Laissez-passer

Notes de l’auteur : Édité le 17/09/24.

Lordi et mordi se déroulèrent sans trop d'encombres.

Pour masquer la dernière perte de mémoire de grand-mère Lorette, Isi avait habilement réécrit l'histoire – pris en flagrant délit, ils avaient dû fuir séparément, Isi s'était trouvé une planque au détour d'une ruelle, pas de quoi s'alarmer – puis il avait brandi le butin. Éblouie, la mère n'y avait vu que du feu.

Elle n'avait manifesté aucune joie cependant. Isi avait fait sa part, au même titre que n'importe quel membre de la famille, pas de quoi escompter un traitement de faveur. Ni accolade, ni félicitations. Tout juste un sourire.

Quelquefois, Isi enviait cette préférence que la mère affichait envers Boris. Et quelques autres fois, il se contentait d'apprécier ces non-dits. La mère n'avait en effet pas puni Isi pour la déchirure à ses braies. Mieux, elle l’avait dispensé des cambriolages à haut risque. Le bruit avait vite circulé qu'à la suite d'un vol spectaculaire, les miliciens perquisitionnaient les échoppes de receleurs les unes après les autres. Gare à celui qu'on pincerait avec de la marchandise présumée volée.

Isi passa ces deux jours à faire les poches des badauds, aidé de grand-mère Lorette rompue à l’art de la diversion. Un programme nettement plus reposant.

De son côté, Boris était trop occupé à se préparer aux Grand-messes, pour trouver le temps de tacler Isi. En plus de la musculation, des gommages, des épilations et du coiffage, la mère lui badigeonnait généreusement le corps de crèmes cosmétiques.

Isi veillait à croiser son frère le moins possible tant il mourrait d'envie d'en rire. Boris rutilait. Plus encore que la poule luisante de gras servie au dîner du lordi.

— Ça doit imprégner ta peau en profondeur, avait cru bon de préciser la mère attablée, en pleine lecture de la notice au dos d'un des pots.

Face à cette remarque, Isi n'avait su se contenir. Il avait pouffé et aussitôt feint de s'étouffer avec un morceau de poule. Son sourire en coin, bien que furtif, n'avait pas échappé à son frère – Isi relevait nécessairement sa cagoule jusqu'au nez pour manger. Boris s'était empressé de lui claquer un taquet en représailles. Malgré la précision du geste, sa paume glissante n'était parvenue qu'à déraper sur la cagoule. Isi s'était senti ragaillardi en regagnant la chambre. Certes, il avait été chassé de table et privé de terminer son assiette, mais vu l'état de contrariété de son frère, il s'en était tiré à bon compte.

Le mordi soir, tandis qu'Isi s'échinait à frotter d'huile de coude les assiettes sales, la mère mit les dernières choses au clair.

— Comme tu le sais, on laisse aux parents le choix d'accompagner les candidats victorieux. C'est un immense privilège. Je compte bien l'honorer. Lorsque Boris l'emportera, nous n'aurons ni le temps de repasser ici, ni le temps pour des adieux... Frotte mieux, tu laisses des traces au fond de la gamelle.

Isi acquiesça d'un hochement de tête et s’exécuta. Sans eau, faire la vaisselle était une gageure. La mère racla un pot d'onguent du doigt, étala le restant sur le front de Boris et poursuivit avec gravité :

— J'ai parlé à mon patron, il s'est montré charitable. Isi, tu pourras prendre ma relève. À une condition, que trois tuyaux mineurs résonnent lors de ton évaluation. En-dessous, ça écornerait l’image de la meunerie... Trois tuyaux, ça me semble à ta portée.

Isi se mit à briquer si fort, qu'un morceau s’arracha de l'éponge. Trois tuyaux, c'était a minima de belles-aisselles, de beaux-orteils, ou un beau-nombril. Les avait-il seulement ?

— Au terme de ces Grand-messes, tu seras un adulte. Tu auras à charge le foyer. Et ta grand-mère.

— Déborah ma fille, on s'en sortira. Ç'aurait été un sacré bazar avec une ribambelle de marmots dans les pattes. Juste nous deux, c'est du gâteau. Te fais pas de bile, mince de mince !

Isi rangea la vaisselle. Il doutait assez que sa mère puisse se faire de la bile pour quoi que ce soit qui les eût concernés à l'avenir. Elle ne pensait qu'au futur triomphe de Boris et à l'impact considérable qu'il aurait sur sa vie à elle. Plus l'échéance des Grand-messes avait approché, plus la mère avait acquis la certitude que Boris l'emporterait haut-la-main, et plus celui-ci avait pulsé des pectoraux au moindre compliment.

« Si ton frangin se foire, c'est sur toi que tout va retomber » l'avait averti le garde-eau. Isi se refusa à se figurer cette éventualité. Et il ne chercha plus à se préoccuper de quoi que ce soit en rapport avec ce morcredi de Grand-messes. Il voulait passer une dernière nuit en famille, que rien d'autre ne comptât.

Ce jour arriva pourtant.

***

À l'aube du morcredi 13 Prairior, la mère planta au pied des lits superposés une bassine pleine d'eau, un dé de savon et un gant de crin. Puis elle tira les couvertures avec vigueur.

— Lavez-vous ! Il s'agit de faire la meilleure des meilleures impressions. Et j’insiste sur meilleure.

Les yeux d'Isi encore collés par la fatigue s'ouvrirent sur une palanquée de papillotes éparpillées dans la chevelure blonde de sa mère. Elle avait mis du rose à ses joues et revêtu sa robe volantée en mousseline. Isi la trouva plus jolie que jamais. Elle avait dû débourser un prix non négligeable, même pour de la seconde main. Isi songea qu'elle le valait bien.

La mère coupa court à cette réflexion, en lui décochant un regard noir :

— Boris en premier, toi en second. Être laid ne te dispense pas d'être propre.

Puis, elle sortit préparer le petit-déjeuner en faisant tournoyer les volants rouges vif de la robe.

Isi s'assit sur son matelas de paille, bailla, frotta ses yeux, réajusta sa cagoule sur sa tête, re-bailla, et posa enfin un regard embrumé sur son frère. D'un frottement appuyé du pouce, Boris entamait l'essuyage de la salive séchée au coin de ses lèvres – chaque nuit, il ronflait la bouche ouverte. Cette fois-ci, il n'alla pas au bout de son geste pour mieux aviser la bassine d'eau. Isi décela une lueur malicieuse dans les yeux de son frère, typique des mauvais coups.

Un craquement de lombaires l'en détourna. Levée à son tour, grand-mère Lorette enfilait sa robe de chambre pelée. Elle avait un curieux épi dressé au-dessus de la tête, et cet habit raccommodé des années plus tôt avec un patchwork de tissus bigarrés achevait de lui donner l'allure d'un clown.

— C'est le grand jour.

