L’AGENCE
Le Retour du Roi
Chapitre 6
Camelot, Grande Bretagne
D'un air songeur, Helena Blavatsky regardait le Roi Arthur dormir. Il y a quelques heures, il avait ressuscité, détruisant Londres sur son passage. Désormais, le colosse de deux mètres était profondément emmitouflé dans ses couvertures. Sa transformation était à présent finalisée, mais il lui fallait du repos pour prendre pleinement possession de son nouveau corps. Une voix nasillarde retentit depuis l'entrée de la chambre.
-Quelle adorable arme de destruction, ironisa La Nuit.
-Dois-je te rappeler tes propres exactions ? répondit sèchement Helena.
-C'était une autre époque, grogna l'homme. Aujourd'hui, c'est le futur qui m'intéresse, et j'ai du mal à voir en quoi ce démon sert la cause du Sacramentum.
-Patience. Il apprendra à se contrôler, et sa puissance servira de fondation à notre monde idéal.
-Charmant, un monde idéal fondé sur des cendres.
-Il suffit, Commandant V. Vos sarcasmes m'ennuient, déguerpissez où c'est vous qui finirez en cendres.
Elle lui jeta un regard froid. Sans un mot, il s'exécuta. Il ne fallait pas abuser de la patience de la mère fondatrice du Sacramentum. L'homme s'égara dans les couloirs labyrinthiques de Camelot. Le château était apparu récemment, comme pour répondre à l'appel de son maître. Les chercheurs les plus compétents d'Helena étaient incapables de trouver une explication rationnelle, ou surnaturelle, à cet événement insoupçonné. Cependant, il fallait reconnaître que la surprise était plutôt positive. L'endroit constitue en effet une forteresse imprenable, à l'abri de tout assaut extérieur. Ses murs d'acier, et ses nombreux sortilèges de protection, en font la défense ultime contre les emmerdeurs de l'Agence. Alors qu'il s’apprêtait à rejoindre ses nouveaux quartiers, La Nuit croisa le chemin d'un de ses collègues, Le Sang. Ils s'échangèrent quelques piques.
-Ma chère cousine, j'ai entendu dire que tu t'étais prise une dérouillée lors de ta précédente mission. Ton surnom stupide te va décidément à ravir.
-C'est une remarque osée, venant de quelqu'un qui se fait surnommer si sobrement « La Nuit ».
-Je suis heureux que mon sobriquet te plaise, Elizabeth.
-Trêve de plaisanterie. Le Roi Arthur, peut-on le contrôler ?
Le Commandant V retira sa capuche. Le vêtement lui permettait de cacher son identité, mais une fois enlevé, il dévoilait un visage d’albâtre aux yeux fins. Les pupilles de l'homme brûlaient d'une lueur rougeâtre. En recoiffant ses cheveux ébènes coupés court, il articula quelques mots.
-Hélèna en a l'intime conviction. Du moins, elle tente de s'en convaincre. Mais il a détruit une ville entière en l'espace d'un instant. J'ai de sérieux doutes.
-C'est rassurant, répondit l'autre commandant. Nous qui voulions l'utiliser à nos fins, il se pourrait que ce soit lui qui finisse par nous utiliser.
-Il nous faut préparer une solution de secours. Nous avons une dette incommensurable envers Héléna, mais elle est aveuglée par ses ambitions.
-Qu'est ce que tu proposes ?
-C'est très simple, il faut-
Un grognement guttural le stoppa net. Derrière lui s'approchait un autre des commandants du Sacramentum, surnommé La Chair. Il ne portait pas sa capuche, dévoilant un imposant corps verdâtre de plus de deux mètres de haut. Il semblait rafistolé de toute part, et ses grand yeux jaunâtres le rendaient encore plus repoussant.
-Toujours aussi charmant, ironisa Elizabeth. Il pourrait avoir la décence de se cacher.
-Grlnh ag hghgm ? Répondit le nouvel arrivant.
-Charmant, et avec de la conversation.
-Glbl.
