Interlude

Un bain de lait tiède, une odeur de pomme cuite, des notes d’agrumes. Le corps n’est plus, seul l’esprit flotte et se prélasse dans cette mer parfumée. Le repos a goût d’hydromel.

— Alek, s’il te plait…

La voix d’Olivia traverse les limbes, résonne et froisse la couverture lisse du liquide. Elle supplie, l’appelle, encore et encore.

— Mon amour… tout va bien, je suis là, veut-il la rassurer. Mais ses mots ne paraissent pas l’atteindre.

Alek ouvre les yeux. Le froid l’envahit simultanément, son corps est sans force et douloureux. Et pourtant, il se sent léger. Il respire, empli doucement ses poumons d’air - Sensation magique de léviter.

Le visage d’Olivia se penche au-dessus de lui : il tente un sourire.

— Tu es là…

Sa joie, son oxygène, son tout. Elle est là ; ses cheveux châtains emmêlés, son visage de larmes séchées, vivante.

— Tu es si belle…

Sa voix n’est qu’un murmure. Olivia pleure comme une enfant, et il comprend que son absence a dû être longue.

Il est trop faible pour se mouvoir, il a besoin de nourriture.

Elle a gardé précieusement un petit sac de viande séchée, avec l’espoir qu’il finisse par se réveiller. Depuis des jours, elle mange à peine, ses réserves sont finies. Il ne reste plus que ce petit sachet.

— Mange… l’encourage-t-elle

Elle lui tend un morceau, juste devant la bouche. Il sait qu’il ne parviendra pas à mâcher la chair sèche et compacte. Il secoue la tête, et elle comprend. Alors, avec toute la détermination qui la caractérise, Olivia arrache un bout de viande avec ses dents, la mastique avec application avant de déposer la bouillie au creux de sa main. Avec des trésors de patience, elle le nourrit du bout des doigts, tel un oisillon. Alek sent la fatigue peser sur tout son être et se replonge dans un profond sommeil.