Bien qu'enrouée, sa voix encore endormie était colorée de tendresse. Elle leur sourit, autant à l'un qu'à l'autre, et elle rejoignit la mère à petits pas claudicants.

— Je vous laisse un peu d'intimité. Insistez sur la tête. Surtout là que les regards se portent, conseilla-t-elle en refermant la porte sur les deux garçons.

Boris sauta du lit et entama sa toilette. Il humidifia le gant préalablement savonné et le passa sur son corps, avec une consciencieuse application. Bien décidé à faire disparaître la fine pellicule de crème rutilante qui n'était pas parvenue à pénétrer sa peau partout en profondeur.

En patientant, Isi repéra le pantalon, le gilet et la redingote suspendus au dossier de la chaise près du mur – ils composaient la tenue louée à l'intention de Boris. Pour Isi, la mère n'avait rien prévu. Il se contenterait de ses habits du quotidien.

Il avait pu raccommoder ses braies grâce aux conseils de grand-mère Lorette. Ce n'était pas du bel ouvrage, mais ça faisait illusion.

Isi examina les froufrous jaune-poussin cousus aux manches, au col et au bas de la basque de la redingote de Boris. Tout bien pesé, il était rassuré de ne pas avoir à en porter d'identique. Ressembler à un tournesol sur pattes susciterait la curiosité. Et s'il avait pu se rendre invisible une journée dans toute sa vie, il aurait choisi celle-ci. Sans l'ombre d'un doute.

Un splatch déconcertant lui fit tourner la tête. À genoux, Boris immergeait quelque chose au plus profond de la bassine.

— Qu'est-ce que tu fabriques ? s'alarma Isi.

— Tu vois bien. Ta lessive.

Isi se figea. Son frère se déchaînait sur sa tunique comme un forcené. L'eau se déversait sur le sol à chaque fois que Boris sortait l'habit pour l'y replonger aussi sec.

— Pas encore assez propre ! cingla-t-il, accompagnant les éclaboussures toujours plus excessives de ricanements intermittents.

Isi se précipita vers lui et essaya de lui faire entendre raison :

— Boris, tu... je... Je ne vais même plus avoir assez d'eau pour me laver.

— Ah oui, oups... J'ai mis trop de cœur à l'ouvrage.

Boris roula en boule la tunique gorgée d'eau, la lâcha au fond de la bassine vide et se redressa fièrement. Il s'approcha au plus près d'Isi pour mieux jauger sa réaction, décochant son plus beau sourire narquois.

— Tes fringues seront propres, elles !

Sur ce, Boris se dirigea nonchalamment vers la chaise et commença à enfiler ses habits de cérémonie. Isi attrapa sa tunique ruisselante et l'essora. Peut-être parviendrait-il à récolter assez d'eau pour un lavage succinct ? Peine perdue. Au fond de la bassine, le liquide – plutôt ce qu'il en restait – était souillé par la crasse qui recouvrait auparavant la tunique.

— Maman va me tuer.

— Il fallait y penser avant de te moquer de moi, l'autre soir... Vois le bon côté des choses, elle te nettoiera à coups de balai.

Boris acheva de boutonner son gilet, en sifflotant. Il saisit la redingote à froufrous qu'il jeta par dessus son épaule, et il se dirigea vers sa table de chevet. Chaque matin, il apposait la main sur l'effigie porte-bonheur placée dessus en évidence, parmi les cierges fondus et les offrandes hétéroclites. La mère la lui avait offerte pour son dix-septième anniversaire, quelques mois plus tôt. Lorette estimait qu'il ne s'agissait que d'une vulgaire bondieuserie. Isi n'avait pas d'opinion sur le sujet. Il n'y avait pas d'autel près de sa taie d'oreiller. Et pas de table de chevet non plus.

Boris acheva sa prière, ralluma les cierges éteints, puis sortit de la chambre. Il avait quasiment refermé la porte quand il trouva bon de conclure, avec un clin d'œil appuyé :

— N'oublie pas d'insister sur ta tête. C'est mémè-rimée qui l'a dit.

Et il claqua le battant de façon impériale.

Isi resta seul, penaud, face à la bassine quasi-vide, à contempler les dernières ondulations troubles de l'eau. L'attitude de son frère, bien que prévisible, l'avait scié une fois de plus. À La Nappe, les enfants beaux valaient mieux que les laids, et par conséquent ils étaient traités avec plus d'égard. Dans les quartiers ouvriers, le constat était encore plus marqué : on les nourrissait mieux ; on les hydratait mieux ; on les éduquait mieux ; on les soignait mieux ; on les préparait mieux. Boris avait grandi dans ce mieux-là. Lui qui était promis à de grandes choses. Lui qui n'était pas qu'une bête bouche à nourrir. Lui qui méritait sans doute toute l'eau de la bassine. Lui, et seulement lui.

Tant pis, Isi ne se laverait pas et se présenterait ainsi aux Grand-messes. Il retira son pyjama et enfila ses braies rafistolées. Emprunter une des tuniques de Boris lui aurait valu un taquet. Il ne s'y résolut pas. À la place, il passa la sienne. Trempée, froide et collante. « Le meilleur moyen de choper la crève » se découragea-t-il.

Tout grelottant, il se dirigea vers son oreiller pour récupérer son laissez-passer nominatif pour le Théâtre. La coutume voulait que chaque laissez-passer soit remis en mains propres par le recenseur de La Nappe. Au début du mois de Floréor, Isi, Boris et leur mère avaient reçu sa visite officielle et leur laissez-passer respectif. Dès qu'il avait été seul, Isi s'était empressé de dissimuler le sien dans un coin de sa taie d'oreiller afin d'éviter que Boris ne trouvât désopilant de le subtiliser. Tandis que ses doigts tâtonnaient l'intérieur de la taie à la recherche du ticket cartonné, Isi aperçut le long manteau du garde-eau jeté à l'autre bout de la pièce. Il était sale et miteux, mais sec. Isi n'hésita pas : au moins il ne tomberait pas malade en le portant. Il retira sa tunique trempée et revêtit le manteau à la place.

Lorsqu’il se sentit enfin prêt à affronter la colère de sa mère, il rejoignit le salon. Son laissez-passer à la main.

***

L'avenue principale était décorée pour l'occasion. Des oriflammes aux armoiries des Bellissimes et des banderoles multicolores étaient accrochées aux réverbères. Les bourrasques déjà tièdes les brandissaient avec majesté.

Des curieux se massaient aux fenêtres et aux balcons. Ils n'applaudissaient pas, ils n'acclamaient pas davantage. Si quelques-uns pointaient du doigt le cortège en dessous, tous avaient des airs de gargouilles fauves agrippées aux balustrades, leurs gueules prêtes à rugir sur les marcheurs.

Isi défilait à bonne distance de Boris et de sa mère. Il avait pour consigne de ne pas s'afficher avec eux. Le plus difficile était encore de suivre le pas. La correction avait été sévère, ses fesses portaient encore les stigmates des crins du balai. Il avait du mal à ne pas boitiller.

