Le soleil de midi brillait de tout son éclat. Pas un seul nuage ne venait blanchir le ciel, ni cacher pour un seul instant ce bel astre. Le front de la jeune fille était recouvert de gouttes de sueur, et, sous sa chevelure épaisse, la chaleur était pire que tout. Dissimulée sur le toit de pierre, Adélaïde observait le couple d’amoureux, un sourire malicieux sur les lèvres. Situés en contrebas par rapport à elle, il n’y avait aucun risque d’être vue. Allongée, et bloquant presque sa respiration, elle tenait à être la plus discrète possible. La lumière, aveuglante, se réfléchissait sur la surface blanche de la bâtisse et ses yeux en étaient tout éblouis. Pour elle, une plaisanterie bien réussie était aussi importante que n’importe quelle mission. Auparavant, elle n’aurait pas osé gâcher ce petit rencard secret, mais maintenant que les fiançailles étaient déclarées, quoi de mal que de s’amuser un peu ? Après tout, ce n’était que sa grande sœur, Hermance, rien de bien menaçant à son goût. Les fiancés se regardaient, des étincelles plein les yeux. Leurs bras ne se lâchaient pas, caressant tantôt la joue, tantôt les cheveux lisses. Les mots échangés n’étaient que douceur sur les lèvres, et d’une banalité aberrante pour les oreilles étrangères qui les entendraient. Adélaïde attendit un peu que son aînée se blottit contre l’épaule de l’amant pour s’approcher doucement. Avec difficulté, elle s’efforçait de ne pas rire ou soupirer d’ennui devant cette scène romantique. Son seau d’eau contre elle, elle rampa sur la pierre dure, qui lui érafla douloureusement les bras. La malice valait bien quelques souffrances… Aucun des deux ne risquait de la voir à présent. Ephrem, sur le toit de la maison d’en face, l’interrogea du regard. Lui-même tenait un seau rempli. Il avait visiblement du mal à attendre plus longtemps, en raison de la chaleur ou de l’enthousiasme à exécuter la farce. Un dernier coup d’œil, et l’adolescente, d’un coup de tête affirmatif, lui fit signe que c’était le moment. Sans hésitation, ils renversèrent leur seau sur les têtes des fiancés, s’écartant vivement. Le souffle coupé par le changement si brutal de température, ils demeuraient le corps rigide et la bouche grande ouverte. N’y tenant plus, les deux plaisantins éclatèrent de rire, sous le regard courroucé d’Hermance. - Adélaïde ! La belle jeune femme, trempée, lança un regard furibond sur le toit d’en face, ses longs cils mouillés lui brouillant la vue. - Excuse-moi, c’était trop tentant ! - Attends un peu, voir ce qu’en dira Maman ! Outrée, elle essorait ses vêtements et ne cessait de marmonner ses mécontentements contre sa sœur. Pourquoi fallait-il toujours qu’elle la suive ? Elle lui était de loin dispensable, et aurait souhaité un tempérament plus doux, avec qui elle aurait pu s’entendre… Au lieu de ça, voilà qu’Adélaïde ne désirait que l’éprouver, et pour son plus grand malheur, ne manquait pas d’imagination. Lorsque Aymeric, son fiancé, se mit à rire lui aussi, Hermance se renfrogna. - Si même toi tu t’y mets… - Allons ma douce, avoue que la blague était bien trouvée… Et il fait tellement chaud, merci Adélaïde ! Après un dernier clin d’œil pétillant, la fille cadette descendit l’échelle de corde, et rejoignit son frère, fiers de leur petit tour. Ramassant les seaux, ils commençaient à se diriger vers le fleuve, lieu idéal où préparer leurs farces. Loin des oreilles indiscrètes, ils pouvaient aisément organiser leurs plans. L’eau claire, les roches brûlantes qui bordaient le fleuve et l’herbe verte offraient un cadre reposant et tout à fait adéquat. Il fallait d’abord descendre la montagne sur laquelle le village demeurait, puis suivre le sentier caillouteux, qui menait à la Potame. - Je crois que la prochaine fois qu’ils se retrouvent ce sera dans deux jours, qu’est-ce que tu prépares ? demanda Ephrem, brûlant de curiosité. Adélaïde n’eût que le temps de prendre sa respiration. Une dame d’une soixantaine d’années ne lui laissa pas le loisir de répondre. Leur ayant agrippé les oreilles, elle les regarda d’un air mi-sévère, mi- doux. - Je ne sais quel sale coup vous projetez de faire, mais si je peux vous en empêcher, je ne m’en gênerai pas ! La simplicité du geste ne leur épargnait pas quelque mal. Levant les yeux vers cette rencontre inopportune, Ephrem amorça un sourire. Bien que de profil, il reconnaissait la silhouette de cette femme pour l’avoir côtoyé bien souvent. Ne serait-ce que son ombre, était distinguable entre mille. - Oh, c’est