Gloria rechargeait sa mitraillette. Elle s’était appuyée contre un mur dans un bâtiment abandonné. Tout autour d’elle, on pouvait entendre les souffles sourds et bruyants des Kings Kongs. Une fois la mitraillette chargée, elle se pencha pour voir à travers un trou.
A l’extérieur, un King Kong escaladait un immeuble en face.
Elle courut à la fenêtre et tira sur l’animal. Un peu plus haut dans le même bâtiment, un survivant l’imita. Le King Kong hurla en sentant les balles lui rentrer dans l’échine. Il se tourna vers Gloria, se ramassa sur lui et bondit dans sa direction.
Gloria sauta en arrière. Le Kong s’écrasa sur le bâtiment abandonné et passa sa main à travers la fenêtre. En deux coups, il avait défoncé le mur et rentrait à l’intérieur. Gloria s’était remise debout et courut à travers un couloir.
Pendant sa course, elle sauta entre deux portes et continua de courir. Le Kong arriva derrière elle, et força son gros corps dans le couloir, défonçant un peu des murs et du plafond. Son hurlement fit trembler les frondaisons. Il passa à l’endroit où Gloria avait sauté et brisa le fil tendu à quelques dizaines de centimètres du sol. Plusieurs détonations eurent lieu et le Kong se retrouva englouti dans les flammes et les explosions.
Gloria sauta dans un escalier et se mis à l’abri du feu. Elle se releva, fière d’avoir éliminé un Kong, et épousseta son poncho. Soudain, une partie du mur derrière elle s’enleva, révélant un autre King Kong encore plus énorme que le précédent. Gloria vida son chargeur dans le visage qui remplissait tout le trou et s’enfuit en courant.
Un autre mur explosa et déversa plusieurs Kong qui essayèrent de l’attraper. Elle sauta alors depuis une fenêtre.
Elle crut mourir, mais elle tomba dans quelque chose de métallique et de froid. La main d’un Mécha King Kong ! Son ami Shoku la regardait à travers les trous du nez.
- Tu l’as réparé !
- Eh ouaip, fit celui-ci avec un petit sourire.
Ils n’eurent pas le temps de plus échanger. Une dizaine de Kong surgirent depuis l’immeuble et tombèrent tous sur le Mécha. Celui-ci les écarta un par un. Deux de ses doigts se modifièrent en lame tranchante, et plusieurs Kong moururent d’un coup de rasoir.
Mais soudain, un immense King Kong apparut au détour d’un immeuble. Il devait bien mesurer une trentaine de mètres. C’était le plus grand qu’ils n’aient jamais vu. Un autre Kong était accroché à son épaule : Harambé. Celui-ci les désigna du doigt. L’immense Kong se jeta sur le Mécha King Kong et lui colla un uppercut que Mohammed Ali n’aurait pas renié.
Le mécha Kong tomba à la renverse. Dans le cockpit, tous les voyants étaient au rouge. Gloria glissa et s’accrocha à un doigt du mécha. Ce dernier s’écrasa par terre et le King Kong géant le suivit. Il l’enjamba et commença à le massacrer de violents coups de points.
- Espèce de vieux porc putride déguisé en vieille pute poilue ! Touche pas à mon mécha ! s’égosillait le pauvre Shoku.
Harambé émit un rire guttural et commanda dans sa langue de Kong de frapper encore plus fort. Shoku sortit alors du cockpit, un petit flingue à la main. Il le pointa vers le King Kong et fit feu.
- Crève, peste noire de mon cul !
- Shoku ! hurla Gloria. Attention !
Le King Kong géant se tourna vers lui et abattit son énorme poing. Un éclair les illumina tous.
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- Numéro 5 ?! s’écria Gene en se retournant.
En effet, 5 lui faisait face, un pistolet dans la main.
- Woh ! Qu’est-ce qui t’arrives, numéro 5 ? fit Gene. Baisse moi ce gun bordel !
- Désolé que ça t’arrives durant ta première mission, le bleu !
- Qu’est-ce que tu racontes ! On est du même côté !
Peu importe le côté duquel se tenait l’agent 5, il eut pendant un temps l’impression que Gene se tenait effectivement à ses côtés. Il le regarda d’un air complètement perdu. Puis la rage s’empara de lui et il frappa Gene avec la crosse du flingue.
