L'appartement

Par CelCis

Les yeux de Gaëlle mirent quelques secondes à s’habituer au passage de la blancheur à l’obscurité. Les fenêtres du lieu dans lequel elles avaient atterri avaient été soigneusement calfeutrées avec de lourds rideaux couleur bleu nuit. Une odeur de cigarettes froides imprégnait l’endroit. Le charme et la joie semblaient, eux, l’avoir déserté.

Sur ses gardes, Gaëlle analysa rapidement l’endroit pour voir s’il y avait un danger. Mais tout était calme. Elle était au milieu d’un appartement qu’elle n’eut aucune peine à reconnaître: c’était celui dans lequel son père avait emménagé après son divorce. C’était un petit appartement une chambre qui, bien aménagé, aurait pu être confortable et charmant. Mais ni le confort ni le charme ne semblaient avoir été à l’agenda de son locataire.

Elles étaient arrivées dans la salle à manger, qui constituait la principale salle à vivre du lieu. Elle y vit une table en bois jonchée de courriers, certains ouverts, d’autres encore fermés, de publicités et d’assiettes sales. Une bouteille de vin trônait, vide. Adossées au mur, des étagères bas de gamme étaient remplies de livres, de revues et de bibelots dans un désordre qui évoquait le déballage rapide des caisses. Les autres murs étaient nus. 

Elle se retourna en direction de la cuisine. Etonnement, celle-ci était impeccablement propre, même un peu trop pour paraître employée. Et terriblement vide. À part une tresse d’ail qui pendait au plafond et quelques condiments placés à côté de la cuisinière, il n’y avait pas grand-chose d’alimentaire qui pouvait indiquer la présence d’une personne. On aurait dit ce genre d’appartement-hôtels, sans âme. Il devait vraiment avoir été triste pour accepter un tel endroit, se dit-elle. Ou du moins, pour en faire un tel lieu. Il était pourtant doué pour le choix des couleurs et la beauté des objets. 

Elle se rappelait les weekends qu’elle y avait passé avec son frère. Leur père les goinfrait de cookies, de glaces, de pizzas commandées au pizzaiolo du coin qui paraissait bien connaître leur père. Le bonheur en terme de nourriture, à leur âge. Que demander de plus qu’un seau de popcorn, avachie devant la télévision quand on a neuf-dix ans? 

Gaëlle revint vers la salle à manger et se dirigea vers un coin, derrière la table, où elle avait aperçu un chevalet solitaire et quelques canevas empilés sans grande attention contre le mur. Elle tiqua de les voir si peu considérés.

Elle avait toujours connu son père un pinceau à la main. Du moins, lorsqu’ils étaient encore dans sa maison d’enfance. Il se mettait dans une salle à l’étage qui était dédiée à son art (un dressing initial transformé en atelier) et peignait pendant des heures. C’était la seule pièce enfant non grata de la maison. Laurent et elle avaient bien essayé de passer outre, mais sans grand succès. Il était doué pour fermer la porte. Le sentiment d’exclusion avait piqué Gaëlle, à chaque fois.

Dès qu’il en ouvrait la porte, l’odeur de térébenthine prenait le couloir d’assaut, bataillant ferme avec celle de la lavande qui était placée dans les commodes. Quand il ne pleuvait pas, il se mettait au jardin avec son chevalet et regardait devant lui, longuement, avant de se mettre à peindre. Il avait l’air absorbé par une vision vue de lui seul.

Bien des années plus tard, tout en coupant ses rosiers dans son jardin - « tenace, ces satanés rosiers », bougonnait-elle - sa mère lui avait expliqué que son père avait avant tout été un artiste. Lorsqu’elle l’avait connu, elle était étudiante et venait étudier au café dans lequel il travaillait. Il était jeune - vingt-sept ans, se rappela-t-elle - et même s’il avait des lunettes toujours un peu bizarres, elle le trouvait beau. Au vu de ses souvenirs et des photos, Gaëlle ne pouvait mettre que ça sur le compte des phéromones. Sa mère s’était relevée, main gantée dans le dos et un rictus sur la figure. « Foutu dos », avait-elle fait. Elle n’avait jamais réussi à lui faire changer de lunettes, rajouta-t-elle, avant de se remettre à tailler ses rosiers et de continuer son récit. 