Les doux encouragements de grand-mère Lorette faisaient office de baume cicatrisant. À défaut de venir, elle l'avait embrassé sur le perron, lui avait juré suivre la retransmission audio et de penser fort à lui, puis elle l'avait laissé rejoindre la procession de candidats cagoulés et de géniteurs.

La foule était de plus en plus compacte. Au maigre aperçu qu'Isi en avait – même en tendant le cou pour dépasser les têtes, il n'en voyait ni le début ni la fin –, il était soulagé que ses modestes habits ne dénotent pas avec ceux des autres. À l'entour, la majorité des enfants d'ouvriers n'avaient pas pris la peine de se costumer, et il en était de même pour les orphelins. Isi passait donc relativement inaperçu. Ce qui l'enquiquinait le plus avec son manteau, c'était la longueur. Les gens manquaient de le faire trébucher dès qu'ils en piétinaient l'un des pans.

Si du reste, les classes bourgeoises s'affichaient volontiers dans des tenues exubérantes, la palme du tape-à-l'œil revenait à la mère d'Isi et à Boris. Les couleurs pastel s'avéraient tendance, les vives passées de mode. Or, ils étaient les seuls à porter du rouge et du jaune poussin – au moins, Isi ne risquait pas de les perdre de vue. Personne ne railla cependant cet anachronisme coloré. Le cortège silencieux avait quelque chose de maladif, de funèbre, de fantomatique presque. Le vent semblait avoir tout asphyxié sur son passage, jusqu'au plus discret claquement de pas. Ce morcredi, on n'émettait aucun jugement avant que le Mètre n'ait rendu le sien.

Bientôt, tous cheminèrent le long de poteaux à cordons, droit vers un poste de contrôle. Postée en vigie sur sa chaise haute, la poinçonneure en charge surveillait la foule alignée devant elle. Deux miliciens patibulaires l'encadraient en bons chiens de garde, reconnaissables à leur plastron, leurs gantelets, leur chapel de fer surmonté d'une plume de geais, et leur mine patibulaire.

— On prépare son laissez-passer, fissa ! s'époumona l'un d'eux en empoignant férocement le pommeau de son glaive.

Le second était occupé à secouer chacun des volants de la robe de la mère comme s'il s'était agi de vieux linges à dépoussiérer. Boris se tenait juste derrière elle, et une dizaine d'inconnus les séparait d'Isi.

— Puisque je vous dis que je ne cache rien, se justifiait-elle offensée par cette palpation grossière. Les baleines de mon bustier ont détraqué votre drôle d'appareil, la voilà l'explication.

Tout en gardant un œil sur la mère, Isi glissa sa main au fond de la poche de son manteau pour récupérer son laissez-passer. Son pouce effleura le pot de Faciès offert par le garde-eau. Isi en avait complètement oublié la présence. Si les miliciens le trouvaient en sa possession, ou pire, s'ils déduisaient que ce pot était issu du cambriolage, il aurait de sérieux ennuis. Sous sa cagoule, son teint vira blême.

Il n'envisagea pas de rebrousser chemin. Le Code du Parfait Chapardeur était très clair sur ce point : détourner le regard, courber l'échine, ou marcher à contre-courant était autant d'aveux de culpabilité. Il allait devoir passer sous l'arche du poste de contrôle, à l'instar des gens devant lui.

Cette arche se composait de larges aimants capables de détecter la présence d’objets métalliques sur n'importe quel individu la franchissant. La milice s'assurait ainsi que personne ne pénétrât l'enceinte du Théâtre, une arme blanche sous le manteau. Le verre du pot de Faciès était recouvert d'une fine étiquette de parchemin et scellé par un couvercle en caoutchouc. Si l'alarme n'avait en théorie pas de raison de se déclencher, Isi estimait préférable de se débarrasser du pot. Mais comment ? S'il se baissait pour le déposer sur les pavés, on le verrait. S'il le laissait discrètement tomber, on entendrait le bris. Il pouvait le glisser dans la poche du candidat de devant, mais l'idée qu'un autre portât le chapeau à sa place le révulsait. Le temps de trouver une solution à cet épineux problème, il était trop tard : Isi se tenait face à l'arche aimantée, le pot de Faciès toujours sur lui.

— À toi ! grincha le milicien.

Isi serra le pot de crème au fond de sa poche, comme si son poing pouvait parer l'assaut des ondes magnétiques. Il franchit l'arche. Elle resta inactive. Il se sentit allégé d'un poids.

De son côté, le milicien jaugeait d'un regard circonspect l'accoutrement d'Isi, beaucoup trop ample pour convenir à un enfant.

— Déboutonne-moi ça, fissa ! commanda-t-il. S'agirait pas que tu nous dissimules quelque chose sous tes frusques.

Isi ouvrit fébrilement les deux pans du manteau jusqu'à exposer son torse nu et ses braies misérables, et il s'efforça de donner le change. Les lèvres du milicien se tordirent en un rictus malicieux :

— Déjà prêt à t'effeuiller ? Gardes-en un peu pour tout à l'heure... Allez, j'en ai assez vu. Rhabille-toi et donne ton laissez-passer à la madame. Et fissa !

Sur sa chaise haute, la poinçonneure écrasée sous un gigantesque livre de comptes ouvrait une paume molle et nonchalante. Elle ne fit pas l'effort de tendre le bras. Isi se hissa sur la pointe des pieds pour lui remettre le précieux sésame. La poinçonneure abaissa son lorgnon jusqu'au bout du nez, et sans un mot, elle lut les mentions à l'avant et au dos du ticket, inspecta le cachet et poinçonna un emplacement sur son livre de comptes. En rendant le laissez-passer, elle hocha la tête signifiant l'accès au Théâtre des Exhibitions.

Isi ne se fit pas prier. La main cramponnée à sa poche, il ne se détendit que lorsqu'il fut suffisamment éloigné du poste de contrôle.

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Peridotite
Posté le 22/05/2024
Coucou Artichaut,

Tout le monde se prépare à la cérémonie.

Je pense que tu as une très bonne plume, le récit est fluide et se lit comme un charme. Le monde que tu décris est original et intéressant. Les persos sont cools, on a un peu l'ambiance de Charlie et la Chocolaterie je trouve.