vous Madame Soline… La sexagénaire, ayant décidée de lâcher les pauvres oreilles rougies, se posta les poings sur les hanches. Adélaïde soutenait son regard en souriant. Habituée à ces petites leçons de morale, elle n’en était décidément plus impressionnée. La dame, en face, demeurait rigide devant ces sourires candides, à croire qu’elle était dépourvue de sentiments… Pourtant, aucun des deux ne craignît de lancer la conversation. - Madame Soline, une fois que ces deux-là seront mariés nous ne pourrons plus rien faire, laissez-nous en profiter, déclara Ephrem d’un ton tendre. - Certainement pas. Depuis le début je ne sais pas s’ils ont eu le droit de se retrouver sans vous deux derrière leur ombre. Veuillez donc bien les laisser tranquilles ! - Je suis même sûr que nos blagues leur manqueront, bougonna le jeune homme. Espérant que leur ancienne nourrice parte pour avoir le chemin libre, ils ne bougèrent pas d’un iota. Cependant, la vieille dame n’avait aucunement l’intention de partir. Elle restait devant eux, bien décidée à ne pas se laisser duper une énième fois par leurs yeux angéliques. Combien de fois avaient-ils profité qu’elle ait le dos tourné pour revenir à leurs manigances ? - Allez maintenant, vos parents vous attendent, les pressa-t-elle. La nourrice les laissa filer, épaules baissées. Cette Madame Soline, elle avait gardé toute la fratrie depuis leur naissance jusqu’à leur âge d’aller à l’école. Leurs parents travaillant tous les deux, elle s’était chargée de les occuper, de les nourrir, de les laver, de les choyer. Rien ne pouvait la rendre plus heureuse. Son célibat n’en faisait pas pour autant une dame acariâtre, bien au contraire. Son cœur était aussi grand que la montagne de Hure. Elle devait ses formes à toutes les gâteries qu’elle faisait aux enfants, et ses cheveux roux, attachés en chignon, révélait toute la flamboyance de son caractère. Après un dernier regard à ceux qu’elle considérait comme ses petits-enfants, elle reprit la route de son logis, qui avait été le cadre de la farce. Lorsqu’ils furent partis, Hermance accouru derrière, ses longs cheveux dégoulinants et sa robe lui collant à la peau. Elle n’accorda pas un mot à sa sœur, cependant ses sourcils froncés en disaient bien long sur son humeur. Ils marchaient à travers les rues pierreuses, Hermance répandant des gouttes d’eau à chacun de ses pas. Leur maison apparut, au détour d’un virage. C’était une bâtisse modeste, toute de pierre construite. Elle se faisait le refuge des vagabonds, quelques fois ; et accueillait à bras ouverts les amis et voisins, passant pour le plaisir de voir ses âmes si bonnes. Elle était abritée par un toit de tuiles rouges, de quelque peu abîmé. Les fenêtres, bordées de volets bleus, donnaient sur les montagnes, tantôt sauvages, tantôt cultivées. L’air sentait bon ici, et l’on pouvait même respirer une odeur de paix. Les narines se remplissaient de tous ces parfums, sucrés et acidulés. Le jardin était soigneusement arrangé, avec toutes sortes de fleurs, colorant agréablement l’extérieur. Du thym, de la lavande, du romarin, des lys… Rien ne manquait. Les abeilles venaient butiner le pollen de toutes ces plantes, offrant un bourdonnement constant. Des oliviers et figuiers entouraient les flancs de la colline, de part et d’autre de la maison ; ainsi que des vignes, un peu plus éloignées, à l’est. Les alentours charmants, les paysages simples, l’atmosphère léger rendaient vraiment cette maison pittoresque. Sur leur petite terrasse, une femme s'approchant maintenant de la quarantaine d'années, passait paisiblement le balai. Ses longs cheveux châtain clair étaient attachés derrière le dos en une tresse épaisse. Levant les yeux vers ses enfants, elle haussa les sourcils de surprise devant Hermance, toute mouillée. - Mais enfin que t’est-il arrivé ? - Demande donc à Adélaïde, répondit-elle sèchement. Contrairement à sa réponse, elle se posta, poings sur les hanches, face à sa sœur, qui se retenait difficilement de sourire. - Figure-toi qu’elle a trouvé amusant de nous arroser, Aymeric et moi, sur la maison de Madame Soline, s’indignait-elle. Pendant que… que… - Pendant leur rendez-vous secret, finit Adélaïde avec un air romantique. - C’est ça, moque-toi. En attendant je vais mettre des heures à sécher, puisqu’elle a eu la bonne idée de me verser un seau d’eau sur la tête. Les yeux gris de la maman s’étaient agrandis d’étonnement. Elle garda le silence quelques secondes, mais finalement peu surprise qu’il