Exorcisme quatre : Triste jour pour Haniel Amorth

Par Ascal

Haniel avait de nouveau crocheté la serrure du toit. Avec précaution, il referma la porte derrière lui. Un soupir de soulagement lui échappa lorsqu’il entendit un délicat clic, sans être suivi par les mugissements de l’alarme de Sisoa. Cette fois-ci, il avait réussi ! Rasséréné, le jeune homme sentit un sourire étirer timidement ses lèvres, le premier depuis des jours.

Le soleil était en train de se coucher. Le lycéen s’avança sur la large terrasse de l’internat et s’accouda à la rambarde pour profiter du spectacle. Dans les rayons rasants, la silhouette écrasante de Sisoa se découpait, série de tours élancées, Babel aux mille talents. Et, en contre bas, Honeda, immense ville froide engloutie sous le béton, semblait se prélasser. Pourtant, s’il prêtait suffisamment attention à l’horizon, le garçon parvenait parfois à distinguer entre deux barres d’immeubles des éclats bleus d’océan.

À l’intérieur de son casque, la voix de Freddie Mercury résonnait avec force. En tout cas, avec assez de force pour couvrir le vacarme incessant qui grouillait dans ses oreilles.

Le regard de Haniel se perdit dans le vide. Son corps, comme attiré par cette immensité, se pencha en avant. Ses doigts se crispèrent par réflexe sur la barrière. Il se demanda, un court instant, qui le pleurerait s’il venait à mourir, là, tout de suite. Certainement pas ses parents, encore moins ses camarades. Peut-être sa petite sœur…

Oui. Elle seule serait triste de le voir disparaître.

Il oscilla. Les murmures dans ses tympans s’amplifièrent, au point de gommer le vibrant « Show must go on ». Son cœur s’accéléra. Non, non, qu’il se taise ! Qu’il se taise ! Le lycéen recula, ahanant, mais ce ne fut pas suffisant pour apaiser les infâmes gargouillements. Alors il attrapa son ipod et augmenta le son jusqu’à s’en faire exploser les tympans. Enfin, les chuchotis se calmèrent. Le souffle erratique, le jeune homme se laissa tomber à genoux, les yeux clos. Il se concentra sur les notes le temps de redevenir maître de son souffle. La piste suivante s’enclencha. The Bravery, « Every Word Is A Knife In My Ear ». Combien c’était vrai…

Haniel s’assit, épuisé. Derrière les notes endiablées, il pouvait toujours percevoir les grognements du monstre. Ce n’était pas leur première confrontation de la journée et ce n’était sûrement pas la dernière.

Combien de temps encore cela devait-il durer ? Il l’ignorait… Haniel rejeta la tête en arrière, les dents serrées à lui en faire mal. Il aurait voulu crier. Laisser échapper le lourd hurlement qui écrasait ses poumons, qui broyait sa gorge. Cela lui aurait fait tellement de bien ! Laisser exploser sa rage ! Comme en écho à sa colère, les grouillements se firent plus violents. Ses doigts, serrés en poing compact, s’écrasèrent contre le sol bétonné.

  • Mais ta gueule ! siffla-t-il.

Haniel aurait tout donné pour troquer sa vie contre celle d’un autre. À ses yeux, mieux valait être n’importe qui plutôt que lui. Non seulement il se traînait ces infâmes murmures dans la tête, mais aussi cette affreuse réputation. Qu’il soit seul ou entouré, il se savait observé, inspecté, disséqué. C’était insupportable… Même lorsqu’il croisait des nouveaux visages, il avait l’impression qu’ils connaissaient déjà toutes les rumeurs qui couraient à son sujet. Comme cet élève de seconde qu’il avait croisé aujourd’hui. Son regard lui donnait encore froid dans le dos.

  • Quelle connerie, murmura-t-il dans le vent.

Une ombre.

Gigantesque.

Tout à coup, une ombre avait fait obstacle au soleil couchant. Le lycéen, surpris, leva la tête vers l’apparition qui bloquait la lumière. Son souffle se coupa alors que ses yeux essayaient de comprendre la scène irréelle qui se jouait devant ses yeux. Surgissant de nulle part, deux lycéens semblaient planer dans le ciel. L’un d’entre eux semblait être enveloppé dans une sorte de carapace brumeuse blanche. L’autre s’accrochait au premier de toutes ses forces.