-Ne te moque pas de lui, s'indigna La Nuit. Sous son apparence répugnante et nauséabonde se cache en réalité un cœur en or.
-Je n'en doute pas, répondit-elle sèchement. Bref, nous reprendrons notre conversation plus tard.
-Fais attention à toi.
-Mrglh, ajouta la créature.
Elle salua l'assistance, avant de s'enfoncer dans les couloirs sans fin de Camelot. Quelques minutes plus tard, elle pénétrait dans ses propres quartiers, retirant sa capuche. La faible lueur des bougies dévoila une jeune femme au visage pâle et aux longs cheveux auburn. Elle partageait les yeux rougeoyants de son cousin.
-Bon, j'ai mérité un bon bain. Où sont mes servantes ?
-Nous sommes ici, maîtresse.
Des jeunes femmes au regard vide et à la démarche lancinante s'approchèrent. Elles déambulaient comme des pantins, totalement soumises au pouvoir hypnotique d'Elizabeth. Enlevant leurs vêtements, elles s'installèrent dans le grand bain qui régnait sur la pièce.
-Vous êtes belles, mais cette beauté n'est qu’éphémère. Laissez moi mettre un terme à vos existences avant que vous ne deveniez vieilles et ridées.
-Nous vivons pour vous servir, maîtresse.
-Parfait.
Elle attrapa un poignard, et égorgea à tour de rôle ses servantes. Ces dernières restèrent immobiles, laissant le bain se remplir lentement de leur sang. La femme aux yeux rouges s'y installa confortablement. Le sang était chaud et parfumé.
-Quel plaisir. Je rêve d'un monde où je n'aurais plus à me cacher pour profiter d'un bon bain. Vous ne trouvez pas ça injuste, que je sois stigmatisée de la sorte ? Ah, vous n'êtes pas en état de répondre, évidemment. Eh bien, sachez que je n'ai pas cherché à devenir comme ça. Le hasard fait que je dois me nourrir d'humains. Culpabiliser ? Est-ce que vous culpabilisez quand vous tuez un animal pour vous remplir l'estomac ? Je ne pense pas.
Elle s’enfonça plus profondément dans le liquide pourpre, alors que les corps des servantes tombaient à tout de rôle dans un bruit flasque.
-Oui, je rêve d'un monde dirigé par la Sacramentum.
Siège de l’Agence à New-York.
Zero était assis à son bureau, le regard vide. Son téléphone ne cessait de sonner. Après quelques minutes à fixer le sol, le vieil homme se décida à bouger. Se traînant lentement jusqu'à son armoire, il en sortit une bouteille de saké et deux verres. Il retourna s’asseoir et servit la boisson. Soudainement, un bruit étrange retentit, faisant apparaître l'hologramme de Samir au milieu de la pièce. Le chef des gardiens s'indigna en découvrant son supérieur hiérarchique en train de siroter son alcool.
-Je pensais que vous me feriez l'honneur de votre présence, Samir. Je vous avais même servi un verre.
-Zero ? Mais qu'est ce que vous foutez ?
-Avant de prendre son envol, le papillon n'est qu'une maigre chenille, mon cher ami.
-Qu'est ce que ce charabia signifie ?
-Cela signifie qu'on est dans la merde et que j'ai besoin de saké, grommela-t-il.
Samir le regarda avec pitié, puis se décida à faire un rapport de la situation.
-En effet, c'est la merde. Londres a été détruite il y a quelques heures. Par miracle, Belzek, Jones et Gene ont survécu. L'enchanteur aussi est en vie, bien que dans un état catatonique. J'ai rapatrié tout ce beau monde dans la Zone 51. Ici, malgré l'attaque du Sacramentum, on a pas de pertes à déclarer.
-Je sais déjà tout ça, mais continuez quand même, cracha Zero en finissant son saké.
-La base est sens dessus dessous, mais par miracle tous les artefacts sont intacts. On a eu pas mal de blessés, mais ils se font soigner en ce moment même. Je compte organiser une réunion de crise d'ici peu, c'est la raison de mon appel. Je ne pensais pas tomber sur un vieillard alcoolique en tentant de vous joindre.