Pour d'éventuels conseils pour s'améliorer, je te dirigerais vers le début de Hunger Game : je reserrerais l'action si j'étais toi pour rester en flux tendu. Il y a vraiment le potentiel de le faire et d'obtenir un récit page turner. Et ce faisant, tu pourrais tout lier : Isi doit se dépêcher de voler du maquillage pour la cérémonie le lendemain. Il se fait quasi chopé, mais réussit à les apporter à temps (sans restée la nuit avec le garde d'eau, il pourrait lui montrer un passage dans les égouts pour rejoindre sa maison ?). Il arrive dans une ambiance où tous se préparent pour le lendemain, c'est la pagaille a la maison. Sa mère est furieuse qu'il ait tant de retard. J'insisterais sur les vêtements, l'apparence un peu beauf de sa mère, et son parler plus spécifique, comme les Dudley dans Harry Potter par exemple. Tu peux appuyer encore les sentiments d'Isi, le fait d'être laid doit lui peser, peut-être est-il content pour son frère tout de même, d'où le fait qu'il lui vole du maquillage/des crèmes ?

Le chapitre est bien écrit, mais j'y trouve un autre bémol si je chipotte : tu nous décris deux scènes sans conséquence. La première, Isi craint la réaction de sa mère, car il ne se lave pas, mais au final, elle ne réagit pas. La seconde, Isi craint d'être arrêté (pourquoi d'ailleurs, n'est-ce pas lui qui rêvait d'éviter la cérémonie ?), mais le garde ne réagit pas. C'est dommage de faire monter la tension pour la faire retomber tout d'un coup. J'intégrerais tout ça plus dans un grand tout, en faisant quelques coupes.

Nan mais sinon c'est très bien. J'ai lu d'une traite et j'ai hâte de savoir ce qui se passera ensuite. 🙂

Mes notes :

"elle n'avait laissé transparaître aucune effusion de joie. Isi n'avait fait que réaliser sa part, au même titre que n'importe quel membre de la famille. Il ne s'était donc attendu à aucun traitement de faveur en retour. Ni accolade, ni félicitations."
> Je te conseille ici de décrire la réaction de la mère plutôt que ce qu'elle n'a pas fait. C'est toujours mieux les phrases positives. J'essaie en général d'éviter les négatives. La au final, on ne sait pas comment la mère a réagi.

"Lorsqu’il se sentit enfin prêt à affronter la colère de sa mère, il rejoignit le salon. Son laissez-passer à la main."
> Attends-voir, tu n'as aucune conséquence à la scène précèdente

"Au moins il ne tomberait pas malade en le portant."
Et plus loin : "les bourrasques déjà chaudes les brandissaient avec majesté."
> Pourquoi croit-il qu'il va tomber malade en portant un habit mouillé alors qu'il fait chaud dehors ?

"Or, ils étaient seuls à porter du rouge et du jaune poussin"
> Isi pourrait se faire une remarque avant non ? Du genre qu'ils ont l'air endimanchés, qu'ils en font trop ?

"avant que le Mètre n'est rendu le sien"
> n'ait

Comment Isi voit-il si bien le cortège ? Il est dans des gradins ? Où est-il ? On a l'impression qu'il est loin et domine la scène.

Un peu long le paragraphe de la poinçonneuse.

La fin du chapitre pourrait être plus tendue.

Ton monde se dessine petit à petit sous nos yeux, les personnages sont bien campés et tu t'inscris dans le sillage de livres jeunesse que j'aime bien, d'ailleurs davantage dans le jeunesse que le YA (et perso je préfère les romans jeunesse que je trouve plus originaux 🙂). Hâte de découvrir où tu nous emmènes !

Au plaisir de lire la suite,
Artichaut
Posté le 22/05/2024
Hello Peridotite,

Toujours ravi de recevoir tes retours, je les trouve très pertinents. Ils me font me poser plein de questions, et c'est ce que je recherche.
Je suis content de lire que les personnages te plaisent. La caractérisation est un de mes gros points faibles (j'en ai conscience donc j'ai fait un gros travail préparatoire en amont), j'ai tendance à avoir des personnages inconstants ou creux. J'ai donc fait en sorte - j'ai essayé du moins - qu'ils aient tous une couleur propre, un passé, une évolution, et qu'on puisse s'identifier à chacun d'eux (héros comme anti-héros à un moment du récit).

Je suis ravi de lire que ça se lit facilement. Et que la plume est agréable. J'espère que les rebondissements futurs seront à la hauteur.

"on a un peu l'ambiance de Charlie et la Chocolaterie je trouve."
>
Ah, c'est drôle comme comparaison. Roald Dahl est un auteur qui m'a marqué gamin. Peut-être que ça joue indirectement.
D'ailleurs, l'hymne au prochain chapitre t'évoquera peut-être les chants dans Charlie. Ce n'est pas délibéré en tout cas ^^

"je reserrerais l'action si j'étais toi pour rester en flux tendu. Il y a vraiment le potentiel de le faire et d'obtenir un récit page turner."
>
C'est une bonne idée en effet. Il faut que je réfléchisse à tout ça. Car le background est quand même très riche, et je veux laisser le temps au lecteur de digérer les informations.

"J'insisterais sur les vêtements, l'apparence un peu beauf de sa mère, et son parler plus spécifique, comme les Dudley dans Harry Potter par exemple."
>
J'en prends note.

"Tu peux appuyer encore les sentiments d'Isi, le fait d'être laid doit lui peser, peut-être est-il content pour son frère tout de même, d'où le fait qu'il lui vole du maquillage/des crèmes ?"
>
Il vole des crèmes, parce qu'il doit se rendre utile d'une façon ou d'une autre et mettre toutes les chances dans la candidature de son frère. C'est son "job" de famille.
De mon point de vue, le fait qu'il soit perdant (parce que laid) ne lui pèse pas tant car il a grandi avec cette idée. Comme une vérité incontestable qu'on lui aurait martelé. Il s'y est fait, et il est résigné. Je pense que les états d'âme de ce genre iraient mieux à un enfant de bourgeois laid (ou au physique quelconque) dont le train de vie plus confortable laisse le temps à des pensées existentialistes de ce genre.
En outre, Isi utilise sa cagoule comme un bouclier. Il se sent protégé quand il la porte. Il ne s'aime pas lui-même, car sa mère le trouve laid ; elle, elle vit au travers du physique de ses enfants (comme une mère de mini-miss un peu). Ce qui pèse à Isi, c'est ce désamour physique plus que sa propre laideur. Il veut être aimé - au moins un peu. Et si ce n'est pas pour son physique et une victoire potentielle, ce sera en cambriolant pour lui faire plaisir. Il achète cet amour. Quoi qu'il en coûte. Même au risque de se faire pincer.
Et même si la mère ne le montre qu'à mots couverts.

Peut-être que ce n'est pas encore assez clair. Et que je devrais insister dessus. À ce stade du récit, ce n'est pas quelque chose que je cherche à cacher non plus.

"Isi craint la réaction de sa mère, car il ne se lave pas, mais au final, elle ne réagit pas."
>
Alors il y a une ellipse parce que décrire une rossée ne m'intéresse pas particulièrement (la cruauté pour la cruauté, je n'en suis pas client).
Mais en vérité, elle le punit bien. Peut-être que je devrais mentionner qu'il a mal aux fesses ou quelque chose comme ça.

