Au terme d’une nuit agitée, Maïwenn effectua son ballet de préparatifs matinaux avec encore moins d'entrain que d'habitude. Prête à partir, elle jeta un dernier regard sur son téléphone portable, espérant un message de Brieuc. Rien. Des nouvelles de sa part lui auraient pourtant fait du bien.
— Ah te voilà enfin, tu es à la bourre ! s’exclama Ludo en la voyant entrer dans leur bureau.
— Mais c'est quoi ce mal-poli. Bonjour Ludo quand même ! lui rétorqua sa collègue.
— C'est peut-être toi qui ne donnes pas envie aux gens de te dire bonjour, tu as vu ta tête aujourd'hui ? Tu as oublié de dormir ou quoi ? la taquina-t-il.
—Tu n’as pas idée ! grommela-t-elle en allumant son ordinateur.
ↂↂↂ
À l’heure du déjeuner, le téléphone de la jeune femme vibra pour lui indiquer un message répondeur. Brieuc avait essayé de la joindre dans la matinée alors que son portable était éteint.
« Oui, c'est moi, trop de boulot en ce moment, tu ne peux pas savoir, j’espère qu’on se verra bientôt ! Bisous »
— C’est ça ouais, quand tu seras dispo, lâcha Maïwenn, blasée.
De retour chez elle en fin de journée, elle alluma sa télévision tout en se préparant un thé. Hypnotisée par l’eau bouillant dans la casserole, elle prêtait peu attention au flash infos qui venait de commencer.
— Mesdames et Messieurs, bonjour. Nous vous l’annoncions dès ce matin et le commissaire de la ville de Quimper vient de le confirmer : c’est bien le corps de Victor Godest, psychiatre, mais surtout fondateur du LaGo, le Laboratoire Godest, qui a été retrouvé ce matin dans l’Odet, rivière traversant la ville de Quimper en Bretagne, annonça l’un des deux présentateurs à l’écran.
Se sentant peu concernée par la mort de cet industriel, Maïwenn versa tranquillement l’eau chaude dans sa tasse. Elle se dirigea ensuite vers son canapé en écoutant le reporter d'une oreille distraite.
— Victor Godest était une personne secrète sur plusieurs aspects, commença l’un des deux journalistes. La rumeur le disait conseiller de nombreuses personnalités, politiques notamment, mais il s’était toujours refusé de le confirmer, préférant le terme d’ami proche. Dans les années soixante-dix, il quitte la capitale pour s’installer en Bretagne et créer le Laboratoire Godest, se spécialisant ainsi dans la recherche sur le fonctionnement du cerveau humain. Son imagination l’a conduit très tôt à imaginer une machine qui aurait, en théorie, décrypté les souvenirs et les rêves, ce qui lui a valu de nombreuses critiques et railleries. Pierre Godest, son frère cadet et actuel président du laboratoire venait pourtant d’annoncer une création majeure dans ce sens.
— Nous sommes en pleine science-fiction, non ? interrompit son Co-présentateur, un rictus aux lèvres.
— Je ne peux répondre à cela, mais en tout cas hier soir avait lieu un cocktail privé dans les locaux du LaGo afin de célébrer leur dernière avancée, reprit le commentateur.
Une photo de la victime apparut soudain à l’écran.
— C’est pas vrai ! s’exclama Maïwenn en reconnaissant l’homme blessé dans la ruelle.
— Le Visio-nerf. C’est ainsi que se nommerait le casque que ce laboratoire développe depuis presque vingt ans et qui était en quelque sorte le bébé de Victor Godest. D’après nos sources, la soirée d’hier a été l’occasion pour l’ancien président de reprendre sa place le temps d’annoncer la démonstration publique de ce casque dans les semaines à venir. Autant vous dire que la mort de celui-ci au lendemain d’une telle annonce affole la toile qui crie déjà au complot. Les premiers éléments semblent indiquer qu’il aurait été poignardé avant d’être jeté dans la rivière.
