Le lieu de l'ailleurs (partie I)

Notes de l’auteur : Problème de formatage pour les dialogues. Je ne sais pas comment ôter les points. Désolée pour cet inconvénient. Si quelqu'un sait comment faire, merci de me dire :)

Le monastère de Saint-Adhnaght, côte ouest de l’Irlande, 999

Le premier millénaire se mourait. Plusieurs disaient que la fin des temps était proche et que la terre était grosse de cataclysmes imminents. Pour les moines de Saint-Adnaght, cela ne faisait aucune différence, car leur vie était déjà un parcours semé d'embûches permanentes.

Ils étaient les derniers survivants des temps légendaires, ultimes descendants des hommes ayant foulé la terre au temps des chevaliers de la table ronde, de cette époque ou rien n’était fixé, mais où tout pouvait être. Ils habitaient Saint-Adhnaght, l’un des premiers monastères à percher sur les rives occidentales d’Irlande. La communauté était jeune, il y avait à peine deux générations qu’elle avait été fondée par quelques moines aventureux. Nul ne savait exactement pourquoi les fondateurs avaient choisi cette terre aride pour y installer l’abbaye, car les terres environnantes n’étaient qu’un amas de pierre où rien ne poussait. L’endroit était humide, constamment balayé par un vent d’embrun où le soleil perçait rarement. Le plus souvent, les nuages étaient bas dans le ciel et les jours courts. On supposait que les premiers moines avaient vu cette misère et qu’ils avaient décidé de s’installer là malgré tout, pensant que leur pauvreté pourrait les rapprocher de Dieu. Il arrivait quelquefois aux religieux actuels de protester dans leurs cœurs contre le choix de leurs aînés, surtout depuis ces dernières années où les difficultés s’amoncelaient. Trois ans auparavant, il y avait eu une épidémie d'une maladie inconnue, puis les rares récoltes avaient été ravagées par un orage de grêle. Envers et contre tout, la communauté essayait de faire fructifier les jardins, mais ceux-ci restaient en grande partie stériles. Les quelques paysans n’avaient pas plus de succès et le monastère restait plongé dans la pauvreté et sous le joug permanent de la faim.

Ce soir-là, Sefare, le prieur de la communauté, regardait d’un œil inquiet ses ouailles souper. La plupart étaient maigres, fatigués, et tenaient leur corps ployé sur la table commune. L’humidité de la salle perçait leurs vêtements grossiers et le feu qui flambait dans l’âtre ne suffisait pas à réchauffer leurs membres transis. Le mois de mars qui se terminait ne réussissait pas à chasser un hiver persistant. Tous tremblaient.

Le seul à se distinguer par son air plus vif que le reste était le plus jeune d’entre eux, Niall. On le remarquait rapidement à son nez aquilin, ses cheveux noirs légèrement bouclés, ses lèvres charnues – comme celles d’une femme – et ses yeux verts perçants qu’il tenait la plupart du temps baissés, comme l’exigeait la règle de la communauté. Il était pâle, presque fantomatique, spectre échappé de quelque tombe. Ce soir-là, il suivait plus attentivement que d’habitude la voix lente et monocorde d’Aeodh qui poursuivait la lecture sainte du soir.

Il racontait la quête de saint Brendan, un moine irlandais des temps anciens, parti sur un frêle esquif vers l’ouest, vers l’inconnu. Il cherchait l’île de la Promission des Saints, une terre paradisiaque réservée par le Seigneur à ses serviteurs. Le saint avait fait le vœu d’errer, avec ses disciples, jusqu’à ce qu’il la trouve, croisant pendant son périple de sept ans maintes créatures merveilleuses. Il avait visité à de nombreuses îles, séjourné sur le dos d’une baleine et avait rencontré Judas en train de subir son châtiment éternel sur un îlot rocheux où le saint l’avait protégé pour une nuit de la furie divine. Aeodh arrivait au chapitre où la patience de Brendan se trouvait enfin récompensée, après avoir vogué tout ce temps.