Le charme se rompit lorsque la gravité reprit le contrôle. Les deux combattants atterrirent violement sur le toit et roulèrent, chacun cherchant à dominer l’autre. Ils se battaient avec une telle férocité que Haniel craignait d’être emporté dans ce tourbillon de violence. Tout à coup, le monstre parvint à se défaire de son adversaire et se releva d’un bond pour fuir. C’est alors qu’il remarqua le témoin. Et il se figea, étonné. Puis une lame s’enfonça dans son dos. La douleur de cet être surnaturel, Haniel eut l’impression de la ressentir au plus profond de ses entrailles. Dans ses oreilles, son monstre hurlait de douleur. Le lycéen avait envie de vomir. Mais bordel, qu’est-ce qu’il se passait, à la fin ?

Un mouvement attira son attention. Le second combattant venait de se relever. Il avait dans la main un couteau à la lame translucide, comme si elle était taillée dans de l’opale. À la vue de cette arme, les gargouillements dans ses oreilles s’accentuèrent. Haniel aurait voulu fuir. Son instinct lui hurlait de bouger, mais il était tétanisé. Ses jambes étaient verrouillées par la terreur. Lorsque le jeune homme leva son bras armé et qu’il poignarda en pleine poitrine son adversaire, son sang se figea dans ses veines. Il assista, terrorisé, à la disparition de la carapace brumeuse. Les fragments évanescents se dissipaient dans les rayons rougeoyants du crépuscule, telles des lucioles de brouillard.

  • Mais putain, c’est quoi ce bordel ?!

Haniel regretta instantanément d’avoir laissé échapper ce cri. Le lycéen armé se tourna vers lui. Un sursaut d’adrénaline déferla dans ses veines. Sans un regard en arrière, le jeune homme enfonça la porte du toit d’un coup d’épaule. Il dévala les marches de l’escalier à toute allure. Incapable de contrôler sa direction à cette vitesse, il percuta un mur, mais reprit aussitôt sa course éperdue.

Un meurtre ? Est-ce qu’il venait vraiment d’assister à un meurtre ? Il fallait qu’il s’éloigne et vite. Mais pour aller où, auprès de qui ? Son cerveau, surchargé par le stress, récitait les voies possibles, mais les rejetait toutes aussitôt. Le principal ? Absent. Les surveillants ? Tous le détestaient, ils n’accorderaient aucun crédit à ses paroles. Un élève ? Même chose. Ses parents ? Leur porte resterait close, quoiqu’il arrive. La police ? Son histoire était trop absurde, ils ne le croiraient pas non plus. Un constat s’imposa à lui : il n’avait nulle part où se réfugier.

Alors il courut jusqu’à sa chambre d’internat dont il claqua la porte derrière lui. Il s’agissait d’une chambre double, mais le second lit était vide. Son dernier colocataire en date en avait eu assez de ses hurlements la nuit et avait demandé être assigné ailleurs. Il allait pouvoir mettre ce lit vide à profit ! Il fallait qu’il bloque porte et fenêtre ! Haniel déménagea l’ensemble de la pièce afin d’obstruer les deux entrées potentielles. Matelas, armoire, table de chevet, tout y passa !

Une fois qu’il se fut barricadé, il se laissa glisser contre un mur, épuisé, la tête entre les mains. Dans son casque, la musique s’était tue. Il avait perdu son ipod dans sa fuite. Les chuchotements infâmes se répandaient dans sa tête, gagnaient son cerveau et la moindre de ses veines. Des frissons incontrôlables le secouaient. Non, non, non…

  • Laisse-moi tranquille, supplia-t-il d’une voix brisée. Laisse-moi !

Comme si le monstre lui avait déjà obéi, ne serait-ce qu’une fois… Harassé de fatigue, Haniel sentit que sa conscience s’étiolait. Puis, sans même qu’il s’en rende compte, il sombra dans les ténèbres.

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  • Hé bien, on ne peut pas dire qu’ils t’ont loupé !

Azaël préféra demeurer muet tandis que l’infirmier appliquait sur sa plaie au visage des Steri-Strips. À ses côtés patientait nerveusement son chef d’étage, qui n’arrêtait pas de jouer avec ses lunettes.

  • C’est un bizutage bien trop poussé, poursuivit l’homme avec un soupir. Détruire ta chambre et te blesser… Je pensais qu’on avait interdit ce genre de pratiques, surtout dans les dortoirs.
  • La cérémonie des choix de secteurs doit se tenir dans deux mois, les secondes commencent à être nerveux, M. Panzen, expliqua maladroitement le lycéen en remontant encore une fois de plus ses lunettes sur son nez.
  • Cela n’excuse rien, répliqua sèchement l’adulte, le regard assassin.

