Une fin de soirée étrange

À vingt-trois heures passées, les deux amies décidèrent d'écourter la soirée et d'aller se coucher, mais en claquant la porte de son appartement, une question traversa l’esprit de Maïwenn.

Merde, ais-je bien fermé à clé ma voiture ?

Elle poussa un soupir puis décréta qu’à cette heure, il était trop tard pour qu’elle aille vérifier. Et pourtant, cette interrogation, si futile, n’arrêtait pas de la travailler. Ne pouvant s’ôter cette idée de la tête, elle passa son manteau et s’engouffra dans les escaliers la menant dehors.

— Je me déteste. Une fois en bas, je vais me rendre compte qu’elle est bien fermée, grommela-t-elle en ouvrant la porte du hall d’entrée.

Malgré la pénombre, elle atteignit sa voiture et put constater que sa portière était effectivement fermée, mais alors qu’elle s’apprêtait à regagner son immeuble, elle entendit des bruits venant de la ruelle au bout du parking. En temps normal, elle n’aurait pas osé s’approcher, mais cette fois-ci une force inexplicable la poussa à s’avancer. Un seul lampadaire vacillant éclairait l’entrée de ce petit passage que d’autres nommeraient coupe-gorge et malgré cela, elle continua sa marche.

Un râle raisonna alors, faisant battre un peu plus fort son cœur. Maïwenn déglutit et fit un pas de plus. Un nouveau râle retentit. Elle s’immobilisa cette fois, terrifiée.

— Aidez- moi s’il vous plait, aidez-moi je vous en prie, put-elle entendre.

La jeune femme prit alors son téléphone en guise de lampe torche et, tremblante, le dirigea vers la voix. Elle distingua alors la silhouette d’un homme adossé à un mur qui pressait ses mains sur son abdomen.

— J’ai besoin d’assistance, reprit-il.

Maïwenn se précipita vers lui et l’aida à se déplacer sous le lampadaire.

— J’appelle les secours, dit-elle en composant le numéro.

L’homme, âgé, était vêtu d’un costume noir et d’une chemise blanche maintenant maculée de sang. Il avait visiblement reçu au moins un coup de couteau.

— Attendez, attendez, la stoppa-t-il en lui accrochant le bras.

Il chercha quelque chose autour de son doigt en se tordant de douleur.

— Vous avez besoin de soins et vite !

— Tenez, dit-il en lui remettant une chevalière, si je ne m’en sors pas, vous devez remettre ceci à…

Il toussa bruyamment et du sang jaillit de sa bouche.

— À Mathias, Mathias Omnès, l’enquêteur, finit-il.

— Arrêtez vos conneries, ça va aller une fois que les secours seront là, rétorqua la jeune femme tout en reprenant son téléphone.

— Il a dû passer par là, hurla une voix masculine provenant de l’autre entrée de la ruelle.

En entendant cela, le blessé eut un sursaut d’adrénaline et repoussa Maïwenn.

— Ce sont mes agresseurs, allez-vous-en, vous ne pouvez plus rien pour moi.

— Non mais vous rigolez, je ne peux pas vous laisser comme ça !

— Pour votre salut ! Et n’oubliez pas, Mathias Omnès.

Non loin de là, les pas se rapprochaient et la jeune femme, dans une sorte d’état second, se retrouva derrière une voiture avant que les deux agresseurs ne soient à la hauteur du blessé.

— Et ben, le vieux a des restes. C’est qu’on a failli le perdre, lança un des hommes encagoulés.

Puis le second sortit ce que Maïwenn perçut comme un poignard argenté. Il saisit ensuite sa victime par les cheveux et lui trancha la gorge.

En voyant cela, elle eut des hauts le cœur et se retint de hurler de terreur. Tous ses membres tremblaient de manière incontrôlée. Elle ferma alors les yeux pour essayer de se reprendre, mais ne put s’empêcher de regarder à nouveau et vit alors les trois hommes disparaître instantanément, comme par magie.