       « L’homme de Dieu avait erré sur la mer, et toujours il ne cessait d’encourager ses frères dans l’espérance, car le terme des sept ans approchait. Soudain, il vit une créature     marine s’approcher de leur embarcation. Jasconius était un poisson si grand qu’il  semblait être une île. Il vint auprès du Saint et l’accompagna jusqu’à l’île aux Oiseaux. Là-bas, ils glorifièrent le Seigneur jusqu’à ce que la Pentecôte fut passée. L’intendant de l’île vint à eux et leur dit : "Je serai votre compagnon de voyage et par moi, vous  trouverez la Terre de la Promission des Saints."

       Après quarante jours de navigation, ils entrèrent dans une grande obscurité. Les frères en eurent grande frayeur, mais l’homme de Dieu se moqua d’eux en leur disant que Dieu   était avec eux, et écarterait le danger si telle était sa volonté. Brendan se tourna ensuite vers leur guide et lui demanda s’il savait ce que la noirceur signifiait. Celui-ci lui répondit qu’elle entourait l’île qu’ils recherchaient depuis si longtemps. Puis, après  qu’une heure de notre temps se fut écoulée, une lumière immense éblouit leurs yeux.  C’était la lumière du Seigneur qui éclairait la terre réservée aux Saints.

       Ils accostèrent sur le rivage et leurs pieds ne furent pas mouillés par l’eau de mer. C’était une île merveilleuse. Là nulle boisson ni nourriture n’était nécessaire pour          sustenter le corps. Elle était pourtant couverte d’arbres lourds, les branches chargées de pommes dorées, comme au temps de l’automne. Les ruisseaux coulaient, plein d’une eau pure et limpide et la nuit ne tombait jamais en ce lieu.

       Pendant quarante jours, ils parcoururent la terre en tout sens. Ils parvinrent finalement devant un grand fleuve calme. Le père se tourna alors vers ses frères et leur dit : « Nous ne pouvons traverser cette eau. La grandeur de cette terre nous restera donc cachée ». Alors ils formulèrent en leur cœur une prière afin de savoir de quelle grandeur était cette terre. À peine eurent-ils fini qu’un jeune homme apparut à leurs côtés et les embrassa tous, tout en récitant des psaumes du Seigneur. Il était blond et vêtu de vêtement d’une   blancheur immaculée. Il dit à Saint Brendan : « Voici la terre qui tu as cherchée depuis  si longtemps. Cependant, ta destinée n’est pas d’y demeurer pour y rester, mais tu dois plutôt retourner vers la terre de tes pères afin que tes os puissent y reposer. Tu as vu les richesses immenses que Dieu a mises sur la mer occidentale, et elles y demeurent de par sa volonté. Ainsi, retourne vers ta terre de naissance et emporte des fruits et des pierres précieuses dont recèle cette île. Quand plusieurs solstices auront passé, cette terre sera révélée à ceux qui viendront après toi. Aucune ombre de mort n’y a demeuré, car le Christ en est la lumière. » Après ces paroles, le jeune homme disparut. Alors ils se jetèrent face contre terre et remercièrent Dieu de ses miracles innombrables. Ils prirent des fruits et des pierres précieuses et reçurent la bénédiction de l’intendant. Puis, ils  retournèrent sur leur embarcation et voguèrent au milieu de l’obscurité.

Aeodh ferma le livre d'un coup sec, puis il le tint soigneusement dans ses mains. Ce geste fit sursauter tous les frères, car ils étaient perdus dans la contemplation intérieure de la grande épopée de saint Brendan. Il y eut un murmure de protestation, vite éteint par un rapide coup d’œil de Sefare. Aeodh alla ranger l'oeuvre avec précaution : il lui avait fallu près de deux ans pour la retranscrire à la main au complet. La Bible et ce livre étaient les seules richesses du monastère et on en prenait le plus grand soin. Les frères se levèrent ensuite et suivirent le prieur en silence jusqu’à la chapelle ou la noirceur régnait. C’était l’heure de l’office de complies. Tous connaissaient par cœur les prières à effectuer et la lumière n’était donc pas nécessaire.

