Exorcisme neuf : « Arts de la scène »

Par Ascal

Le lundi était en effervescence. Tous les élèves de la 2de 8 se retrouvaient avec plaisir après le week-end et échangeaient sur le programme de leurs deux jours de repos. Beaucoup, aussi, parlaient du secteur qu’ils allaient visiter dans l’après-midi. Azaël laissait traîner ses oreilles de gauche à droite. Étant donné que la séance de sport d’hier avait été plutôt intense pour un débutant comme Haniel, il était dispensé d’entraînement aujourd’hui, afin que ses muscles se reposent. Alors, c’était l’occasion pour lui de visiter d’autres étages dans le bâtiment des premières.

  • Camarade Walker !

Édith s’assit brusquement à ses côtés. Aujourd’hui, elle avait rassemblé ses longs cheveux noirs en deux énormes chignons dans lesquels elle avait coincé des maillets de xylophone. Encore une coiffure aussi extravagante qu’audacieuse. Elle portait sous sa veste d’uniforme un tee-shirt dont l’imprimé lui était familier… Puis il se souvint où avait vu ce pistolet maintenu dans les airs par trois cordes : sur le poster qui trônait au-dessus du bureau de Haniel !

  • Oh, tu aimes mon tee-shirt, camarade Walker ? Il s’agit du groupe Mother Mother ! Tu connais, dis, tu connais ?
  • Heu, non, balbutia Azaël. Mon colocataire a… un poster… comme ça.

Une flamme s’alluma dans le regard de la jeune fille alors que sa bouche formait un rond surpris. Elle voulut poursuivre son interrogatoire, mais l’exorciste lui fit signe de se taire. Leur professeur venait de rentrer en classe. Il sortit son cahier afin de consigner religieusement le cours à venir. Édith tenta bien de le distraire, mais il l’ignora royalement. Sa voisine de table finit par abandonner la lutte et se contenta de griffonner des partitions sur des séries de feuilles volantes pendant le reste de la matinée.

À la pause déjeuner, ce fut une autre personne qui vint solliciter l’attention de l’exorciste : Richard Bernhart. Depuis qu’il l’avait exorcisé, le timide jeune homme semblait le considérer comme un ami. Il l’invita à manger avec lui et tous deux se retrouvèrent à une table isolée. Ils avalèrent leur repas sans échanger un mot. Si le silence ne dérangeait pas le moins du monde Azaël, ce n’était pas le cas de son camarade qui ne cessait de gigoter sur sa chaise, mal à l’aise. D’ailleurs, il finit par violemment poser ses couverts et prendre une grande inspiration :

  • Azaël !
  • Oui ?
  • J… Je… Est-ce que… Est-ce que tu accepterais de venir avec moi à l’étage « Arts de la scène », cet après-midi ?

L’intéressé cligna des yeux, surpris par son ton. Pourquoi Richard était-il aussi anxieux… ? Il accepta d’un hochement de tête. Après tout, pourquoi pas, cela pourrait se révéler une riche expérience. Un profond soulagement passa sur le visage de son vis-à-vis. La glace brisée, la parole de Richard se libéra. Il se mit à parler des cours qu’ils avaient eu dans la matinée. Apparemment, le fait que leur professeur de mathématiques sue abondamment semblait le préoccuper. L’exorciste l’écoutait attentivement, ponctuant son discours de quelques « Hum » polis.

Richard poussa soudain un profond soupir et prit un air rêveur.

  • Tu sais, Aza’ – l’intéressé haussa un sourcil, pas du tout habitué à entendre son prénom raccourci de la sorte, je suis content que tu viennes avec moi tout à l’heure. Je n’ai jamais osé… aller dans le secteur « Arts de la scène »…
  • Pourquoi ? s’étonna l’exorciste.
  • Pourquoi…

Richard passa une main gênée dans ses cheveux blonds courts puis remit maladroitement en place ses lunettes rondes.

  • C’est une histoire un peu longue, avoua-t-il. En fait, j’ai perdu mes parents assez jeune. Et c’est ma grand-mère qui m’a élevée.