Le chef d’étage rentra la tête entre les épaules, ne pouvant rien répliquer. L’exorciste, quant à lui, flottait dans une sorte de demi-conscience. Son cerveau paniqué tentait tant bien que mal d’assembler les pièces du puzzle. Une fois le whisperer exorcisé, il avait récupéré Richard et l’avait hissé sur son dos. En chemin vers les dortoirs, il avait rencontré son chef d’étage, alerté par le vacarme. Celui-ci l’avait pris aussitôt en charge les deux élèves et avait guidé l’exorciste jusqu’à l’infirmerie. C’était lui qui avait déverrouillé la porte et qui était allé réveiller l’infirmier qui somnolait dans une pièce adjacente.

Azaël n’avait même pas eu besoin d’inventer un mensonge afin d’expliquer son état ou celui de sa chambre ; son chef d’étage lui avait trouvé une excuse toute faite. Un bizutage. Voilà ce qu’il avait déduit en constatant son état. L’exorciste se sentait nauséeux rien qu’à l’idée qu’une chambre détruite et des blessures pouvaient résulter d’un tel traitement.

Cependant, là n’était pas le sujet. Il avait été vu. Par Haniel Amorth, le première sans-secteur. Et, fait troublant, il lui avait semblé que le jeune homme avait réussi à percevoir le whisperer de Richard, pourtant invisible pour l’œil humain. Devait-il prévenir Sengo ? Il craignait sa réaction. C’était sa première mission en solitaire et quelqu’un avait été témoin de l’exorcisme ! Il s’en voulait pour sa négligence. Il fallait qu’il retrouve Haniel au plus vite et qu’il efface sa mémoire. Les whisperers étaient un secret farouchement gardé par le Clan. Il ne tenait pas à savoir ce qui se passerait si jamais l’existence de ces monstres était révélée au grand jour…

Son regard se porta sur Richard, qui dormait dans un lit cerclé de rideaux diaphanes. Son visage semblait serein, comme si les peurs qui l’empoisonnaient jusqu’alors s’étaient enfin évanouies. Cette vision apaisa en partie les craintes qui s’agitaient dans son estomac. Certes, il avait été vu, mais il avait quand même accompli sa mission ; il avait délivré Richard du mal qui le rongeait.

  • Pour ce soir, Azaël, tu peux dormir ici, lui proposa l’infirmier. On t’assignera une nouvelle chambre demain.
  • Heu, attendez, monsieur ! Un autre élève a été mêlé au… bizutage. J’ai peur qu’il soit blessé, lui aussi…

L’exorcisme l’avait épuisé. À l’heure actuelle, il ne désirait qu’une chose : s’allonger et sombrer dans un profond sommeil. Cependant, il ne pouvait pas se laisser aller. Pas encore. Avant toute chose, il devait assurer ses arrières.

  • Tu sais de qui il s’agit ? s’inquiéta son chef d’étage.
  • Haniel Amorth.

Un soupir souleva le torse de l’infirmier.

  • Dans quels genres d’ennuis s’est-il encore fourré, celui-là ? marmonna-t-il. Je vais m’occuper de lui, poursuivit-il en s’adressant à Azaël. Toi, tu restes là et tu te reposes.
  • Monsieur, j’aimerais vous accompagner, proposa aussitôt l’exorciste. Il n’avait pas l’air d’aller bien, ça le rassurera peut-être si je viens aussi.

Son interlocuteur hésita un moment, mais accepta. Il renvoya le chef d’étage se coucher puis se rendit jusqu’à l’étage des premières, l’exorciste sur les talons.

  • Comment Amorth s’est retrouvé mêlé à une affaire de bizutage ? questionna M. Panzen alors qu’ils gravissaient un escalier. Je sais qu’il n’est guère apprécié de ses camarades, mais quand même…
  • Il était au mauvais endroit au mauvais moment, monsieur, répondit sombrement le lycéen.

Une grimace discrète apparut sur le visage de l’homme. Il finit par s’arrêter devant une porte taguée. « Ta gueule », « Cinglé », « Dégage ». Des mots d’une grande violence. Un malaise vint comprimer les tripes d’Azaël. On dirait que sa cible n’était vraiment pas la bienvenue entre ces murs…

L’infirmier frappa deux petits coups discrets afin de ne pas réveiller l’ensemble de l’étage.