- Te fous pas de ma gueule ! Vous n’arrêtez pas de vous foutre de ma gueule avec le Colonel Jones ! Ca fait vingt piges que je me la traîne sur le dos à jouer les marioles ! Je ne rêve plus que d’une chose, c’est de tous vous tuer ! !!
Gene réagit avec la vitesse du guerrier. Ca, c’était quelque chose qu’il connaissait. Un humain pointant un pistolet vers un autre humain. Ca, c’était quelque chose qu’il pouvait gérer. Avec une main, il poussa l’arme à feu de 5, et de l’autre l’attrapa par le col. Il passa sa main libre entre son épaule et fit basculer l’agent. Ce-dernier s’écrasa au sol. Entre-temps, Gene avait récupéré son arme et le maintenait en joue.
- 5, je sais pas à quoi tu joues. On s’est séparé il y a à peine une heure. T’as peut-être été piqué ou quoi.
- Va te faire foutre ! Et puis je suis sur que t’es un infiltré toi aussi ! Tu nous as tous vendus !
Gene le regarda avec des yeux ronds.
- c’est ma première mission gros con ! Comment je peux vous avoir vendu ? Je ne connaissais pas l’existence de l’Agence il y a vingt-quatre heures ! Et c’est quoi cette histoire d’infiltré ?
5 parut perturbé par la sincérité qu’il lut dans le visage de Gene. Ce-dernier le laisse se relever lentement.
- Attends, laisse moi t’expliquer.
- Reste-là où tu es.
- Bordel… laisse moi reprendre mes esprits…
- T’as tué 40 ??? fit Gene, se souvenant soudain de ce que 5 avait dis.
Ce fut à son tour de lui donner un coup avec la crosse.
- Fils de pute ! Ca avait l’air d’un mec bien. C’est quoi cette histoire comme quoi t’es un infiltré ?
- Eh ben… Tu ne sais pas ? On a fait parti de la même Organisation, tout les deux…
- La même organisation ? Qu’est-ce que tu racontes… l’Agence tu veux dire ?
- Non… la…
BLAM !
La tête de 5 explosa et se répandit sur le sol en un grand arc de cercle rouge. Le corps de 5 se modifia en une gelée noirâtre. Gene se retourna, une nouvelle fois. Et une nouvelle fois, il se retrouva en face de 5. Exactement le même.
- Putain… fit ce dernier. Je me suis tué moi-même… C’était quoi ce truc ?
Gene lui donna une tape à l’épaule.
- Tu m’as sauvé la vie, mon pote !
- J’te le fais pas dire… Ca doit être un espèce de morphi-copieur, mais c’est la première fois que je vois un truc comme ça.
5 rangea son flingue, en regardant la flaque noire remuer.
- Putain, je n’arrive pas à le croire. J’ai rencontré un autre moi, et il a fallut que ce soit un gros monstre… Oah, t’imagines toutes les aventures qu’on aurait pu vivre ensemble, toutes les belles blagues qu’on aurait pu s’envoyer…
Gene le regarda l’air de ne pas trop savoir quoi dire. Puis un détail lui revint.
- Hé, ton double, il a dit quelque chose à propos d’une organisation, comme quoi on en ferait parti tous les deux… Tu sais ce qu’il a voulu dire ?
L’agent 5 se figea, puis il attrapa son flingue à la vitesse de la lumière et le pointa sur Gene.
- Woh ! fit celui-ci en reculant.
- Derrière-toi ducon !
Gene se retourna et vit arriver toute une meute d’étranges formes humanoïdes. Grandes et effilées, elles avaient d’énormes griffes à la place des mains. Leurs têtes n’avaient pas d’yeux ni de nez, juste un large crâne écarlate fendu par une bouche garnie de dents. La meute se précipitait vers les agents. 5 fit feu. L’un d’eux tomba et se releva aussitôt en crissant.
- Bordel ! Des vampires de Taipan ! La pire espèce ! Déguerpissons d’ici !
Ils se ruèrent dans un autre couloir, les vampires à leurs trousses.
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De l’autre côté de New-York, Shoku et Gloria contemplait le bras du King Kong géant découpé. Il s’étalait sur le buste détruit du mécha. Son propriétaire hurlait de douleur en se tortillant quelques pâtés de maisons plus loin. Harambé regardait avec dégoût l’objet qui avait découpé le bras de son sbire.