"Isi craint d'être arrêté mais le garde ne réagit pas. C'est dommage de faire monter la tension pour la faire retomber tout d'un coup."
>
En vérité, c'est l'occasion pour moi de garder sur Isi, le pot de Faciès. Et de le rappeler au lecteur.
C'est un peu une sorte de macguffin métaphorique qu'il va traîner avec lui. Une sorte de second visage. Un symbole de cette société faussement vernie aussi. L'anneau de Gollum, mais sans pouvoir. ^^
Et je me garde aussi la possibilité d'en faire un outil de tentation future (l'idée de dissimuler autrement, plutôt que de s'assumer). Car au fond, l'histoire est pour moi un prétexte à l'acceptation de soi, aussi.

Mais peut-être que ça fera partie des éléments à couper à la relecture finale.

"pourquoi d'ailleurs, n'est-ce pas lui qui rêvait d'éviter la cérémonie ?"
>
Oui mais pas d'aller en prison tout de même. ^^

Je pense qu'il faut que j'insiste davantage sur les répercussions du cambriolage et le fait que la milice fait des perquisitions chez les revendeurs du marché noir pour retrouver la marchandise.
C'est un passage que j'envisageais de rajouter dans le chapitre précédent. Je pensais notamment faire en sorte que la poule grasse servie au souper avait été chipée par Isi - souhaitant se rabattre sur des petits larcins tant que la milice reste à cran.

À voir si c'est pertinent dans une optique de resserrage des évènements. Je vais cogiter.

"Je te conseille ici de décrire la réaction de la mère plutôt que ce qu'elle n'a pas fait. C'est toujours mieux les phrases positives. J'essaie en général d'éviter les négatives. La au final, on ne sait pas comment la mère a réagi."
>
Pertinent en effet. Je n'avais pas vu ça de cette façon. J'en prends note.

"Pourquoi croit-il qu'il va tomber malade en portant un habit mouillé alors qu'il fait chaud dehors ?"
>
C'était l'occasion d'une petite pensée caustique (un peu humour noir). Mais effectivement, c'est contradictoire et ça tombe peut-être à plat du coup.
En réalité c'est surtout l'inconfort de porter une tunique trempée qui l'incite à se rabattre sur le manteau.
Le point que tu soulèves me fait néanmoins penser qu'Isi pourrait se rabattre sur une tunique appartenant à son frère puisque lui porte une tenue spéciale.
Petite incohérence donc.

"Isi pourrait se faire une remarque avant non ? Du genre qu'ils ont l'air endimanchés, qu'ils en font trop ?"
>
J'avais insisté sur le fait qu'Isi trouvait la tenue de cérémonie de son frère tape-à-l’œil quand il le voit s'habiller. Tu en veux plus ?^^
J'aime le terme "endimanché" et sa résonance en tout cas, je me le note.

"Comment Isi voit-il si bien le cortège ? Il est dans des gradins ? Où est-il ? On a l'impression qu'il est loin et domine la scène."
>
Alors il n'est pas du tout dans des gradins ni même en position surélevée. La remarque est intéressante. Ce qu'il voit du cortège, c'est ce qui l'entoure (la foule tassée). Mais du coup, il faut peut-être que j'angle ma caméra à sa hauteur.

"Ton monde se dessine petit à petit sous nos yeux, les personnages sont bien campés et tu t'inscris dans le sillage de livres jeunesse que j'aime bien, d'ailleurs davantage dans le jeunesse que le YA (et perso je préfère les romans jeunesse que je trouve plus originaux). Hâte de découvrir où tu nous emmènes !"
>
Ça me fait très plaisir ça. J'avais peur que l'aspect jeunesse/YA ne te charme pas.

J'avoue être assez infichu de cataloguer ce récit en terme d'âge du lecteur. J'écris un peu avec mon âme de grand enfant, et des paillettes dans les yeux. En me disant que c'est comme une histoire de BD au fond, ça doit avoir des degrés de lecture divers pour s'apprécier à tout âge. C'est d'ailleurs pour ça que je l'ai catalogué en conte, ici. Il y a un peu du "il était une fois, un palais doré où seuls les beaux avaient le droit de séjourner".^^

Encore merci pour ce retour et ta lecture.
À bientôt.
Artichaut
Artichaut
Posté le 22/05/2024
PS : j'en profite pour détricoter le clin d’œil derrière l'autel sur la table de chevet.
Quand je logeais chez l'habitant en Birmanie, il y avait ces autels de fortune perpétuellement éclairés de guirlandes électriques. Bling bling paradoxal. La religion pouvait prendre des allures parfois de décors de fête foraine (même dans les temples), je trouvais ça fascinant.
Peridotite
Posté le 22/05/2024
J'ai tendance à avoir des personnages inconstants ou creux
> Mais non, pour l'instant du moins, c'est bien

"Roald Dahl est un auteur qui m'a marqué gamin."
> Oui moi aussi, j'aimais beaucoup Roald Dahl. Mon préféré était Matilda

"le background est quand même très riche, et je veux laisser le temps au lecteur de digérer les informations."
> Pour l'instant ça va, on n'est pas submergé. Le concept est plutôt simple (et c'est ce qu'il faut). Je pense que même un enfant (ton public cible) pourrait le lire et comprendre.

"Et si ce n'est pas pour son physique et une victoire potentielle, ce sera en cambriolant pour lui faire plaisir"
> Ça tu pourrait l'appuyer.
Pour la scène du cambriolage, quand il voit les crèmes, il pourrait être contente en imaginant la réaction de sa mère (qu'elle n'aura pas, mais le lecteur imaginera une bonne mère et sera surpris en la rencontrant) ?

"Et que je devrais insister dessus."
> Sur les émotions du gamin peut-être. Ça te permettra de le caractériser immédiatement. Le problème de le faire résigné, c'est que c'est plus difficile de faire ressortir cette émotion - du coup, l'absence d'émotions.

"Peut-être que je devrais mentionner qu'il a mal aux fesses ou quelque chose comme ça."
> Ah oui, j'ai pas du tout compris qu'il avait eu une fessée. Mais il est pas un peu agé pour ça ? Il doit être genre plus grand que sa mère !

"En vérité, c'est l'occasion pour moi de garder sur Isi, le pot de Faciès. Et de le rappeler au lecteur.
C'est un peu une sorte de macguffin"
"pas d'aller en prison tout de même"
> Je mettrais une phrase d'explication pour comprendre pourquoi c'est interdit d'avoir ce pot. Après tout, il y a une énorme usine de crème qui pollue toute la ville. On en déduit qu'elle fait tourner la cité, pas que les crèmes sont interdites quoi. Pourquoi cache-t-il ce pot ? Pourquoi la prison ? On risque de ne pas comprendre la scène (là je suis un peu perplexe)

" repéra le pantalon plié, et la redingote et le gilet suspendus au dossier de la chaise près de la porte : ils composaient la tenue louée à l'intention de Boris"
"Isi avisa les froufrous jaune-poussin cousus aux manches, au col et au bas de la basque de la redingote de Boris."
> Y a que ça comme description. En tant que lecteur, on ne se dit pas à ce stade que ce ne sont pas les tenues qu'il faut. Je me suis dit que c'était normal de porter ça pour la cérémonie. Si les tenues ne sont pas à la mode et totalement débiles, il faut en effet insister ou du moins le dire.

