Exorcisme quatorze : Home sweet home

Par Ascal
  • Alors tu penses qu’il y a des chances que celui qui soit possédé… ce soit Phineas ?

Haniel asséna un dernier coup dans le sac de frappe puis acquiesça, la respiration sifflante. Azaël, les deux mains posées sur le punching-ball pour l’immobiliser, fit mine de réfléchir. Il indiqua à son élève de se remettre en mouvement. Celui-ci poussa un grognement de mécontentement, mais s’exécuta. Le son régulier des gants sur le sac aidait l’exorciste à organiser ses pensées. En une après-midi, le lycéen avait bien avancé dans ses recherches. Les doutes envers Léo étaient presque écartés, mais ceux envers Phineas, au contraire, s’en étaient trouvés renforcés. Il allait falloir qu’ils l’espionnent de plus près encore.

  • C’est bon, Haniel, tu peux t’arrêter.

L’intéressé s’empressa de retirer ses gants, le souffle coupé par la séance. Il se laissa lourdement tomber sur un banc et attrapa sa bouteille d’eau pour la vider en quelques gorgées. L’exorciste s’installa à côté de lui, toujours perdu dans ses pensées. Il reçut alors un faible coup dans l’épaule.

  • Ça ne va pas ? l’interrogea son élève, sourcils froncés.
  • Si, désolé, j’étais en train de réfléchir à notre enquête. Je suis en train de me demander comment je peux investiguer sur Kim et Morgane sans éveiller leur suspicion.
  • Si tu veux parler à Morgane, elle est juste là…

Haniel pointa l’autre bout de la salle de boxe qu’ils avaient investi une heure plus tôt. Leur suspecte venait d’en franchir le seuil avec naturel. Elle leur décocha son habituel sourire poli puis trottina jusqu’à eux. Elle avait sur l’épaule un lourd sac de sport qu’elle déposa délicatement sur le sol.

  • Salut, vous deux !
  • Morgane, qu’est-ce que tu fais là ? l’interrogea Azaël, surpris. Le bâtiment des premières est interdit aux secondes pendant les préparatifs de la guerre des secteurs.
  • Tu es bien là, toi, souligna la jeune fille.
  • Il est avec moi, rétorqua Haniel.

Le regard malicieux de la jeune fille l’effleura brièvement avant de revenir sur Azaël.

  • Et qu’est-ce que vous faîtes là, alors ?
  • J’entraîne Haniel pour…
  • Il m’apprend des mouvements de self défense ! l’interrompit précipitamment son élève.

Ce dernier jeta un regard noir à son professeur qui lui rendit un sourire timide. C’est vrai qu’il avait parlé sans réfléchir. Morgane sembla intéressée.

  • C’est une excellente idée, c’est toujours utile de savoir se défendre, approuva-t-elle.
  • Tu t’y connais ? s’étonna l’exorciste.
  • Bien sûr, j’adore combattre des serpents durant mon temps libre.

La commissure de ses lèvres s’était légèrement relevée. Azaël vit son colocataire se questionner sérieusement sur la véracité de ses propos et il se demanda un bref instant s’il arrivait parfois aux adolescents normaux de réellement se battre contre des reptiles. Puis il repoussa l’idée. Après tout, il s’agissait de Morgane. Elle adorait proférer des mensonges d’un ton tranquille.

Elle fit signe à Azaël de se lever et de se placer face à elle. Le jeune homme hésita puis obtempéra, non sans avoir jeté un coup d’œil interrogateur à son colocataire, tout aussi perdu que lui.

  • Le meilleur moyen pour apprendre, c’est d’observer, déclara la jeune fille d’un ton faussement docte. Attaque-moi, Azaël.
  • Je ne préfère pas. Je risque de te blesser.
  • Je t’assure que je n’ai rien à craindre. C’est juste un cours de débutant, n’est-ce pas ?