Depuis tout jeune, il ne rêvait que de peinture. Mais ses parents, son père surtout, ne voulaient rien entendre. Ils voulaient un bon diplôme en bonne et due forme, avec un cachet sérieux et des signatures, et un métier sûr du genre contrat longue durée, ordinateur plus bureau. « Ce qui faisait vomir ton père », avait-elle rajouté avec un sourire en coin. Il leur avait donné une partie de ce qu’ils attendaient: il avait passé le jury central et était revenu chez eux leur tendre son diplôme, avant de s’en aller d’un pas léger s’inscrire à l’académie. Contre l’avis de son propre père, bien évidemment. Il travaillait comme barista pour payer son toit et sa nourriture. 

—Il était courageux, on ne peut lui enlever ca, lui avait-elle dit, son sécateur peinant face à une branche particulièrement coriace. 

Le reste du temps, il le passait à peindre ou en compagnie d’amis artistes. Sa mère avait craint d’entrer dans ce cercle. Mais pour lui, elle l’avait fait. Elle resta quelques instants pensive, avant de parler, plus pour elle-même, de combien le bouillonnement intérieur et la sensibilité de son père l’avait fait chavirer. Gaëlle avait dû grimacer pour lui faire changer de sujet. À 17 ans, on n’a pas envie d’avoir les détails sur la vie amoureuse de ses parents. 

Puis la vie s’en était mêlée, avait-elle continué. Toujours à apporter des virages quand on ne l’y attend pas. Sa mère était devenue enceinte d’elle. Elle s’était tournée vers Gaëlle et lui avait fait un large sourire. Ils étaient heureux, bien sûr, mais sa mère était encore étudiante, et il fallait gagner de quoi vivre. Surtout quand, peu de temps après, Laurent était arrivé à son tour. Sa mère avait alors terminé ses études, mais pour quatre personnes, un salaire de barista et de stagiaire ne suffisait pas. Petit à petit, son père avait dû rogner sur son temps de peinture. Il disait que cela allait, mais elle voyait que cela lui en coûtait d’abandonner ses pinceaux. Il commença en temps partiel dans un bureau dans le secteur alimentaire. 

—Le mieux qu’il avait pu trouver, et le plus proche de la maison, surtout. Mais pas du tout son style. Sa mère secoua la tête. 

Puis on lui avait donné davantage de responsabilités, et il avait accepté parce que cela permettait à sa famille de déménager de leur petit deux pièces vers une jolie maison de banlieue. Le rêve de son grand-père se réalisait, le cauchemar de son père prenait forme. Il ne peignit bientôt plus que les weekends, lorsque l’agenda des activités des enfants le permettait, parce qu’il voulait avoir du temps pour aller les conduire et les rechercher à leurs cours. Et il commença à sombrer. 

À ce moment de son récit, sa mère avait eut l’air triste. 

—J’aurais peut-être dû réagir davantage, et plus tôt. Arrêter d’être gentille et de me dire que cela lui passerait. Je l’ai secoué, mais il était trop tard. Il ne voulait plus changer. Et pourtant, j’ai essayé,  dit-elle avec tristesse. Un filet de regret traversa ses yeux. 

Gaëlle, avec la fougue de son adolescence et de ces idées qui volètent dans le ciel sans avoir encore heurté le sol de la réalité, lui avait rétorqué que son père avait eu tout pour être heureux: deux enfants, une femme qu’il aimait et qui l’aimait et une jolie maison. Que demander de plus? Sa mère l’avait couvée d’un regard tendre. 