  • Amorth, souffla-t-il. Amorth, c’est l’infirmier scolaire.

Il tenta de repousser le battant, mais impossible de le bouger. L’élève et l’adulte échangèrent un regard inquiet.

  • On dirait qu’il s’est enfermé… Je vais aller voir chez le concierge si je peux récupérer un passe. Azaël, est-ce que je peux te demander de continuer à l’appeler ? Peut-être qu’il t’écoutera.

Quelle chance inespérée ! L’exorciste attendit que l’infirmier ait disparu de sa vue pour se tourner vers la porte. Il n’avait pas son équipement sur lui, comment allait-il crocheter la serrure ? Il jeta un regard aux alentours. Le dortoir était extrêmement silencieux. Ses yeux se posèrent sur le panneau de bois. Bien… Situation extrême, solution extrême, n’est-ce pas ?

Azaël recula de quelques pas, prit une profonde inspiration. Puis il s’élança et balança un violent coup de pied contre la porte. Dans un craquement sinistre, le bois se fendit. Cependant, le battant butta contre quelque chose. L’exorciste se mit à le pousser avec l’épaule. Dès qu’il eût dégagé un espace suffisant, il se faufila dans la pièce. Il remarqua les meubles qui avaient dû être entassés là dans l’espoir de bloquer l’entrée. On dirait que Haniel avait tenté de se barricader.

Les chambres des premières étaient plus grandes que celles des secondes. Azaël se tenait au centre d’un minuscule vestibule. À sa droite, par la porte entrouverte, il apercevait l’ombre d’une douche. Un plic ploc agaçant s’en échappait. Face à lui, il y avait une ouverture, masquée par un rideau fleuri. D’un revers de bras, il écarta le tissu léger. La vision qui s’offrit à lui l’estomaqua.

Recroquevillé sur lui-même, les yeux clos et les mains plaquées sur ses oreilles, Haniel Amorth se balançait doucement d’avant en arrière. Des marmonnements incompréhensibles s’échappaient de ses lèvres en sang, comme s’il les avait percées de ses dents à force de serrer les mâchoires. Mais ce ne fut pas la posture du jeune homme qui perturba l’exorciste. Ce fut la froideur qui se dégageait de lui. Comme si une bulle de givre le gardait prisonnier de sa coupe.

  • Hé, Haniel… l’appela-t-il doucement.

L’intéressé releva brusquement la tête. Un court instant, ses yeux furent entièrement rouges comme deux gouttes de sang. Puis, ils reprirent leur couleur initiale. Azaël avait l’impression qu’on venait de jeter une chape de plomb sur ses poumons. Un whisperer. Haniel Amorth était possédé par un whisperer. Un frisson glacé dévala le long de sa nuque. Nom d’une goule… Était-il capable de mener un nouvel exorcisme ? L’épuisement continuait à progresser dans son corps, telle une lèpre poisseuse. Son portable était dans sa chambre. Aucun moyen d’appeler Sengo en renfort.

Il fallait donc qu’il s’en occupe lui-même.

Il fit surgir une lame de sa manche. Habituellement, les exorcistes se battaient avec des lances, conçues spécialement par la Maîtresse du Fer, leur forgeron. Mais pour sa mission d’infiltration, on lui avait remis trois couteaux. Ces lames enchantées ne blessaient que les whisperers et permettaient aux membres du Clan de faire appel à leurs pouvoirs spirituels. Par l’intermédiaire de ce métal sacré, ils pouvaient briser les noyaux des fantômes, leur unique faiblesse.

À la vue de la lame, Haniel quitta sa position recroquevillée. Il se leva avec des gestes lents. Un air étrangement résigné était imprimé sur son visage.

  • Tu es venu te débarrasser de moi ? demanda-t-il. Alors fais vite, je t’en prie.

Azaël se raidit, surpris. Un whisperer qui communiquait dans leur langue ? Comment était-ce même possible ? Il n’avait jamais entendu de cas similaire… C’est alors qu’il comprit. Ce n’était pas le fantôme qui parlait.

C’était Haniel.

Ce dernier plaqua soudainement ses mains contre ses oreilles, les traits traversés par une grande souffrance. Il tomba à genoux dans un cri.