Zero ricana.
-Dans ce cas, venons-en à l'essentiel. Des nouvelles de Camelot ?
-Rien pour l'instant, la forteresse est immobile, et le Sacramentum semble toujours s'y terrer. J'ai repéré d'importantes défenses magiques, qui nous empêchent de lancer un assaut surprise. Si vous voulez mon avis, vu notre échec précédent, l'heure est à la prudence.
-Effectivement, soupira le vieil homme. Le point positif, c'est que le Roi Arthur devrait encore mettre quelques heures pour s'approprier son nouveau corps. Mais lorsqu'il aura réussi, il lancera sans nul doute sa conquête du monde.
-Permettez-moi d’émettre quelques réticences, il a tout de même atomisé une métropole.
-Bien qu'il ait peu d'égard pour la vie humaine, il reste un conquérant. Il ne détruira pas le monde entier, mais laissera certainement un sillage de désolation sur son chemin.
-Le Sacramentum le laisserait faire ?
Zero s'apprêta à se resservir un verre, puis abandonna l'idée et commença à boire son alcool directement à la bouteille.
-Ils n'ont pas le choix. Pauvre Helena, cette fois-ci, elle a libéré des puissances qui la dépassent.
-Dans ce cas que faisons-nous ? S'énerva Samir.
-Vous allez ouvrir une dimension parallèle dans laquelle Belzek et Miss Berry vont entraîner nos meilleurs éléments : Jones, Nila, Gene et Arthur. Trouvez des armes légendaires de rang S pour ces deux derniers. Ensemble, ils formeront l'équipe d'élite qui se chargera de lancer l’assaut sur Camelot au réveil du Roi Arthur. Et envoyez moi l'Agent Douze, j'ai quelques petits tours à lui apprendre.
Le chef des gardiens lâcha un soupir de soulagement.
-Pas trop top vieillard. Tout est déjà prêt, j'attendais votre validation.
-Parfait, mais une dernière chose. Les différents gouvernements imputent à l'Agence la destruction de Londres. Officiellement, c'était une attaque terroriste d'origine inconnue, mais officieusement, ma crédibilité en tant que Chef est en jeu. Cela dit, je suis conscient de ma part de responsabilité.
-Qu'est ce que cela signifie ?
-Cela signifie que mon temps à la tête de l'Agence est compté. Je vais tenter de nous gagner un peu de répit, mais qui sait vers quoi on se dirige si le reste du monde vient fourrer son nez dans nos affaires ?
-Je peux m'en charger. Il va me falloir-
-Non, nous devons nous concentrer sur le Roi Arthur, c'est la priorité absolue. Mais tu dois te préparer. Samir, si je suis renvoyé, tu devras devenir mon successeur.
-Quoi ?!
La communication se coupa à cet instant précis. Depuis son laboratoire de la Zone 51, Samir s'indigna contre cet arrêt soudain.
-Quel vieil empoté ! Il m'a raccroché au nez !
-Mais il a donné son approbation pour l'entraînement spécial, affirma TT12.
-Apporte la cimeterre de Nergal à Gene, et Arthur peut prendre la hache.
-Vous êtes sûr pour la hache ?
-Pour être tout a fait franc, elle a disparu de mon bureau. Il s'est déjà barré avec.
-Et la durée de l'entraînement ?
-Dans la dimension Z, le temps s'écoule bien plus lentement que sur notre planète. Une minute ici équivaut à six heures là-bas. En supposant qu'il nous reste cinq heures avant le réveil du Roi Arthur, cela laisse à notre équipe deux mois et demi d'entraînement intensif.
-Bien reçu. Ne faudrait-il pas également songer à quelque chose pour Londres ?
-J'y réfléchissais.
Il s'approcha d'un de ses ordinateurs quantiques pour y pianoter quelques indications rapides en finissant son café. Après quelques longues secondes, une faux apparu. Sur les milliers d'onglets supplémentaires, des représentations de Chronos, divinité du Temps dans la mythologie grecque, s'affichèrent. TT12 s'autorisa un sifflement strident.