—De l’art, avait-elle rajouté doucement. Tout cela lui avait retiré tout ce qui comptait le plus pour lui. Ce qui lui était essentiel. 

En voyant le regard choqué de Gaëlle, elle avait continué.

—Ne crois pas que nous n’étions pas importants à ses yeux. C’était le cas. Mais il y avait un grand vide en lui. Qu’il a cherché à combler à sa manière. 

Gaëlle en avait été outrée. Elle en aurait pu en taper du pied. Mais être aussi théâtrale n’était pas son truc. Elle ne comprenait pas que sa mère ait pu trouver des excuses à son père. C’était beaucoup trop facile. Il les avait abandonnés, c’était aussi simple que cela. Si elle voulait vivre dans ses rêves, tant pis ou tant mieux pour elle. Mais pour Gaëlle, il n’en était pas question. Elle voulait regarder la réalité en face, tirer ses propres conclusions et avancer. Son père les avait lâchés. Aucune justification ne pouvait excuser cela.    

Avec précaution, Gaëlle bascula les canevas pour y jeter un oeil. Il y en avait bien une vingtaine, de toutes tailles. Elle eut envie d’ouvrir les rideaux de la fenêtre adjacente et de faire rentrer la lumière et un peu de vie dans le lieu, mais elle n’osa pas. Elle n’était toujours pas sûre de ce qui se passait et préférait ne pas trop s’agiter. Elle bougea juste le coin du rideau pour qu’un faisceau de lumière éclaire l’endroit où étaient entreposées les toiles.

Elle s’accroupit et commença à les regarder une à une. Il n’y avait pas de poussière sur le dessus, témoignant du soin qui leur était apporté malgré le fait qu’ils étaient laissés à même le sol. Il lui parut y avoir deux séries distinctes de peintures. La première série était constituée de portraits. Les styles différaient de l’un à l’autre, à se demander s’ils avaient été peints par la même personne. Certains étaient peints à l’aide de grands traits colorés soulignant à grosses touches les visages. Cela lui rappella les dessins que son frère faisait, étant petit. Ce n’était peut-être pas très respectueux pour le travail de son père, se dit-elle. Et pourtant, il s’en dégageait quelque chose d’insaisissable et d’émouvant qui l’ébranlait au plus profond d’elle.

L’un d’entre eux, représentant un homme, la toucha particulièrement. La première chose que l’on remarquait était ses yeux qui rayonnaient d’une joie profonde, puis son visage, totalement hors proportion, qui ressortait sur un fond de forêt. Gaëlle fut prise d’une bouffée de bien-être. Cela fit jaillir le souvenir d’un tableau d’art naïf qu’elle avait observé il y a quelques années chez une collègue haïtienne. Elle était restée longuement à l’admirer, se laissant entraîner sur le chemin de terre battue qui avait été tracé en un coup de pinceau parmi les maisons, jusqu’au moment où les autres invités discutant haut et fort étaient venus près d’elle. Elle avait quitté le tableau à contrecoeur pour rejoindre le calme de la cuisine. Elle s’était demandé pourquoi les gens se déplaçaient en meute comme cela, à croire qu’ils avaient peur d’être seuls. Il faut dire qu’elle ne comprenait pas toujours comment s’y prendre avec les gens. Ils lui paraissaient étranges. Elle trouvait la présence des livres, ou des tableaux, plus rassurante. 

Les visages des autres peintures étaient plus réalistes. Elle les trouva moins à son goût. Si elle en croyait les dates mentionnées en bas des portraits, son père les avait peints dans sa vingtaine. Elle n’y reconnut personne, sauf sa mère, toute jeune et dont le visage respirait l’innocence. 