Azaël ignorait à quoi ressemblait un cours pour débutant. Au Clan, il avait juste appris à recevoir des coups et à en donner. Mais il n’était pas sans ignorer que c’était en combat réel que les guerriers se forgeaient. Il était parti de ce principe, fondamental à ses yeux, pour construire sa leçon du jour. Peut-être qu’il s’y prenait de la mauvaise façon. Il détailla le corps de Morgane. Sous son tee-shirt à l’imprimé fleuri et son jogging, il devinait des muscles bien dessinés. Il décida de lui accorder sa confiance. Il lui signala son accord d’un signe de tête. La magicienne recula de quelques pas puis se mit en position défensive. L’exorciste prit une profonde inspiration puis se précipita vers son adversaire. Tout ce qu’il voulait faire, c’était la neutraliser. Il n’en eut pas l’occasion.

Alors qu’il tentait de se glisser sous la garde de Morgane, celle-ci saisit son bras et pivota sur ses talons. Azaël sentit son corps être tiré en avant et il roula sur l’épaule de la jeune fille. Son dos claqua violemment sur le sol et tout l’air se retrouva expulsé de ses poumons. Bon sang ! Il n’avait rien vu venir. Morgane lui adressa son sempiternelle sourire sans joie puis se tourna vers Haniel qui n’avait pas osé bouger de son banc.

  • Tu as bien observé nos mouvements ?
  • A… Azaël !

Celui-ci se redressa péniblement. Le lycéen hanté se précipita vers lui pour l’aider à se relever. L’exorciste le remercia d’un signe de tête avant de reporter son attention sur Morgane. Il ne s’était pas attendu à ce qu’elle bouge avec autant de fluidité. Il s’était fait avoir en beauté… La magicienne sembla l’étudier de pieds en cape pendant de longues secondes avant de secouer la tête, comme si elle essayait de se sortir de l’esprit quelque idée déplaisante. Elle récupéra ses affaires dans un geste leste.

  • Je suis désolée, je n’aurai pas dû m’imposer pendant votre séance, c’était malvenu de ma part. Je vous laisse vous entraîner tranquillement.

Avant qu’ils ne puissent la retenir, Morgane avait quitté la salle. Quelle apparition fulgurante… et douloureuse ! Azaël avait l’impression d’avoir été piétiné. Il n’en était pas fier, mais il ne pouvait poursuivre la leçon ainsi.

  • Ça va ? le questionna Haniel en fronçant les sourcils.
  • Oui, lui assura son colocataire. Elle m’a juste pris par surprise.

C’était un mensonge. Certes, il ne s’était pas attendu à ce que Morgane le mette au tapis, mais il avait été attentif à chacun de ses mouvements. Mais il devait se rendre à l’évidence… La jeune fille savait combattre. Après, il avait entendu dire que certains adolescents s’adonnaient aux arts martiaux volontairement, par plaisir. Peut-être était-ce son cas. Il défit nerveusement sa queue de cheval.

  • On va rester sur du théorique pour ce soir, déclara-t-il.
  • Du théorique ?
  • Tu voulais en savoir plus sur le Clan, non ?

Sa petite question attisa une flammèche d’intérêt dans le regard de son colocataire. Ils prirent une douche rapide dans les vestiaires avant de regagner leur chambre afin d’être à l’abris des oreilles indiscrètes. Ils s’installèrent sur le lit de Haniel et Azaël tira son grand cahier à spirales où il notait ses cours.

  • Mon clan a été fondé par un couple, se lança Azaël. Dominika Miko, surnommée par les exorcistes la Maîtresse du Fer, a été confrontée très jeune aux whisperers et elle s’est battue seule pendant des années. Lorsqu’elle a rencontré son mari, John, ils ont décidé de fonder un clan afin de former des personnes capables de vaincre les fantômes.

Leur clan, c’était d’abord une histoire de famille, puis l’entreprise s’était développée. Les exorcistes engagés par Dominika et John étaient principalement des personnes qui avaient perdu autrefois des êtres chers à cause des whisperers. Tout comme lui, Donnie ou encore Ronnie… Haniel l’écoutait sans émettre un commentaire, fasciné par ce monde qu’il apprenait de plus en plus à connaître. Il se permit tout de même une interruption :

  • Mais tu dis que ton clan n’est établi qu’à Honeda, c’est ça ?
  • Oui, tout à fait.
  • Tu veux dire qu’on ne trouve des whisperers que dans cette ville ?