"Mais du coup, il faut peut-être que j'angle ma caméra à sa hauteur."
> Oui c'est ça ce que je pensais. On n'a pas l'ambiance "gamin dans la foule"

C'est amusant ces machins bling bling et modernes. Une fois, j'ai voyagé en Corée du Sud et un moine bouddhiste m'a fait une prédiction de je-ne-sais-quoi... avec son portable (il avait une app pour calculer un truc religieux, une histoire de chaud/froid), ça m'avait fait rire.
Artichaut
Posté le 22/05/2024
"Mais non, pour l'instant du moins, c'est bien"
>
Oui, parce que je sais que je dois le travailler. Alors j'insiste à mort.
J'ai eu notamment de longues discussions avec ma meilleure amie (qui a fait aussi du ciné) sur les personnages féminins. Comment leur donner de la consistance et éviter de tomber dans l'écueil de la "princesse jolie et nunuche".

"Mon préféré était Matilda"
>
Tellement bien celui-là.

"Pour l'instant ça va, on n'est pas submergé. Le concept est plutôt simple (et c'est ce qu'il faut). Je pense que même un enfant (ton public cible) pourrait le lire et comprendre."
>
Je pense que la submersion peut venir avec les chapitres suivants. J'ai beaucoup de choses à expliquer, et le but c'est de ne pas noyer. Pour l'instant, j'ai l'impression de ne pas me perdre mais c'est toujours délicat de prendre du recul sur un texte.

Et, il y a enfant et enfant. Je ne pense pas que ça s'adresse au moins de 11/12 ans non plus. Certaines scènes sont un peu effrayantes. Et je vise les 300/400 pages.

"Le problème de le faire résigné, c'est que c'est plus difficile de faire ressortir cette émotion - du coup, l'absence d'émotions."
>
La résignation est probablement une des émotions que je trouve les plus touchantes. C'est pas facile à transmettre, mais ça crée un lien fort avec le lecteur quand ça transparaît.
On a envie que le héros se réveille et se batte.

Je pense que la résignation se ressentira plus lors des Grand-messes, tu me diras le moment venu. ^^

"Ah oui, j'ai pas du tout compris qu'il avait eu une fessée. Mais il est pas un peu agé pour ça ? Il doit être genre plus grand que sa mère !"
>
Pas des fessées, des coups de balai. ^^

"Je mettrais une phrase d'explication pour comprendre pourquoi c'est interdit d'avoir ce pot. Après tout, il y a une énorme usine de crème qui pollue toute la ville. On en déduit qu'elle fait tourner la cité, pas que les crèmes sont interdites quoi. Pourquoi cache-t-il ce pot ? Pourquoi la prison ? On risque de ne pas comprendre la scène (là je suis un peu perplexe)"
>
J'ai pas dû être clair dans mon explication, car je sens une confusion. Les produits cosmétiques sont légaux mais extrêmement chers forcément. Ils ne sont donc utilisés que par les bourgeois principalement.
Ici, le seul risque qu'Isi court c'est qu'on se demande comment un enfant pouilleux comme lui se retrouve avec un produit cosmétique. De là, à faire le lien avec le cambriolage, lui peut le craindre mais ça n'est qu'une supposition.

Ce que je pensais rajouter, c'est le fait que la milice cherche à remettre la main sur le butin dérobé et donc fait des descentes chez les revendeurs du marché noir.
Le fait de savoir que la milice est sur l'affaire pourrait légitimer davantage la panique d'Isi lors de ce contrôle. Oui ce n'est qu'une partie du butin... Mais si ça suffisait pour le coffrer ?

Je sais pas si c'est plus clair ^^

" Y a que ça comme description. En tant que lecteur, on ne se dit pas à ce stade que ce ne sont pas les tenues qu'il faut. Je me suis dit que c'était normal de porter ça pour la cérémonie. Si les tenues ne sont pas à la mode et totalement débiles, il faut en effet insister ou du moins le dire."
>
J'accentuerai ça alors. ^^

"C'est amusant ces machins bling bling et modernes. Une fois, j'ai voyagé en Corée du Sud et un moine bouddhiste m'a fait une prédiction de je-ne-sais-quoi... avec son portable (il avait une app pour calculer un truc religieux, une histoire de chaud/froid), ça m'avait fait rire."
>
Oui ces paradoxes sont assez fascinants et déroutants haha
Cléooo
Posté le 10/05/2024
Coucou Artichaud ! ^^

Encore un bon chapitre. Je suis quelque peu exaspérée par le comportement de Boris, mais bon !
La fin du chapitre était vraiment haletante, avec le pot dans la poche d'Isi... Je m'attendais vraiment à ce que quelque chose arrive et j'ai ressenti son soulagement à être passé sans encombre ! Une très belle tension narrative sur ce passage.

Je te fais maintenant quelques remarques plus précises :

"elle n'avait laissé transparaître aucune effusion de joie. Isi n'avait fait que réaliser sa part, au même titre que n'importe quel membre de la famille. Il ne s'était donc attendu à aucun traitement de faveur en retour. Ni accolade, ni félicitations."
-> quelque chose me gêne dans les seconde et troisième phrases... J'ai l'impression qu'on passe des pensées de la mère d'Isi à celle d'Isi. "Isi n'avait fait que réaliser sa part" j'ai l'impression de percevoir un jugement, que sa mère porterait sur lui ici. Genre : "ça va, il a juste fait sa part du taf !" et quand tu continues sur "il ne s'était donc attendu à aucun traitement de faveur..." là j'ai l'impression de nouveau d'être dans la tête d'Isi.
C'est vraiment un ressenti subjectif, et je serai peut-être seule à l'avoir, mais je pose ça là.

"Au terme de ces Grand-messes, tu seras un adulte" -> Boris est plus âgé que lui, mais ils participent tous les deux à la même Grand-messe. Ils deviennent adultes à la sortie, peu importe leur âge ?

"Cette fois-ci cependant, Boris n'alla pas au bout de son geste pour mieux aviser la bassine d'eau. Non sans arrière-pensée." -> j'ai pas compris :( j'ai l'impression qu'il y a un truc à comprendre mais j'ai pas compris.

"Boris roula en boule la tunique gorgée d'eau, la lâcha au fond de la bassine vide et se redressa fièrement." -> je le trouve vraiment immature pour un grand-frère. Cette action m'a déplu au plus au point. Peut-être un chouilla trop. Si c'était l'inverse et qu'il était plus jeune, ça me paraitrait plus logique ! Mais là, je trouve que c'est un peu le truc "de trop" parce qu'ils partent quand même à un événement important...

