Chapitre Sixième,
Fragment de souvenir d’Húdôr, Planète 33, XIXème siècle
Le Finistère
Charlotte entra dans le Finistère avec le reste de sa classe. Toutes les jeunes filles étaient vêtues de bleu. Aucun homme n’étaiit présent dans l'assemblée. Ces derniers accédaient très rarement aux postes offerts par le Finistère. Ils préféraient souvent rester à la maison s’occuper des enfants et entreprendre des travaux physiques. Le Finistère -composé en grande majorité de femmes- encourageaient ces Mesieurs à suivre leur instinct naturel pour la bestialité et les tâches physiques. A l’inverse, on attendait des femmes qu’elles se dédient aux travaux intellectuels afin de soutenir leur famille et de participer à l’effort social.
Charlotte n’avait jamais eu aucune envie de prendre époux ou de faire de la société un endroit meilleur. Tout ce qui l’intéressait c’était de pouvoir voler. Le reste lui était égal. Enfin, ça lui était égal mais elle ne trouvait pas ce fonctionnement très juste. Ses années à l'académie avaient été exclusivement marquées par des moqueries féminines. De temps en temps elle aurait apprécié un soutien masculin. Les garçons des rues avaient toujours été ses compagnons de jeu. Parmis eux, pas de course effrénée à la réussite, seulement un profond sentiment de chaleur.
Kingsley chassa avec agacement ces souvenirs de son esprit. Elle n'était pas ici pour faire de la politique ou ressasser le passer. Aujourd'hui son avenir lui tendait les bras et elle avait bien l'intention de le saisir à bras le corps. Observant les alentours avec émerveillerment elles suivit les autres filles pour s'asseoir dans un auditoire immense. Des plantes rampaient sur les pierres grises qui formaient un cercle concentrique parfait autour d'un monolite en Cristax mort taillé par les Dieux. Au-dessus de la jeune fille, le soleil continuait sa course lente vers le crépuscule dans un ciel immaculé. Elle goûta un instant la fraîcheur bienvenue du soir.
On lui avait remis un numéro avant d’entrer et elle s’était assise à la place correspondante. Numéro 42. Toutes les jeunes filles de la classe de Madame Suzanne étaient présentes. Charlotte regarda autour d’elle afin d’évaluer les tignasses rousses et blondes qui l’entouraient. Elle en remarqua une avec un front immense et ne put s’empêcher de penser qu’elle allait forcément obtenir le Destin qu’elle voulait. Avec un front pareil, cette fille devait être supérieurement intelligente.
« Vraiment la taille d’un front Charlotte ? Très spirituel. »
Elle maugréa un tais-toi à la voix. La fille assise à sa gauche, une rouquine au visage parsemée de taches de rousseur s’adressa à elle avec suffisance :
- Quoi ?
- Je n’ai rien dit.
- Tu viens de me demander de me taire.
- Non. Mais je le fais maintenant.
La rouquine s’apprêtait à répliquer quand une grande dame aux cheveux magnifiquement argentée fit son entrée. Elle se tenait au milieu de l’auditoire circulaire. Les chuchotements excités cessèrent immédiatement. La Présidente venait de faire son entrée. Elle portait une robe translucide marquant ses formes avantageuses qui contrastait avec la rigueur de son maintien. Son regard parcura momentanément la jeunesse qui lui faisait face. Sa beauté, son élégance et son jeune âge troublaient autant qu’ils imposaient le respect. Un son enchanteur émana de ses lèvres parfaitement dessinée et psalmodia les mots sacrés :
Cristax des mers ailées,
Les nuages noirs sèment ta pensée.
La foudre nous illumine,
Elle plongera dans l’abime
Ceux qui n’entendent pas,
La voix de la foi.
Le chant, magnifiquement exécuté, plongea l’assistance dans une transe toute religieuse.
Le Finistère constituait l’organe décisionnel principal du pays. La Présidente, choisie par le Cristax, représentait l’incarnation vivante de la voix divine sur Terre. Elle était entourée de six Grands Juges qui l’accompagnaient dans les affaires gouvernementales. L’une d’entre eux, une dame épaisse aux cheveux de cuivre et aux airs supérieurs pris la parole :
- Mesdames, nous sommes ici aujourd’hui pour décider de votre Destin. Vous avez toutes travaillées avec ardeur pour arriver aujourd’hui dans ce lieu sacré. Vous êtes la crème de la crème de la société. Savourez cet instant avec dignité.
Charlotte leva les yeux au ciel lorsqu’elle entendit pour la énième fois l’importance qu’accordaient son gouvernement à la réussite scolaire au lieu de donner sa chance à la créativité. Les jeunes filles autour d’elles relevaient le menton ou se recoiffaient pendait qu’elle-même s’enfonçait encore plus dans son fauteuil.