Aussi étrange que cela puisse paraître, cette supposition était exacte. Les exorcistes ignoraient comment c’était possible, mais aucun cas de possession n’avait été dénoté ailleurs.

  • C’est bien pour ça que les seuls groupes d’exorcistes que je connais ne se trouvent qu’à Honeda, conclut Azaël.
  • Les ? releva son colocataire en fronçant les sourcils.

Son professeur eut un sursaut. Il ne comptait pas aller si loin dans sa leçon, mais il n’était pas sans savoir que Haniel ne le lâcherait pas tant qu’il n’aurait pas craché le morceau. Il hésita puis, de nouveau, sa voix s’éleva :

  • Il existe un autre clan appelé la Brigade. On ne sait pas grand-chose d’eux et, personnellement, je n’ai jamais rencontré d’exorcistes qui en provenaient. Mais mes maîtres m’ont enseigné qu’il ne fallait jamais avoir affaire à eux.
  • Pourquoi ?

L’exorciste mentait. Il se souvenait parfaitement de son unique rencontre avec un membre de la Brigade. Un souvenir qu’il préférait garder enfoui tout au fond de lui. Un frisson malsain parcourut sa peau alors que l’odeur entêtante du sang flottait dans ses narines. Il finit par pousser un soupir et planta son regard grave dans celui de son colocataire avant de passer aux aveux :

  • Parce qu’ils tuent les victimes de possession pour exorciser les whisperers.

Un silence glacial envahit la pièce. Azaël referma sèchement son cahier. La leçon était terminée pour aujourd’hui.

  • Allons-nous coucher. Une longue semaine nous attend.

--

En réalité, la semaine passa très vite. Entre les cours, les leçons spirituelles de Haniel, son entraînement physique et ses propres investigations, Azaël avait eu l’impression de courir à travers Sisoa pendant des jours. On était désormais vendredi soir et le jeune homme était installé devant son assiette dans le réfectoire, l’air absent. Un chahut le tira de son apathie. Il aperçut Richard au loin, entouré de plusieurs élèves de première. Des amis qu’il avait rencontré à l’étage « Arts de la scène » ? Son camarade s’aperçut qu’il l’observait et lui fit un signe de main. Ne sachant trop comment réagir, l’exorciste répondit en lui renvoyant son geste. Richard semblait mal à l’aise, comme s’il hésitait sur la conduite à tenir. Son attitude intrigua Azaël. Il s’apprêtait à se lever pour le rejoindre lorsqu’un plateau glissa sur sa table. Relevant les yeux, il aperçut Kim. Son regard dévia vers Richard, mais les autres lycéens et lui avaient disparu de son champ de vision.

Le jeune homme à la voix robotique s’assit face à lui et commença à dévorer son repas à grands coups de fourchette sans prêter attention à son voisin de tablée. L’exorciste, tout en mangeant, l’observait à la dérobée. Enquêter sur Kim était difficile, il ne savait par quel bout commencer. Il avait bien tenté d’interroger Édith, mais la jeune fille n’en savait guère plus que lui ; leur ami était aussi silencieux que mystérieux. Mais il n’avait pas son pareil pour rassembler des informations sur des gens.

Il n’eut pas le temps de s’appesantir sur la question. Bientôt, la table fut envahie par le reste de la bande. Les discussions allaient de bon train. Chacun discutait sur son programme du week-end. Azaël apprit de cette manière que les quatre amis avaient prévu de se retrouver dès le lendemain afin qu’ils puissent travailler chacun leur art respectif. Kim, comme il aimait le souligner lui-même, se contentait d’apprécier le spectacle.

  • Tu n’as pas de spécialité ? le questionna l’exorciste.