Une grand-mère adorable, qu’il précisa. Mais extrêmement inquiète quant à son avenir. Elle répétait toujours qu’elle ne pourrait pas toujours être là pour l’épauler en cas de coup dur de la vie. Alors, il fallait qu’il trouve un métier sûr, stable et, surtout, qui lui rapporte suffisamment d’argent pour être tranquille. Seulement, lui, tout ce qu’il voulait, c’était fouler les planches. Apprendre des textes de grands auteurs, échanger des répliques avec les meilleurs comédiens et déclamer des tirades enflammées dans de merveilleux théâtres. De peur de décevoir sa grand-mère, il avait tout enfoui au fond de lui.

Azaël devinait derrière ses mots une montagne de frustration. C’était sûrement pour ça que le whisperer l’avait pris pour cible… Les émotions négatives attiraient les fantômes qui s’en nourrissaient afin de renforcer leur emprise sur leurs cibles.

  • Mais… Depuis que tu m’as sauvé de ce bizutage, j’ai envie… de plus m’écouter, tu vois ? poursuivit Richard. Et j’ai envie, au moins le temps d’un après-midi, d’essayer de monter sur scène.

Il sourit timidement, comme s’il venait de dire une bêtise. L’exorciste, lui, était admiratif. Il comprenait mieux la nervosité de son vis-à-vis et pourquoi il tenait à ce qu’il l’accompagne. On était toujours plus courageux lorsque quelqu’un se tenait à nos côtés, après tout.

  • J’ai hâte de te voir sur scène, Richard.

Il était sincère. L’expression de son interlocuteur s’épanouit. Et Azaël comprit alors qu’il avait choisi les mots justes.

--

Haniel s’était installé dans un coin d’une des nombreuses salles de répétition qui jalonnaient l’étage « Musique » de la tour des premières. Assis à même le sol, son carnet sur les genoux, il observait autour de lui avec intérêt. Il adorait ce secteur car, généralement, les musiciens étaient tellement absorbés par leur pratique qu’ils ne faisaient même pas attention à lui. Il pouvait demeurer ici des heures et des heures sans qu’on ne le remarque.

Cependant, depuis hier, il semblerait qu’il ne pouvait plus passer inaperçu. Il fallait dire que, déjà, la matinée avait été étrange. Avec le temps, ses camarades de classe avaient appris à l’ignorer. Mais, aujourd’hui, il avait senti peser sur lui des regards interrogateurs à de nombreuses reprises.

Lui qui s’était bâti une tour d’ivoire veiné de lave colérique sentait sa précieuse structure s’effriter. Depuis qu’il portait constamment sur lui ce précieux fragment de couteau, il essayait de se reprendre peu à peu la main sur le cours de sa vie. Il savait qu’il était trop tard pour choisir un secteur. Mais il avait tenté de, au moins, adresser la parole à ses voisins de pupitre en classe. Il s’était heurté à une muraille d’hostilité qui l’avait dissuadé de recommencer.

Alors, pourquoi, oui, pourquoi, ces mêmes camarades de classe s’intéressaient soudainement à lui ? Ce ne serait quand même pas à cause de la séance de sport d’hier… si ?

  • Camarade Amorth !

Il sursauta et fit glisser son casque rouge en arrière. Devant lui s’était plantée une jeune fille aux longs cheveux noirs rassemblés en deux chignons, ce qui lui donnait un air de souris mutine. Un sourire solaire était étalé sur les lèvres, comme si elle semblait ravie de le voir. Elle avait en main un archet et une scie musicale. Le col de sa veste était orné d’un seul badge. Une élève de seconde ?

L’inconnue se laissa tomber à ses côtés, à sa grande surprise.

  • Qu’est-ce que tu écoutes ? le questionna-t-elle vivement.

Sans plus de cérémonie, elle lui piqua son ipod. Elle poussa un léger sifflement qui se transforma en trille mélodieuse. Son sourire s’élargit.

  • Neon Trees, ils ont de bons titres, approuva-t-elle.

