Je t’ai aimée comme je t’ai battue : avec force et déraison, longtemps, et toujours dans le silence.
Aujourd’hui mes bras tordus sont retenus sans sangle au siège de mes dernières heures, et je me chie dessus sans même m’en rendre compte. Je ne peux plus que voir, parfois gémir. Il aura suffit qu’un vaisseau pète dans ma tête pour que je me retrouve à terre, déjà un pied, une jambe, un bras et la moitié du visage dans la tombe.
Mais pourtant toi, tu restes là. Toujours debout, et qui me porte, me conduit, me lave et puis m’essuie. Me borde, me parle sans réponse, tiens une main qui ne m’appartient plus.
Comment n’as-tu pas pu péter un câble bien avant moi, toi qui maquillais des coquards en cernes, jours de marché et à la messe ? Moi je croyais trop te connaître, et peut-être en avoir assez. Désormais je découvre, distant, ta beauté qui s’épanouit en fanant. Grande ourse, il m’a fallu du temps et du recul pour te trouver, t’admirer.
Grande ourse, toi, tu restes là. Mais pourquoi, dis-moi ? Par amour ? Par habitude ? – Pour aller où ? sembles-tu me dire. Par peur ? Mais peur de quoi ? Sûrement plus de moi. Du regard des autres ? Ou de celui de Dieu ? Il n’a pas dû regarder par ici depuis longtemps.
Sans savoir ce que tu penses, puisque tu parles tout aussi peu, j’arrive néanmoins à lire, peut-être à croire, en ton regard, qui scintille de près comme de loin. C’est désormais mon premier et mon dernier rayon, dès que tu ouvres et fermes les volets.
Mais ce qu’il y a de plus beau, ce sont tes gestes tendres, mon seul spectacle, la seule preuve que je suis toujours en vie : ces doigts qui serrent les miens lorsque tu lis, manges et me nourris. Je suis cette ancre qui termine lentement de rouiller, et toi, qui en fin de compte a juste peur de dériver.
Ce qui me touche plus que tout désormais, ce sont tes lèvres ridées sur mon front dégarni. Tes lèvres qui me pardonnent jusque dans l’inertie. Tes lèvres qui me répètent que tu m’aimes, pour le meilleur et pour le pire, et qui le soir me murmurent un « Adieu », non par espoir, mais bien par peur que, dans le noir, je disparaisse, sans que tu m’aies dit au revoir.
Chérie, je t’aime, d’un amour que je ne pourrai plus donner.
Tu lis ton livre ; tes yeux se ferment. La lampe est restée allumée.
Endors-toi… tiens-moi la main, jusqu’à demain. Le temps d’un bout d’éternité.
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Y a pas une phrase qui n'est pas belle à mes yeux. Les rimes sont vraiment belles, moi qui ne sait pas en faire je suis vraiment admiratif.
Merci pour ce texte. Si tu n'as pas gagné, je ne comprend pas x)
Le plus dur à été pour moi de trouver comment aborder le truc. C'est pas simple de se mettre dans la peau d'un mari violent, surtout en ayant un passif avec ce genre d'histoire et en conséquence une aversion non dissimulée envers ce genre de personnage. L'exercice de style était donc d'en faire un personnage attachant ^^'
Pour le concours : le résultat n'a pas encore été révélé, je croise les doigts !!