-La faux de Chronos ? Elle pourrait nous aider à restaurer Londres à son état antérieur, mais-
-Mais nous n'avions aucune trace de son emplacement, jusqu'à récemment. J'ai analysé les données des dernières explorations du professeur Abigail. Je pense avoir retrouvé la trace de la faux.
-Vous comptez l'envoyer récupérer l'artefact ?
-Évidemment, c'est notre meilleur élément pour ce qui est de la recherche d'armes antiques. De toute façon, ce n'est pas une guerrière, l'entraînement spécial ne lui serait d'aucune utilité.
-Je lui transmets l'ordre de mission, sifflota TT12.
-Un instant.
Samir pris un air sérieux.
-Sa dernière recherche en solo a bien manqué de finir en fiasco total. Cette fois-ci, je ne la laisserai pas partir seule. Il est carrément sinistre, mais nous allons devoir lui envoyer... cet homme.
Camelot, Grande Bretagne
Assis autour d'une table en chêne, deux des commandants du Sacramentum discutaient. L'un était couvert d'épaisses bandelettes de tissus cachant son corps émacié. L'autre n'avait pas retiré sa capuche, et l'artefact magique maintenait donc son identité secrète. Il ne semblait pas très loquace.
-Tu n'es pas très bavard, le nouveau. Pourtant, cela fait déjà quelques semaines que tu nous as rejoint.
-Pardon, murmura-t-il.
-C'était une remarque, pas une critique. Si tu n'es pas d'humeur, je parlerai pour nous deux. Après tout, j'étais autrefois pharaon. J'ai de nombreuses histoires à raconter.
-Vraiment ?
-Oui, et aujourd'hui, mon empire n'existe plus et je suis juste... « Le Sable ». Comme quoi, aucun règne n'est éternel.
-Moi, je ne sais même plus qui je suis, grogna l'autre commandant.
-Depuis qu'on t'a trouvé, tu es « La Neige ». Tu n'as pas besoin de plus.
-Mais mon passé...
-Qui se soucie du passé ? Bientôt, le Sacramentum créera un monde où les monstres peuvent vivre en toute liberté. Ne réfléchi plus au passé mais imagine ton futur. Tu pourras devenir ce que tu souhaites.
-Je... ne sais pas.
-Eh bien, dans ce cas, tu n'auras qu'à me suivre. Tes pouvoirs psychiques me seront bien utiles. Nous commencerons par réclamer ce qui m'appartient de droit, le royaume d’Égypte. Ensuite, j'ordonnerai à mes sujets de me construire un palais gigantesque, qui ferait frémir les dieux en personne. Une fois terminé, nous nous évertuerons à fonder une paix durable qui permettra à mes terres de proliférer pour les millénaires à venir. J'ai tout le temps devant moi, après tout, je suis une momie.
-Très bien.
-Parfait, il ne reste plus qu'à choisir mon discours. Je songeais à quelque chose du genre, « Peuple d’Égypte, votre vénéré pharaon est de retour ». Cela dit, ce n'est pas assez théâtral, non ?
-Je ne sais pas.
-Oui tu as raison, je vais plutôt partir sur un « Après dix mille ans, je me réveille enfin d'un sommeil éternel pour sauver mon royaume de la damnation ». Bon, c'est une figure de style, je n'ai pas réellement dormi dix mille ans.
-Celui là est très bien.
-Ah, qu'est ce que je ferais sans toi mon ami. Ton aide m'est précieuse.
-Quelqu'un approche, remarqua-t-il.
Depuis la pénombre, La Nuit s'avança, saluant ses deux amis.
-Peuple du Sacramentum, votre dévoué collègue est de retour.
-Depuis quand tu nous espionnes ? Siffla la momie.
-Je ne souhaitais pas interrompre un si touchant discours.
-Et toi, que vas-tu faire dans le nouveau monde ?
