I.5 Tobo

Notes de l’auteur : Apparemment la fête des Semaines ce n'est pas en automne, on va faire comme si on n'avait rien vu, d'accord ?

« Sennakérib est mort. Son fils Asarhaddone lui succède. Vive le roi ! »

Tobo remua l’oreille, indifférent. Les humains qui criaient dans la rue ne l’intéressaient pas. Il voulait seulement profiter de sa sieste.

C’était sans compter sur Tobie. Le garçon avait visiblement trouvé la nouvelle très réjouissante, et avait trouvé bon de saisir les pattes avant de son chien pour le faire danser. Et pour le dîner, Anna avait préparé une délicieuse soupe à l’oignon. Elle n’avait pas lésiné sur le fromage, et y avait également fait macérer des morceaux du canard rapporté la veille par Tobo lui-même. Tobo avala à grandes lampées le contenu de sa gamelle, puis, une fois repu, s’allongea sur le paillasson pour monter la garde.

 

Les jours qui suivirent se déroulèrent comme d’accoutumée. Tobo courait après les lapins la journée et après les voleurs pendant la nuit ; Anna réparait le toit des voisins contre un peu d’argent, et Tobie s’occupait de tenir la maison. Il passait également quelques heures par jour dans l’atelier de son père, à scier et frotter et creuser des morceaux de bois, selon une logique typiquement humaine qui échappait totalement à Tobo. L’oncle Anaël passa les voir ; il s’entretint longuement avec Anna, suite à quoi la maîtresse de maison ressortit joyeuse et dansante.

Et trois jours plus tard, alors que Tobo jouait à la balle avec Tobie, une voix familière retentit à l’entrée de la maison :

« Mes agneaux, comme vous m’avez manqué ! »

Tobie se jeta dans les bras de son père, tandis que Tobo, oubliant complètement sa baballe, galopait pour faire la fête à son maître. Tobith était de retour !

Tobo passa l’après-midi à courir dans tous les sens, à courser les pigeons sans jamais en attraper aucun, à harceler son maître pour avoir des caresses, à faire le tour de la maison à toutes pattes et à se battre en duel contre sa propre queue. (Il gagna le duel.) Tobith était de retour !

Pendant ce temps, du côté des humains, ce n’étaient qu’embrassades, baisers et larmes de joie. Anna avait enlacé son mari si fort qu’ils étaient à présent complètement emmêlés. Tobie, pris au milieu de l’étreinte de ses parents, et bien qu’il semblait avoir quelque difficulté à respirer, avait l’air de s’accommoder parfaitement de la situation.

Ce fut Anna qui mit fin à cette tentative de meurtre par étranglement en étant subitement frappée par une autre idée pour étouffer son fils et son mari : les faire s’empiffrer de gâteaux au miel. Elle mélangea avec ardeur les ingrédients, alluma le feu et mit les galettes à dorer sur sa poêle. Tobith eut droit à la première, et en croquant dedans, il ferma les yeux de bonheur :

« Cela m’avait tellement manqué ! Pendant mon exil, je ne mangeais que des fruits et des insectes, parfois du pain quand on m’en donnait. »

Son épouse prit un air catastrophé et s’empressa de cuire d’autres gâteaux. Tobie eut lui aussi son content, et Anna elle-même ne se priva pas. Même Tobo eut le droit de dévorer tous les accidents de cuisson, ceux qui étaient trop cuits ou déchirés ou qui comportaient de trop gros grumeaux. Enfin, drogués au sucre et ivres de bonheur, ils s’écroulèrent tous les quatre de fatigue et laissèrent les anges de Dieu bercer leur sommeil.

 

La famille nageait dans le bonheur. Tobith reprit ses affaires ; Anna eut plus de temps pour elle, et Tobie devenait un beau brin de jeune homme. Des envoyés du nouveau roi vinrent restituer à Tobith les biens qui lui avaient été enlevés. Tobo avait toute la viande qu’il voulait. Par ailleurs, les filles du quartier commençaient à faire de l’œil à Tobie, qui représentait définitivement le meilleur parti à des lieues à la ronde. Le soir, son chien l’écoutait énumérer ses prétendantes et se demander laquelle il allait épouser. Tobo l’écoutait parler en se demandant si une nouvelle maîtresse viendrait rejoindre la maison. Mais au vu de l’opinion de Tobie sur la gent féminine, on était encore loin des fiançailles.

La fête des Semaines approchait, et pour la célébrer dignement, Anna et Tobie s’investirent avec ardeur dans les préparatifs. Ils passaient leur temps entre le marché et les fourneaux, si bien que Tobo se retrouvait souvent seul. Alors il courait, courait dans les champs et dans les prés et dans la forêt, il s’enivrait des odeurs de l’automne, et ne revenait à la maison que le soir, sale et fatigué, mais heureux.

Enfin, le grand jour arriva. Tobie dressa une table recouverte de plats délicieux, Anna alluma des bougies et sortit des coupes ornementées. Tobith entonna un cantique, que sa femme et son fils reprirent après lui ; Tobo battait la mesure en remuant la queue. Mais le maître ne commença pas tout de suite le repas.

« Il n’est pas juste que nous festoyions dans l’abondance tandis que d’autres ont faim. Va, Tobie, essaie de trouver parmi nos frères déportés à Ninive un pauvre qui se souvienne de Dieu de tout son cœur ; amène-le pour qu’il partage mon repas. Moi, mon enfant, j’attendrai que tu sois de retour. »

Tobie siffla Tobo et le chien, sur les talons de son jeune maître, s’élança dans les rues de la ville. Ils parcoururent la rue des Lilas puis l’avenue du Sanctuaire sans croiser personne. Mais quand ils arrivèrent sur la grand-place, ils se figèrent.

Au milieu de la place gisait le cadavre d’un Israélite.

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MayaPer
Posté le 03/01/2024
I-ko m'a également fait ce coup là 5 fois sur le même livre "sans parents" je l'ai donc signalé (encore une fois), je te suggère de ne pas y prêter attention.
blairelle
Posté le 03/01/2024
Mince ! Je l'ai signalé aussi
MayaPer
Posté le 03/01/2024
Et, j’ai beau la signaler, elle continue encore !
MayaPer
Posté le 03/01/2024
Je viens de recevoir 3 message de I-ko avec comme contenu : …………………
blairelle
Posté le 05/01/2024
GRRRRRRRRRRRRRRRRRRRRR
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