L’AGENCE
Le temple maudit
Prologue
Népal, dans l’Himalaya.
Il hurla de peur.
Le petit N’guyen faillit tomber dans le ravin. Loin en bas, le fleuve glaçé rugit, déçu de ne pas avoir englouti le jeune apprenti moine.
Il s’assit sur la petite route taillée à flanc de montagne, le temps de calmer les battements de cœur. Il se calma en regardant les montagnes de l’Himalaya et leur tranquillité trompeuse. Il fouilla ensuite son cartable pour vérifier qu’il n’avait rien fait tomber.
Cela lui arrivait tout le temps quand il revenait de son séjour annuel chez ses parents, il glissait et manquait de tomber. Son esprit se distrayait pendant quelques semaines, entre jeux vidéo, Internet et télévision, et il faisait donc moins attention. C’était peut-être aussi parce que ses parents lui manquaient…
N’guyen se ressaisit, se leva et se concentra sur le chemin pour éviter de glisser à nouveau. Pour se donner du courage il fixait ses pensées sur les amis qu’il allait retrouver au temple ainsi que les maîtres qu’il aimait. Il pensait aussi à ceux qu’il aimait moins, ceux qui se prenaient trop au sérieux et qui devenaient vraiment très marrant quand ils s’énervaient à cause des farces de N’guyen et de ses amis.
Lorsqu’il tourna au dernier embranchement avant le temple, il sut que quelque chose n’allait pas. Il n’y avait pas le brouhaha habituel du temple, entre les ânes, les poules ou les enfants. Il n’y avait que le silence, lugubrement comblé par le souffle du vent froid de l’Himalaya.
N’guyen s’avança prudemment le long du chemin et tomba sur le temple. Il était vide. Les petites cases en chaux qui servaient d’habitude d’abri pour les moines et les apprentis ne fumaient plus et personne n’y rentrait ni n’en sortait. Les cages où étaient enfermés les poules et les enclos pour les ânes et les chèvres étaient également vides.
N’guyen voulut appeler pour voir si quelqu’un lui répondrait, mais quelque chose l’en empêcha. Il préféra garder le silence et se faufiler à travers les cases, vers l’entrée du temple proprement dit. Soigneusement sculpté dans le flanc de la montagne, une magnifique entrée ressemblant à celle des monuments antiques de Petra surplombait les cases en chaux. Deux bouddhas encadraient la sculpture et semblaient regarder N’guyen droit dans les yeux, lui conseillant de se calmer et de prendre la bonne décision. Sur les escaliers finement décorés, il y avait une traînée de sang. N’guyen sentit sa gorge se sécher.
D’habitude, l’entrée qui s’enfonce dans le cœur de la montagne était éclairée par des bougies installées le long du mur. Mais là, il n’y avait plus aucune lumière. L’entrée s’enfonçait dans l’obscurité la plus pure.
N’guyen effectua une prière pour se donner du courage. Même si c’était formellement interdit par le règlement du temple, il alluma son portable. Pendant qu’il s’allumait, le jeune garçon regardait autour de lui, aux aguets. Il mit le portable en mode lampe et un jet de lumière éclaira le temple. A ce niveau, l’entrée correspondait à un tunnel. N’guyen balaya l’intérieur de son portable mais ne vit personne. Par contre, il remarqua que les traces de sang continuaient droit devant lui.
Il avança prudemment jusqu’à que l’obscurité l’engloutisse complètement.
Peu de temps après qu’il se soit enfoncé dans le temple, un hurlement de jeune garçon retentit, porté par l’écho des montagnes millénaires.