que tu as filmée ressemble, mais pas exactement, il me semble. Enfin, je crois, j’ai pas vraiment regardé. Je n’étais pas concentré là-dessus.
— On va voir.
Ils sortirent en silence. Camille ne pipa mot tout le long du trajet vers l’hôpital et elle le sentit soulagé quand ils eurent livré leur colis. Bon sang, c’était quelque chose qu’elle ne pouvait pas comprendre, ça lui échappait complètement. Comment comptait-il survivre en paniquant devant un échantillon et en allant chercher une brouette pour transporter un sac à dos ?
— Me regarde pas comme ça, je sais ce que tu penses, gronda-t-il au bout d’un moment. Tu me trouves fragile, c’est ça ?
— J’ai rien dit.
— Ça se voit sur ta tête. On a déjà eu cette discussion, c’est pas moi qui suis fragile, c’est toi qui es surhumaine.
— J’ai toujours rien dit.
Elle resta silencieuse un peu plus longtemps et finit par demander.
— Bon, et sinon, il t’est arrivé quoi l’autre jour ?
— Ah, tu n’as pas oublié, ricana-t-il.
— Ça m’intrigue. Toi en armure…
— J’ai pris une douche à la Brigade parce que j’étais crade… et ils m’ont passé ça pour que je puisse me changer.
— Les vêtements que tu as ramenés puaient le soufre.
Il se mordit la lèvre.
— Tu es allé renifler mes fringues sales ? demanda-t-il hilare.
— Tu tiens vraiment à ce que je te tire les vers du nez ? gronda-t-elle.
— C’est bon, c’est bon. Fin du suspens. Non, je ne suis pas allé dans les limbes. J’ai fait un tour dans le quartier des criminels pour trouver des gens qui seraient capables de me donner des détails croustillants sur la trop sacro-sainte Brigade. Je me suis fait bizuter comme un bleu, je me suis retrouvé dans un bâtiment plein de monstres et la cavalerie a dû rappliquer pour me tirer de là.
— T’es vraiment trop con.
— Bah quoi ? Ça se serait passé comme ça si j’avais écouté ce qu’on me disait en arrivant ? J’aurais été envoyé là-bas et je serais mort ?
— Bien sûr que non.
— Alors c’est quoi le problème ?
— Mais bon sang, Camille, personne dans cette ville n’ignore qui tu es. Tout le monde est au courant que tu es le fils de Tony et que tu es de la Brigade. À quoi est-ce que tu t’attendais, au juste ?
Il fit la moue, mais ne répondit rien, un peu vexé.
— Si tu veux savoir quelque chose, pourquoi tu ne me demandes pas à moi ? continua Chris. Sur le quartier des criminels, sur la Brigade…
— Tu m’aurais accompagné ?
— Si tu m’avais donné une meilleure raison, oui.
— Pourtant, j’ai cru comprendre que tu préférais ne pas t’en approcher.
Elle haussa les épaules.
— Ça va, j’aime pas les fantômes, mais je n’en ai pas peur. Je ne retrouverai pas ma mémoire en regardant de vieux gravats. Et même si ça arrivait et bien quoi ? J’aurais d’autres trucs à ruminer, ça ne changerait pas grand-chose à ma vie.
— Dit comme ça…
— J’espère qu’ils t’ont passé un savon parce que ta conduite était vraiment stupide.
— Oui, c’est bon, j’ai compris.
Il soupira. Elle lui donna une petite tape dans le dos pour le consoler, il fit mine de s’être déboité l’épaule. Elle riait encore en poussant les portes battantes du bar. Son sourire se fana instantanément quand elle se rendit compte dans quoi elle venait de mettre les pieds.
Je parie sur un anniversaire surprise.
Chapitre très court, je n'ai pas grand chose à dire à part : quand est ce qu'ils vont se tomber dans les bras ? Parce que quand on passe son temps à ce chamailler comme ça, on est un vieux couple, hein ? XD
Allez, à bientôt !
<3