La Juge cuivrée reprit avec le même ton cérémonieux :
- Vous n’avez pas été choisies par le Cristax mais vos efforts vous ont conduit ici. En vous ignorant, le Cristax vous a guidé sur la voie de l’altruisme. Entre toutes vous êtes bénies. Avant de procéder à la cérémonie du Destin, remercions le Cristax pour sa générosité.
Charlotte observa la Présidente Aria manipuler avec soin une pierre noire comme la nuit et pourtant brillante comme les étoiles. C’était la première fois qu’elle voyait du Cristax pur vivant à l’état solide. Ce genre de pierre se trouvait au fond des océans les plus profonds, dans les recoins les plus obscurs. Il ne s’agissait pas simplement d’une pierre, il s’agissait d’une expression matérielle de la volonté du Cristax dans son état le plus originel. Personne ne savait comment elles avaient atterri sur Terre. Certains pays niaient même leur existence. Les mains de KIngsley s’étaient jointes bien avant que la présidente ne réveille la pierre. Une douce lumière or en émana.
Charlotte se dit qu'elle avait toujours aimé et craint le Cristax. Elle était heureuse de ne pas compter parmi les élues au service de la Présidente et des Juges. Pas la moindre trace de magie dans son corps, pour ça il était temps de prier et de remercier le Cristax.
Néanmois, quelque chose clochait chez elle. Le sentiment qu’elle ressentait en cet instant était mêlé de terreur plus que de respect. Parceque parfois et bien le Cristax lui parlait. Et cette voix, loin de l’apaiser, réveillait en elle une colère insoupçonnée.
Un coup de coude dans les côtes l’extirpa de ses pensées.
- 42, c’est bien toi non ?
Charlotte regarda l'enquiquineuse avec hébétement. Quarante-deux personnes étaient passées avant elle ? Oh non. La voix féérique de la Présidente la ramena brusquement à la réalité.
- Numéro 42, Madame Charlotte Kingsley.
Charlotte sauta de son siège comme une fusée. Quelques rires discrets parvinrent à ses oreilles, elle ne douta pas qu'il s'agissait des pestes de l'académie. Pourtant ce n’était tout de même pas de sa faute si elle s’était encore perdue dans ses pensées. Madame Suzanne disait elle-même qu'il n'existait pas fôret plus dense. Elle atteignit le podium avec angoisse détestant être au centre de l’attention.
La Présidente l’accueillit avec un sourire bienveillant avant de se tourner vers ses collègues. Les six Juges étaient vêtus d’une tunique noire. Un seul homme se tenait parmi elles.
« Pour respecter la parité. »
Charlotte expira calmement afin de faire taire la voix du Cristax. La Juge rousse qui avait ouvert la cérémonie prit la parole avec ce que Charlotte décela à demi-étonnée comme de la méfiance :
-Votre cas fut complexe Madame Kingsley…
- Comment ?
L’incrédulité naquit sur le visage des Juges pendant que Charlotte réalisait avec horreur qu’elle venait de parler à un membre du gouvernement français sans avoir y être invitée. Rien de pire ne pouvait lui arriver à ce stade. Du moins c’est ce qu’elle pensait.
- Vous ne parlez pas français ?
- Si bien-sûr.
- Alors vous comprenez les mots « cas » et « complexe » Madame Kingsley.
Des rires mauvais montèrent à nouveau de l'assistance. La juge ne comptait visiblement pas épargner Charlotte. Son ton était plus sec qu'un mois d'août et son visage aussi fermé que les murs d'une prison. Charlotte n'aimait pas être prise en défaut mais pa dessus tout, elle détestait qu'on lui manque de respect. Des larmes discrète lui montèrent aux yeux et ses joues s'empourprèrent. Elle rassembla le semblant de contenance qui lui rester pour planter ses yeux d'acier dans ceux de la juge et cracher :
- Evidemment.
- Changez de ton.
« C’est toi le thon »
Comme un perroquet, Charlotte répéta :
- C’est toi le thon.
La jeune fille plaqua une main blème sur sa bouche. La Juge épaisse recula malgré elle, réaction que Charlotte ne compris pas tout de suite. Elle balbutia, tentant de conserver son autorité :
- Je vous demande pardon ? Ce n’est pas possible vous ne pouvez pas être Charlotte Kingsley.
La salle était très bien insonorisée, ce qui desservit Charlotte de façon monumentale. Toute l’assemblée s’embrasa d’indignation. On siffla. On lui jeta des insultes au visage. L’esprit de Charlotte devint blanc et la foule devint de plus en plus floue. Elle reçut une mandarine en pleine tête. La douleur alluma quelque chose de nouveau et des larmes commencèrent alors à couler sur ses joues rouges de honte. Ses poings se serrèrent afin de tenter d’apaiser la voix qui répétait sans cesse
« Ce n’est pas possible vous ne pouvez pas être Charlotte Kingsley. »
« Ce n’est pas possible vous ne pouvez pas être Charlotte Kingsley. »
« Ce n’est pas possible vous ne pouvez pas être Charlotte Kingsley. »
« PAS CHARLOTTE KINGSLEY ».
