Comme la plupart des détails de la culture féerique, le système politique de la bannière de Elduir-Khal, la déesse du vent et des orages est mal connu. Tout juste peut-on dire que le Grand Sabbath constitue l’organe décisionnaire et que la cheffe de ce gouvernement est désignée sous le nom de Baba Yaga.
« Le Grand Sabbath »
extrait du Traité sur les sociétés du bouclier-monde du maître architecte Vinci
Par moment, Epiphone regrettait d’avoir choisi d’afficher publiquement son statut de princesse électrice. Contrairement à ses pairs qui vivaient humblement au sein du peuple de la mer, elle devait à présent justifier chacun de ses faits et gestes. Certes, elle pouvait déléguer la plupart de ses actions secrètes à sa fidèle suivante Iphigénie. Malheureusement celle-ci voyageait en direction de Zulla pour assurer l’échange épistolaire avec le prince Hector.
La trêve séculaire touchait à sa fin. La confrérie des élémentaires devait se hâter de constituer ses forces en vue de l’affrontement prochain. Epiphone organisa donc une campagne de propagande dans le royaume d’Aquira pour se rapprocher au plus près des marais du Nord des fées libellules. Il lui fallait absolument rencontrer ses amis Flamèche et Persuic. La princesse profita de la fin de sa tournée pour s’évaporer sur le chemin du retour. Longtemps elle erra au milieu des marécages sans rencontrer âme qui vive. La dryade n’ignorait pas que si les fées se refusaient à vous, il était impossible de les débusquer. Un mystérieux sortilège protégeait leurs cités. Elle espérait simplement que sa présence soit rapporter à l’un de ses alliés. Il ne lui fallait que de la patience. Son intuition s’avéra judicieuse. Au bout de deux jours à déambuler dans un brouillard impénétrable, Persuic se présenta à elle.
« Epiphone ! Amie de moi ! Moi content ! Toi suivre moi ! »
« Persuic ! Je suis positivement ravie de te revoir !...Enfin ! »
La princesse suivit son ami et moins de cinq cents mètres plus loin, ils quittèrent l’opaque rideau de brumes pour se retrouver comme par magie à l’entrée du pays des fées libellules. Il était impensable que celui-ci se trouvât si près ! Par quel prodige était-ce possible ?
La culture féerique se basait sur l’eau et le vent. Toute leur civilisation exploitait ces deux ressources au maximum de leur potentiel. Une multitude de bassins formaient une ceinture autour de la cité. De nombreuses mains s’affairaient dans ces étangs où alternaient riziculture et pisciculture. En plus de leur usage alimentaire, ces points d’eau constituaient des douves difficilement franchissables pour l’ennemi, si tant est qu’un adversaire belliqueux ait jamais pu se rendre en ces lieux. Les moulins à aube colonisaient le moindre ruisseau et les moulins à vent dominait la moindre butte surélevée.
A la suite de Persuic, Epiphone progressa entre les différents réservoirs jusqu’à arrivé à l’entrée de la cité. Les bâtiments semblaient tellement fragiles et délicats ! Ils ne possédaient comme base qu’un simple plancher sur pilotis. Les parois de papier de riz quasiment transparentes ne tenaient que grâce à leurs cadres de bois. Les toits de chaumes se seraient brisés au premier impact d’une arme de jet. Une simple flèche enflammée pouvait embraser toutes les constructions ! Pour construire ainsi, les fées étaient certaines de ne jamais subir l’assaut d’un ennemi.
Malgré leur rencontre, il y avait plus de trente années, Persuic ne possédait que quelques mots d’elfique et de nausiquin. Il s’exprimait principalement en runique, langage que la princesse ne maîtrisait pas du tout. Il fallait reconnaître que les fées dans leur élan protectionniste au maximum en autarcie vivaient repliées sur elles-mêmes et ne représentaient pas l’enjeu diplomatique principal pour les peuples de la mer. Enfin, le guide l’amena auprès de Flamèche.
« Princesse Epiphone ! Bonheur moi retrouver vous ! »
Décidément, l’hyperactive Flamèche n’avait pas plus progressé que son époux ! Les trois amis exprimèrent leur joie de se revoir et commencèrent à faire le point sur les avancées de la confrérie des élémentaires. La dryade expliqua la réussite totale de sa campagne politique. Les trois-quarts de la bannière de Génoas-Khal soutenait la ligue d’Anulune et affichait la bande rouge, symbole de ralliement au mouvement. De son côté, la fée progressait sur l’échiquier politique. Le Grand Sabbath trouvait un intérêt à développer une association avec les autres peuples élémentaires. L’organe décisionnaire féerique l’avait intégrée en son sein après avoir pris connaissance de ses soutiens diplomatiques extérieurs, à savoir un maître négociant de la guilde gnome, un représentant du Lugnasad satyrique et de l’unique dryade affichant son statut de princesse électrice. De son côté, Persuic avait développé une affaire florissante d’exportation des soieries féeriques en collaboration avec Bivot. Le trésor de guerre ne faisait que grandir !
« Mes amis, je ne sais pas si Bivot vous a déjà entretenu de l’affaire qui m’amène présentement. Pour gagner la guerre et ainsi maintenir la paix, la confrérie dois mettre toutes les chances de son côté ! Sur le conseil de mon fils, ton filleul Flamèche, je suis à la recherche des sept présents des Sept ! Auriez-vous des informations sur ces armes divines ? »
« Bivot expliquer nous projet ! Moi demander Sabbath. Dées deux présents encore posséder ! Tambour-tonnerre et chevalière-bouclier ! Tous autres perdus ! »
« A votre avis mes amis, le Grand Sabbath compte-il les mettre en commun pour le profit de la confrérie des élémentaires Ou bien protégera-t-il jalousement les derniers objets divins qu’il possède ? »
« Tambour-tonnerre trop important pour territoires fées ! Lui créer brouillards pour cacher citées féeriques ! Chevalière-bouclier juste bijou pour Baba Yaga ! »
« Ah ! Au moins savons-nous ce que les fées possèdent. Le tambour-tonnerre pourrait s’avérer utile sur le champ de bataille ! »
« Si moi devenir Baba Yaga, offrir Hector chevalière-bouclier ! »
« Si seulement Flamèche ! Comment puis-je t’aider à devenir la Baba Yaga du Grand Sabath ? »
« Plus argent ! Plus armes ! Plus soutien ! »
Persuic parlait peu et jamais pour ne rien dire. La stratégie de la confrérie des élémentaires était la bonne. Il suffisait de l’intensifier. L’époux de Flamèche avait raison. Il fallait plus d’argent, d’armes et plus de soutien politique ! Pourquoi Epiphone s’était-elle rendue au pays des fées libellules en catimini ? Il lui fallait rattraper sa délégation avant son retour à Neptnas et faire une entrée remarquée auprès de sa grande amie Flamèche.