Les ouvriers font un vacarme ahurissant. Je comprends bien qu'il n'est pas simple d'effectuer un ravalement de façade dans le plein silence mais ont-ils besoin d'ajouter leur radio de merde, avec leur musique de merde au jalonnement agressif de ce qui ressemble à un marteau piqueur ? Enrico Macias en duo avec la machine des enfers c'est un peu mystique, comme ça, dès le matin.
Alors je m'énerve toute seule, je grogne d'abord, je râle ensuite, je gueule bientôt.
Putain j'aimerais pousser cet échafaudage dans une autre dimension !
C'est étrange, sous tension, comme l'on peut être distrait sur le reste de nos actions. Je ne prends pas ce boucan comme excuse à ma bêtise, elle est bien présente toute l'année même dans le calme absolu mais tout de même, ça n'aide pas !
Nerveuse j'effectue donc mes actions rapidement et avec un réel détachement.
- Qu'on en finisse !
Ainsi à cet instant, j'ai bougé le bouton de température de ma machine à laver d'un cran, dans le mauvais sens, sans faire attention... (si je faisais attention à ce que je fais, la vie serait tout de suite moins drôle, avouez-le).
Dans cette machine, j'ai déposé ce que nous avions de plus fragile, ou presque, une chance dans mon malheur ma robe japonaise à trois cent euros étant tombée du panier à linge en cour de route, elle évitera la catastrophe de peu.
Des pulls qui se lavent à froid, une écharpe en cachemire qui trainait dans le panier depuis l'hiver dernier et les maillots de bain de ma fille seront par-contre du voyage.
Tout c'est joué à un cran prés, quand on y pense, un simple petit centimètre de rien du tout.
Je vous explique : Le cadrant rond du bouton de réglage commence à froid puis augmente de trente degrés jusqu'à quatre vingt dix, normal jusque là. En passant évidement par quarante, soixante, le tout dans un sens, vers la droite.
Dans l'autre, du coup, vers la gauche, quatre vingt dix est collé à : eau froide…
L'avantage d'un lavage long, à quatre vingt dix degrés, c'est qu'après cent vingt minutes de lavage et cinq d'essorage, il ne reste certainement que très peu de chance de trouver une tache récalcitrante. Mais le résultat est on ne peut plus discutable. Mes pulls en laine ressemblent à des gants de crins, ceux de ma fille à des tenues pour Barbie au pire, pour Hobbit au mieux. Quand à l'état des vêtements en fibres "moderne" il nous fait regretter d'avoir dû butter de pauvres petits acryliques innocents pour les réaliser.
La palme revient aux maillots de bain qui ont, je pense, un peu "fondu". J'ignore si on peu dire ça comme ça... En bref l'amas qu'ils représentent tous deux est vraiment très consistant, voir carrément coriace. Il refuse d'ailleurs de s'étaler, préférant, tel un hérisson sauvage, rester en boule. Position de défense bien inutile à présent, puisque lorsque je le secoue, ses fibres qui s'émiettent tombent par terre sans demander leur reste.
Encore une victoire de canard...