La deuxième série d’oeuvres rassemblait des paysages. Quelques-uns arboraient un air aussi naïf que les portraits. D’autres semblaient être des jeux de style mais elle ne les trouva pas très réussis, comme s’il avait tenté de rentrer dans des vêtements qui n’étaient pas à sa taille et qu’ils avaient craqué de tous bords. Toutefois il n’avait probablement pas eu le coeur de s’en séparer. Elle fut surprise de retrouver son jardin d’enfance, ou plutôt la manière dont il l’avait rendu. Elle lui avait trouvé un air tellement sérieux lorsqu’il le regardait, debout ou assis, avant de poser en fin de compte ses pinceaux sur sa toile. Et pourtant, le rendu était à mille lieues d’être solennel. L’effet était joyeux, presque espiègle, avec ces couleurs pleine de vie, ces arbres en fleurs et ces nuages moutonneux. Cela la fit sourire.

Elle arriva à la fin des tableaux, un peu déçue qu’il n’y en ait pas davantage. Elle vérifia les dates: la dernière peinture remontait aux huit-neuf ans de Gaëlle. N’avait-il jamais peint après cela? Elle avait du mal à le croire, vu le nombre de fois où il s’était enfermé dans son atelier. Elle jeta un oeil à la ronde au cas où certains lui auraient échappé. Mais elle ne vit rien. Soudain elle réalisa qu’elle n’avait jamais senti cette odeur de térébenthine lorsqu’elle venait le voir dans cet appartement. Elle avait beau y réfléchir, elle ne se rappelait pas l’avoir vu avec un pinceau dans les mains non plus. Par contre, elle se rappelait de son air triste lorsqu’il voyait Laurent dessiner ou peindre sur sa table. Il s’en détournait souvent. Avait-il alors totalement arrêté? Etait-ce le divorce qui avait eu cet effet-là? Gaëlle se surprit à grignoter ses ongles.  

Elle se dirigea vers sa chambre. La porte était à moitié ouverte. Elle s’y glissa. D’un premier coup d’oeil, on pouvait dire que la chambre manquait de tout: de vie, de joie et de présence. Il n’y avait même pas mouche qui vive. Il n’y trônait qu’un lit au milieu, une penderie en bois clair à sa droite et une commode à trois tiroirs à sa gauche. Le strict minimum du célibataire. Il n’y avait même pas un vêtement pour trainer à terre. Elle n’y vit aucun autre canevas. Pourquoi les avoir empilé dans un coin alors qu’une seule peinture accrochée au mur aurait pu égayer ce lieu? Elle aurait bien vu le tableau de son jardin, ou de l’homme et ses yeux brillants sur le mur à gauche, en lieu et place de ce blanc gris perle déprimant. Comment pouvait-on accepter de vivre dans une chambre d’hôpital telle que celle-ci?

Gaëlle venait de quitter la chambre et allait se diriger vers la salle de bains lorsqu’elle entendit un son. C’était une petite musique assez agaçante. Quelques notes plutôt aiguës qui se répétaient sans discontinuer et qui semblaient provenir du salon.

 Le salon était une petite annexe à droite de la porte d’entrée qui abritait tout au plus un divan bleu avachi, une table basse blanche et une vieille télévision. Lorsque Gaëlle y entra, son coeur fit un bond dans sa poitrine. Caché derrière le divan, son père était là, assis par terre, les jambes en tailleur et le dos appuyé sur le sofa, la petite fille assise à côté de lui. Après un moment d’hésitation, Gaëlle finit par avancer précautionneusement dans le salon pour l’observer de plus près. Cela faisait tant d’années qu’elle n’avait plus eu l’occasion de le voir. Habillé, du moins, se dit-elle en repensant avec embarras à la scène de la salle de bains. 

Son père avait l’air tellement jeune, avec ses cheveux en bataille, son t-shirt délavé à manches courtes et col déformé, son jeans bleu clair à trous et ses pieds nus. Il devait avoir quoi… 35-36 ans? Il avait une manette d’une console entre les mains et ne semblait pas s’être aperçu de leur présence. Les yeux rivés sur l’écran, il était tout à son jeu. Tout comme la fillette, d’ailleurs, dont la bouche béait largement. Gaëlle suivit leurs regards et vit un petit bonhomme vert qui galopait d’un coin à un autre sur l’écran de télévision.