L’intéressé remonta ses lunettes pensivement en faisant la moue. Puis il se mit à écrire sur son téléphone. Suivant le rythme de sa rédaction, la voix robotique s’éleva :

  • Je pense rejoindre un des secteurs scientifiques l’année prochaine. Je suis excellent en maths, je n’ai pas besoin de m’entraîner. Mais j’aime bien regarder les artistes galérer.
  • Le chemin de l’art est une belle souffrance, mon ami ! s’exclama Léo.
  • Oui, mon cœur de pierre apprécie votre douleur.

Une flopée de rires préenregistrés jaillit soudainement du portable de Kim. Édith faillit s’étouffer avec son tiramisu dans un sursaut de surprise. Morgane lui tapota doucement le dos.

  • Et si tu te joignais à nous, Azaël ? proposa soudain la magicienne en se tournant vers l’exorciste. Après tout, tu fais partie de notre groupe, maintenant !
  • C’est très aimable de votre part, mais je passe le week-end chez Haniel, déclina poliment l’exorciste.

Les quatre amis échangèrent des regards lourds de sens que ne pouvait saisir Azaël. Il se demandait pourquoi ils semblaient tous excités par cette annonce.

  • Nos oisillons grandissent si vite, soupira tragiquement Léo. Si jeunes et déjà en train de quitter le nid !
  • Et ils nous délaissent, nous, pauvres parents, renchérit Kim.

Il enclencha un nouveau bouton sur son application vocale et de gros sanglots s’élevèrent de son téléphone.

  • Ha… Haniel et moi ne sommes pas vos enfants, balbutia Azaël, confus.
  • C’est une blague, Azaël, soupira Morgane.
  • Oh… Désolé…

Tous éclatèrent de rire devant la mine dépitée du jeune homme. Édith, elle, lui donna une solide claque sur l’épaule, ce qui devait être sa manière à elle de consoler les gens. L’hilarité des lycéens était contagieuse et l’exorciste sentit malgré lui la commissure de ses lèvres se relever. Finalement, se dit-il en observant les visages de ses amis, la vie à Sisoa avait parfois du bon…

--

L’appartement de la famille Amorth était situé à la frontière de la ville. Pour s’y rendre, il fallait prendre un bus qui roulait dans la direction opposée à la mer. À mesure que les secondes s’égrainaient, Haniel sentait la boule d’épines grandir dans sa poitrine. Il était soulagé qu’Azaël soit à ses côtés, cette fois-ci, vraiment. Ses parents n’oseraient jamais avoir un comportement désobligeant face à un invité. Ils se devaient de donner l’image d’une famille parfaite, selon les dogmes de leur religion, enfin, leur interprétation de la religion. Comme si pousser son propre enfant dans les escaliers pouvait être une marque d’amour.

Ils quittèrent le quartier des affaires de Honeda pour déboucher dans un endroit bien plus austère, jalonné de barres d’immeubles grisâtres. Azaël avait le nez collé à la vitre et son colocataire le devinait fasciné par ce qu’il observait. Ce garçon était vraiment déconnecté du monde réel…

  • On y est, déclara soudain le lycéen hanté en se levant.

Il balança son sac à dos sur son épaule et invita Azaël à le suivre d’un coup d’œil. Sous l’arrêt de bus en piètre état, une fille basanée aux cheveux noirs et bouclés les attendait tout en mâchant un chewing-gum rose. Sur son nez en trompette étaient chaussées de larges lunettes carrées rouges. Un grand sourire vint étirer ses lèvres.

  • Haniel ! s’exclama Milagro.

Elle bondit sur ses pieds pour mieux lui sauter dans les bras. Haniel rit de son attitude enfantine avant de la soulever dans les airs. Son entraînement commençait à payer, il arrivait à porter sa sœur avec bien plus de facilité qu’avant. Milagro rit de bon cœur, ses menottes accrochées à ses épaules. Puis son attention se porta sur leur invité et elle demanda à son frère de la faire redescendre. La petite boule d’énergie fonça en direction d’Azaël et se planta devant lui pour l’examiner attentivement. L’exorciste se raidit sous cet examen inquisiteur. Il jeta un regard inquiet à son colocataire qui, grand prince, décida de lui venir en aide. Il posa une main sur la tête de Milagro pour la rappeler à l’ordre.