Le colonel Jones le tenait à bout de bras : son épée magique. Elle brillait de milles feux. L’agent 12 se tenait à côté d’elle avec une énorme arme à feu et le fameux liquide – le condensé de nano-robots qui allait transformer tous ces King-Kong en Samsung brûlant.
- Jones ! s’écria Gloria.
Ils se réfugièrent derrière les agents. Harambé s’appuya sur ses deux bras et les fixa avec une haine féroce. Puis il se leva et tapa sur son torse tout en hurlant très fort. Il y eut un lourd silence ensuite, tandis qu’il leur jetait un regard rempli de mépris.
Ils entendirent des grondements partout autour d’eux. Un King Kong arriva depuis un immeuble et se rangea derrière Harambé. Puis un autre, et un autre. Au bout d’un moment, une centaine de King Kong se dressait derrière leurs chefs, certains accrochés aux immeubles, d’autres par terre en train de se taper le torse.
Jones fit tournoyer son épée.
- Les gars, si on doit mourir ici, autant mourir bravement…
Elle allait s’avancer vers les Kongs quand un mouvement attira son attention. Accrochés à des cordes, les survivants alliés à Gloria surgirent des immeubles abandonnés et se positionnèrent autour des agents. Une dizaine de mécha Kongs arrivèrent en volant et se placèrent du côté de Jones.
- Voilà toute l’armée des King Kongs, fit Gloria. Derrière nous se trouve le centre de New-York.
- Alors nous voilà à la dernière bataille, annonça Jones. La fin de la guerre. Il ne faut pas qu’il dépasse cet endroit.
- Ouaip ! Les gars ! dit-elle en se retournant vers les survivants. Voilà la dernière des batailles ! Cela fait vingt ans qu’on se bat contre les Kongs et on a la chance d’en finir ! A vos armes, guerriers !
Les survivants rugirent tous et se ruèrent vers l’armée des Kongs. Jones insuffla de l’énergie à son épée qui s’enflamma. Elle eut une pensée pour 5 et Gene.
- Vous avez intérêt à vous ramener ici fissa, bordel !
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Dans les locaux abandonnés de l’Agence, Gene et 5 s’étaient réfugiés dans une bibliothèque. Ils voyaient les vampires passer à travers la vitre.
- Putain, mais même les vampires existent ? demanda Gene.
- Et oui. Tu verras, ton cerveau acceptera tout ça plus vite que ce que tu crois… attends, pousses toi.
5 se pencha et tira un livre. Soudain, un pan entier de la bibliothèque s’ouvrit, dévoilant un passage secret.
- Ah ! C’était bien ce que je pensais, fit 5 avec une pointe de fierté. Viens, ce passage donne sur une armurerie !
Ils s’engouffrèrent dans le couloir obscur tandis que la porte-bibliothèque se refermait. Gene alluma sa lampe-torche et ils virent des tâches de sang.
- Merde, les créatures ont découvert le passage secret ?
- Il est plus secret alors…
- …
Ils avancèrent prudemment jusqu’à l’armurerie. Une lumière clignotait. Le sang couvrait toute la salle. L’agent 40, étalé par terre, était couvert de sang. De grandes griffures parcouraient tout son corps. 5 alla lui fermer les yeux.
- Tu étais un grand guerrier, 40… Que les portes du Valhalah s’ouvrent pour toi…
- Qu’est-ce que tu marmonnes ? demanda Gene.
- Je prie ! Laisse-moi tranquille.
- Mais t’es con ou quoi ?! Il n’est pas mort ! Regarde son buste !
Et effectivement, le buste de 40 se soulevait. Légèrement, mais il se soulevait. 5 eut une impression de grande joie.
- Yes ! fit-il en cherchant quelque chose dans sa combinaison.
Il en sortit une seringue qu’il planta dans le gros bras de 40.
- C’est quoi ? demanda Gene.
- Un sérum de guérison. Ca le maintiendra en vie pour quelques temps. Mais il faut le ramener dans notre réalité, ou il va y passer.
5 se releva et regarda autour de lui. Des armes en pagaille comblaient les murs. 5 et Gene se regardèrent avec un sourire. Ils se remplirent les poches de balles et de grenades. 5 prit un fusil d’assaut à décharges plasma et Gene opta pour deux mitraillettes longue portée à balles traceuses transcendantales.
Soudain, ils entendirent des crissements provenant de la galerie qu’ils venaient de prendre. Les vampires…
- Ca va chier, grogna Gene.
