I.10 Azraël

Sara entra dans la chambre accompagnée de son nouveau compagnon. Elle chassa Azraël du lit ; le chaton, dérangé dans sa sieste, grogna et se trouva une place sur le coffre à vêtements. Il mit un certain temps avant d’adopter une position vraiment confortable ; puis, il fourra sa truffe sous sa queue, et ferma les yeux.

Il ne dormit pas longtemps.

Quelques minutes à peine après l’arrivée des deux humains, des halètements bizarres lui parvinrent. Il secoua l’oreille, comme pour se débarrasser d’un bruit parasite ; mais ils se faisaient de plus en plus rauques. Ce n’était pas le bruit normal que faisaient les humains quand ils s’accouplaient. Alors il ouvrit un œil.

Et ce qu’il vit lui hérissa les poils.

Sara se tenait recroquevillée dans un coin de la pièce, tétanisée de terreur. Et son mâle, à demi nu entre le lit et le mur, luttait en vain contre la… créature. Les humains ne pouvaient pas la voir. Mais Azraël était un chat, et les chats savent reconnaître les êtres des autres mondes. C’était un démon, un démon à la carapace noire et aux cornes blanches et aux ailes rouges. Il avait la taille de l’humain le plus grand, le plus robuste et le plus costaud que la terre eut jamais porté. Ses yeux jaunes brillaient d’une lumière maléfique. Et de ses longues et fines mains, il serrait de toutes ses forces le cou fragile et vulnérable du partenaire de Sara.

Azraël feula. Le démon tourna son regard vers lui et ricana.

« Le courageux guerrier que voilà !

- Asmodée, grogna Azraël.

- C’est moi, répondit Asmodée. Tu ne peux rien contre moi, misérable vermisseau. Je tourmente ton humaine depuis deux ans déjà, c’est le sixième de ses maris que je tue de mes mains. Et pour chaque homme qu’elle réussirait encore à ramener dans cette chambre, je le tuerai de la même manière sans que tu ne puisses rien faire d’autre que regarder.

- Moi, je ne suis pas assez fort pour lutter contre toi. Mais un jour viendra où tu feras moins le malin. Car il est des êtres plus puissants encore que les démons. »

Asmodée éclata d’un rire sinistre. Il laissa tomber le corps sans vie du mâle de Sara, puis s’évanouit dans une gerbe de flammes écarlates. C’était un effet de style qu’il faisait juste pour Azraël, car d’habitude, devant de seuls humains qui ne voyaient rien, il se contentait de disparaître sans faire de chichis.

Sara pleurait toutes les larmes de son corps.

« Pardon… Pardon, Chebassan ; tu étais mauvais, mais tu ne méritais pas de mourir. »

Azraël se blottit contre son humaine pour la réconforter. Et il se jura, en son for intérieur, qu’il ferait tout son possible pour aider à vaincre le démon Asmodée.

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