— Une enquête est en cours donc, jugea bon de préciser son Co-présentateur. Ah, on me signale que notre correspondant sur place est prêt. Gwendal, Gwendal Quemeneur, bonjour, alors que pouvez-vous nous dire de plus ?
L’image des journalistes en plateau disparue pour laisser place à un jeune homme en parka bleue marine qui tenait dans sa main un gros micro aux couleurs de la chaîne. Il porta la main à son oreille et, entendant qu’on lui donnait l’antenne, il se mit à marcher le long de la rivière, face caméra.
— Bonjour, et bien oui, en effet, c’est là, tôt ce matin que des promeneurs ont trouvé le corps de Victor Godest, confirma-t-il en montrant l’endroit en question quadrillé par la police. D’après nos informations, il présentait plusieurs coups de couteau.
Maïwenn était pétrifiée sur son canapé, elle en était sûre, c’était l’homme qu’elle avait vu dans la ruelle en bas de son immeuble. Pourtant, son corps venait d’être retrouvé à plusieurs kilomètres de là. Avait-elle tout inventé ? Devait-elle prévenir la police ?
Quelqu’un frappa à sa porte, la détournant de ses questions.
— Salut beauté, lança Brieuc lorsqu’elle ouvrit la porte. Tu as une sale gueule dis donc, qui est mort ? plaisanta-t-il en entrant sans lui laisser le temps de réagir.
— Bien sûr entre, je t’en prie, se résigna-t-elle.
— Quoi ? Tu ne veux pas me voir ? s’offusqua le jeune homme.
— C’est pas ça, c’est juste qu’il m'arrive des choses bizarres, ça me perturbe depuis quelques j…
La jeune femme ne put finir sa phrase, car Brieuc l’embrassa fougueusement. Il la plaqua contre la porte qu’elle venait de refermer et passa ses mains sous son pull. Maïwenn tourna sa tête afin d’échapper à la bouche du jeune homme qui couvrit alors son cou de baisers tout en le serrant de sa seconde main.
— Arrête, je n’ai pas la tête à ça, lui dit la jeune femme.
— Chut, ne parle plus, ne parle plus, rétorqua Brieuc en redoublant d’intensité.
— Putain, tu fais quoi là, je viens de te dire d’arrêter ! s’énerva Maïwenn.
— Et aller, madame la rabat-joie, laisse-toi faire pour une fois, insista le jeune homme.
— J’ai dit non ! hurla-t-elle en le repoussant violemment.
— Merde, c’est quoi ton problème à la fin, mais qu’est-ce que je fous avec une coincée comme toi ! explosa Brieuc.
— Mon problème, c’est que j’ai vu cet homme se faire tuer en bas de l’immeuble, avoua la jeune femme en pointant la photo de Victor Godest toujours à l’écran.
Elle s’assit sur son canapé et entre deux sanglots raconta ce qui lui était arrivée dans la ruelle. Brieuc, lui, n’avait pas pris la peine de s’asseoir et semblait en colère.
— Ils viennent de dire qu’il était mort à Quimper, à plus de cinquante kilomètres d’ici, rétorqua-t-il.
— Je sais, mais je sais aussi ce que j’ai vu, se justifia Maïwenn.
— Deux hommes en poignardant un autre puis se volatilisant par magie, c’est bien ça ? ironisa Brieuc.
— Ca a l’air fou, oui, mais…
— C’est le mot, fou. Je crois que tes problèmes au travail commencent vraiment à te faire craquer. Tu devrais aller voir un médecin, lui conseilla froidement son petit ami.
— Tu penses que je suis folle, c’est ça ?
Le jeune homme fit la moue et prit du temps avant de répondre.
— Non…Tu es surmenée, tu devrais te reposer. D’ailleurs, je vais y aller comme ça, tu pourras dormir, conclut-il en ouvrant la porte d’entrée.
— Oui, tu as probablement raison, il vaut mieux ne plus trop nous voir, acquiesça la jeune femme, dépitée par son comportement.
— À plus tard alors, je t’appelle, finit le jeune homme en claquant la porte.