Niall se dirigea en queue de cortège. Il y avait déjà dix ans que ses parents étaient venus le porter au monastère afin que les moines le recueillent. Il ne conservait que des souvenirs diffus d’avant son intégration dans la communauté. Il savait, car on le lui avait dit, qu’il était le dernier d’une famille nombreuse et que le seul héritage que celle-ci se transmettait de génération en génération était une faim tenaillante. On lui avait également affirmé qu’il venait du nord-ouest de l’Irlande, d’un pays où le roc côtoie l’herbe et où le vent souffle toujours. Les cultures s’y perdaient une année sur deux et les famines y étaient nombreuses. Certains même tenaient pour un châtiment divin le fait d’y être né. C’était tout ce qu’on avait voulu lui dire. Il ne se rappelait pas du nom de ses parents, ni de leur apparence. S’il fouillait bien dans sa mémoire, il y entrevoyait vaguement la force brute de son père, de celle qui soulevait des montagnes. Il ne gardait aucun souvenir de sa mère. Peut-être était-elle morte en couches en l’ayant. Peut-être était-elle tombée malade. Pourtant, ce n’était pas réellement important : on ne pouvait pas trop s’attacher aux gens ici-bas tellement ils mouraient rapidement. Tout ce qu’on pouvait espérer était de revoir ceux qu’on avait aimé au paradis, là où sont les âmes éternelles.

Comme il s’agenouillait dans le noir de concert avec ses frères, il chassa toutes ces pensées de son esprit. Ils prièrent sans discontinuer pendant une demi-heure. Pendant tout ce temps, Niall ne pensa pas à sa famille oubliée, mais à saint Brendan et à son aventure aux confins du monde. Dans la tête du jeune homme, la promesse de Dieu de révéler l’île de la Promission des Saints aux successeurs du saint aventurier s’inscrivait en lettres de feu. Peut-être était-il sans le savoir cet héritier tant attendu. Il n’osait le formuler distinctement au fond de son esprit, de peur d’être taxé d'orgueil, mais au fond de son cœur sourdait l’espérance qu’un jour, il prendrait la mer là où de mémoire d’homme nul n’avait plus été depuis longtemps.

***

On murmurait parfois au coin de l'âtre qu'aux premiers temps de la chrétienté irlandaise, des moines étaient partis faire la peregrinatio. Ils s’étaient offerts aux flots et s'en étaient allés là où la main de Dieu devait les conduire. On évitait soigneusement de parler d’eux et leurs souvenirs ne vivaient plus que dans quelques vieilles têtes chenues qui abordaient rarement le sujet. Lorsque celles-ci iraient se coucher pour mourir, l’existence des moines navigateurs irait se mêler à la brume des souvenirs.

Ces derniers mois, l’aîné de la congrégation avait pris le plus jeune sous son aile. Ils se comprenaient à demi-mot et partageaient la même spiritualité intense et le même sens de l’absolu pour tout ce qui touchait l’intemporel

  •  Il y a longtemps qu’on ne m’a plus rien demandé sur la peregrinatio, affirma le vieil Elias à Niall lorsque ce dernier l'interrogea sur la question. Elle a été bannie voici longtemps par les anciens prieurs. Elle est pleine de danger, car elle expose l’âme de l'homme à un péril trop grand pour son cœur. Quant à moi, je pense que l’épopée de saint Brendan ne saurait s’inspirer du démon. En fait, je ne sais même guère si ce qu’on a raconté des moines navigateurs est vrai. Ont-ils seulement existé ?

Il lui raconta comment il se rappelait qu’au temps de sa jeunesse, il avait entendu de vagues rumeurs à ce sujet et en avait alors parlé aux anciens de l'époque. Ils lui avaient dit que leurs prédécesseurs avaient été des explorateurs s'étant rendus jusqu’aux confins du monde pour servir Dieu dans l'isolement et la paix. Ils s’étaient installés un peu partout, dans les îles britanniques et même jusque dans l’archipel des Féroés, situé loin dans le nord. Ils avaient fondé un monastère à Iona en Écosse où ils s'étaient efforcés de convertir les Pictes et les Scots. Ils étaient allés de plus en plus loin, jusqu’à une île perdue dans le septentrion, nommée Thule, où plusieurs ermites s’étaient exilés durant plusieurs années. Là-bas, disait-on, le jour et la nuit ne mouraient pas, mais se fondaient indistinctement l'un dans l'autre. Les étoiles brillaient d'une lumière neuve et des feux dans le ciel traversaient la voûte en longues trainées colorées. La terre était couverte d'herbe verte et la mer jetait des reflets bleuâtres sur les roches de la grève.