  • Tu vois bien que tu le mets mal à l’aise. Allez, présente-toi, canaille.

L’enfant hocha vigoureusement la tête puis tendit formellement sa main vers Azaël, comme le lui avait appris leur père.

  • Bonjour, je m’appelle Milagro Amorth et j’ai onze ans.
  • Non, c’est faux… intervint son frère.
  • J’ai dix ans et demi, c’est presque onze !

Azaël ignorait quelle posture adopter. Il finit par serrer la main de la fillette, mal à l’aise.

  • Bonjour, Milagro. Moi, c’est Azaël Walker, j’ai quinze ans.
  • Ah, tu es moins vieux que mon frère, alors c’est lui qui commande, ce week-end.
  • Heu, oui, d’accord.

Haniel se mit à sourire, amusé par cette perspective. Milagro décréta qu’elle était leur guide et ouvrit la voie. Les deux colocataires lui emboîtèrent sagement le pas. Le lycéen hanté se tourna vers l’exorciste, moqueur :

  • Elle ne va pas te mordre, tu sais.
  • Je me doute bien ! s’offusqua Azaël.
  • Il n’y a pas d’enfants, au Clan ?
  • Si, si, mais pas d’aussi énergiques…

Son ton bougon acheva de mettre Haniel de bonne humeur. Ce week-end ne serait peut-être pas si terrible, en définitive…

  • Dépêchez-vous ou vous allez vous perdre ! les interpella Milagro, quelques mètres plus loin.

Trouvant que les lycéens n’avançaient pas assez vite à son goût, la petite fille revint sur ses pas. Elle glissa ses menottes menues dans les grandes mains des garçons puis les tira à sa suite. Haniel sentait que les doigts de sa petite sœur étaient fermes autour des siens. C’était sa manière à elle de lui signaler sa présence et son soutien. Il l’en remercia en exerçant une douce pression à son tour sur sa main. Quant à Azaël, constata le jeune homme, il semblait vraiment être en train de se demander pourquoi il était là.

Ils dépassèrent un square où une bande de gamins jouait à chat perché en poussant de grands cris. Des arbres apportaient ici et là des touches de nature. Autour d’eux, trois barres d’immeuble encadraient l’espace vert, telles d’énormes baleine de béton échouées. De la musique indienne s’élevait d’une fenêtre non loin d’eux. D’ici, ils apercevaient le hall de leur immeuble. Haniel aurait voulu ralentir pour repousser le moment fatidique, mais sa sœur ne lui en laissa pas l’occasion. Sans hésiter, elle continua à marcher en traînant les lycéens derrière elle. Ils pénétrèrent dans la large bâtisse. Haniel ressentit un frisson dégringoler le long de sa colonne vertébrale à la vue de l’escalier. Une volée de trente marches.

Bon sang qu’il détestait cet endroit…

Leur appartement se situait au premier étage.

  • Papa et maman ne sont pas encore là, indiqua soudainement Milagro alors qu’ils s’engageaient dans l’escalier en bois.

Son frère se figea au milieu des marches. La petite fille lui lança un sourire de lutin, ravie de son petit effet.

  • Oui, ils sont à l’église. Ils mangent avec le père Fabrice. Ils reviendront dans l’après-midi.

Haniel sentit le soulagement le saisir au niveau des poumons et il se mit à respirer plus librement. Un déjeuner avec le père Fabrice signifiait que ses parents seraient en de meilleures dispositions à son égard, au moins jusque dimanche. Dans un élan de joie, il embrassa Milagro sur la tempe.

  • Pâtes bolo pour fêter ça, canaille ? lui proposa-t-il.
  • Oh, ouais !