-Réclamer ce qui m'appartient de droit, la Valachie. Mais je n'y suis pas encore, tout comme tu es encore loin de récupérer l’Égypte.
-Pourquoi donc ? S'indigna Le Sable.
-Tout simplement car notre atout est incontrôlable. Le Roi Arthur a détruit Londres sur un coup de tête. Qu'est ce qui nous garantit qu'il n'annihilera pas nos royaumes respectifs durant sa prochaine croisade ?
-C'est une bonne question, reconnu le commandant.
Un long silence pris place. La Nuit le brisa, faisant comme si de rien n'était.
-Le Roi Arthur vient de se réveiller, et a convoqué les cinq commandants du Sacramentum. Je suis venu vous chercher, chers collègues.
-J'ai un mauvais pressentiment, remarqua La Neige.
-Moi de même, mais nous n'avons pas vraiment le choix.
Sans un mot, les trois compères se dirigèrent vers la salle de réunion. Les couloirs sombres de Camelot semblaient se distordre sur leur passage. Après quelques minutes, ils pénétrèrent dans une grande salle circulaire. En son centre trônait une table ronde en bois épais. Les murs étaient décorés de tapisseries aux couleurs vives, et de magnifiques vitraux permettaient à une douce lumière d'emplir les lieux. Autour de la table étaient déjà installés Helena Blavatsky, Le Sang et La Chair. Les commandants restant s'installèrent à leur tour sur les imposants fauteuils entourant la table. Le Sang fut le premier commandant à questionner le regroupement.
-Quel est le sens de cette réunion Helena ?
-Je n'en sais pas plus que vous, Le Roi Arthur a demandé à ce que nous l'attendions ici, il devrait arriver d'un instant à l'autre.
-Je n'ai pas pour loisir d'att-
Une pression monstrueuse fit vibrer les lieux. Derrière les solides portes de la pièce, quelqu'un approchait. Tandis qu'il faisait son entrée, une aura écrasante baigna l'endroit, contraignant les membres présents à la docilité. Le Roi Arthur, haut de deux mètres pour une centaine de kilos de muscles, se dirigea jusqu'à son siège. Il était équipé d'une armure en or massif, mais son imposante couronne était d'un noir de jais. Évidemment, Excalibur se tenait fidèlement à sa ceinture. De son regard bleu azur, il jaugea chacun de ses sujets.
-Je suis heureux de vous voir tous réunis, mes chevaliers.
-Vos chevaliers ? Questionna Helena.
-À partir d'aujourd'hui, les chevaliers de la Table ronde sont reformés, et vous avez l'immense honneur d'en faire partie.
Personne n'osa une objection. Le Roi Arthur passa sa main dans sa barbe blonde broussailleuse. Son visage restait fermé, ne laissant transparaître aucune émotion.
-Maintenant que le sujet est clos, passons à l'essentiel. Je vais achever ce que je n'ai jamais terminé. Je vais conquérir ce monde, qui m'appartient de droit. Vous allez m'y aider, mes précieux chevaliers. Et en échange de vos bons et loyaux services, je vous récompenserai par les terres de votre choix.
-L’Égypte, murmura Le Sable.
-Et comment allons-nous procéder, mon Roi ? Questionna La Nuit.
-Grlbl, approuva La Chair.
Le Roi Arthur jeta un œil à son épée, puis s'attarda sur Helena.
-J'ai eu vent des dernières nouvelles. Les intérêts du Sacramentum rejoignent les miens. C'est la raison de votre présence ici, sinon vous seriez déjà tous morts.
-Charmant, répondit Le Sang de manière inaudible.
-De ce fait, les ennemis du Sacramentum sont les miens. Nous allons donc détruire l'Agence.
-Un projet des plus sensés, répondit sobrement Helena.
-Quelle est votre stratégie ? Questionna La Neige.
-C'est simple. Nous allons nous rendre jusqu'à New York, où se trouve leur quartier général, et détruire la ville.
-Efficace, ironisa La Nuit.
