La famille était venue passer quelques jours dans la capitale d’un pays étranger. Depuis leur arrivée, Hyacinthe et ses parents avaient visité des musées, des édifices religieux, des villas extraordinaires. Ils avaient parcouru de nombreuses rues, avenues et aussi des boulevards. Ils avaient traversé des parcs et des jardins, longé des quais, franchi des ponts, admiré des bassins, des cascades, des statues, des arbres exotiques, des animaux sauvages en liberté. Ils marchaient du matin au soir, n’étaient jamais fatigués et s’émerveillaient de toutes les richesses qu’ils voyaient.
Hyacinthe était une adolescente réservée et craintive. Il fallait éviter qu’elle sombre dans la mélancolie. Son père et sa mère ne manquaient jamais une occasion de lui faire plaisir. Ils cherchaient sans cesse de nouvelles excursions pour stimuler leur fille unique. Explorer les villes et les pays lointains nourrissait son imagination et développait son intérêt en toutes choses. Comme elle était trop jeune pour se déplacer seule, ses parents l’accompagnaient à chaque voyage. Ils jouissaient autant qu’elle des découvertes qu’ils faisaient lors de leurs périples. Ils l’associaient au choix des destinations et à la préparation de leurs escapades. Elle élaborait avec enthousiasme la liste des activités à entreprendre une fois sur place. Après l’euphorie de l’anticipation, Hyacinthe adorait les moments privilégiés où les beautés et les curiosités d’une cité se révélaient à elle. Les journées se déroulaient harmonieusement. Elle se sentait en parfaite sécurité avec ses parents.
Cette fois, ils avaient réservé une chambre dans un modeste petit hôtel de la capitale, dont la façade donnait sur le port. La fenêtre s’ouvrait sur la mer. C’était un ravissement. Il y avait un balcon avec une rambarde en fer forgé ouvragé. Des fleurs en pot retombaient sur les volutes de métal et un guéridon entouré de deux chaises garnissait la petite terrasse. Les parents aimaient y passer un moment le soir avant d’aller se coucher, pendant que Hyacinthe lisait dans son lit. Ils se remémoraient leur journée et commentaient leurs souvenirs. Ils évoquaient les monuments qu’ils avaient vus ou même visité, les architectures incroyables, les œuvres qui avaient enchanté leurs yeux, les plats qu’ils avaient mangés. Ils aimaient goûter aux spécialités locales dans de petits restaurants sans prétention. Manger dehors sur un trottoir aménagé ou dans un jardin était un délice dont ils ne se privaient pas.
Le dernier après-midi de leur voyage, alors qu’ils avaient déjà énormément marché, ils décidèrent de prendre un bus pour retourner à l’hôtel. Ils s’étaient beaucoup éloignés du port pour effectuer leurs visites et n’avaient pas le courage de faire tout le chemin en sens inverse. Après plusieurs jours de promenade, la fatigue se faisait ressentir. Ils avaient déjà pris un tramway pour rentrer la veille. Ils ne détestaient pas emprunter les moyens de transports. Circuler dans les rues animées à bord d’un omnibus était une manière agréable et reposante de visiter la ville. Ils étudièrent succinctement la carte des réseaux urbains et identifièrent un bus qui les rapprocherait de leur destination.
Ils gagnèrent la gare routière qui se trouvait tout près et cherchèrent l’arrêt de la ligne qui les intéressait. Emportés par leur conversation, ils se trompèrent en montant dans le véhicule. Ce n’était pas le bon numéro. Comme ils ne connaissaient pas très bien les lieux, ils ne s’en rendirent pas compte. Le bus s’ébranla lourdement. Il roula dans des rues commerçantes encombrées. Rien ne différenciait ces artères de celles d’autres quartiers. À un certain moment, tous trois crurent reconnaître l’arrêt où ils avaient projeté de descendre. Ils quittèrent le bus, persuadés qu’ils étaient presque arrivés.