  •  Tue-moi ! hurla-t-il, les yeux écarquillés, envahis par une vague de folie. Tue-moi ! Que je ne l’entende plus ! Je n’en peux plus !

L’entendre… ? De quoi parlait-il ? Du whisperer qui le hantait ? Azaël ne savait comment réagir. Haniel serait donc conscient qu’il était possédé ? Il assura sa prise sur sa lame et murmura : « Xeo ». Aussitôt, ses yeux virèrent au noir. Il parcourut le corps de Haniel du regard, à la recherche du noyau du whisperer. Cependant, sa vision se brouilla et il porta une main fatiguée à son front moite. Bon sang, il n’arrivait pas à distinguer le cœur… Il était incapable de pratiquer un exorcisme dans cet état !

Le possédé, ne sentant pas la morsure de la lame, redressa la tête vers le lycéen. La colère envahit son visage.

  • Mais bon sang, qu’est-ce que tu attends ! Me tuer, c’est bien ce que tu es venu faire, non ?!
  • Quoi ? Non !

Azaël avisa sa lame puis la laissa tomber sur le parquet. Son vis-à-vis le considérait maintenant avec méfiance, l’air mauvais.

  • Je… Je ne suis pas là pour te faire du mal, lui assura l’exorciste. Mais pour te débarrasser du… du fantôme.

Le jeune homme était décontenancé. Il n’avait jamais parlé à une victime de possession. Une fois l’exorcisme achevé, il s’en allait, voilà tout. Mais pour la première fois, la personne hantée était pleinement consciente et semblait même libre de ses mouvements.

Haniel écarquilla les yeux.

  • Le fantôme ? Le truc qui murmure sans cesse dans mes oreilles ? C’est un fantôme ?

Azaël hocha la tête. Son interlocuteur fronçait dorénavant les sourcils, comme s’il pesait ses paroles et les évaluait, cherchant à savoir s’il lui disait la vérité. Puis ses yeux se posèrent sur la lame qui reposait entre eux. L’exorciste mit un genou à terre pour pouvoir lui parler plus facilement.

  • C’est ça, acquiesça-t-il. Je suis… Je peux m’en occuper, tu comprends ? Je peux t’aider.
  • Tu vas… m’aider ?

Cette question sonnait comme une supplique. Une douloureuse et lourde supplique sous laquelle rampait bien des ombres, bien des souvenirs poison. Azaël opina, tâchant de sourire afin de rassurer le jeune homme. Ce dernier se mit alors à rire nerveusement, les yeux étincelants.

  • Et… Et je ne l’entendrai plus ? le pressa-t-il vivement. Plus rien ?
  • Oui, promis.

Haniel bondit sur ses pieds. Il était animé par un soudain regain d’énergie. Un sourire fou étirait ses lèvres.

  • Vas-y ! Vas-y, fais ton truc ! Tue le fantôme !

Azaël nia de la tête, désolé.

  • Je ne peux, pas ce soir. Le premier exorcisme m’a coûté toute mon énergie, je ne suis pas capable d’enchaîner avec un deuxième.

Haniel ne répondit pas, déçu, en colère. Il se détourna brutalement de l’exorciste et gagna la salle de bains en trois enjambées. Un cri de rage et un bruit de verre brisé parvinrent à Azaël, étouffés par la porte close. Ce fut ce moment que choisit l’infirmier pour débarquer, le regard halluciné à la vue du battant fracturé et des meubles en désordre. L’exorciste s’empressa de reprendre son couteau, qu’il dissimula de nouveau dans sa manche.

  • Mais que s’est-il passé ici ? le questionna M. Panzen avec inquiétude.
  • J’ai entendu un cri, alors je suis entré, mentit Azaël. Désolé… pour la porte.

L’adulte répondit par un grommellement incompréhensible puis se désintéressa de lui pour aller vérifier l’état de Haniel. Il parvint à le faire sortir de la salle de bains après deux, trois menaces. Lorsque le lycéen émergea de la pièce, il avait les poings en sang. Il darda sur Azaël ses yeux rougis.

  • Quand ? cracha-t-il. Quand peux-tu m’en débarrasser ?
  • Demain, lui répondit Azaël.
  • C’est une promesse ?
  • Oui.
  • Bien.

Il ignora délibérément l’infirmier et gagna son lit sur lequel il se laissa tomber comme une masse. L’homme poussa un énorme soupir et se mit à se masser les tempes.