C’était donc cela, la raison pour laquelle Zelda ne lui était pas inconnu. Elle s’étonna d’avoir oublié à quel point son père adorait jouer à la Nintendo. Il était d’ailleurs le seul dans la famille: ni elle ni son frère n’aimaient cela. Laurent préférait s’asseoir à la table à manger avec ses crayons, tandis qu’elle se posait avec un livre dans le fauteuil de coin. Son père se retrouvait souvent à tenter d’acheter leur participation au jeu avec de la glace ou une sortie cinéma pour le lendemain. Ce qui, évidemment, marchait à tous les coups. Gaëlle et Laurent finissaient invariablement par se battre à coups de cuillères pour plonger le premier dans le pot de glace chocolat banane acheté un peu plus tôt à l’épicerie du coin.

La fillette se tourna vers Gaëlle avec un sourire comme si c’était Noël avant l’heure.

—T’as vu? C’est Link! Mais j’arrive pas à jouer, dit-elle en fronçant les sourcils.

La fillette avait saisi la seconde manette qui traînait sur la table et poussait sur tous les boutons sans que cela n’ait le moindre effet sur le jeu. De ce que Gaëlle pouvait en voir, de toute façon, c’était perdu d’avance. Il n’y avait qu’un personnage à jouer, le petit bonhomme en forme de lutin.  

—C’est pas juste, y a que lui qui peut jouer, fit-elle en faisant la moue.

Le père de Gaëlle jouait comme un acharné et la manette couinait si douloureusement que Gaëlle en eut presque mal au coeur pour elle. Lorsqu’il perdait ou passait un niveau, il prenait une rasade du verre de bière posé devant lui. Gaëlle fit une grimace dégoûtée qui chassa l’intérêt pour son père qu’elle avait pu avoir précédemment en regardant les tableaux. C’était bien ça l’homme dont elle se rappelait. Il pouvait bien jouer à des jeux de gamins, il n’en avait pas moins foutu sa vie en l’air. À bien y penser, c’était peut-être cela, le problème. Son père avait été un gamin qui avait refusé de grandir et de prendre ses responsabilités. Face à la réalité, il n’avait pas réussi à réagir comme un adulte. D’où sa fuite éperdue dans l’alcool. Une vague d’amertume la traversa.

Gaëlle se détourna de lui et regarda les alentours. Sur la table blanche, à côté de la bière et au milieu des revues et d’un tas de papiers désordonnés, se dressait un petit cadre rectangulaire abritant une photographie. Gaëlle se pencha vers elle, jetant d’abord un coup d'œil à son père pour s’assurer que celui-ci ne se rendait compte de rien, puis la saisit. 

C’était la première fois qu’elle posait ses yeux sur cette image. Elle avait été insérée avec soin dans un beau cadre en bois acajou. L’atmosphère laissait penser qu’elle avait été prise au bord de la mer un jour de grand froid. Son père la portait sur ses épaules et la tenait par les jambes, tandis qu’elle entourait son cou de ses bras. Un ciel gris et bas reposait tout autour d’eux.

Elle ne devait pas avoir plus de 3-4 ans, avec son gros pull tricoté en laine blanche et son bonnet noir un rien trop grand. Elle riait aux éclats. Lui arborait un grand sourire. La tristesse du ciel n’avait aucune prise sur eux.

Interloquée, Gaëlle plissa les yeux et scruta l’image. Oui, c’était ça. Dans ses yeux de gamine, elle lisait de la joie et de la fierté. 

De la fierté ? Gaëlle s’étrangla de surprise.

Lorsque le voile de brouillard apparut aussi soudainement qu’un hoquet, les seules pensées de Gaëlle étaient pour cette photo. Elle, perchée sur les épaules de son père, rayonnante. Lui, la tenant fermement et l’empêchant de tomber. Tous deux paraissant certains que le monde ne pouvait rien contre leur bonheur. Consciente que le temps lui était compté, Gaëlle fit du mieux qu’elle pût pour fixer cette image dans sa mémoire. Et même si elle savait que c’était en vain, ses mains s’accrochèrent au cadre dans l’espoir de l’emporter de l’autre côté.