Sans lui laisser le temps de se remettre de sa stupéfaction, elle se leva d’un bond et sauta sur le tabouret le plus proche. Elle coinça sa scie entre ses jambes menues et fit courir son archet sur son tranchant, arrachant ainsi une plainte fantomatique à l’instrument.

  • Mais t’es qui ? murmura Haniel.
  • Moi, hum…

La jeune fille tapota pensivement son menton, comme si elle réfléchissait sérieusement à la question. Puis la réponse lui apparut soudainement. Elle pointa alors son archet sur lui, comme un autre brandirait une arme.

  • Je suis ta nouvelle amie, décréta-t-elle.
  • Hein… ?
  • Je m’appelle Édith. Édith Okuni. Devenons de bons amis, camarade Amorth ! Et écoutons plein de musique ensemble !

Haniel s’apprêtait à l’envoyer paître, mais il y renonça. Une pensée venait de le traverser. Après tout… pourquoi ne pas accepter ? Ce n’était pas comme s’il avait des amis, de toute manière. Certes, cette fille semblait un peu, hé bien, perchée, mais si elle aimait les mêmes groupes que lui, ça leur ferait au moins un sujet de conversation. Il était quasiment certain qu’Azaël, lui, n’écoutait jamais de musique…

Édith prit une lente inspiration et ferma les yeux. Puis son archet se mit à caresser doucement la lame de son instrument. Des notes s’envolèrent à travers la salle de répétition, comme autant d’étoiles dans un ciel d’été. Un frisson dévala la colonne vertébrale de Haniel. Bon sang, la scie musicale avait un son si particulier, comme s’il appartenait à un autre monde. Édith était complètement absorbée par la musique. Ses mouvements étaient lents, calmes, ce qui contrastait étrangement avec son arrivée en fanfare. Le possédé l’observait, soufflé par la prestance qu’elle dégageait. Sans même en prendre conscience, il se mit à croquer son portrait abandonné sur une page de son carnet déjà couverte de notes et de paroles.

Pour la première fois depuis ce qui lui semblait être une éternité, une étrange sérénité vint prendre possession du jeune homme. Avant, il avait peur. Il était noyé dans les chuchotements. Puis le silence l’avait envahi, le laissant seul dans le vide de sa tête et de sa vie qu’il découvrait dépourvue de sens. Et pourtant, à cet instant… Il avait l’impression que ce n’était pas important.

Les paroles de « It’s alright » de Mother Mother, une de ses chansons préférées, résonnaient dans sa poitrine, au même rythme que les battements lents de son cœur.

It's alright, it's okay, it's alright, it's okay

You're not a monster, just a human

And you made a few mistakes

  • Hé, le sans-secteur !

L’intéressé poussa un soupir. Il fallait évidemment que cet instant suspendu de paix soit gâché. Deux jeunes filles marchaient vers lui d’un pas vif. Il avisa leurs chemises noires. Super, des représentantes du conseil des élèves. Parce que ces étudiants étaient dotés d’un minimum d’autorité, ils prenaient beaucoup de liberté au sein de Sisoa. En début d’année, alors qu’il s’emmurait de plus en plus dans le silence et la colère, plusieurs lycéens en chemise noire l’avaient harcelé en lui présentant deux choix : choisir une option ou dégager de leur terrain de jeu. Tout ce qu’il avait fait, c’était alors augmenter le son de la musique qui ne cessait de se déverser alors dans ses oreilles.

Mais aujourd’hui, les chuchotements s’étaient tus et il n’avait plus de notes enragées derrière lesquelles se réfugier. Il était seul, sans sa haine.

Les deux nouvelles arrivées se plantèrent devant lui, poings sur les hanches.

  • Tu connais le règlement. À moins d’y être autorisé, tu n’as pas à être ici.

Évidemment, Haniel connaissait les règles. Mais il continuait à penser qu’elles n’avaient pas de sens dans sa situation actuelle.