-Le monde actuel est corrompu par le vice. En détruisant la capitale du vice, nous lancerons un message clair au reste de la terre : plier le genou ou mourir. Sans l'Agence pour nous arrêter, ils n'auront pas d'autres choix.
-Quelle forme prendra l'attaque, mon Roi ? S'interrogea Le Sang.
-Une attaque aérienne. Nous allons utiliser Camelot pour traverser l'océan Atlantique.
Alors que les chevaliers s'échangeaient des regards confus, Arthur se leva, brandissant son épée vers les cieux. La lumière devint aveuglante, et la forteresse entière se mit à trembler.
-Camelot, forteresse imprenable ! Envole toi, et brave l'océan ! L'heure est venue de détruire nos ennemis !
Quelques secondes plus tard, le château royal quittait le sol pour s'envoler vers les nuages. Lentement, la forteresse commença à se diriger vers l'ouest.
Nevada, Zone 51.
Samir lisait son chapitre de One Piece, impassible. La base était baignée dans la pénombre de la nuit. Seul les cliquetis de la machine à café bouillante, non loin de là, troublaient le calme nocturne. Alors qu'il arrivait à la fin de sa lecture, le scientifique fut surpris par TT12 qui se relevait d'un bond, troublé dans sa mise à jour quotidienne.
-Maître Samir, je détecte une intrusion.
-Encore ? Impossible, j'ai renforcé les systèmes de sécurité.
-Regardez par vous-même.
Le robot roula jusqu'à l'ordinateur quantique le plus proche, et pianota rapidement sur le clavier de ses petites mains métalliques. Quelques instants plus tard s'allumait une caméra, affichant un couloir... vide.
-Un bug dans le système ? Il faut dire que les derniers intrus ont mis un sacré bordel.
-Non Maître Samir, il y a bien quelqu'un. Et il s'approche rapidement de nous.
-Bon, pas besoin de sonner l'alerte, je vais m'en charger personnellement.
-Vous êtes sûr ? Nous pouvons toujours faire revenir nos alliés de la dimension Z.
-Leur entraînement n'est pas terminé, ce serait du gâchis.
-Très bien. L'intrus sera là dans approximativement 30 secondes.
Samir se leva, et se dirigea vers la cafetière. Il se servit un verre dans lequel il déposa exactement neuf morceaux de sucre.
-L'intrus sera là dans approximativement 25 secondes.
D'une traite, le scientifique vida son sucre au café, et s'essuya la bouche du revers de sa blouse immaculée de blanc.
-L'intrus sera là dans approximativement 20 secondes.
-Mince alors, où j'ai mis mes babouches ?
L'homme regarda autour de lui, mais il lui était impossible de retrouver ses chaussures au milieu du laboratoire chaotique. En désespoir de cause, il jeta un œil sous une pile de cartons de pizzas. Les babouches étaient toujours portées disparues.
-L'intrus sera là dans approximativement 15 secondes.
-Tu n'aurais pas vu mes babouches TT12 ? Je ne peux quand même pas accueillir notre invité pieds nus.
-Aucune idée, Maître Samir. Par contre, L'intrus sera là dans approximativement 10 secondes.
Samir soupira, récupérant une part de pizza qui avait survécu au fond de sa boîte qu'il avala en quelques bouchées.
-Les champignons étaient sur la pizza d'origine ?
-L'intrus sera là dans approximativement 5 secondes.
-Bon, peu importe. Il serait temps de me préparer.
-L'intrus sera là dans approximativement 1 secondes.
-TT12, FUSION !
Le robot se disloqua instantanément, et ses pièces virevoltèrent jusqu'à Samir, fusionnant avec son corps pour créer une armure imprenable de métal. Au même moment, les portes du laboratoire éclataient, plongeant l'endroit dans les ténèbres les plus noires.
-TT12, activation du protocole 2705, « Shadow Eater ».
-Bien reçu Maître Samir.
Le bras de l'armure métallique se mit à briller d'une lumière éclatante, rendant sa visibilité à la pièce. Face au chef des gardien se tenait un des commandants du Sacramentum, immobile, le visage profondément enfoui sous sa capuche.
