La lumière n'était qu'une illusion

Par MariKy

— Quels dieux implorez-vous lorsque le néant se resserre et vous arrache au monde ?

Hosgen murmurait en frôlant de sa main la muselière du dragon. Ses iris d’or le fixaient intensément, irradiant de douleur.

— Oh, je ne peux qu’imaginer les pensées qui traversent ton esprit, reprit le Fondateur. Cela me fascine. Si je pouvais encore entendre…

Le regard du prisonnier l’implorait d’un hurlement muet. Hosgen secoua la tête.

— Hélas pour nous deux, je ne le peux plus.

Il esquissa un sourire et retira sa main, arrachant son corps à la chaleur qui enveloppait le dragon. Elle n’était qu’un mirage qui se glissait dans sa chair pour réveiller la douleur. Chaque minute en sa présence réveillait le vide et la faim insatiable. Il recula, admira le pendentif scintillant sur le poitrail du démon. Une perle si jeune et si pure. Aucune raison de douter. Alors pourquoi hésitait-il encore à partir ? C’était cette femme, bien sûr.

Elle était enfermée sous bonne garde, le corps prisonnier du Sang Pourpre, l’esprit prisonnier des limbes. Estelon l’avait trouvée inchangée. Hosgen aurait pu vérifier, mais il ne se faisait pas assez confiance pour la voir lui-même. Ses mains auraient fini sur ses joues pour l’effleurer, ou serrées sur son cou pour l’étrangler. L’une ou l’autre solution n’était pas tolérable. Il avait besoin d’elle pour les atteindre. La réponse était quelque part en elle, il en avait la certitude. Tout comme il avait la certitude que Nayhidan l’avait créée contre lui. Ce visage, ce n’était pas une coïncidence. Mais qu’avaient-ils fait de sa mémoire ? Hosgen ne pouvait croire qu’elle disait la vérité. Il finirait par trouver les réponses, et qu’importe le temps qui s’écoulait. Le temps n’existait plus.

— Seigneur Hosgen ? Le carrosse vous attend.

— Appelez les lanciers, qu’ils gardent les démons en mon absence.

— Bien, Monseigneur.

Hosgen glissa une dernière fois la main sur le pendentif du dragon, faisant tinter la pierre contre celle incrustée dans sa paume. Elle avait creusé sa place entre la chair et l’os, il la sentait vibrer dans son bras. Hélas, aussi pure et intense qu’elle soit, elle ne parvenait pas à étouffer l’effet de la Rochelune. Dès qu’il eut franchi la porte du donjon, sa lueur nacrée réveilla la soif. La magie inondait le ciel, ruisselait sur ses épaules, coulait contre ses lèvres pour attiser le manque. Il serra les dents. La lumière n’était qu’une illusion. Une maladie qui gangrenait son corps et corrompait les hommes. Il referma la porte du carrosse, dégoûté.

Le vide, voilà ce dont le monde avait besoin.

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Hastur
Posté le 28/03/2021
Hello !

Un petit chapitre qui nous fait voyager dans les sinistres ruminations d'Hosgen ! Vraiment sinistre ! Ce passage était court, mais très efficace j'ai trouvé. "Le temps n'existait plus ?" Est-ce littéral dans son cas ? J'imagine que nous aurons des réponses dans la suite.

En tout cas, son départ semble présager d'une petite évasion en bonne et due forme ? :D. Je l'espère fortement !

Bon courage pour les corrections et la restructuration !

Dans ce que tu as changé, il y a de la réécriture où tu as ajouté de nouvelles choses ? Ou c'est simplement un redécoupage pur et simple ?

A bientôt :)
MariKy
Posté le 28/03/2021
Hello Hastur ! J'ai écrit ce passage tout récemment, il n'était pas dans la version première de mon roman, et je trouvais que ça manquait un peu... J'aime bien visiter les pensées torturées de mes personnages :p
Concernant les derniers changements, j'ai totalement réécrit les premiers chapitres, j'ai modifié des passages et ajouté une scène... J'ai tout détaillé dans le forum si ça t'intéresse ! (Chambres capitonnées>Sous la plume de MariKy)
Hastur
Posté le 05/04/2021
Ok ! Je vais aller voir ça sur le forum alors ! Merci :).
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