  • Je n’appartiens à aucun secteur, répliqua-t-il froidement. Même si je n’ai pas pris l’option musique, je ne gêne personne.
  • Ça ne change rien au fait que tu n’es pas le bienvenu ici, le rabroua l’une de ses interlocutrices. Retourne copiner avec le secteur « Sport » si ça t’amuse tant que ça, mais ne nous dérange pas dans notre pratique ! Ici tout le monde donne le meilleur de soi pour son avenir…

Haniel sentait l’agacement l’envahir. Il s’apprêtait à répliquer de nouveau, mais un trille suraigu lui coupa la parole. Édith venait de faire glisser son archet sur sa scie, attirant l’attention des querelleurs sur elle. Une fois qu’elle fut certaine d’avoir leur attention, elle se leva calmement puis plaqua l’instrument contre la poitrine d’une des chemises noires qui l’attrapa par réflexe.

  • C’est bon, je le maîtrise, celui-ci. Je vais commencer à en apprendre un nouveau. Haniel, viens m’aider à choisir mon prochain instrument.

Elle l’attrapa sans plus de cérémonie par la manche de son sweat-shirt et le tira à sa suite, loin des deux harpies. Haniel, d’abord sonné, se laissa faire. Mais il se reprit très vite et se dégagea de l’emprise de la jeune fille.

  • Qu’est-ce qui t’as pris ? grommela-t-il. Je n’ai pas besoin de toi pour me tirer d’un mauvais pas.

Contre toute attente, Édith éclata de rire. Elle lui jeta un regard chaleureux avant de disparaître, comme une illusion de fumée qui, soudain, s’évanouirait dans les airs. Haniel resta quelques secondes immobile, interdit par cette étrange rencontre. Édith Okuni… Il n’était pas sûr d’avoir envie de recroiser sa route. Il n’avait pas besoin de la pitié de cette fille pour exister. Dès qu’il se serait débarrassé de son fantôme, il pourrait reprendre une existence normale.

--

L’étage « Arts de la scène » était d’une splendeur à couper le souffle. Lorsqu’on en passait le seuil, on était cueillis par l’atmosphère grave et solennel qui s’en dégageait. Le hall de ce niveau était une salle toute en longueur et en colonnades. Des tentures bordeaux dissimulaient les nombreux couloirs qui s’étendaient de part et autres. Au centre de cette pièce démesurée se dressait un piédestal en marbre où était gravé le plan du secteur.

Richard et Azaël se tenait devant cette carte, à la recherche du meilleur itinéraire pour rejoindre l’option théâtre. L’intitulé « Arts de la scène » regroupait en réalité de nombreuses disciplines, toutes plus fascinantes les unes que les autres. Danse, magie, cirque… L’exorciste était fasciné par ces mots colorés. Ils avaient une saveur acidulée et semblaient dissimuler en leur sein un monde aussi bien inédit que grisant.

  • Aza’, par là, l’appela Richard, qui l’attendait avec impatience devant l’un des rideaux.

L’exorciste le rejoignit et ils repoussèrent les lourdes draperies. Un corridor plongé dans le noir s’étendait devant eux. Seule une faible flamme dansait dans le lointain, suspendue dans une lampe à pétrole. Les pas des deux élèves résonnaient sous la voûte du plafond. À mesure de leur avancée, des bruits leur parvenaient. D’abord des chuchotis fiévreux, puis des notes de musiques enflammées. Soudain, ils débouchèrent sur un majestueux amphithéâtre. Les bancs en pierre semblaient pouvoir accueillir l’école toute entière. Et au centre de ces gradins se dressait une scène ronde dépouillée. Perchée dessus, des élèves enchaînaient des répliques à un rythme endiablé. Ils se déplaçaient ensemble, ponctuaient leurs tirades de gestes saccadés, habités. Autour d’eux, d’autres élèves les observaient avec attention. Certains étaient vêtus de bleus de travail et s’étaient rassemblés devant une large console. En actionnant quelques leviers, ils augmentaient ou diminuaient les éclairages, tels des magiciens. D’autres croquaient dans de larges carnets et discutaient à voix basse autour de rouleaux de soie.