Haniel demanda à Azaël si cela lui convenait aussi et leur invité répondit timidement par l’affirmative. Ils pénétrèrent tous trois un petit appartement à la peinture jaune défraîchie, mais aux meubles en bon état. Des bouquets de lavande séchés et des assiettes en porcelaine se disputaient la place sur les murs du salon. Une douce odeur de cire d’abeille flottait dans les airs. Milagro bondit sur le canapé recouvert de plaids bariolés pour allumer le vieux téléviseur cathodique et le laisser tourner en fond sonore. Son grand frère lui demanda de faire le tour du propriétaire à Azaël pendant qu’il commençait à cuisiner. La petite fille accepta à cœur joie et attrapa leur invité par la main pour le guider à travers l’appartement. Haniel, pendant ce temps, fouilla dans le frigo à la recherche d’ingrédients.

Alors qu’il mettait l’eau à bouillir, Azaël revint et lui demanda s’il pouvait lui apporter son aide. Il fut assigné à l’épluchage des oignons. L’exorciste se mit au travail au silence. Le lycéen hanté l’observa un moment à la dérobée et devina à son expression que quelque chose le dérangeait. Il finit par lui asséner un coup de coude dans le bras pour le faire parler. Il vit son colocataire se mordiller la lèvre inférieure, puis se lancer d’une voix hésitante :

  • Tu as… beaucoup de crucifix dans ta chambre.
  • Ah, ouais… C’est censé éloigner le démon.

Le jeune homme eut l’air surpris. Il fronça les sourcils.

  • Ce n’est pas très efficace.

Sa remarque arracha un sourire à son hôte.

  • Je sais.

Azaël marmonna quelque chose à l’encontre des méthodes archaïques d’exorcisme puis s’attaqua avec plus de vigueur à ses oignons. Ils cuisinèrent dans un silence confortable. Haniel aurait adoré que ses parents ne rentrent pas du week-end. Deux jours complets avec Milagro et son insupportable colocataire, voilà qui aurait été un programme très plaisant…

Mais toutes les bonnes choses ont une fin. Ce qui sonna le glas de ce moment suspendu, ce fut une sonnerie de téléphone. Azaël abandonna la cuisine pour récupérer son portable.

  • Sengo, tout va bien ?

Haniel perçut vaguement le bourdonnement d’une voix masculine. Il vit le visage de l’exorciste pâlir considérablement et lui jeter un regard paniqué. Pourtant, il répondit sans hésitation à son interlocuteur :

  • Oui, bien sûr, je m’en charge, ne t’en fais pas.

Il raccrocha et demeura de longues secondes bras ballants. Haniel était en train d’égoutter les spaghettis.

  • Hé ! appela-t-il. Ça ne va pas ?
  • Je… On vient de m’assigner un exorcisme, bredouilla Azaël d’une voix blanche.

Le lycéen possédé claqua sa passoire dans l’évier.

  • Ne me dis pas que c’est ça que tu viens d’accepter !

Le silence de son colocataire était suffisamment éloquent. Haniel sortit de la cuisine et se précipita vers lui pour l’attraper par les épaules.

  • Azaël, je n’en suis pas capable ! Je ne peux pas pratiquer un exorcisme ! Je n’ai même pas encore maîtrisé le sort de perception.
  • Je le sais parfaitement… Mais on n’a pas le choix.

L’exorciste fit surgir une lame dans sa main.

  • On part à la chasse au whisperer.

--

– Le Roi Léo s’est connecté –

Le Roi Léo : Plus qu’une semaine avant la guerre des secteurs, j’ai si hâte !

Édith Piaf : Il paraît qu’elle ne ressemble pas du tout aux deux premières.

Kim Possible : En même temps, les deux premières étaient un peu ennuyeuses. Il s’agissait juste de démonstrations pour présenter les différentes options.

Édith Piaf : J’ai hâte, j’ai hâte !

Kim Possible : Au fait, pour ton grand projet…

Le Roi Léo : Notre grand projet ! C’est aussi le mien, je te rappelle !

Édith Piaf : C’est avant tout celui du camarade Amorth !

Kim Possible : Bref, c’était juste pour te dire que j’étais prêt de mon côté.

Édith Piaf : Tu es le meilleur !

Kim Possible : Je sais.

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