"La rue principale était décorée pour la circonstance." -> Oh ? J'espérais avoir la réaction de la mère sur la tenue d'Isi ! J'ai été surprise qu'on passe directement à la suite.

Voilà, en tout cas bon chapitre et j'enchaîne avec la suite !
Artichaut
Posté le 11/05/2024
Hello Cléooo, je vois que tu as enchaîné les chapitres. C'est bon signe quand le lecteur ne lâche plus le récit ^^

Merci pour ce retour qui m'amène à me poser quelques questions judicieuses.

Je pense que je n'ai pas été assez clair sur quelques données - je pensais que la rencontre avec le garde-eau - suffirait à entrevoir les dérives du système. Mais visiblement pas assez.

Les beaux et les laids ne sont pas traités de la même façon dans ce monde. Et c'est encore plus vrai dans les classes pauvres. Aussi la mère privilégie son fils aîné et elle envoie Isi au casse-pipe faire des petits boulots à risque de malfrat.
Dans d'autres familles, les enfants laids peuvent travailler (même en étant mineur) ou pire être abandonnés à l'orphelinat. Une bouche à nourrir en moins, c'est autant d'argent économisé pour un enfant qui a ses chances.

Quand Isi pense - car c'est lui qui le pense - qu'il n'a fait que réaliser sa part. Il y a une forme de résignation. La Cité fonctionne comme ça, ce n'est pas une injustice propre à sa famille. Il accepte son sort. Il s'est fait à l'idée qu'il était laid, et à tout ce qui accompagne cette laideur.

De même, Boris ne supporte pas quand Isi est traité de la même façon que lui. C'est un grand frère immature certes, parce qu'il est né dans cette préférence démonstrative, cajolé d'une surabondance de compliments. Mais l'idée qu'Isi vaille aussi bien ne coule pas de source et l'irrite. Aussi il surnomme Lorette mémérimée et la méprise parce qu'elle les traite équitablement - pour lui c'est inconcevable. Et il gâche la bassine d'eau parce qu'il est hors de question qu'Isi puisse se laver comme lui. Il est beau, Isi est laid. Pas d'équité possible.

Tu me diras si avec ces explications, ça paraît plus évident.
De toute façon, je me rends compte que je dois préciser tout ça pour éviter que le coup de la bassine ne soit considéré que comme de l'immaturité primaire.

Pour ce qui est de ne pas voir la mère, j'avais envisagé de montrer la réaction, ça n'apportait pas grand chose car on pouvait s'imaginer sans peine ce qui va lui tomber dessus (j'ai pas mal évoqué les rossées au balai). Je l'ai coupée au montage. ^^
Peut-être que je pourrais mettre une petite phrase pour dire qu'il a les fesses endolories. À voir.

Encore merci pour ta lecture. Je vais corriger ça, tant que j'ai l'esprit ciblé sur le souci ^^

Et du coup, je te rattrape sur le commentaire suivant juste après. ;)
Artichaut
Posté le 11/05/2024
"Boris est plus âgé que lui, mais ils participent tous les deux à la même Grand-messe. Ils deviennent adultes à la sortie, peu importe leur âge ?"
>
J'oubliais. La réponse est oui. La cérémonie des Grand-messes symbolise le passage à l'âge adulte. 16 ans étant l'âge le plus jeune - puisque les candidats ont entre 16 et 18 ans.
Artichaut
Posté le 11/05/2024
Voici donc le petit passage ajouté :

Isi resta seul, penaud, face à la bassine quasi-vide, à contempler les dernières ondulations troubles de l'eau. L'attitude de son frère, bien que prévisible, l'avait scié une fois de plus. À la Nappe, les enfants beaux valaient mieux que les laids, et par conséquent ils étaient traités avec plus d'égard. Et dans les quartiers ouvriers, le constat était encore plus marqué : on les nourrissait mieux ; on les hydratait mieux ; on les éduquait mieux ; on les soignait mieux ; on les préparait mieux. Boris avait grandi dans ce mieux-là. Lui était promis à de grandes choses. Lui n'était pas qu'une bête bouche à nourrir. Lui méritait sans doute toute l'eau de la bassine. Lui, et seulement lui.
Tant pis, Isi ne se laverait pas et se présenterait ainsi aux Grand-messes.

Je trouve que ça apporte une petite touche de résignation tragique bienvenue. Du coup merci pour la remarque ^^
Cléooo
Posté le 12/05/2024
"Les beaux et les laids ne sont pas traités de la même façon dans ce monde." -> non non non je te rassure tu as été très clair là-dessus ! Mais je ne peux m'empêcher de séparer le cercle familial de la société. Je vois que grand-mère Lorette est spéciale mais pour le coup comme Isi apporte quand même quelque chose à sa famille, à grand risque en plus (risques supportés pour sa famille, pas pour la société). Peut-être que c'est sa passivité (résignation) par rapport à la situation alors qui m'étonne, parce qu'on sent qu'il ressent quand même la chose comme une injustice.

La bassine oui ce n'est pas transparent cette idée que tu me donnes. Dans le comportement de Boris, on sent plus l'immaturité que l'irritation quant au fait qu'on ait pu les traiter de manière équitable... Ce n'est que mon avis subjectif après.

"J'oubliais. La réponse est oui. La cérémonie des Grand-messes symbolise le passage à l'âge adulte. 16 ans étant l'âge le plus jeune - puisque les candidats ont entre 16 et 18 ans."
-> elle se déroule à quelle rythme, ces grand-messes ? Tous les deux ans du coup ? Trois ans ?
Je repense au discours des parents dans le chapitre suivant :
"— Deux Grand-messes qu'elle accuse le coup. La première fois c'était original, je l'admets.
(...)
Ce jour-là, elle a tout perdu. Nous, avec nos cinq enfants, nous avons encore une bonne décennie d'espoirs devant nous. C'est un peu facile de la juger.
-> j'ai un doute sur le calcul là du coup. Ils ont déjà assisté à deux grands-messes, et ont cinq enfants, et ont encore une décennie de grand-messes devant eux... Du coup je ne suis pas sûre d'arriver à définir à quelle fréquence elles ont lieu.
À moins que les enfants puissent participer à plusieurs grand-messes ? Mais ça me paraît superflu, et pas forcément logique.

Ton petit passage ajouté est très bien je pense.
Artichaut
Posté le 12/05/2024
Hello ^^

"elle se déroule à quelle rythme, ces grand-messes ? Tous les deux ans du coup ? Trois ans ?"
>
Tous les 1,618... ans (nombre d'or oblige). Soit tous les 491 jours.