Ils se mirent à marcher, cherchant un repère qui les guiderait vers leur hôtel. Ils déambulaient dans les rues, attentifs aux détails extérieurs. Mais malgré leur bonne volonté, rien ne leur rappelait les environs du port. Le quartier autour d’eux était animé et sympathique. Ils étaient un peu perdus, mais pas inquiets. Ils ne se découragèrent pas.
Ils passèrent devant les grilles ouvertes d’un parc et pénétrèrent dans l’enceinte. Les pelouses étaient bien vertes, parsemées de massifs de fleurs colorées. Des rangées d’arbres et de buissons délimitaient les parterres. Le terrain était légèrement en pente et le chemin menait à une sorte de château. De loin, ils n’apercevaient que les toits et les multiples cheminées qui surplombaient la ramure. Ils parcoururent les allées jusqu’à l’édifice. La façade couleur crème comportait une multitude de hautes fenêtres élégantes et un porche avec des colonnades. Arrivées devant le somptueux bâtiment, Hyacinthe et sa mère se sentirent rassurées. Elles avaient la conviction d’être déjà passées par là. Ils pensèrent tous les trois se trouver désormais près de l'hôtel. Ils continuèrent à traverser le parc et avancèrent en direction d’un portail situé en contrebas, du côté opposé à celui par lequel ils étaient entrés. Ils ressortirent confiants du jardin. Ils seraient bientôt arrivés à destination. Cependant, rien autour d’eux ne ressemblait au quartier où ils logeaient.
Ils se trouvaient au milieu de ruelles bordées de boutiques et de grands magasins. Une foule dense circulait dans les deux sens. Ils s’avancèrent sans trop savoir quelle direction prendre. Ils passèrent devant une échoppe où une jeune-fille vendait des bracelets en coton sur lesquels un message était brodé. Les colifichets étaient présentés en vrac dans une ombrelle retournée. Il y en avait de toutes les couleurs et l’ensemble était ravissant. Juste à côté, une femme proposait toutes sortes de babioles, ainsi que des billets pour une représentation dans un petit théâtre situé à deux pas.
Hyacinthe ne pouvait détacher ses yeux des bracelets. Elle regarda ses parents d’un air suppliant. Sans même discuter, ils lui en offrirent un pour lui faire plaisir. Cela ne coûtait presque rien. Fébrile, Hyacinthe plongea la main dans l’amoncellement des rubans colorés. Elle choisit un bijou en tissu rose. Des fleurs et un cœur étaient brodés sur le dessus en fils de couleurs, et un message était écrit dans la langue du pays. La vendeuse le traduisit. Il disait : ‘Le bonheur t’attend’. C’était un peu étrange, mais ils n’y prêtèrent pas attention. Hyacinthe noua le ruban à son poignet et s’en fut avec ses parents. Malgré la fatigue de la journée, elle se sentait légère et euphorique.
Ils décidèrent finalement d'aller voir le spectacle et achetèrent trois billets pour le théâtre. Épuisés par la longue promenade, les parents étaient contents de faire une pause. La perspective de s’asseoir pendant un moment pour se reposer leur plaisait.
La bâtisse se dressait tout près. Ils y pénétrèrent. L’intérieur était minuscule et sombre. L’éclairage, réduit à une simple veilleuse, vacillait. Ils trouvèrent trois places contiguës et s’assirent. Les fauteuils étaient en velours rouge foncé et usés, mais confortables. Ils s’enfoncèrent dans les sièges mous avec délectation. La pièce commença presque aussitôt. C’était une comédie, une sorte de farce. Ils ne comprenaient pas les paroles puisque les acteurs jouaient dans la langue du pays. Mais cela n’avait pas d’importance car le spectacle était visuel. Le décor était minimaliste.
Sur scène, les comédiens vêtus de costumes extravagants et colorés se contorsionnaient, s’apostrophaient, chantaient des mélodies accompagnés par une flûte et un tambourin, éclataient de rire ou pleuraient à chaudes larmes. Leurs gestes et leurs mimiques étaient si éloquents qu’il n’y avait pas besoin de saisir les mots de leurs dialogues. Leurs jeux de rôles étaient très amusants. Ils se disputaient avec exagération, se rabibochaient avec force accolades, se poussaient en criant, faisaient des galipettes et se roulaient par terre. La famille riait aux larmes en regardant leurs espiègleries.