  • Bon sang, Amorth, mais qu’est-ce qu’on va faire de toi, grogna-t-il. Walker, ajouta-t-il en direction de l’exorciste, je vais m’occuper de ses blessures. Tu sauras regagner l’infirmerie tout seul ? Tu es très pâle, il faut que tu ailles te reposer.
  • Oui, monsieur.

En réalité, il n’en était pas certain, car l’appel du sommeil allait bientôt avoir raison de lui. Il quitta la chambre rapidement, non sans un dernier regard en arrière. Regard que lui rendit Haniel, brûlant, hurlant. De nouveau, un frisson le saisit. Le jeune homme couvait une telle haine en lui… Comment faisait-il pour ne pas étouffer sous toute cette colère ?

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– Kim Possible s’est connecté –

Kim Possible : I’m back !

Le Roi Léo : Alors, alors ? Qu’est-ce que tu as appris ?

Kim Possible : Bilan, une chambre détruite, un uniforme en lambeaux et quelques plaies dont une vilaine coupure sur la joue.

La Fée Morgane : Tu as encore hacké l’ordi de Panzen ?

Kim Possible : Pour quelqu’un qui conserve des dossiers médicaux confidentiels, son système de sécurité est déplorable !

Édith Piaf : J’espère que le camarade Walker va bien… Je lui poserai des questions pour avoir les détails demain matin !

Kim Possible : On compte sur toi, cette fois-ci ! Tire-lui les vers du nez.

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Alex3393
Posté le 31/07/2025
Bonsoir Ascal,

Nouveau chapitre ou cette fois-ci on suit le aussi le personnage de Haniel. J'aime beaucoup les histoires avec différents points de vue et j'étais content de débuter le chapitre avec lui. Je reste curieux sur les whisperers et j'ai hâte d'en savoir plus.
J'ai lu ta réponse au commentaire de Cléo et j'étais heureux de savoir qu'Azael resterait à Sisoa, maintenant j'ai hâte de savoir pourquoi.
Très bon chapitre, c'est toujours aussi plaisant de te lire !
Ascal
Posté le 02/08/2025
Hello Alex, ça me fait très plaisir de te voir de retour sur le roman :) j'espère qu'il va continue à te plaire !
Cléooo
Posté le 16/07/2025
Hello Ascal !

Alors ce chapitre est bien, c'est dans la continuité du précédent, donc assez peu de choses à dire. Une remarque sur la fin du chapitre plutôt : on a pas encore beaucoup de détails sur ce que sont les whisperer (même si on comprend l'idée au global, hein !) et je me demande s'ils ont d'autres "pouvoirs" que de te murmurer à l'oreille. En outre, je me demande s'ils sont capables de beaucoup plus méchant, et s'ils ont une conscience. Si eux-mêmes assistent à ce qui se passe. En gros, je me demande s'il est bien prudent pour Azaël de parler devant Haniel de quand il s'occupera de son cas, et si la créature va réagir en retour. Ça ferait un rebondissement intéressant, mais en même temps, Azaël connaissant les whisperer, il serait peu logique qu'il prenne le risque...
Ce qui me ramène à une question que je me suis posé précédemment : une fois les exorcismes passés, qu'est-ce qui retiendra Azaël à Sisoa ?

Et sur ces questions, je te laisse avec mes diverses notes :

- "avait de nouveau crocheté la serrure du toit" et "Cette fois-ci, il avait réussi !" -> du coup, je pense que le "de nouveau" est de trop, si habituellement il n'y arrive pas. Ou alors pour la première phrase "tentait de nouveau de crocheter la serrure" ?
- "« Ta gueule », « Cinglé », « Dégage ». Des mots d’une grande violence." -> en effet d'une grande violence, mais je ne sais pas si c'est utile de le préciser, que c'est d'une grande violence.
- "Il n’avait jamais entendu de cas similaire… C’est alors qu’il comprit" -> peut-être un peu rapide ? Ça aurait pu être développé sur plusieurs paragraphes, pour laisser un peu de suspense.
- Remarque : peut-être le chat n'est-il pas nécessaire à chaque fois ? Celui-ci n'apprend pas grand chose par exemple.

À bientôt !
Ascal
Posté le 17/07/2025
Hello Cléo !
Merci pour ton rertour.
Les whisperers ont encore bien des secrets, qu'on déroule tout au long du tome et des suivants :)
J'espère que l'astuce que j'ia trouvée pour retenir Azaël à Sisoa te plaira !
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