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De l’autre côté de la ville, la bataille entre les Kings Kongs et les humains faisaient rage. Les explosions pleuvaient, les corps tombaient, les têtes étaient arrachées… Gloria se battait avec férocité, elle grimpait en courant sur l’échine des grands singes et leurs collait des balles en plein dans le crâne… Shoku faisait bouger son mécha mal en point avec toute la force et la technique qu’il pouvait… L’agent 12 faisait parler ses flingues à la vitesse de la lumière, chaque balle crevant un œil ou touchant un point sensible… Le capitaine Jones se battait comme une amazone, bondissant et abattant sa terrible lame magique, créant un maelstrom de feu et de mort autour d’elle.
L’agent 12 tira une salve de balles en direction d’un Kong particulièrement tenace et courut se réfugier dans un bâtiment abandonné.
- Ces sales singes ne me laissent pas de répit pour activer les nano-robots ! grogna-t-il.
Il sortit la fiole avec le liquide violet. Il fallait qu’il soit à un niveau élevé pour l’envoyer sur l’armée des Kongs.
L’agent 12 se mit donc à gravir les escaliers pour atteindre le sommet. Une ombre parcourut la façade à grande vitesse sans qu’il ne s’en rende compte.
Au moment où il éclatait la porte qui menait au toit, Harambé surgit devant lui.
- Merde ! fit 12.
Il sortit un flingue et vida son chargeur sur Harambé. Celui-ci courut dans tous les sens pour éviter les balles mais certaines l’atteignirent. Il hurla de colère, agrippa la porte par laquelle était monté 12, l’arracha du sol et la lança sur l’agent. Celui-ci la reçut de plein fouet. Il eut l’impression de s’être fait percuté par un poids-lourd lancé à pleine vitesse. Il tomba par terre sous l’effet du coup, et regarda Harambé se jeter sur lui.
Il lui restait heureusement un pistolet dans son dos. Au moment où les poings du singe allaient le réduire en soupe pour vieux, 12 visa l’œil du singe et fit feu. Harambé fut stoppé net dans sa route, et il porta ses mains à son visage sanguinolent dans un hurlement de douleur.
L’agent 12 en profita pour se lever et lancer la fiole en l’air, au-dessus du champ de bataille. Juste à ce moment, Harambé vit l’agent lancer le liquide à travers ses mains ensanglantés, de son œil encore valide. Il ouvrit sa gueule terrible bordée de dents et hurla d’une voix venue du tréfonds des enfers :
« NON !!! »
Il se jeta vers l’agent 12. Ce-dernier leva son pistolet à la vitesse de la lumière et visa la fiole. Il tira et la balle traversa l’air. Elle perça la fiole et continua sa course folle. Le liquide violet se déversa alors sur le champ de bataille.
L’agent 12 eut le temps d’avoir un bref sourire avant qu’Harambé ne lui rentre dedans avec toute sa force de King Kong. L’agent fut éjecté en l’air et tomba de l’immeuble.
Jones, qui observait la scène, hurla son nom. 12 tomba de plus de dix mètres, et elle ne vit pas son corps s’écraser quand un Kong passa devant. Sa première intuition fut de se ruer devant elle pour voir si 12 était encore vivant, mais son professionnalisme prit le dessus. Elle avait une mission à finir. Le liquide violet – les nanos robots – était dans l’air. Il fallait qu’elle active le virus biotechnologique injecté dans le portable.
Le colonel Jones détourna la tête avec douleur et s’efforça de penser à la mission. Elle regarda en l’air. De légers scintillements violets voletaient dans l’air et se fondaient dans la fourrure des King Kongs. Dans quelques minutes, tous seraient infestés, et Jones pourrait alors mettre fin à la guerre des Kongs. Il était temps, car les humains étaient clairement en train de perdre cette bataille. Les Kongs étaient bien trop nombreux.
Elle chercha dans ses vêtements le portable. Autour d’elle, des explosions, des cris de guerre, des coups de feu, des hurlements de Kongs, du sang, de la fumée, des flammes. Mais le colonel restait concentrée. Elle regardait les nanos robots se mélanger aux singes géants. Plus que quelques secondes. Soudain, du coin de l’œil, elle vit un singe bizarrement immobile. Elle tourna la tête.