"Je repense au discours des parents dans le chapitre suivant.
-> j'ai un doute sur le calcul là du coup. Ils ont déjà assisté à deux grands-messes, et ont cinq enfants, et ont encore une décennie de grand-messes devant eux..."
>
Alors ils ont encore cinq enfants à y passer. Soit, dépendamment des âges de chacun (mettons qu'ils soient très rapprochés les uns des autres), 8 ans, (un peu plus espacés), 10/12 ans.

Je ne précise pas combien ils ont d'enfants au total. Et évidemment certains d'entre-eux y sont déjà passés, puisqu'ils ont assisté à au moins deux grand-messes avant celle-ci.

À la Nappe, pour mettre toutes les chances de leur côté, les mères procréent jusqu'à la ménopause. Les familles comptent généralement jusqu'à 13 enfants en moyenne.

La famille d'Isi fait office d'exception pour deux raisons :
- la mère a été veuve très jeune.
- grand-mère Lorette a refusé de se retrouver mère au foyer pour travailler comme un homme.

C'est encore assez flou à ce stade, mais je compte insister dessus assez rapidement. En mettant Isi face aux autres vainqueurs des Grand-messes.
Mais peut-être que ça vaudrait le coup de l'expliquer plus tôt aussi. Je vais y réfléchir.

"À moins que les enfants puissent participer à plusieurs grand-messes ? Mais ça me paraît superflu, et pas forcément logique."
>
Une seule participation par personne. Ça n'aurait pas de sens sinon. ^^

Ah très bien si le petit ajout te plaît.

Merci pour tous ces petits questionnements qui me poussent à me demander si certaines infos manquent de clarté.

À bientôt
Cléooo
Posté le 12/05/2024
Okay je rebondis là-dessus et je te laisse tranquille xD
Tous les 491, une année en faisant 365 (si on est bien sur le même système de comptage), y a-t-il une raison particulière qui fait que Boris n'est pas participé avant ses dix-huit ans ? Il a dû y avoir une à deux grand-messes depuis qu'il est en âge d'y participer ?
Artichaut
Posté le 12/05/2024
Alors du coup, je suis retourné dans mes notes et mes comptes d’apothicaire. J'ai bien fait une petite erreur : c'est 591 jours et non 491 jours, mais ça fait bien 1,618 ans.

Pour le reste tout est correct.

"Boris n'est pas participé avant ses dix-huit ans ?"
>
Boris a dix-sept ans (et 4 mois pour être précis). Voilà l'explication. ^^
Lors des Grand-messes précédentes, il n'avait donc pas l'âge requis pour participer, puisqu'il avait 15 ans (et 9 mois).
Je serai curieux de savoir comment tu en es arrivé à cette déduction qu'il avait plus de 18 ?

Seuls les enfants entre 16 et 18 (et donc qui ont 16 ou 17 ans) candidatent. L'idée c'était de faire un clin d’œil au nombre d'or qui se retrouve un peu partout : 1,618 ans / entre 16 et 18 ans, etc ^^

Peut-être que c'est trop geek sur les bords. Haha
Cléooo
Posté le 12/05/2024
Très bonne question. Je crois que dans ma tête il avait deux ans de plus qu'Isi et que 16+2=18 et c'est tout xD
Mais OK, ça marche du coup !
Makara
Posté le 06/04/2024
Hello Artichaut ! Me revoilà :)
Alors, j'avais déjà lu ce chapitre mais j'ai dû oublier de commenter :/
Le frère d'Isa est tout de même assez insupportable, si ce n'était pas aussi un gamin, je le détesterai ! Je me demande tout de même s'il n'y a pas un peu de jalousie. Pourquoi saboterait-il le lavage de son frère sinon ?
Le chapitre se lit toujours très bien, tu as vraiment une plume maîtrisée. J'aime bien les remarques d'Isa au sujet de sa mère, de la cérémonie. Ton personnage est attachant. Tu fais monter le suspense avec ces grandes messes !
A bientôt :)
Artichaut
Posté le 07/04/2024
Hello Makara,
Merci de ton retour.
Évidemment la méchanceté de Boris n’est pas gratuite. Jalousie, ressentiment, mimétisme maternel, peut être un peu de tout ça. Ce sera un sujet évoqué plus loin dans le récit.

Bien content de lire que tu t’attaches à Isi. C’est sans doute le signe qu’il sort plutôt bien jusque là.

Encore merci. Et à très vite pour la suite.
Artichaut
Edouard PArle
Posté le 21/02/2024
Coucou Artichaut !
Nous voilà aux Grand-Messes, tant attendues depuis le début du roman ! La tension monte avec le chapitre. J'avoue que j'ai été surpris de voir Isi arriver si vite devant l'Arche, je pensais que tu décrirais davantage l'ambiance de cette journée spéciale. On comprend que c'est loin d'être une fête mais j'avoue que je suis un peu resté sur ma faim au vu de l'importance qu'à cette cérémonie dans ton roman. Du moins c'est ce que laissent penser les premiers chapitres.
Au vu de l'avancement de l'histoire, je vois mal comment Isi pourrait ne pas être sélectionné pendant les Grand-Messes. Tout semble mener à ce "retournement" de situation. Mais j'avoue avoir beaucoup de mal à voir comment il va pouvoir gagner, et c'est là que réside toute ma curiosité pour les prochains chapitres. Si tu ne m'avais pas dit que c'était un personnage temporaire, j'aurais peut-être pu penser que le garde-eau était peut-être impliqué dans les Grand Messes d'une manière ou d'une autre et donc en mesure d'aider Isi. Je suis donc très curieux de voir comment ça va se dénouer...
Petite remarque :
"et il se sentit frisonner de froid" -> frissonner
Un plaisir,
A bientôt !
Artichaut
Posté le 21/02/2024
Salut Edouard,

Merci pour ton retour.

Le prochain chapitre - sur le déroulement de la cérémonie à proprement parler - est plus long et plus visuel. J'ai fait ce choix de ne pas trop insister ici sur la procession et le contrôle du laissez-passer pour ne pas alourdir le récit en descriptions, et pour ne pas donner l'impression qu'Isi se retrouvait à être simplement "passif", jusqu'à son évaluation du moins. Mais peut-être faudra-t-il que je retravaille cet aspect dans ce chapitre-ci. J'ai peut-être en effet été trop concis.

Pour la sélection d'Isi, c'est effectivement assez prévisible.^^
En réalité, je ne cherche pas particulièrement à cacher ce retournement (dans le résumé il est même annoncé). Comment va-t-on en arriver là? C'est ce qui le rend intriguant au fond. Beaucoup de questions vont se poser pour les lecteurs et pour les personnages.

Je note pour la petite faute. Merci.
La suite arrivera courant de la semaine prochaine, à priori.

Encore merci pour la lecture et le retour.
À bientôt.
Edouard PArle
Posté le 21/02/2024
tu as raison, parfois c'est mieux de ne pas forcer le suspense et d'installer du mystère ailleurs.
Hâte de découvrir tout ça !
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