s’agisse encore une fois d’une idée de sa fille cadette, son masque calme se fissura. Ses lèvres dessinèrent petit à petit un grand sourire, qui éclata en un rire cristallin. - Oh non, Maman ! Personne n’est donc décidé à prendre ma défense aujourd’hui ? - Vous deux, mettez la table. Adélaïde, prépare le repas en plus, pour la peine. Hermance change-toi, je m’occupe de ta robe, dit-elle, venant de se remettre de son accès d’hilarité. De toute façon, avec cette chaleur elle ne mettra que peu de temps. Ainsi, la petite famille s’affaira à leurs tâches, pendant que tout le village se préparait également à déjeuner. L’ensemble des maisons bâties à Hure suivait à peu près toutes la même configuration. Faites de pierre à l’extérieur, elles étaient conçues pour garder une agréable fraîcheur dedans. Les plafonds étaient soutenus par des poutres en bois et le sol recouvert de tomette. Bien entendu, l’intérieur et la grandeur variaient d’une habitation à une autre. Ici, la pièce principale se faisait fort simple : quelques beaux meubles en bois étaient calés contre les murs ; de fins rideaux blancs ornaient les fenêtres ; et quelques chaises se serraient autour d’une table, somme toute assez étroite pour six. Le logis, pauvre mais accueillant, respirait l’honnêteté. Entretenu soigneusement, il se faisait propre, humble et paisible pour quiconque en franchissait la porte. À Hure, la paix et la prospérité régnaient. Le village était logé sur la plus haute montagne de la région Bounaise, Kabru. Comme dans chaque hameau de campagne, tout le monde connaissait tout le monde, et les voyages en ville étaient presque rendus inutiles. En effet, les ressources ne manquaient pas et il n’y avait donc pas besoin de voyager vers une plus importante. Des champs bordaient les alentours du village, un fleuve descendait en cascade de leur petite montagne, du bétail grouillait partout dans les plaines... Tous les éléments s’étaient réunis pour permettre une vie agréable. Chaque habitant avait sa place, et les ressources environnantes leur suffisant pour assurer leur équilibre, ils demeuraient totalement indépendants. Les relations amicales ne manquaient tout de même pas. Au contraire, les villageois rendaient service de bon cœur. Quelques-uns, peut-être, avaient plus de mal à se nourrir chaque jour, mais jamais l’idée de quitter le village ne leur avait traversé l’esprit. Leurs difficultés n’atteignaient pas la misère, et les bonnes âmes de Hure savaient bien se rendre utiles auprès d’eux. Bien sûr, par goût du voyage et de l’aventure, certains habitants étaient partis, revenant la plupart du temps par mal du pays. D’autres encore ne se satisfaisaient plus des biens du village, et désiraient la richesse et les grandes villes. Ces personnes-là demeuraient tout de même rares, Hure comblant le cœur de chaque villageois. Quant à la fratrie et à leurs parents, jamais ils n’étaient allés plus loin que la fin de la chaîne de montagne, ou lorsque la Potame, le fleuve de la région, devenait salé. Cette caractéristique indiquait la fin de la région Bounaise, tout de collines et de vallées, pour aller vers la région morte. Celle-ci, excepté une forêt de chênes à l’ouest, n’était que sable et ruines. D’après les anciens du village, cette région avait autrefois abrité la vie, mais rien ne restait désormais que la désolation des paysages. Bien que retirés, aucun membre du village n’était ignorant. Chacun connaissait l’histoire et les événements de leur pays, Sauteras, ainsi que ses différentes régions, grâce aux livres des explorateurs. Tout le monde savait lire, écrire et compter, et chaque habitant travaillait, pour l’aisance de leur famille et le bien de Hure. Théophane, le maître de la famille en question, travaillait en tant qu’agriculteur, dans les campagnes environnantes. Ainsi, son labeur contribuait à nourrir sa famille et ne se satisfaisait que du travail bien fait. Cet homme réservé et de quelque peu stoïque, ne se souciait ni de son confort, ni des préoccupations matérielles. Ses efforts, il les offrait pour le bien commun, dénués d’un quelconque désir d’argent. Ses pensées étaient bien difficiles à cerner et on ne savait donc jamais ce qu’il souhaitait ou rêvait. Il était simple, raisonnable, aimait sa terre et pour rien au monde ne la quitterait. Certaines gens du village en avaient peur, prenant son calme impérial pour du mépris. Il faut dire que sa peau mate et ses cheveux brun comme l’ébène avaient de quoi impressionner. Pourtant, aucun