A une centaine de mètre, Harambé la fixait. Sa face de Kong déformée par une vilaine cicatrice semblait réfléchir. Son œil valide allait du portable au visage du colonel à toute vitesse.
- Bordel, se dit Jones, il comprend…
D’un geste brusque, Harambé se projeta en avant et se lança vers Jones.
- Merde, merde, plus que quelques secondes…
Elle tendit son épée légendaire vers le singe. De l’autre main, elle tenait le portable. Elle puisa dans son énergie la force nécessaire pour allumer Durandal. Celle-ci éclata de mille feux et s’entoura de flammes vertes et rouges. Jones sentait que c’était son dernier coup ; elle n’avait plus assez d’énergie.
Harambé était sur elle. Jones vit qu’il s’arquait sur ses jambes. Il allait sauter. Elle donna un coup en l’air, pensant qu’elle allait le trancher en deux, mais au dernier moment, Harambé glissa sur le côté. Sa feinte lui permit de passer sous l’épée et d’empoigner Jones de sa main immense.
Elle hurla de douleur quand elle sentit ses os serrés par plusieurs centaines de kilos. D’un geste étonnement délicat et précis, Harambé retira le portable des mains de Jones et l’écrasa en mille morceaux.
Jones regarda les miettes tomber par terre avec horreur. Il l’avait vaincue, ils allaient gagner la bataille, les humains allaient mourir… Elle allait mourir ici, dans un monde parallèle…
Harambé approcha son visage d’elle. Il puait la sueur, le sang et la violence. Son œil brillait d’intelligence et de haine. Ses dents, immenses, étaient jaunes et couvertes de baves. Il regardait Jones droit dans les yeux.
Le colonel était à sa merci. Elle ferma les yeux et laissa tomber Durandal. Elle sentit la grande gueule du Kong s’approcher de son visage.
Soudain, elle sentit une vague de chaleur et une explosion percuta ses tympans. Elle ouvrit les yeux. Des flammes léchaient le visage d’Harambé. Il hurla de douleur et lâcha Jones. Elle tomba par terre tandis qu’Harambé trébuchait, son visage ensanglanté et brûlé.
Jones avait du mal à se tenir debout, à cause de ses oreilles blessées, mais elle réussit à regarder autour d’elle. Elle vit l’agent 5 avec un fusil d’assaut fumant. Il lui fit un grand sourire. Derrière lui se tenait Gene tirant à tout va avec ses mitraillettes.
- On est de retour, fils de pute ! Hurlaient les deux gars.
5 faisait exploser tout autour de lui, motivant les derniers guerriers humains à se ramener derrière lui. Les Kongs qui osaient s'approcher finissaient déchiquetés en milles morceaux. Le corps de 5, tout couvert de sang, ressemblait à un petit feu follet aux yeux de Jones, qui le voyait s'éloigner.
Les Kongs se mettaient en branle et suivaient la bande de 5, ce qui laissait un temps de répits au colonel. Elle se tourna vers Gene. Ce-dernier la regarda droit dans les yeux. Autour d'eux, New-York semblait s'effondrer dans l'apocalypse. Les tours aux alentours étaient détruites, des feux naissaient un peu partout, de la fumée s'élevait partout et les débris avaient remplacés le sol. Gene et Jones se sentirent seuls au bout de l'Histoire. Enfin, c'est ce que ressentit Gene. Poussé par l'intuition masculine, il s'approcha du colonel et lui caressa la joue. Il crut voir un éclat de désir au fond des yeux du colonel avant de ne plus rien voir du tout quand celle-ci lui colla une baffe surpuissante !
- Arg ! Mais… colonel !
- Tu t'es cru dans une boite de nuit, Redford ?! On est en plein milieu d'un champ de bataille, rookie !
- Cookie ?
- Ah mais qu'il est con !
Elle lui colla un coup de pied dans le ventre et le força à se remettre debout.
- Où est-ce que vous étiez bordel de merde !!! On a failli tous y passer ! Putain, si vous étiez arrivé plus tôt, on aurait peut-être même pu utiliser le portable et niquer tout ces gorilles ! 12 serait peut-être vivant… et…
- Colonel, fit Gene en levant un doigt vers ce qu'il y avait derrière Jones.
