— Exfiltration —

Par Flo_M

Non loin du niveau qu’ils venaient de quitter, les fuyards trouvèrent ce qu’ils étaient venus chercher.

— Le hangar n°1, les informa Alicia.

— Et il est censé renfermer quoi ? demanda Claire qui ne s’en trouvait pas plus avancée.

— Notre issue de secours. Un prototype de transporteur de troupes avancé à décollage vertical. Le T.T.A.D.V.

Devant la tête de son amie, elle ne put s’empêcher de rajouter :

— Euh, ouais, l’acronyme n’est pas génial, mais c’est un prototype.

— Et tu es sûre qu’il vole au moins ? demanda Claire, de plus en plus sceptique.

— Affirmatif. Il a eu quelques petits problèmes de propulsion, mais c’est réglé. Enfin d’après ce qu’on m’a dit.

Elle adressa alors un sourire qui se voulait rassurant à Claire, mais que son amie perçut comme tout son contraire.

— De toute façon, a-t-on vraiment le choix ? demanda-t-elle d’un air désabusé.

— Reste plus qu’à savoir s’il est toujours gardé par des hommes de confiance, ajouta Alicia en entrouvrant la porte de service.

Elle se faufila dans le hangar, avec Jeunot sur les talons, suivi de Claire, Fifou et Aya qui fermait la marche.

Dans un premier temps, le champ leur sembla libre, mais Alicia repéra bien vite deux gardes à la carrure impressionnante. Elle fit signe à ses amis de se cacher et s’approcha seule des deux hommes, avec une démarche nonchalante. Claire la vit échanger deux mots avec les agents, puis elle se tourna dans leur direction et leur fit signe de la rejoindre.

— Claire, je te présente Grayson et Todd. Deux des gars les plus intègres de l’Agence.

Les deux hommes saluèrent Claire d’un signe de tête. Ils étaient grands et bien bâtis. Des agents de terrain manifestement. Grayson était le plus âgé des deux, et ses grands yeux noirs, assortis à sa peau brune, brillaient d’intelligence. Todd quant à lui, faisait une tête de moins que son camarade, mais ne semblait pas moins dangereux. Il arborait une belle moustache noire dont il semblait aussi fier que du fusil à pompe qu’il tenait en main.

— Et par-dessus tout, ajouta Alicia, ce sont de sacrés pilotes.

 

Les deux pilotes, possédant les codes d’accès pour l’ouverture du toit du hangar, n’eurent aucun mal à faire décoller l’engin. Le Contrôle ne tarda toutefois pas à se faire entendre entre deux grésillements. Apparemment, le colonel Dirk craignait – à juste titre – que les fuyards ne s’échappent par la voie des airs et il le fit savoir avec de nombreux cris rageurs. Alicia demanda à ses deux collègues si ça ne les gênait pas de trahir pour la bonne cause, ce à quoi ils répondirent que ce n’était pas eux les traitres dans cette histoire. Heureuse qu’ils pensent exactement la même chose qu’elle, Alicia sourit en tapant amicalement sur leurs épaules massives.

Claire n’avait jamais vu un engin de cette stature. D’une taille plutôt raisonnable, l’appareil avait un profil effilé qui le faisait ressembler à un rapace. D’ailleurs, c’était le surnom qu'utilisaient les deux pilotes d’essai, au grand désarroi d’Alicia qui semblait tenir – pour une raison obscure – au nom de T.T.A.D.V. Contrairement aux autres appareils à décollage vertical, il n’était pas muni d’hélices à la manière d’un hélicoptère, mais de deux réacteurs amovibles issus d’une technologie avancée – et sûrement récupérée auprès de quelques savants plus ou moins fous, se dit Claire, ne sachant manifestement pas quoi en penser. Sa soute arrière donnait directement sur deux rangées de sièges situées de chaque côté de la carlingue.  Il était, en outre, doté de galeries d’armes à feu et d’équipements divers, et juste avant la cabine, un ensemble d’écrans et de cadrans semblaient appartenir à la console d’un Q.G. mobile. L’appareil avait l’air fonctionnel et paré à toutes les situations. Sur la recommandation des pilotes, Claire s’attacha et harnacha ses deux compagnons à quatre pattes dans des compartiments prévus à cet effet. Le décollage qui se fit tout en douceur, et le Rapace fila vers les cieux.

 

Claire n’en revenait pas. Elle s’était approchée du cockpit avec la bénédiction des deux pilotes et de son amie, afin d’avoir une meilleure vue de l’extérieur. Ce qu’elle avait sous les yeux était absolument extraordinaire. C’était la première fois qu’elle prenait l’avion et elle n’aurait jamais cru que son baptême de l’air se serait fait dans un appareil aussi sophistiqué. La vitesse avec laquelle il fendait les cieux était proprement stupéfiante. Ses seuls repères étaient les nuages qui filaient à toute allure, mais c’était suffisant pour qu’elle comprenne que la vitesse atteinte par l’appareil était prodigieuse.

Elle resta quelques minutes à contempler les cieux, puis elle rejoignit Alicia qui était installée à la console de commandement.