Brieuc avait trois ans de plus que Maïwenn et d'après ce qu'il lui avait dit, il venait d'une famille aisée. Il avait fréquenté une prestigieuse école avant d’occuper un poste dans une banque. Blond, les cheveux coupés en brosse et rasé de près, il était toujours impeccablement vêtu. Il plaisait à la gent féminine, ce qui gonflait son ego, même au risque d'être indélicat devant Maïwenn. Ils s'étaient connus sur un site de rencontre et dès le début, elle avait senti quelque chose de malhonnête en lui, mais elle s'était laissé séduire par son aplomb et ses belles paroles. La réaction de Brieuc la mettait hors d’elle, mais en même temps, il n’avait pas tort, ce qu’elle avait vu était impossible et cela lui faisait peur. Était-elle en train de basculer dans la dépression ? Cette idée lui fit perdre le sommeil alors, à une heure du matin, elle avala un somnifère et s’endormit enfin.
Lecture de ce nouveau chapitre et quel bel empafé ce Brieuc.
Tu décris bien l'homme à l'égo surdimensionné xD
Petite remarque : de nos jours, il y a quelque chose d'assez pratique qu'on appelle la voiture, est-ce si difficile de déplacer un corps ? Ça m'étonne que ni Maïwenn, ni Brieuc ne pensent à ça.
Et quelques remarques au compte-goutte :
"Se sentant peu concernée par cette nouvelle, Maïwenn versa tranquillement l’eau chaude dans sa tasse et se dirigea vers son canapé." -> comme elle entend quand même parfaitement l'annonce, ça contredit un peu le manque d'intérêt. Mais c'est juste un avis.
"une création majeure dans ce sens." -> une création ? ou une avancée ?
"Autant vous dire que la mort de celui-ci au lendemain d’une telle annonce affole la toile qui crie déjà au complot.
Les premiers éléments semblent indiquer qu’il aurait été poignardé avant d’être jeté dans la rivière." -> je suppose que c'est une erreur de frappe, mais sinon, pourquoi ces deux phrases sont-elles séparées ?
"— C’est pas ça, c’est juste qu’il m’est arrivé un truc bizarre, ça me perturbe depuis quelques j…" -> c'est arrivé la veille, non ?
"coincée comme toi !" -> c'est peut-être ma perception personnelle, mais je trouve le mot "coincée" assez immature. Frigide ?
Voilà voilà pour mes retours ! Je reviendrai prochainement voir la suite :)
Pour moi, son manque d'intérêt au début, vient du fait qu'elle ne connait pas le nom de la victime, du coup elle suit l'info sans faire vraiment attention, jusqu'à ce qu'elle voit sa photo et le reconnaisse. je vais peut être revoir ce passage pour que ce soit plus clair.
Je n'aime pas Brieuc et c'est vrai que je l'imagine assez immature, blessant, d'où l'expression "coincée comme toi". Après, cela peut paraitre un peu trop, mais j'ai déjà croisé des Brieuc en réel (ahah)
Merci encore de tes remarques, ça m'aide à améliorer ce texte!
L'histoire progresse ! Je suis contente d'en apprendre un peu plus sur ce fameux Brieuc, même si honnêtement, j'espère que Maïwenn le quittera très, très vite.
Tu continues de me surprendre, c'est chouette. Je ne m'attendais pas à ce que cet homme soit réel... Son invention tire presque sur un élément de science-fiction, je trouve. Mais je pense que ça va rapidement devenir autre chose. Quelque chose auquel Maïwenn sera liée ! J'ai hâte <3
J'ai vu en passant un "disparue" à la place de "disparut" ("L’image des journalistes en plateau disparue pour laisser place à un jeune homme en parka bleue marine qui tenait dans sa main un gros micro aux couleurs de la chaîne.")
Voilà voilà !
Contente qu'au bout de 3 chapitres tu ne sois pas encore lassée par l'histoire de Maïwenn et surtout que tu aies pris le temps de commenter.
A bientôt