Richard ne put retenir un couinement d’excitation. Il jeta un regard nerveux à son ami, comme s’il ne parvenait pas encore à croire qu’il se trouve ici. Azaël l’encouragea d’un signe de tête et un large sourire s’épanouit sur le visage de son camarade de classe. En une fraction de seconde, il dévala les marches et s’approcha de la scène. Il fut salué par de grandes exclamations, les premières étant visiblement ravis de leur nouveau visiteur. Cet accueil chaleureux rassura l’exorciste. Visiblement il n’avait plus de souci à se faire pour Richard. Il était fier, d’une certaine manière, d’avoir pu accompagner l’adolescent dans cette métamorphose. Puis tout à coup, une pensée le traversa.

Qu’était-il advenu des autres personnes qu’il avait sauvées ?

Au sein du Clan, il n’y avait aucun suivi des victimes. Après avoir accompli leur travail, les exorcistes retournaient chez eux et laissaient les autorités compétentes prendre le relai. Mais qu’advenait-il des personnes hantées ? Après avoir traversé un tel traumatisme, parvenaient-elles à reprendre le cours d’une vie ordinaire ? Azaël ne s’était jamais posé une telle question et aujourd’hui, ce manque de réponse le rongeait.

  • Hello, Walker !

Cette interjection l’arracha brutalement de ses pensées. Le nouvel élève se retourna et se retrouva nez à nez avec Morgane. Il cligna des yeux, surpris par cette mystérieuse apparition. La jeune fille tenait dans ses bras une brassée de cerceaux et arborait son habituel sourire, ni joyeux ni triste. Elle se posta à ses côtés pour observer ce qui retenait son attention et avisa le groupe des premières qui entourait Richard.

  • Richard Bernhart aurait enfin surmonté sa peur de la scène ? demanda-t-elle malicieusement.
  • Comment tu… ?
  • Le théâtre ne t’intéresse pas ? enchaîna-t-elle.

Azaël marqua une pause afin d’être sûr qu’elle ne lui couperait pas de nouveau la parole et marmonna vaguement une réponse négative. Si Kim le mettait mal à l’aise avec sa voix robotique, il y avait quelque chose chez Morgane qui l’intriguait énormément. Il émanait d’elle une sorte d’aura qu’il ne parvenait à saisir. Comme si elle déambulait dans un univers auquel elle n’appartenait pas vraiment…

L’exorciste remarqua que la jeune fille le regardait avec attention et comprit qu’elle lui avait posé une question. Il détacha nerveusement ses cheveux et lui demanda de répéter. Sa gêne arracha un petit rire à son vis-à-vis.

  • Je disais, ça te dirait de venir voir l’option magie avec moi ? C’est l’art qui m’intéresse le plus, personnellement.
  • Oh, d’accord, je te suis.
  • Pas besoin d’être si formel, petit oisillon !

Azaël choisit prudemment de ne pas relever ce surnom. Décidemment dans cette école, les élèves semblaient avoir une dent contre son prénom…

Il emboîta le pas de Morgane. Cette dernière marchait devant lui. Ses lourdes boucles rousses, retenues par un épais nœud violet, tressautait à chacun de ses mouvements. À travers sa chemise d’uniforme, l’exorciste devinait ses muscles bien bâtis. Il ne s’était pas rendu compte jusqu’alors de la stature de la jeune femme. Son corps était assez petit, mais nerveux. Il se demanda vaguement quel sport elle pratiquait.

  • On y est !

Une nouvelle fois, le jeune homme fut tiré de ses pensées par Morgane. Il s’ébroua et se concentra sur ce qu’il se passait devant lui. Les deux élèves avaient atterri dans une nouvelle salle. Cette fois, il y avait une multitude de petites scènes dispersées à travers l’espace. Des étudiants s’y étaient perchés afin de pratiquer leurs tours. Ils avaient des spectateurs installés à même le sol sur des coussins, qui analysaient chacun de leurs gestes.

La guide d’Azaël se dirigea vers une élève de première à qui elle remit les cerceaux. Les deux jeunes filles échangèrent brièvement avant que Morgane ne s’éloigne, non sans avoir intimé d’un geste le lycéen à la suivre.