— Nous ne risquons pas d’être repérés par ceux qui nous traquent ? lui demanda-t-elle, quelque peu inquiète malgré elle.

— Le Rapace est conçu pour être indétectable, nous ne devrions pas avoir de problèmes à ce niveau-là.

— Et où nous emmène-t-il ? Dans un endroit que tu estimes assez sécurisé pour moi ?

— Je ne sais pas s’il existe encore des endroits de ce type, je suis désolée.

— Mais, mes parents… commença Claire, avant de s’arrêter brusquement.

— Je sais, répondit Alicia. Et j’y pense constamment, mais nous sommes traqués et tant que nous n’aurons pas réglé cette histoire, il serait dangereux d’essayer de les rejoindre. Je ne pense pas que l’Agence, ou plutôt les traitres qui y sont infiltrés s’intéressent à eux…

Elle s’interrompit en voyant l’angoisse qui se dessinait sur le visage de Claire. Il s’agissait de son amie d’enfance, pas d’une civile qu’il fallait rassurer avec des formules toutes faites. Elle soupira et se tourna vers Jeunot qui était resté à l’arrière avec Aya. C’était lui le spécialiste des communications après tout.

— Adam, il y aurait possibilité de nous connecter aux serveurs de Talos Island sans nous faire repérer ?

— Notre fenêtre d’action risque d’être très serrée. Vous recherchez quelque chose en particulier ? demanda-t-il en s’approchant de la console.

— Quelqu’un, répondit Alicia.

 

 

La vision de ses parents au bord d’une piscine, et inconscients du danger qui planait au-dessus de leur tête, rassura quelque peu Claire – pas tant pour ce qui était du danger, mais surtout pour le fait qu’ils semblaient sains et saufs et à l’abri. Elle aurait aimé pouvoir être à leurs côtés, à profiter d’une semaine de farniente au soleil – surtout qu’elle avait vu sur les moniteurs que l’île possédait son propre parc aquatique. Elle avait toujours adoré les parcs aquatiques… –, mais il fallait qu’elle soit aux côtés d’Alicia pour découvrir où ce sombre héritage allait les mener.

— Ce qu’ils veulent c’est ce carnet, déclara Alicia en brandissant le petit cahier.

Les deux jeunes femmes étaient à présent attablées à proximité de la console, un calepin à portée de main pour noter leurs découvertes, et deux tasses de café chaud pour garder l’esprit alerte. Claire s’étonnait encore de tout ce qu’on pouvait trouver à bord de l’appareil. Il y avait même des cages et des équipements pour les animaux. Derrière elles, elle entendit un jappement de Fifou. Elle jeta un œil à Aya et Adam qui essayaient de divertir les animaux qui ne semblaient pas rassurés par les bruits de l’appareil.

— Et ils savent que nous l’avons, continua Alicia. Maintenant, à nous de découvrir ce qu’il a de si important.

Claire acquiesça, il était temps de se mettre au travail.

 

Il ne leur fallut pas longtemps pour découvrir sur une série de chiffres qui intrigua Alicia.

— Il y en a plusieurs comme ça, à différentes pages, l’informa Claire. Sur le coup, je n’ai eu aucune idée de ce que ça pouvait bien être. Mais maintenant… Regarde, si on associe les chiffres qui apparaissent sur les premières pages, on a…

— Des coordonnées géographiques, lâcha Alicia dans un souffle.

Elle se hâta d’entrer les coordonnées dans la console et les deux jeunes femmes regardèrent le résultat s’afficher sur une carte du monde stylisée : « Erreur, veuillez réessayer ».

— Mais ça n’a aucun sens ! s’agaça Claire.

— J’étais pourtant persuadée que nous allions trouver la réponse à toutes nos questions. Ces coordonnées me semblent pourtant correctes.

— Sauf si…

— Tu as trouvé quelque chose ?

— Oui, je pense qu’il faut prendre en compte les lettres qui sont annotées à côté. Ma grand-mère utilisait souvent un genre de code quand j’étais petite. Elle disait que ça formait l’esprit d’essayer de les déchiffrer. J’ai toujours cru qu’elle tenait ça de son père, mais elle n’a jamais voulu m’en parler. Si j’inverse les chiffres et que je considère que l’alphabet ne commence qu’à la douzième lettre, j’obtiens… Oui, c’est le même code ! Entre ces chiffres dans la machine !

Et cette fois, l’écran afficha un résultat que les deux jeunes femmes – et leur public venu observer la scène – découvrirent avec soulagement.

— Les Alpes, lancèrent Claire et Alicia en cœur.

— Attends, se reprit Claire. Où exactement ? On dirait la Suisse, non ?

— Toujours aussi mauvaise en géographie ? lui lança Alicia, malicieusement. De plus, la Suisse était neutre pendant la Guerre et elle n’a jamais été sous occupation allemande.

Elle pointa son index sur l’écran, avant de poursuivre :

— Là, c’est la Suisse, et là, l’Italie. Notre objectif se trouve ici, dans les Alpes autrichiennes.

— Ce qui est déjà plus logique pour des nazis, lui concéda son amie.


— Je crois qu’on a trouvé notre prochaine destination.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Vous lisez