Charlotte laissa échapper un cri. Des nuages noirs arrivèrent en trombe de l’est dissimulant le soleil comme une éclipse. Des éclairs blancs jaillirent du sombre firmament. La pierre de Cristax posée au creux de la roche centrale commença à grésiller. Mue par un instinct de survie bien supérieur à toute forme de conscience, Charlotte s’empara d'elle. Comme revenue à une vie antérieure, telle un organisme vivant, des nervures de lumière dorée apparurent sur la pierre. Une déflagration d’une violence inouïe projeta alors toute l’assemblée inconsciente.
Charlotte tenait toujours la pierre veinées de lumière dans ses mains moites avec incrédulité. Son visage gonflé et lacéré de larmes se détacha du Cristax. Elle réalisa que la Présidente était toujours sur ses deux jambes. La déflagration l’avait faite reculer mais pas tomber. Ses cheveux argentés brillaient de mille feux quand elle articula presque en état de choc :
- Tu es une élue du Cristax.
Les yeux de Charlotte s'écarquillèrent d'horreur et la pierre palpita comme un oiseau en cage entre ses doigts.
- Non !
- Calme-toi mon enfant. Donne-moi la pierre, elle affole ton pouvoir.
- Quel pouvoir ? Je n’y comprends rien. Je suis venue ici pour devenir pilote. Ca n'a rien à voir avec le Cristax. Lâchez-moi !
Charlotte hurlait en tentant de s'extirper de la poigne de la présidente qui maintenait son pognet gauche avec une force surhumaine. Le simulacre d'ange oréolé de cheveux argenté posa sur la jeune fille un regard empreint de convoitise et de malice.
- Ça va aller. Je vais t’aider. Viens avec moi mon enfant.
Mais les mots sonnaient faux, comme une voix désincarnée n'ayant que le temps et l'espace comme point commun avec le visage dont elle émanait. Charlotte su qu'elle ne serait plus jamais libre, que la présidente la considérait maintenant comme un trophé rare et précieux qu'elle pourrait apposer tout en haut de son étagère dédiée. Elle se vit bloquée dans une vitrine, réduite en esclavage, à la merci des visiteurs la détaillant telle une relique sainte et poisseuse. Trop inestimable pour être détruite et trop dangeureuse pour être libre. Elle se vit telle qu'elle était désormais : une arme.
Kingsley ne ferait jamais confiance à la Présidente. Ignorant son conseil, elle serra la pierre plus fort contre son cœur et le Cristax lui murmura :
« Tu n’es pas Charlotte Kingsley ».
par contre j'ai trouvé le passage où le cristal s'éclaire, jusqu'à la fin du chapitre, un peu rapide, ça manque un peu de détails peut-être, et de ressenti. Un peu d'épaisseur serait bienvenu je pense !
Tu peux élaborer ser l'épaisseur stp ? Pour la première fois j'ai vonlontairement essayé de faire court et tu trouves que ça me dessert. Tu peux m'expliquer pourquoi ?
Tu dis que la pierre est posée sur l'écrin, mais dans la phrase d'après, charlotte l'a finalement dans les mains.
Et dans le dialogue avec aria, ça manque peut-être de narration entre, des sentiments de charlotte.
Et pour ce qui est de la déflagration, qu'a-t-elle fait exactement ? Est-ce que des murs se sont fissurés ? Est-ce que les élèves sont sonnés ? Ou juste choqués ? Tu vois l'idée ?
Ça manque de quelques phrases pour alimenter le décor. Après peut-être que les autres avis diront l'opposé exact
Je vois ce que tu veux dire. J'ai senti que j'avais "expédié" ce chapitre. Je vais le travailler à nouveau et je te tiens au courant dès que c'est fait.
Merci bcp pour ton feedback c'est super sympa et ça m'aide à améliorer l'histoire :D
A la prochaine !
Juste un petit détail sur ce passage :
"...Aucun homme n’était là. Les hommes accédaient très rarement aux postes offerts par le Finistère. Ils préféraient rester à la maison, s’occuper des enfants et entreprendre des travaux physiques. Le Finistère jugeait le plus souvent que les hommes..."
Le mot "homme" est répété beaucoup de fois, je permet de te suggérer ce remaniement pour rendre cela plus fluide (ce sera un exemple plus parlant que milles explications) :
"Aucun homme n’était là. Ils accédaient très rarement aux postes offerts par le Finistère, préférant rester à la maison, s’occuper des enfants et entreprendre des travaux physiques. Le Finistère jugeait le plus souvent que les hommes..."
Super commentaire ! Merci bcp je vais corriger tout ça ASAP.
See u soon!
Ciel
Benebooks merci encore pour tes conseils et commentaires. J'a tout revu grâce à toi :)
Ciel