Subitement, un nouveau personnage surgit au milieu de la troupe. Sa taille dépassait celles de tous les autres comédiens. Il était habillé d’un habit noir et brillant. Ses yeux étincelaient comme des braises. Son jeu était époustouflant. D’une pichenette, il faisait danser les autres acteurs, il les obligeait à courir et à bondir comme des marionnettes sans volonté. Lui-même changeait de visage et d’expression comme un caméléon, faisait des pirouettes et des tours de passe-passe. Il était à droite, et puis à gauche, ses mains ne cessaient de virevolter. Les spectateurs le fixaient avec stupéfaction. Il accaparait tous les regards.
Hyacinthe était fascinée. Les paillettes du costume voltigeaient dans tous les sens. Elles faisaient comme une pluie d’or qui s’envolait et retombait du plafond sur le sol. Éblouie par la poudre scintillante, Hyacinthe se demandait si elle n’était pas en pleine hallucination. Le peu de raison qui lui restait sombra soudain dans le néant. Les yeux de feu la transperçaient. Il lui semblait qu’ils ne regardaient qu’elle. Elle se sentait transportée par le charme indéfinissable du comédien. Il souriait, faisait des grimaces déroutantes. Elle était totalement hypnotisée par son jeu envoûtant. Petit à petit, elle ne comprenait plus la différence entre la réalité et le rêve. Que voulait-il lui dire ? Elle était bouleversée, ne savait plus quoi penser. Son imagination prit le dessus. Devant ses yeux, la scène devint légèrement floue. Elle ne distinguait plus que la silhouette noire et les yeux étincelants. Elle se laissa emporter par cette sensation passagère. Elle dansait et tournoyait, légère comme une plume dans cette atmosphère étrange. Le temps s’écoula mais elle ne le vit pas passer.
Sans avoir compris l’histoire racontée dans la pièce, ni même avoir conscience que le spectacle était terminé, Hyacinthe vit soudain le rideau tomber sur la scène. C’était fini. La draperie se releva un instant pour le salut des comédiens et tout s’arrêta. Les lumières se rallumèrent, l’enchantement avait cessé, la magie avait disparu. La salle apparut telle qu’elle était en réalité, un endroit sordide et décati. Les murs de plâtre se délitaient, le mobilier était défoncé, la scène prête à s’effondrer, le rideau rongé par l’humidité et les souris.
Indifférents à la pauvreté du lieu et satisfait par la représentation, les parents se levèrent et tous les spectateurs sortirent du théâtre en se bousculant. Tous les trois se retrouvèrent dans la rue. Le soir tombait déjà.
– Cherchons encore un peu, dit le père. Essayons de regagner l’hôtel.
Ils tournèrent en rond. Ils se perdirent complètement. Ils marchaient dans la partie la plus ancienne de la ville. Le vieux quartier était un dédale de ruelles étroites, venelles et impasses, flanquées de maisons antiques et penchées. Il y avait des chats sur la chaussée et aux fenêtres. Après plusieurs détours infructueux pour rejoindre le port, ils parvinrent sur une petite place.
Et brusquement, Hyacinthe le vit. Il déambulait sur le trottoir d’en face, au milieu d’un groupe de jeunes gens. Il avait un nouveau visage et portait des vêtements de ville, mais elle reconnut ses yeux de braise, sa démarche souple et ses mains qui bougeaient pour s’exprimer. Il captait toute l’attention de ses amis en leur parlant. Il tourna la tête et la fixa un instant. Elle fut à nouveau envoûtée. Il s’éloigna. Il sembla à Hyacinthe qu’elle continuait à vivre le spectacle. Mais cette fois, elle était montée sur scène et jouait la pièce au milieu des comédiens. Toute à sa rêverie, elle suivait ses parents comme un automate.