— Mais alors, ils y sont encore? demanda Niall qui écoutait l'ancien avec une curiosité dévorante.

—  La rumeur veut que les moines aient quitté cette île brusquement en laissant derrière eux tous leurs précieux livres et autres objets de cultes. On dit que les quelques rares à en être revenus ne voulaient pas parler de leur expérience passée. Leur bouche demeura obstinément scellée là-dessus et, quand ils moururent, le souvenir de leur expérience se perdit dans les mémoires. Il ne reste plus aujourd'hui de tout cela qu’une aura de danger trouble qui a justifié l'interdiction faite aux autres de retourner à l'occident, là où la mer gèle.

En entendant cela, le cœur de Niall s’enflamma. Pas un instant il ne douta de l’existence des anciens partis au gré des vagues, vers la destinée que Dieu leur avait faite. Si certains étaient revenus comme cela, peut-être n’avaient-ils pas été jugés dignes par Dieu de venir jusqu’à l’endroit que saint Brendan avait découvert. Peut-être avaient-il rencontré le diable ou quelqu'autre créature diabolique.

  •  Et comment partaient-ils? Utilisaient-ils le même type de navire que les pêcheurs le long de la côte?
  •  Oui, ils utilisaient le curragh, répondit Elias avec réticence. Ils partaient à cinq, quatre hommes tenant les rames et le cinquième maniant le gouvernail. Ils avaient une voile carrée, permettant au vent de les propulser lorsqu’il leur était favorable. Je ne sais pas comment ils faisaient pour partir sur les eaux de la mer. Elles sont profondes et dangereuses. Elles abritent la limite du monde et il serait impie de vouloir naviguer plus loin que les terres que Dieu a faites
  • Mais saint Brendan…
  • Saint Brednan était élu de Dieu. Il est parti béni de par sa main et sous sa protection. Il a vu des merveilles que nous ne verrons que lorsque la fin des temps arrivera. Ne te mets pas dans le tête de faire comme lui! Tu ne sais pas à quels périls tu t'expose.

Niall écoutait à peine. Il fixa la mer avec une nouvelle intensité et éprouva de toutes ses fibres l’appel de l’onde. Il sentit la présence divine l’envelopper, son âme se fondre dans la substance de l’univers et fuir la matérialité d’ici-bas. Ce que lui disait le vieil Elias confirmait les racontars des paysans sur le sujet : qu’il y avait une île à l’ouest, une île forgée par la glace et sculptée par un vent incessant. Était-ce l’île de la Promission des Saints de saint Brendan? Était-ce une autre île qui reposait là de par la grâce de Dieu? Si ce l’était, serait-ce là le lieu où reposeraient les Justes lorsque la fin du monde terrestre arriverait, le lieu où tous les hommes auraient pu séjourner si Adam et Ève n’avaient pas commis la faute première? Il l’espérait. Et surtout, se pourrait-il qu'il soit parmi les élus destinés à visiter ces rivages bienheureux?

Les traits de Niall se figer au fur et à mesure qu’il contemplait la mer de l'ouest. Son corps se tendit vers l'eau.

— Le désir de l’ouest vient de t'embraser, mon jeune ami, déclara Elias en secouant douloureusement la tête.  Fais attention, c’est un feu dévastateur qui ne se consume jamais. 

Les cloches du monastère se mirent à sonner à la volée, appelant les frères à l’office de vêpres. Il fallut plusieurs appels du vieil homme pour que Niall ne daigne revenir à la réalité. Le vieillard l’entraîna alors sur le sentier escarpé qui menait à l’éminence rocheuse où se trouvait la chapelle de la communauté. Fait de pierres grossièrement taillées, l'édifice trapu avait délaissé la construction en cercle parfait des premiers sanctuaires pour imiter la croix du Christ. Des scènes naïves aux couleurs vives ornaient les murs, reproduisant les scènes de l’iconographie chrétienne irlandaise. On y voyait ainsi la vie détaillée de Saint Patrick, convertisseur de l’Irlande : sa capture par les pirates irlandais, la vente de sa personne comme esclave et sa fuite héroïque sur 200 miles pour atteindre un port et ainsi rejoindre sa famille. Et surtout, surtout, son retour dans celle qu'on nommait alors Hibernia pour répandre la foi chrétienne dans le nord et dans l’ouest. Il était devenu évêque et s'était échiné à convertir les riches comme les pauvres, les fils de rois comme les vilains. L’image qui fascinait le plus Niall était cependant celle où on voyait Patrick perché sur une colline, entreprenant un jeûne de 40 jours et chassant tous les serpents d’Irlande parce que l’un d’eux avait osé l’importuner.