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Dzêtagon
Posté le 25/05/2023
Bonjour :)

Après un (trop) long moment, me revoici pour reprendre les aventures de Gaëlle et de sa petite compagne ^^.

Il devait vraiment avoir été triste pour accepter un tel endroit, se dit-elle. Ou du moins, pour en faire un tel lieu. Il était pourtant doué pour le choix des couleurs et la beauté des objets. 
→ En quelques paragraphes, on ressent bien l’atmosphère des lieux et, indirectement, l’humeur de leur locataire. Ça respire la tristesse, la monotonie, l’abandon… On comprendra vite pourquoi.

Elle avait toujours connu son père un pinceau à la main.
→ J’aime beaucoup cette découverte sur le père de Gaëlle. Pour le moment, on ne connaissait de lui que le ressentiment qu’éprouvait Gaëlle à son égard et son penchant pour l’alcool. Cet amour de l’art et de la peinture apporte une touche plus douce et poétique à son portrait.

Au vu de ses souvenirs et des photos, Gaëlle ne pouvait mettre que ça sur le compte des phéromones
→ ahah, j’aime beaucoup cette remarque ^^

Depuis tout jeune, il ne rêvait que de peinture. Mais ses parents, son père surtout, ne voulaient rien entendre.
→ Un père rigide, une enfance pas forcément très drôle avec cette pression… les contours du père de Gaëlle s’affinent encore.

Le reste du temps, il le passait à peindre ou en compagnie d’amis artistes. Sa mère avait craint d’entrer dans ce cercle.
→ Je comprends ce point de vue. Moi aussi je craindrais d’entrer dans ce genre de cercle, de ne pas m’y sentir à ma place, de ne pas comprendre leur monde… c’est un milieu un peu particulier, le monde de l’art ^^

Le rêve de son grand-père se réalisait, le cauchemar de son père prenait forme.
→ Je trouve cette phrase terrible.

Il ne peignit bientôt plus que les weekends, lorsque l’agenda des activités des enfants le permettait, parce qu’il voulait avoir du temps pour aller les conduire et les rechercher à leurs cours.
→ Quelle dualité… le père de Gaëlle a quand même sacrifié de son temps personnel, ce temps de peinture si précieux, pour eux. Mais ça lui en a coûté, visiblement.

son père avait eu tout pour être heureux: deux enfants, une femme qu’il aimait et qui l’aimait et une jolie maison. Que demander de plus?
→ Ah, si ça suffisait ^^’’

Son père les avait lâchés. Aucune justification ne pouvait excuser cela.
→ Je comprends un peu le point de vue de Gaëlle, forcément biaisé par les frustrations et les déceptions engendrées par le comportement de son père. Mais je comprends aussi celui de sa mère, qui connaît forcément mieux l’homme derrière le père.

Il faut dire qu’elle ne comprenait pas toujours comment s’y prendre avec les gens. Ils lui paraissaient étranges. Elle trouvait la présence des livres, ou des tableaux, plus rassurante.
→ Oh oui ahaha.

Les visages des autres peintures étaient plus réalistes. Elle les trouva moins à son goût.
→ Je trouve amusant que Gaëlle, si à cheval sur ses principes, sur les règles, se montre plus touchée par les peintures les plus extravagantes et aime moins les plus réalistes ^^. Il y a encore de l’émerveillement en elle.

Face à la réalité, il n’avait pas réussi à réagir comme un adulte. D’où sa fuite éperdue dans l’alcool. Une vague d’amertume la traversa.
→ Gaëlle le juge si durement… Une fois encore, cela peut se comprendre, elle garde son point de vue de petite fille trahie par son père. Mais les gens sont faillibles. Tout le monde n’a pas la capacité de rebondir. J’ai l’impression qu’il se cache encore des zones d’ombre dans le passé du père de Gaëlle, qui éclaireraient complètement pourquoi il agit ainsi.

