Le grenier

Un peu plus tard dans la matinée, Sam frappe à la porte de la chambre de Théo. Il n'est pas surpris de le voir une fois de plus allongé sur son lit, la musique ronronnant dans ses oreilles et un crayon gribouiller sur un carnet. Il en a marre de le voir ainsi se laisser aller. Il repense à Théo toujours prêt à sortir faire du vélo ou aller sur la plage dès qu'un rayon du soleil pointait le bout de son nez. Maintenant,il ne fait plus rien, il se renferme dans sa chambre, fuit le monde, le fuit lui aussi.

« ― Théo je ne te dérange pas ? Je voudrais te montrer un truc de dingue, le grenier est énorme, y a un tas d’objets entassés dans tous les sens, c'est génial !!!

― fous moi la paix Sam, je n'ai vraiment pas envie maintenant. J'irai le voir plus tard ton grenier. Tu peux sortir s'toplait ! » Sam ressent les yeux de son frère le foudroyer derrière le voile de ses cheveux brun. Sa réponse cinglante lui fait l'effet d'un coup de fouet dans le dos.

Sam a pris l'habitude de se faire tacler de la sorte par son frère. La rage en poche, il sert les poings et ne dit rien. Il n'aime pas rentrer en conflit avec lui, avec personne en fait.

Il ravale sa fierté et remonte au grenier, son excitation revient, l'idée d'explorer le passé le rend heureux.

Les rayons du soleil s’immiscent timidement par les interstices de la charpente en bois et s'abattent sur un amoncellement d'objets anciens. La poussière voltige dans les rais de lumières. Sam en pénétrant dans cette ambiance brumeuse soutenue par l'odeur d'humidité et la chaleur suffocante s'imagine dans un film d'horreur. Ce lieu l'inspire, il est sur de trouver des réponses aux questions qu'il se pose au sujet de son grand oncle. Il se faufile au milieu de vieux meubles. Un bahut en bois massif lui rappelle celui de sa mamie dans lequel il aimait chiper les bonbons rangés dans une cocotte en porcelaine. Un rocking-chair, des malles en bois, des chaises entassées les une sur les autres avec pour la plupart des pieds manquants ,et tout un tas d'autres vieilleries s'accumulent dans le champs de vision de Sam. Il s'enfonce au milieu des buildings de boites entassées qui doivent cacher bien des trésors ou mieux des secrets. Il se sent petit dans cette cité de carton et dépassé par l'ampleur du travail de recherche à accomplir. Il veut résoudre l'énigme de la disparition de son oncle, il est persuadé de trouver des réponses dans ce grenier. Il pense à sa tante, l'imagine comme Pénélope attendant Ulysse. Seul l'espoir lui a permis de vivre aussi longtemps. « Pauvre femme », se dit-il. Il se met à sa place, comment accepter l'inimaginable quand rien n'explique une telle disparition. Soit tu t'en remets à Dieu et tu pries, soit comme sa tante tu attends, tu espères. Sam veut écrire son histoire pour rendre hommage à sa patience, il veut comprendre, lui au moins ne l'abandonnera pas. Même s'il ne l'a jamais connu et que dans sa famille elle a été en quelque sorte reniée, il a de l'empathie pour elle. Comment ne pas devenir aigrie dans de telles circonstances, quand la vie te joue un si mauvais tour ?

Absorbé par ses rêveries et ses désirs de découvrir la vérité, il n'entend pas les pas de son frère s'immiscer dans son dos :

— alors c'est ça que tu voulais me montrer ? Un grenier ?

Le sang de Sam fait demi tour dans ses veines, l'intrusion de son frère le fait sursauter comme une puce affolée. Il ignore sa remarque emplie de scepticisme pour le rembarrer de manière excessive :

— putain mais ça ne va pas de rentrer comme ça !!!

— désolé je ne savais pas qu'il y avait une manière particulière de pénétrer ton antre !! Si tu veux je m'en vais.

Théo se détourne de son frère apparemment vexé par la réaction de Sam. Gêné de s'être autant emporté, ce qui ne lui ressemble pas d'ordinaire, Sam interpelle Théo avant que ce dernier quitte les combles.

— excuse moi Théo, je ne voulais pas t'envoyer chier. Je suis content que tu sois là. Alors tu en penses quoi?c'est pas trop génial comme endroit? Je suis sur que je peux trouver des indices sur la disparition de notre oncle.