Les deux moines entrèrent dans la chapelle alors que la cloche sonnait une dernière fois. Niall vit Sefare leur jeter un regard réprobateur alors qu'ils se faufilaient dans les derniers rangs. Malgré le frisson qui lui parcouru l'échine, il s'efforça de reproduire les gestes coutumiers propres à l'office de vêpres et de faire comme s'il n'avait rien vu.  Il mis toute sa ferveur à suivre la messe et à élever son esprit vers Dieu. Bien sûr, il savait pourquoi prier, on lui avait assez rabattu les oreilles à ce sujet depuis qu’il avait été en âge de former ses premiers souvenirs. Envers et contre tout, il devait supplier Dieu de bien vouloir daigner abaisser son regard sur leur pauvre île misérable battue par les vents. Il devait lui adresser toutes les suppliques imaginables pour qu'il veuille bien leur épargner la prochaine catastrophe en lice. En effet, depuis des lustres, sa terre natale avait fait face à toutes les calamités possibles. À chaque nouveau cataclysme qui les frappait, Sefare invoquait le courroux de Dieu. Et encore aujourd’hui, son sermon portait sur la colère divine.

— Mes frères, encore une fois la moitié de nos récoltes a été ravagée par un gel tardif. Les épis, à peine sortis du sol, s’effritent entre les mains des paysans et déjà les enfants crient de faim. Et pourquoi devons-nous vivre avec de tels maux? Pourquoi le Seigneur nous renvoie-t-il ces rappels constants de sa colère? Mes frères, la raison est simple : nous péchons constamment par laxisme et par orgueil.

Sa voix tonna dans la petite chapelle et l'autel gronda avec lui jusqu'à en fendre les pierres des murs. Niall se recroquevilla sur son banc. Les yeux de Sefare flambèrent.

— Encore aujourd'hui, dans ces terres, des être vivent dans l'erreur et prient des idoles. Ils ignorent le Verbe incarné et se complaisent à suivre Satan et son troupeau. Ils offensent notre Seigneur Jésus qui se sacrifia pour nos âmes quand ils font encore et toujours ces rituels magiques qui nient Dieu. Nous devons considérer que la fatalité qui nous frappe aujourd’hui n’est qu’un rappel que nos efforts sont insuffisants Le zèle de Saint Patrick se serait-il éteint avec lui? Prions mes frères, pour la pérennité et la plénitude de l’Irlande! Et rappelons nous toujours que même dans notre malheur, notre situation pourrait être pire. Réjouissons-nous donc! intima-t-il d'une voix véhémente.

Niall frissonna. Il savait à quoi le supérieur référait quand il affirmait que cela aurait pu être pire. Bien sûr, ce qu’il y avait de pire que de manquer de grain ou de s’effondrer suite à quelque mystérieux mal était de rencontrer les Barbares blancs venus du Nord. Personnellement, il ne les avait jamais vus. Par chance, ces étrangers ne s’étaient jamais encore aventurés dans leurs terres trop isolées pour constituer une proie convenable à leur convoitise, mais il avait entendu les récits des destructions qu’on leur attribuait. On disait qu’ils étaient pâles comme des morts, vêtus de vêtements amples flottant dans le vent, et qu’ils arrivaient sur des navires de feu à tête de monstre. Ils sautaient à terre et ravageaient tout, pillaient et égorgeaient sans scrupules hommes, femmes et enfants qui se trouvaient sur leur chemin. Ils prenaient tout ce qu’ils pouvaient. On affirmait encore qu’ils étaient des créatures de Satan, des démons incarnés venus troubler l’activité des hommes. En pensant à eux, Niall sentit l’étau de la peur se serrer son cœur. Il ferma les yeux et s’efforça de chasser de son esprit tous ces barbares imaginaires. Il n’y parvint qu’à grande peine. L’office s’acheva, l’assemblée se leva et parti en lente procession vers la sortie. Leurs pas crissèrent sur le roc dur.

