Une fausse note. Encore. La contrebasse soupira discrètement, baissa son archet. Le violon ferma les yeux, résigné. Silence dans la salle. Puis une explosion. Colère. Exaspération. Fatigue. Ras-le-bol ! Encore ce mi bémol oublié pour la treizième fois. Violoncelle engourdi ! L’alto s’empara d’un surligneur orange fluo et entoura l’altération déjà colorée. Il se rassit, prêt à reprendre. Le chef d’orchestre tourna la page de son dossier. Retour à l’introït. « Trois, quatre ! » Mouvements lents. Mélancoliques. Un requiem, mort, noir, vibrant. Un requiem pour pleurer, une messe pour tuer les cœurs. Mais pour l’instant, leurs dents crissent et leurs oreilles saignent. Ils filèrent toute la partition, sans s’interrompre. Enfin, les épaules se relâchèrent, les sourcils redevinrent lisses. La paix se fraya un chemin entre le kyrie et le paradis. Les morts étaient enfin en harmonie. La dernière note vibra dans la salle plongée dans la pénombre. Les fantômes applaudirent sans bruit. Les musiciens fermèrent leurs yeux et reposèrent leurs instruments. Ils étaient enfin en paix.