Épilogue [NOUVELLE VERSION]

Le domaine des ducs de Frostarel se déployait, immortel, comme un arbre aux multiples ramifications, caressé par les doigts d’un soleil estival. La monture d’Altaïs renâcla doucement lorsqu’il l’incita à s’immobiliser, et les mains tremblantes du jeune homme raffermirent leur prise sur les rênes. Après des mois de voyage dans les contrées d’Issheimr, Alexander et lui avaient décidé de revenir dans le Nord. de revenir sur ces terres gorgées du sang d’Evald, du leur également.

Altaïs retint son souffle avec appréhension, mais la brise continua d’agiter les branches, soulevant dans son sillage un parfum de fleurs des champs. Des oiseaux chantonnèrent au loin.

Tout n’était pas mort avec Evald.

Et peut-être qu’ici, Altaïs guérirait petit à petit.

— Tout paraît si paisible, observa Alexander en mettant pied à terre.

— Oui…

Le murmure d’Altaïs s’échappa avec peine de sa bouche tant sa gorge était nouée.

— Nous y sommes. Chez nous.

Altaïs baissa les yeux vers son compagnon, qui s’était arrêté près de sa monture. Alexander effleura son bras du bout des doigts, laissant dans son sillage une traînée d’étincelles qui réchauffa sa peau sous le tissu clair de sa tunique. Son sourire ensoleillé acheva de chasser le froid qui s’était logé dans la poitrine d’Altaïs.

Lentement, celui-ci frôla la bague qui ornait l’annulaire d’Alexander, métal blanc serti d’une pierre bleu pâle. Semblable à celle qu’il portait lui-même.

Leur promesse.

— Je t’aime, chuchota-t-il.

Les mots vibrèrent au fond de lui comme les cordes d’une harpe. Il était… heureux. Malgré la colère qui surgissait parfois sans crier gare, malgré l’angoisse qui reprenait souvent le dessus, il réapprenait peu à peu à respirer, à vivre. Jour après jour, ils bâtissaient à la force de leurs espoirs et de leurs rêves un avenir auquel Altaïs avait longtemps cru ne pas avoir droit.

— Et les étoiles ne tomberont jamais.

Altaïs inspira profondément et attrapa la main que lui tendait Alexander pour descendre de son cheval. Doucement, leurs doigts toujours entrelacés, il s’engagea à la suite de son compagnon, foulant les jardins avec en mémoire tout ce qu’il s’y était passé, et tout ce qu’il pourrait désormais y advenir.

— Nous sommes chez nous, répéta Alexander dans un souffle.

chez nous

Pour toute réponse, Altaïs l’embrassa avec tendresse. Oui, sur ces terres où il aurait pu grandir, aux côtés d’Alexander, il guérirait petit à petit.