En sortant, Niall ne put s’empêcher de jeter quelques coups d’œil inquiets vers le large. Elias, qui se trouvait à sa gauche, lui sourit pour le rassurer. Le jeune frère remercia son aîné d'un coup d'oeil reconnaissant. Elias lui avait conseillé de penser aux histoires de Saints lorsqu’il aurait peur, pour savoir que la volonté du Seigneur s’accomplissait toujours, peu importe ce qui pouvait arriver. Pour cesser d’imaginer toute sorte de choses, il s’imagina qu’il était saint Brendan naviguant vers l’île de la Promission des Saints et qu’il errait dans l’obscurité, sur le point d’arriver à la lumière. Perdu dans sa contemplation intérieure, il sentit de nouveau cette immense de certitude l’inonder : comme pour Saint Brendan, sa destinée était de voguer et de se rendre à l’île de la Promission des Saints si telle était la volonté de Dieu. Peut-être pourrait-il y prier, y faire le jeûne et les contritions nécessaires pour assurer la paix d’Irlande, la fin des païens et la fin des calamités récurrentes sur l’île. Il ne savait pas trop ce qui arriverait une fois qu'il atteindrait cet objectif, l’après restait diffus, mais son désir était clair. Son choix se cristallisa de façon définitive. Lui aussi entreprendrait la peregrinatio, pour le meilleur ou pour le pire.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Ella Palace
Posté le 03/07/2021
Coucou!

on est propulsé ailleurs dans ce chapitre! Ca ouvre sur le mystère et ses questions. Que vient faire cette histoire dans l'histoire? J'ai hâte de voir le lien!
Ce sont de belles images, un peu d'histoire et de "magie", c'est appréciable.
C'est bien écrit aussi :-)

Mes remarques (si cela te convient toujours):

-« n’étaient qu’un amas de pierre », pierres
-« Il avait visité à de nombreuses îles », pas de à
-Un peu trop de redondances du mot « île », selon mon humble avis
-« Voici la terre qui tu as cherchée », que
-Redondance du verbe « demeurer »
-« Quand plusieurs solstices auront passé », seront passés ?
-« Peut-être était-elle morte en couches en l’ayant », en l’ayant mis au monde ?
-« Tu ne sais pas à quels périls tu t'expose », un peu trop de fois le terme « péril » et tu t’exposeS
-« Si ce l’était », si cela l’était ou si ça l’était ?
-« Les traits de Niall se figer au fur et à mesure… », se figeaient ?
-« …de bien vouloir daigner abaisser son regard… », trois infinitifs à la suite, c’est un peu lourd.
-« Niall sentit l’étau de la peur se serrer son cœur », pas de se
- « …l’assemblée se leva et parti en lente procession… », partit
-Redondance de coup d’œil
-« il sentit de nouveau cette immense de certitude l’inonder », cette immense certitude ?

A bientôt!
nicanette
Posté le 03/07/2021
Merci d’etre ma fidele lectrice 😀 tes remarques me font toujours plaisir. Le lien est revele a la fin de la premiere partie. Tu mr firas alors si tu ty attendais si j’ai le plaisir de retenir ton attention jusque la!
Ella Palace
Posté le 03/07/2021
Je te souhaite d'avoir beaucoup d'autres lecteurs. 🙂

Chaleureusement
nicanette
Posté le 04/07/2021
Merci! Mais à date, j’aime beaucoup la qualité de mes lecteurs et on dit toujours que ce n’est pas la quantité qui compte, mais la qualité!
Ella Palace
Posté le 04/07/2021
Je te rejoins tout à fait!
Alors, je te souhaite beaucoup de lecteurs de qualité 😀
nicanette
Posté le 04/07/2021
Merci Ella ☺️
Vous lisez