Elle se retourna et vit une vingtaine de Kongs horriblement silencieux se dresser devant eux. Les flammes se reflétaient sur leurs pelages, sculptant leurs muscles et enrageant leurs regards. Harambé se situait au milieu. Il avait un rictus hideux sur le visage qui devait être un sourire. Jones vit avec terreur qu'il tenait dans sa main Durandal, son épée magique. Le singe géant leva l'épée et la fit passer entre ses dents, dans un geste éloquent.
- A l'attaque ! Hurla Harambé en levant l'épée.
- Cassons-nous ! Répondit le colonel en filant comme un coureur de fond.
Gene se mit à courir en vidant ses chargeurs sur les Kings-Kongs à leurs poursuites. Ils couraient vers la bande de résistants de 5 qui s'étaient réfugiés entre temps dans un stade de base-ball.
Les humains avaient bloqués les entrées et canardaient les singes, ceux-ci criblaient les barricades de pierres grosses comme ma t**b. D'autres avaient décidés de grimper le stade et de passer par les toits.
Gene et Jones se demandèrent par où passer pour se réfugier auprès de leurs alliés. Ils allaient se faire prendre en sandwich avec Harambé derrière et les Kings-Kongs devant.
- On va crever, Gene ! cria le colonel, qui courait aussi vite qu'elle pouvait. Mais avant, on va se battre pour donner du temps à 5 !
- Non ! On va pas mourir ! Hurla Gene Redford.
Il leva ses mitraillettes et bombarda les Kings-Kongs devant. Ceux-ci reçurent plusieurs balles dans leurs peaux dures comme du bœuf. Ils se retournèrent en se protégeant la tête de leurs bras. Ils virent alors Gene et Jones arriver à toutes vitesse. Derrière eux, la vingtaine de Kongs emmenés par Harambé.
Derrière les barricades, 5 vit ces co-équipiers arriver.
- Merde ! Ils vont crever si je ne les aide pas, dit-il.
Une expression constipée passa sur son visage, signe d'une extrême réflexion chez 5.
Le mécha de Shoku se hissa sur les toits du stade. Avec quelques tirs de bombes, il se débarrassa des quelques Kongs qui avaient essayés de grimper. A l'intérieur, Shoku exultait.
- Alors mon coco ! Tu vas marcher fils de pute !!!
Le mécha n'était pas en grande forme. Mais il pouvait aider Gene et Jones. Alors que les singes allaient tomber sur les co-équipiers de 5, le mécha transforma ses deux bras en deux énormes fusils et tira des balles gigantesques. La Terre sembla exploser autour de Gene et Jones, et soudain, ils virent une ouverture entre les Kings-Kongs. Ils s'y ruèrent et allaient atteindre les barricades quand Harambé tua tout espoir.
Il brandit l'épée et la lança sur le mécha. Celle-ci percuta le robot et rentra dans la tôle. L'épée toucha Shoku en plein coeur. Il cracha du sang et se sentit mourir.
- Connard de fils de pute, murmura-t-il avant de mourir.
Le mécha tomba en arrière lentement et s'écrasa au milieu du stade. Vu que les Kings-Kongs n'étaient plus sous le feu du robot, ils bondirent vers les barricades.
Gene et Redford se retournèrent pour voir les singes tomber sur eux. Ils n'allaient jamais arriver à se mettre en sécurité.
C'est alors que 5, accompagné de Gloria, firent exploser les barricades et tirèrent sur les singes. Cela n'allait pas les arrêter mais au moins les ralentir.
- Allez ! Ramenez vos fesses ici !!! hurla 5.
Gene et Redford coururent vite jusqu'aux entrées du stade. Ils passèrent derrière 5 et Gloria mais les singes étaient sur eux. Ils s'enfournèrent tous dans les tunnels, et tombèrent les uns sur les autres. Plusieurs bombes explosèrent, ce qui eut pour effet de faire s'effondrer une partie du stade sur les Kings Kongs dans un grand brouhaha.
Le calme se fit. On aurait cru que New-York était devenu véritablement vide. Mais soudain, une main -poilue- surgit des débris. Harambé sortit de sous les énormes décombres. Il se retrouvait seul au milieu du stade. Il se tournait et retournait. Il avait l'impression d'avoir gagner la guerre. Il hurla de bonheur et se rua sur le mécha, allongé sur le terrain. Il explosa son crâne et le lança comme une balle de base-ball. Soudain, le sol vibra et plusieurs autres King Kong sortirent de terre. Harassés, fatigués, le sol couvert de sang, ils se rassemblèrent autour de Harambé.