Et même si elle savait que c’était en vain, ses mains s’accrochèrent au cadre dans l’espoir de l’emporter de l’autre côté.
→ Cette fin de chapitre est si belle <3. La fierté, la joie, la surprise, le désir féroce de s’accrocher à cette image surprenante et inédite… Je trouve ça très touchant. Malgré ses ressentiments, Gaëlle éprouve encore des sentiments positifs pour son père, cachés tout au fond d’elle. Un besoin de le retrouver quand tout allait bien ?

On en apprend un peu plus sur le père de Gaëlle :). Visiblement, la vie a pris un triste tour pour lui. Il a dû laisser de côté sa passion pour s’occuper de sa famille, rentrant ainsi dans le moule honni que son propre père souhaitait pour lui. Est-ce cet abandon qui l’a mené vers la dépression ? Y a-t-il autre chose ? On pourrait se dire qu’une fois divorcé, qu’une fois « plus libre » de ses contraintes familiales, il aurait pu en profiter pour se remettre à peindre. Mais visiblement, ce n’est pas le cas. Est-ce « l’échec » de sa vie de famille qui l’a rendu ainsi ? Culpabilisait-il d’avoir laissé de côté sa famille, au point de gâcher sa passion à son tour ? Le mystère demeure. Les personnages se complexifient. J’ai hâte d’en savoir plus sur eux, même si j’ai le net sentiment qu’il y aura des moments très tristes, peut-être des réalisations, des émotions vives, des découvertes…

Quelques petites coquilles ^^ :

Etonnement, celle-ci était impeccablement propre, même un peu trop pour paraître employée.
→ Etonnamment

—Il était courageux, on ne peut lui enlever ca, lui avait-elle dit, son sécateur peinant face à une branche particulièrement coriace.
→ ça

Gaëlle, avec la fougue de son adolescence et de ces idées qui volètent dans le ciel sans avoir encore heurté le sol de la réalité
→ volettent

Cela lui rappella les dessins que son frère faisait, étant petit.
→ rapella

Il n’y avait même pas un vêtement pour trainer à terre.
→ traîner

Pourquoi les avoir empilé dans un coin alors qu’une seule peinture accrochée au mur aurait pu égayer ce lieu?
→ empilés

Il avait une manette d’une console entre les mains et ne semblait pas s’être aperçu de leur présence.
→ « Il avait la manette d’une console » ou « Il avait une manette de console » sonneraient mieux je pense ^^

C’était donc cela, la raison pour laquelle Zelda ne lui était pas inconnu.
→ Ah, tu parles de la princesse ou du jeu ? Si c’est la princesse, inconnuE ^^

A très bientôt :)
CelCis
Posté le 26/05/2023
Coucou Dzêtagon,

Je suis heureuse de voir que l'image du père s'affine à tes yeux aussi. Alors qu'il était plein de potentiel, il me paraît s'effacer au fil du temps, comme une vieille photo... Il se laisse emporter par le courant, quasiment. Alors que Gaelle, pas question qu'elle fasse cela! Au contraire. Mais comme tu dis, en même temps, ces voyages et cette photo réveillent quelque chose en elle. Des souvenirs oubliés, de la tendresse, de la fierté, même...

Bien vu pour toutes les remarques! J'ai reçu ma première bêta lecture de PA , je vais pouvoir m'y remettre bientôt, youhouuuu!

Merci pour ta constance, ça me touche beaucoup <3
À tout bientôt!
Dzêtagon
Posté le 27/05/2023
Aaah, félicitations pour ta première bêta lecture :D c'est toujours un moment important.
Je compte bien finir ton récit, peu importe le temps que ça me prendra ;)
A très bientôt ^^/
CelCis
Posté le 27/05/2023
ohh merci! <3
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