-Salutations du Sacramentum.
-Salutations de l'Agence.
-Je ne suis pas ici pour me battre.
-Pas de chance alors.
Avec la vitesse d'un avion de chasse, Samir se projeta sur son adversaire, et propulsa de sa main une décharge colossale d'énergie qui atomisa sa cible sur le coup. Cette dernière se reforma quelques mètres plus loin, amusée. La Nuit retira sa capuche, révélant un visage pâle aux yeux rougeoyants. Il lança un sourire provocateur à son interlocuteur. TT12 ne manqua pas de remarquer l'identité du commandant ennemi.
-Maître Samir, c'est...
-Je sais TT12, n'oublie pas que mon cerveau fonctionne plus rapidement que ton processeur.
-Dans ce cas ?
-Activation du protocole 2200, « Hellsing ».
Le bras métallique de l'armure se déforma, créant un énorme pieu rotatif.
Il sauta sur l'ennemi, l'arme nouvellement crée pointée sur son cœur. Celui-ci se laissa faire.
-Bien vu, mais cela ne sert à rien. Je suis lié aux autres commandants, il est impossible de me tuer individuellement.
-Ce n'est pas mon intention.
De sa main libre, il attrapa le col du vampire.
-TT12, utilise notre atout.
-Votre atout ? S'interrogea la cible.
-Je ne suis pas seulement TT12, mais également l'ASR 1339, relique de scellement niveau SS+.
Depuis le fond de la pièce, une voix nasillarde retentit.
-Mon cher cousin, il serait peut-être temps de vous défendre ?
-Je me demandais quand tu allais sortir de ta cachette, remarqua le scientifique.
Le Sang, le visage caché par sa capuche, observait l'action nonchalamment.
-Je n'ai pas envie de me battre. Ce n'est pas non plus l'intention de mon camarade.
-Alors, pourquoi êtes vous-la ? Questionna l'homme.
-Nous sommes venus discuter, affirma La Nuit.
Samir le lâcha.
-TT12, reste sur tes gardes.
-Évidemment, Maître Samir.
-Je vous écoute, commandants du Sacramentum.
La Nuit épousseta ses vêtements, puis se dirigea vers la machine à café, la regardant d'un air perplexe.
-Il se trouve, Monsieur Samir, que le Sacramentum a un problème. Un problème que nous partageons avec l'Agence. Le Roi Arthur est incontrôlable. Notre supérieur n'en a pas encore conscience, mais il est impossible de l'utiliser. Il n'en fait qu'à sa tête.
-J'en ai les larmes aux yeux, asséna Samir d'une voix sarcastique.
-Je n'ai pas terminé. Quelques instants avant mon arrivée, Camelot s'est mis en route pour New York. Mon souverain autoproclamé a en tête de traverser l'océan Atlantique dans sa forteresse volante. Une fois arrivé sur la côte est des États-Unis, il détruira tout bonnement et simplement la capitale. Des questions ?
-Quel intérêt avez-vous à me révéler ses plans ?
-C'est très simple, répondit le vampire. Si vous réussissez à vous en débarrasser, cela nous retirera une épine du pieds.
-Et si l'Agence échoue ?
-Eh bien, si vous échouez, je suppose que le Roi Arthur aura la grandeur d'âme de m'attribuer un tas de cendres de mon choix, ironisa La Nuit.
-Le temps presse, le stoppa Le Sang. Il faut retourner à Camelot avant que notre absence ne soit remarquée.
Le vampire dégaina une montre à gousset de sa poche, à laquelle il jeta un œil inquiet.
-En effet, il est déjà affreusement tard. Mon ami de circonstance, vous nous voyez dans l'obligation de vous laisser. Faites bon usage de ces informations.
Ils disparurent dans une explosion de ténèbres, laissant le scientifique perplexe face à de telles informations.
-TT12 ?
-Je viens de confirmer leurs dires, Camelot est en effet en train de se déplacer à grande vitesse vers New York.