  • Alors, Azaël, tu connais un peu le monde de la magie ?
  • Pas vraiment non…

La lycéenne se dirigea vers un casier dont elle tira un étui tout en longueur. Elle le déposa avec précaution au sol avant d’en faire sauter les loquets. À l’intérieur, sur un coussin de velours violet, reposait une épée à la lame si fine qu’on voyait à travers. Des veines bleutées en parcouraient le fil. Sur la garde étaient gravées de petites fleurs qu’Azaël reconnues comme des alkanas. Himi avait toujours un pot de cette plante sur sa table de chevet. C’était une arme splendide… D’où pouvait-elle provenir ?

  • Un héritage familial, expliqua Morgane qui semblait avoir lu ses pensées.
  • C’est vrai ?
  • Non, je l’ai volée.

L’exorciste fronça les sourcils, avant de se rappeler que la jeune fille était une menteuse invétérée. Il ne fallait pas qu’il prenne au sérieux ce qu’elle dise. Morgane recueillit religieusement la lame. L’air semblait vibrer autour du sabre, comme s’il… chantait. La jeune fille esquissa quelques pas de danse en faisant tournoyer son arme. Cette dernière émettait une stridulation à chaque geste. La lycéenne fit sauter l’épée au-dessus de sa tête, pirouetta sur elle-même avant de rattraper gracieusement l’arme et de la tendre à Azaël.

  • J’utilise beaucoup cette lame dans mes tours, elle ne présente aucun risque. Tu veux la prendre en main ? Tu peux même me poignarder avec si tu veux !
  • Par… Pardon ?
  • Pour la beauté du tour.

Le jeune homme déglutit, mal à l’aise. Un frisson cascada le long de son échine alors qu’un voile de sueur baignait ses tempes. Il avait la sensation qu’il allait rendre tout son déjeuner… Il allait refuser maladroitement lorsqu’un son de conque étouffé résonna à travers la salle. Tous les élèves suspendirent leur activité, oreille aux aguets. Tout à coups, des étudiants en trottinettes électriques débouchèrent d’un couloir en soufflant dans d’énormes coquillages. Ils traversèrent la pièce à vive allure, zigzagant habilement entre les scènes. À leur passage, les élèves applaudissaient en sifflant et hurlant. Azaël, abasourdi par cette vision tirée d’un rêve absurde, se tourna vers Morgane, en quête de réponse. La jeune fille était en train de ranger son arme d’un air boudeur, visiblement déçue de ne pas avoir pu l’utiliser.

  • Qu’est-ce qui se passe ? lui demanda-t-il.
  • Tous les secondes sont priés de quitter la tour des première.
  • Quoi… ?

Les yeux de la lycéenne pétillaient.

  • On va beaucoup s’amuser !

--

– La Fée Morgane s’est connectée –

La Fée Morgane : Les amis, une nouvelle guerre des secteurs est déclarée ! Mieux encore, c’est l’heure de la grande guerre !

Kim Possible : C’est exact. Le département « Musique » a déjà lancé l’offensive tout à l’heure.

Édith Piaf : Youpi !

Le Roi Léo : Mais ça veut dire qu’on n’a plus accès à la tour des premières pendant pratiquement un mois, le temps que toutes les options préparent la bataille ! J’étais en train de peindre une toile magnifique !

Édith Piaf : Oh, mince de mince, j’avais oublié ce fâcheux détail ! Ça veut dire, que je ne vais pas pouvoir m’entraîner au handpan ! Le président du conseil des élèves ne m’a toujours pas rendu le mien depuis que je me le suis fait confisquer…

Kim Possible : Plus important, vous avez entendu les rumeurs à propos du sans-secteur ? Apparemment, il aurait obligé Azaël à courir avec lui sur les pistes de l’étage « Sport ».

Le Roi Léo : Oh, oh, l’oisillon aurait des problèmes ? Il faut l’aider !

Édith Piaf : Vous êtes sûrs, camarades ? Peut-être qu’on se trompe, après tout. Le camarade Amorth n’est peut-être pas un vilain.

La Fée Morgane :

Le Roi Léo :

Kim Possible :

La Fée Morgane : Je les aie vus se diriger vers le toit de l’internat. Et si on allait les espionner ?

Kim Possible : Roger !

Le Roi Léo : J’en suis !

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