- ON A GAGNE !!! hurla Harambé.
Les King Kongs sautèrent un peu partout en se tapant le buste, persuadés d’avoir vaincu les humains.
Dans un coin, des cailloux se mirent à rouler. Une main humaine sortit d’entre les débris. C’était Gene, qui se mit tant bien que mal debout. Il observa le stade à moitié détruit, les cadavres humains éparpillés un peu partout, et les Kings-Kongs dansant au milieu, faisant trembler le sol. Il tomba à genoux, regrettant comme jamais d’avoir pris ce job. Hier encore, il menait une vie à peu près normale, entre hamburger et baise. Aujourd’hui, il assistait à la fin d’un monde, à la fin de l’humanité d’un autre univers. Il avait participait à la bataille finale entre les singes géants et les humains, et il avait perdu. Un lourd sentiment d’abandon s’abattit sur lui, il souhaitait mourir maintenant.
Un éclat au milieu des débris retint son attention. Il leva la tête. L’épée magique du colonel Jones gisait entre deux morceaux de bétons. Gene se demanda s’il pouvait s’en servir, si elle éclaterait de milles feux entre ses mains. Son esprit délirait un peu, il s’imaginait en guerrier invincible. Soudain, quelque chose le ramena avec force à la réalité. Le sol ne tremblait plus.
Il tourna la tête. Les Kings-Kongs le regardaient tous avec haine. Harambé hurla vers lui en montrant ses dents. Il se mit à courir vers Gene.
Ce dernier se mit debout, mais au lieu de s’enfuir dans la direction opposée aux singes, il se mit à courir droit vers eux. L’épée se trouvait entre eux.
Gene s’approchait de l’épée quand il remarqua du coin de l’œil que tous les singes accouraient vers lui. Il allait mourir ici. Son idée de se battre avec l’épée magique était complètement débile. Il allait mourir.
Il plongea en avant comme un joueur de rugby et agrippa l’épée. Il eut le temps de se retourner et de voir l’ombre d’Harambé tomber sur lui. Avant qu’une tonne de muscle ne l’écrase, il eut le temps de remarquer qu’aucune flamme n’avait allumé l’épée.
Harambé vint l’écraser de tout son poids. D’autres Kings-Kongs vinrent tomber sur le pauvre Gene. Une masse de Kings-Kongs le bloquait de leurs poids.
Au milieu de toute cette masse de King-Kong enchevêtrés, Harambé regardait Gene droit dans les yeux. Il ouvrait lentement les dents, prêt à lui arracher la tête. Gene voyait très bien les dents du singe malgré l’obscurité qui l’entourait.
Soudain, face au monstre, face à la mort certaine, face à la fin du monde, une puissance incroyable l’envahit et le submergea. Il se releva, soulevant plusieurs tonnes de Kings-Kongs, et l’épée s’illumina de toutes les couleurs. Une lumière arc-en-ciel s’échappa d’entre les corps des singes. La lumière s’intensifia et gomma les ombres des Kings-Kongs. Puis elle disparut soudainement et une onde de choc souleva les singes géants. Ils tombèrent tous. Gene était debout au milieu d’eux. Celui-ci tenait Durendal l’épée magique dans sa main. L’épée brillait de milles feux. Elle semblait brûlait d’énergies pures.
Les singes se relevèrent tant bien que mal. Harambé fut le plus rapide. Il poussa un rugissement de frustration et sauta sur Gene, le visage déformé par la haine.
Un coup d’épée désintégra Harambé jusqu’à l’ADN, englouti dans un jet de puissance pure.
Les autres Kings-Kongs se ruèrent sur Gene qui poussa toute son énergie dans l’épée. Elle s’illumina de toutes les couleurs et explosa au milieu des singes géants. L’énergie déployée tua tous les Kings-Kongs sur le moment. Ils s’évaporèrent tous en cendres.
L’onde de choc souleva les morceaux de bétons sous lesquels étaient bloqués les derniers humains. Parmi les survivants se trouvait le colonel Jones. Elle observa Gene tenir l’épée. La lumière baissait petit à petit, jusqu’à qu’elle disparaisse.
Lorsque l’épée redevint normale, Gene s’effondra par terre, épuisé. Le colonel Jones le rejoint et le tapota de son pied.
- Surprenant, ce fils de pute, dit-elle.