II. Octobre

Par BAEZA

Ce n'était pourtant pas le parcours habituel.

 

La dame à l’enfant, qui avait demandé l’arrêt, s’inquiéta et s’adressa à lui :

 

  • Je suis désolé, Madame. Répondit le conducteur sans émotion. Il y a des travaux dans cette rue. Je dois suivre un autre itinéraire.

 

Philippe regarda sa montre.

 

  • Souhaitons que ce détour ne soit pas trop long. Pensa-t-il.

 

Il craignait de ne pas être à l’heure à l'ouverture des bureaux car il avait un travail important à terminer impérativement dans la journée.

 

Il envoya un texto à son collègue pour le prévenir de son retard.

 

Le chauffeur continua à rouler jusqu'à un premier carrefour, où il tourna encore à droite.

 

  • Que se passe-t-il, capitaine ? Lança le vieil homme au regard curieux à destination du conducteur. Vous retournez sur vos pas, aujourd’hui ?

 

  • Je respecte les instructions que me donne le central. Toutes les autres routes semblent bouchées et ils me demandent de prendre cet itinéraire.

 

  • Et comment vous a-t-il dit tout cela, votre central ?

 

Le chauffeur désigna son oreille droite avec son index :

 

  • C’est là, … c’est dans mon oreillette.

 

  • C’est vrai qu’on s’éloigne. Se désola la maman. J’étais presque arrivée à destination.

 

  • Ne vous inquiétez pas madame, le central devrait bientôt m’indiquer le bon trajet et je vous déposerai ensuite juste devant chez vous.

 

Le conducteur remontait maintenant l’avenue à bonne allure dans l’autre sens car aucun feu ne l’arrêtait.

 

Le bus allait bientôt passer sous le périph.

 

  • Mais nous allons bientôt sortir de Paris ! S’étonna inquiet le jeune adolescent, du fond du car. Eh pas de blagues, j’ai des cours à suivre, moi !

 

  • Ne vous inquiétez pas. Répétait le conducteur. J’observe strictement les recommandations de mon central.

 

Il était pourtant, lui-même, un peu inquiet.

 

  • Mais qu’est-ce qu’ils foutent au centre de circulation aujourd’hui ? Pensa-t-il sans rien en  laisser paraître aux passagers.

 

Il fallait qu’il y ait un sacré problème dans Paris pour qu’on lui demande de faire ce long détour.

 

Pourtant, malgré le doute, il continuait de faire avancer son bus, irrésistiblement.

 

Ils allaient bientôt passer sous la poterne des peupliers et après ce serait la banlieue.

 

Mais par où voulaient-ils qu’il passe ?

 

Tous les passagers regardaient défiler, avec résignation, le décor inhabituel des maisons, dans ces rues où ils ne venaient jamais.

 

  • Mais arrêtez le bus au moins et laissez nous descendre. Protesta l’homme en costume cravate.

 

  • Je ne peux pas faire çà, le règlement du service est formel. Je ne peux pas vous déposer tant que nous n’avons pas retrouvé le circuit normal.

 

Les usagers du véhicule public étaient consternés.

 

Une fois passé le périphérique, le bus tourna à gauche et fila en direction de la banlieue sud.

 

Le véhicule ne croisait aucun feu rouge et continuait sa course à un rythme rapide mais régulier ; presque normal.

 

  • D’après les instructions, nous allons bientôt arriver.

 

  • Arriver mais arriver où ? S’étonna, inquiète, la dame en tailleur à carreaux.

 

  • Je ne sais pas exactement.

 

Le bus fit une embardée sur la droite et se retrouva sur un chemin de terre.

 

Tout autour de lui apparurent des champs uniformément couverts d’une herbe rase qui faisaient penser à une pelouse sans fin.

 

  • Mais où sommes-nous ? Dit l’homme âgé. Je ne savais pas qu’il y avait un coin comme celui-là, si près de Paris.

 

  • Nous sommes peut-être arrivés sur les pelouses de Reuilly. Répondit le jeune ado.

 

  • Vous croyez ? Répondit la maman, sans y croire.

 

Le bus continuait de rouler sur le chemin cahoteux et on commençait à apercevoir, au loin, une massive bâtisse grise.

 

Le véhicule poursuivait sa route et le bâtiment approchait.

 

  • Mais, c’est quoi cette construction ? C’est très moche ! Lança la dame en tailleur.

 

  • Oui, vraiment très moche. Cà ressemble à la Santé. Répondit l’homme en cravate.

 

Le bus arrivait au pied du bâtiment. Les portes de la bâtisse étaient ouvertes. Il entra.

 

Le véhicule pénétra à l’intérieur d’une cour grise octogonale et s’arrêta au pied du mur du fond. Il ne pouvait aller plus loin.

 

Derrière le car, les portes du bâtiment se refermèrent.

 

  • Mais, vous nous avez emmenés directement dans une prison ! Cria la maman.

 

 

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