Sous le choc, elle attendit quelques minutes avant de sortir de sa cachette. Elle s’approcha alors de l’endroit où s'étaient trouvés les trois hommes et fut parcourue par un frisson d’effroi. Tout était calme, comme si rien ne s’était produit. Elle fouilla dans sa poche de manteau, mais ne trouva aucune trace de la chevalière qu’elle avait pourtant placée là.

Déboussolée, elle prit son téléphone et composa le numéro de la police, mais en entendant la voix de l’opérateur, elle réalisa qu’on ne la prendrait pas au sérieux si elle expliquait ce qu’elle venait de voir. Elle raccrocha. Ce pouvait-il qu’elle ait tout inventé ?

La jeune femme rentra chez elle et décida de prendre une douche, comme pour se nettoyer de ce qu’elle ne savait plus être réel ou non. Elle laissa les jets d’eau chaude lui parcourir le corps et resta ainsi un bon moment avant que ses mains fripées ne la décident à se coucher enfin.

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Cléooo
Posté le 10/04/2024
Hello portequigrince !

Encore un chapitre plutôt court, mais agréable à lire.

Je te fais quelques remontées :

"peut-elle entendre" -> concordance des temps, tu es au passé dans ton récit.

"où se trouvaient les trois hommes" -> où s'étaient trouvés (puisqu'ils n'y sont plus)

"Ce pouvait-il qu’elle ait tout inventé ?" Se plutôt que ce, non ? -> je trouve ça curieux comme réflexion, si proche de l'acte lui-même. Je trouverais ça plus logique si ce genre de réflexion lui survenait dans les jours qui suivent.

En revanche j'aime beaucoup le coup de la chevalière, sa seule preuve de la scène, qui disparait ! Le coup de l'objet qui reste comme preuve d'une scène qu'on pourrait croire rêvée est vue et revue. Là, il y a une certaine originalité !

À bientôt :)
Portequigrince
Posté le 15/04/2024
Je me répète, mais je ne peux que redire merci pour ton temps sur ces corrections! :-)
coeurfracassé
Posté le 09/04/2024
Bonjour bonjour !
C'est très agréable de te lire. C'est très fluide, et à aucun moment, j'ai pensé à une autre tournure de phrase (à une exception mais je t'en parle après). Vraiment, bravo !
Le personnage de cet homme blessé est très étrange. Bon, déjà parce qu'il "n'existe pas" (enfin pour l'instant, mais je me doute qu'il soit bien quelque part ailleurs que dans sa tête). Ensuite, et c'est justement mon exception : sa manière de parler. Vraiment, vraiment étrange. Ça aide beaucoup à imaginer le personnage, je trouve. Quelqu'un d'important, on dirait. Cependant, j'ai trouvé ça bizarre qu'il ne soit pas paniqué et qu'il garde tout son sang froid. Par exemple, il dit "j'ai besoin d'assistance", alors que la plupart des personnes aurait dit "j'ai besoin d'aide", voire simplement "au secours". De plus, il dit, si je ne m'abuse : "pour votre salut". Ces mots m'ont intriguée... Il est quand même sur le point de mourir ! Mais si c'est sa personnalité, laisse comme ça, c'est parfait !
Mis à part ça, tu m'as appris un nouveau mot, coupe-gorge. Alors merci ;-)
Et aussi, je suis très intriguée par le fait qu'elle n'ait pas retrouvé la chevalière non plus. Tu m'as surprise avec ça, je m'attendais à ce qu'elle garde ce premier lien avec l'imaginaire . Donc c'est vraiment bien !
Bravo !
Portequigrince
Posté le 15/04/2024
Merci beaucoup pour ton commentaire détaillé!
J'avoue que ce ton étrange est recherché car, sans en dire trop pour la suite, il n'est pas comme les autres :-)
Ca m'encourage beaucoup ton commentaire, encore merci.
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