La famille marcha encore et encore. Ils étaient fatigués, égarés, hagards. Le père mit fin à leur calvaire en désignant une enseigne devant eux. C’était celle d’une auberge nichée au bout d’une ruelle, à moitié plongée dans la pénombre.
– Voici un petit restaurant qui semble nous tendre les bras, dit-il avec un certain soulagement. Nous sommes exténués. Je propose que nous mangions ici et que nous prenions ensuite un taxi pour retourner à l’hôtel.
Hyacinthe et sa mère acquiescèrent sans se faire prier.
Dans l’auberge, les tables étaient recouvertes de nappes rouges à rayures. Les plats étaient typiques et délicieux. La famille se détendit enfin. À un moment, Hyacinthe leva la tête de son assiette et aperçut le comédien. Surprise de le revoir une troisième fois, elle sursauta. Cela ne pouvait pas être une coïncidence. La suivait-il ? C’était une idée absurde, elle la chassa. Il était assis de l’autre côté de la salle avec d’autres personnes. Ils dînaient eux aussi. Elle crut reconnaître quelques acteurs, mais n’était plus sûre de rien. Ils se restauraient et riaient bruyamment. Soudain, le visage de l’inconnu pivota vers elle et ses yeux foudroyants la transpercèrent comme une flèche. La sensation était douloureuse.
Pourtant, ce regard n’était pas méchant. Il était comme une caresse qui disait : ‘Je veux ton bonheur’. L’étrange échange ne dura qu’un instant. Aussitôt après, le groupe joyeux se leva et quitta le restaurant. L’inconnu ne lui adressa pas un signe de tête en sortant. Tout restait mystérieux dans leur connivence. Elle ne comprenait pas. Elle n’avait plus faim. Aucun aliment n’aurait pu franchir sa bouche ni sa gorge. Elle étouffait presque. Elle avait besoin d’air. Elle refusa de prendre un dessert.
Ses parents comprirent qu’elle était en détresse. Ils se levèrent et sortirent dans la rue. Le père entraîna sa femme et sa fille vers une place éclairée, au bout du boyau sombre où se situait l’auberge. Ils croisèrent un taxi en maraude qu’ils hélèrent. La voiture s’arrêta. Ils montèrent à l’arrière. Le chauffeur se retourna. C’était encore lui. Elle s’affola à nouveau. Les yeux inquisiteurs la dévisageaient et anéantissaient toute volonté en elle. Les mots restaient coincés dans sa gorge. Elle était incapable de parler ni même d’émettre un son. Inconscient du désarroi de sa fille, le père donna l’adresse de l’hôtel sans attendre.
Le taxi roula. La voiture traversait des rues et des quartiers à toute vitesse. Les pneus crissaient à chaque virage sur les pavés ronds. Les parents ne connaissaient pas le chemin. Ils regardaient désespérément par la vitre, cherchant à se repérer sans y parvenir. Assise entre son père et sa mère, Hyacinthe était enfoncée dans le siège, coincée par la ceinture de sécurité. Elle se sentait confuse et fixait sans le voir le profil du conducteur. Le taxi finit par s’arrêter devant l’entrée d’un hôtel. L’établissement ne ressemblait pas à celui où ils logeaient. Où pouvaient-ils se trouver ?
Alors le chauffeur se tourna à nouveau vers elle et la regarda. Il lui parla. Elle comprit distinctement ce qu’il dit.
– Je suis ton Prince Charmant. Un jour, je t’épouserai.
Épouvantée, muette de stupeur, elle se laissa entraîner dehors par sa mère tandis que son père réglait la course. Ils pénétrèrent dans l’hôtel. On leur donna la clé de leur chambre. Quand le père déverrouilla la porte et poussa le battant, Hyacinthe s’aperçut que la pièce avait complètement changé. Le sol était couvert de plusieurs tapis épais. Il y avait une toile tendue au-dessous du plafond. Elle donnait l’impression d’être sous une tente. Rattachée aux coins de la pièce, elle se creusait telle une voile en plein vent. Des coupes de fruits étaient disposées sur de petits guéridons, au milieu de foulards et de rideaux qui créaient une atmosphère ouatée. Une légère fumée s’échappait de lampes à huile posées par terre. Des volutes de parfums enveloppèrent les voyageurs. Toute la chambre était décorée d’objets colorés et brillants. Ils se couchèrent sur le sol où des nattes étaient étendues, couvertes de coussins brodés éparpillés. Ils s’endormirent.