D'un regard dubitatif, Sam toise son frère pour s'assurer qu'il ne se fout pas de lui. Apparemment non quand il constate que son frère sans attendre de réponse de sa part est déjà reparti dans les méandres du grenier pour dénicher des secrets.

— en fait t'es sérieux là ?! Et pourquoi toi tu trouverais quelque chose alors que la police n'a pas pu résoudre l'enquête ? Tu te crois meileurs qu'eux ?

— pas du tout mais je trouve ça étrange qu'ils n'aient rien trouver, je suis sur qu'ils ont bâcler l'affaire. Tu vas pas me dire que cela t'intrigue pas un peu ?

Théo ne s'est pas vraiment posé la question, son frère a toujours eu plus d'imagination que lui. Enfant, Sam inventait toujours des histoires extraordinaires, des aventures trépidantes dans lesquels il donnait des rôles à jouer à Théo. Il aimait s'amuser avec lui, il incarnait des personnages crées par Sam. Ils avaient même réalisé une pièce de théâtre qu'ils avaient joué devant leurs parents.

— c'est vrai que c'est bizarre cette histoire mais de là à élucider ce mystère rien qu'en fouillant le grenier, je ne sais pas…

Théo s'interrompt, il est interpellé par une lumière aveuglante qui émane d'un objet dissimulé derrière une vieille armoire. En s'approchant pour voir de plus près ce qui crée cet étincellement, il découvre à moitié caché sous un drap un psyché sur pied. Un rayon du soleil reflète dedans ce qui produit cet éclat de lumière. Cet objet l'intrigue sans trop savoir pourquoi, il n'a rien de spécial. Son image apparaît dans le miroir, il fait face à lui même. Ce qu'il voit le choque. Depuis combien de temps ne s'est-il pas regarder dans une glace ? Longtemps apparemment, il ne se reconnaît plus. Ses cheveux ont poussé, ils sont gras. Il se trouve maigre, les traits de son visage sont saillants. Il se hait, son image le rebute mais pour autant il n'arrive pas à détourner son regard. Il est retenu par une force extérieure qui l’oblige à se regarder tel qu'il est. Bizarrement, même si son reflet lui ressemble il a l'impression de faire face à un inconnu. Au moment où résonne la voix d'Anna un étage plus bas, son reflet se met à bouger alors que lui non. Le temps de fermer les yeux et son image est redevenue la même. Il ne sait pas s'il a halluciné mais ce psyché lui renvoie le portrait d'un garçon qu'il déteste.

— ça va Théo, tu es tout pale ?

— oui oui ça va, je crois qu'il faut descendre, maman nous appelle. »

Théo ne voulait pas trahir son malaise. Il emboîte le pas de Sam qui se précipite dans l'escalier les bras encombrés d’une lourde mallette. Ce dernier est excité à l’idée d’aller exhiber une de ses trouvailles à sa mère : une vieille machine à écrire Underwood. Théo considère une dernière fois le psyché sur pied avant de descendre du grenier. Une boule pesante vient se loger dans son ventre.


 

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Elly
Posté le 09/04/2023
J'aime cet aspect "enquête" de l'histoire. Je trouve que ce genre d'intrigue permettent vraiment au lecteur d'accrocher à l'histoire. En plus de ça, Sam me fait un peu penser à l'acolyte de Sherlock Holmes, je ne sais pas trop pourquoi. En tout cas, ce psyché est bien mystérieux. J'avais de la peine pour Sam qui voyait son frère changer, mais maintenant j'en éprouve aussi pour Théo qui déteste son reflet. Je trouve ça triste mais une partie de moi espère qu'après ça il se reprendra un peu en main et sera un peu plus sympa, mais je doute que cela se produise :')
- Je crois que "sur" dans "je suis sur que..." prend un accent circonflexe sur le -u car on peut le remplacer par "certain". Il y a aussi un autre moment avec cette faute il me semble
- il y a un moment : "Alors tu en penses quoi?c'est.." Il faudrait mettre un espace entre le point d'interrogation et mettre un "c" majuscule. Il y a d'autres moments aussi ou il manque un espace entre le point d'exclamation. C'est pas vraiment une faute mais j'ai remarqué ça pendant ma lecture
minoucheKa
Posté le 15/04/2023
cool que la partie enquete te plaise. Oui Théo va se rapprocher de Sam et sans trop en dire on va comprendre un peu plus tard dans l'hisoire pourquoi son comportement a changé
merci pour les fautes je vais les corriger
a bientot
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