-Depuis combien de temps nos alliés s'entraînent dans la dimension Z ?
-Approximativement deux mois, treize jours, une heure, douze minutes et cinquante-neuf secondes.
-Ramène les pendant que je contacte Zero. Nous allons lancer un assaut sur la citadelle pendant qu'elle traverse l'Atlantique. Cela permettra à nos équipes d'utiliser leur pleine puissance sans risquer la vie de civils.
-OK. Dé-fusion en cours.
Les pièces de l'armure se décrochèrent du corps de son porteur, et dans un brouhaha métallique, elles se rassemblèrent pour former de nouveau le robot que l'on nommait TT12.
-Maître Samir, vous avez grossi. L'armure a du mal à passer au niveau de votre ventre.
-Va te faire foutre, TT12.
Camelot, Grande Bretagne
Depuis un des nombreux balcons de Camelot, Le Roi Arthur regardait l'océan déchaîné. D'immenses vagues s'élevaient vers le ciel noir, rependant une forte odeur d'iode sur leur passage. Une tempête était proche. Helena Blavatsky s'approcha.
-Mon Roi, nous avons un problème.
-J'écoute.
-Les États Unis viennent de nous envoyer l'armée de l'air. Ils approchent à grande vitesse dans le but de détruire la citadelle.
-Ils peuvent essayer.
-Je suis surprise par ce choix des plus soudains. Il semblerait que le président des États Unis ait pris cette décision sur un coup de tête.
-Peu importe, il mourra comme les autres.
Le portable d'Helena vibra. Elle le sortit d'une de ses poches, en y jetant un regard amusé.
-C'est le président américain. Il vient de tweeter, je cite : « Camelot est une invention des chinois. Le Roi Arthur n'a jamais existé. Dans le doute, je vais toutefois atomiser la forteresse géante qui se dirige en volant vers New York. »
-Amusant.
A l'horizon, des centaines d'avions de chasse apparurent. Ils étaient innombrables, telle une légion de moustiques. Arthur leur jeta un regard vide.
-C'est probablement les dragons dont vous m'avez parlé, Helena.
-En effet mon Roi, bien que le terme « avions » soit plus approprié.
-Pitoyable.
D'un geste vif, il dégaina son épée, et la plaça à l'horizontale. Tandis qu'il murmurait quelques chants antiques, l'arme s'illumina de mille feux. Une aura écrasante balaya le balcon, forçant la maîtresse du Sacramentum à se reculer légèrement.
-Excalibur, une nouvelle fois, prête moi ta force ! Détruis mes ennemis !
Dans un cri de rage, il balaya le vide, déchaînant un immense arc d'énergie vers l'horizon. L'attaque atomisa tout sur son passage, créant d'épais tumultes de fumée en vaporisant les vagues qui avaient le malheur de se trouver sur son chemin. Quelques instants plus tard, l'océan avait retrouvé son aspect impassible. Le ciel s'était éclairci un instant avant de reprendre son air sinistre. Plus de traces de l'armée de l'air.
-Bien.
-Il semblerait que vous nous ayez débarrassé de ces gêneurs.
-Des insectes.
-Nous sommes encore loin de la côte est. Cela ne m'étonnerait pas qu'ils nous envoient quelques missiles d'ici là, voir une bombe nucléaire ou deux.
-Insignifiant. Les défenses de Camelot sont imprenables. Le château ne peut être détruit.
-M'en voilà rassurée.
-Je vais me reposer un moment. Que personne ne me dérange.
Il s'absenta, laissant Helena seule sur le balcon. Elle lui jeta un regard mauvais.
-Pauvre cloche, si tu penses pouvoir agir comme bon te semble, tu te trompes lourdement. Pour l'instant, tout se déroule parfaitement comme je l'avais prévu.
Elle claqua des doigts, et un des commandants du Sacramentum apparu à quelques mètres d'elle, immobile.
-À présent, je vais avoir besoin de vos capacités particulières, La Neige. Où devrais-je vous appeler par votre véritable nom... Nubur.