Quand ils s’éveillèrent le lendemain, l’enchantement avait disparu. tout était redevenu normal. Il ne restait aucune trace du décor oriental de la veille. Ils se retrouvaient dans leur chambre, telle qu’ils la connaissaient. La fenêtre était grande ouverte. La chaude lumière du soleil entrait à flot dans la pièce. Le rideau se gonflait au vent comme une voile. Hyacinthe se leva. Elle sortit sur le balcon et se pencha à la rambarde pour regarder l’effervescence du port de pêcheurs. Elle admira une dernière fois les bateaux, les jetées de pierre et les phares. Depuis l’intérieur de la chambre, sa mère l’appela.
Ils préparèrent leurs valises avant de descendre prendre le petit déjeuner. Hyacinthe avait le cœur serré. La veille avait été le dernier jour, le voyage se terminait. Cette aventure n’avait-elle été qu’un rêve bizarre ? Le bracelet à son poignet la persuada du contraire. Distraitement, elle relut le message qui avait été brodé sur le tissu. Elle sursauta. Elle comprenait ce qui était écrit alors qu’elle en était incapable le jour précédent. Les mots avaient changé. Ils disaient ; ‘Ne m’oublie jamais’. Elle s’étonna. Que signifiait cette bizarrerie ?
Le père paya la note de l'hôtel. Tirant leurs valises à roulettes derrière eux, ils gagnèrent la gare ferroviaire qui était située tout près. Le train était déjà à quai. Ils montèrent à bord et trouvèrent leur compartiment. Quand Hyacinthe hissa sa valise sur le porte-bagages, elle s’aperçut qu’elle avait perdu le bracelet de coton brodé. Elle rougit de honte et se mordit les lèvres. Comment pouvait-elle avoir déjà égaré ce cadeau de ses parents ? Elle l’avait pourtant bien noué autour de son poignet. Elle se sentit triste. Elle avait abandonné un précieux souvenir derrière elle. Quel dommage ! Elle était vraiment stupide. Elle se laissa tomber sur le siège à côté de la fenêtre et resta assise, le regard fixe tourné vers les panneaux sur le quai. Ses parents s’installèrent. Ils ne s’étaient pas rendus compte du trouble de leur fille.
La sonnerie retentit. Les hauts-parleurs diffusèrent l’information du départ. Le train se mit à rouler doucement puis accéléra. Alors qu’il avait atteint une certaine vitesse, il s’engouffra soudain avec fracas dans un tunnel. Tout devint noir.
Hyacinthe poussa un cri puis éclata en sanglots. Il lui semblait que rien ne pourrait jamais la consoler. Assise près d’elle, sa mère ressentit ses soubresauts. Elle passa son bras sur l’épaule de sa fille et l’attira vers elle. Hyacinthe s’appuya contre sa mère et se laissa aller doucement. Le train sortit du tunnel et continua sa route à vive allure. La lumière du jour éclaira à nouveau le compartiment. Pendant un long moment, la mère consola la jeune fille en la berçant comme un bébé. Petit à petit, Hyacinthe se calma.
– Nous reviendrons, murmura la mère à son oreille. Ce voyage était bien étrange et passionnant, n’est-ce pas ? Nous avons vu et appris beaucoup de choses.
Hyacinthe se taisait. Maintenant qu’elle avait recouvré ses esprits, elle se demandait ce que sa mère avait compris.
– Certainement tout, se dit-elle.
Elle regarda son poignet désormais nu. Tous ses remords s’envolèrent. L’image troublante du comédien disparut. Elle n’avait pas envie de revenir dans cette ville. Le souvenir de cette aventure resterait une énigme. Avait-elle rêvé toute l’histoire, ou bien les choses s’étaient-elles passées comme elle les avait vécues ?