autre cœur que le sien n’était plus disposé à aider. Et cela, sa femme, Victoire, avait bien su le voir. Aussi clairs que les yeux de son mari sont noirs, et aussi souriante que son mari est de marbre. La bonté de son âme n’avait pu faire autrement que de regarder au-delà de ce physique assez impressionnant. Elle s’était fiée à la profondeur plutôt qu’à l’apparence, si facile à juger. Son caractère doux mais aussi exigeant avait fait d’elle une personne toute désignée pour devenir institutrice. Grâce à elle, les enfants ont tout appris d’élémentaire, et bien plus loin que de simples leçons. Son œuvre consiste à leur apprendre la vie, tout simplement. Consciente que de nombreux parents ne peuvent offrir à leurs enfants une éducation digne de ce nom, elle y travaille, tout en leur laissant le véritable rôle. Comblée dans ce village de paix, elle eut quatre enfants dont elle n’avait jamais toléré d’écart dans leur conduite, surtout lorsque cela consistait en la générosité et l’aide. Ils se trouvaient tout aussi différents les uns que les autres, en passant par l’énergie d’Adélaïde, le romantisme d’Hermance, la timidité d’Ephrem et les mystères d’Armand. La texture de leurs cheveux ou la couleur de leurs yeux variaient d’une sœur à un frère, mais l’on distinguait leur lien fraternel avec leur belle peau bronzée et saine, et leurs pommettes saillantes, qu’ils tenaient de Théophane. L’aînée, Hermance, âgée de dis-sept ans, est déjà fiancée à Aymeric, un charmant jeune homme aux cheveux blonds comme le blé. Ils avaient grandi ensemble, et à l’adolescence leurs sentiments avaient commencé à se dévoiler l’un pour l’autre. Bien que susceptible et un brin impatient, la jeune femme fut une enfant exemplaire, soulageant ses parents d’un grand poids par son obéissance. Santé fragile à cause de toux régulières, elle ne se ménage pas pour autant. Distinguée, gracieuse, quiconque la voyait pouvait imaginer une princesse. Bien qu’assez douée pour se faire aimer des enfants, sa sœur Adélaïde vint l'exaspérer au plus haut point. Son aptitude à être raisonnable et raisonner, trouve tout son contraire en sa sœur. Énergique, toujours en quête d’aventures et pleine de joie. Elle aime sa sœur, plus jeune qu’elle de deux ans, mais le meilleur moyen pour lui montrer, selon elle, est de lui en faire voir de toutes les couleurs. Jamais son imagination ne s’épuise. Cheveux châtain-clair et bouclés, toujours en bataille font d’ailleurs l’exaspération d’Hermance, soignée, et coiffant avec soin sa chevelure brune et lisse. Seuls leurs yeux se ressemblent, tout aussi bleus que leur mère. Sa vigueur cache néanmoins un caractère inflexible, s’opposant encore une fois à son aînée. Entreprenante, si par malheur une idée lui venait en tête rien ne pourrait la faire sortir. Et son meilleur allié pour réaliser ces tours, c’est son frère Ephrem. D’un naturel réservé, tenant sans aucun doute de son père (au niveau de caractère tout autant que du physique), il forme un duo de quelque peu incongru avec Adélaïde. Leur proximité dans l’âge les aide sûrement à s’entendre. Avec qu’un an de différence, les amusements et peines sont partagés. Il a du mal à se faire des amis, mais sa timidité ne le rend que plus sympathique. C’est certainement lui le plus généreux et honnête de sa fratrie. Ne se confiant pas beaucoup, ses parents ne parviennent pas vraiment à connaître ses inquiétudes et joies. De toute évidence, ce jeune garçon renferme bien des ambitions, qu’il ne rêve que de prouver. Et enfin Armand, le dernier de la famille nombreuse. Il a les cheveux clairs de sa mère et les yeux noirs de son père, mais en est pourtant bien éloignés. Onze ans déjà et il n’a peut-être parlé qu’une dizaine de fois. On sait qu’il n’est pas muet. Pourquoi tant de timidité ? Il n’a pourtant pas l’air d’avoir peur quand on lui parle… Son comportement ne fait qu’inquiéter sa mère, qui par toute sa douceur et sa compétence n’a pas su comprendre. Le docteur intrigué n’a pas plus réussi à diagnostiquer un quelconque problème, si problème il y a. Seul le chef du village, Bariza, a un jour obtenu de lui, paraît-il, des explications sur son état d’esprit. Sur l’insistance d’Armand, il a été tenu au secret de ne rien dire. Bariza, c’est le chef du village de Hure. Ce n’est pas un vieillard, ni un sage. Son histoire est assez peu connue des habitants et rare sont les curieux assez courageux pour oser le lui demander. Tout ce que l’on sait, c’est qu’il a sauvé les villageois d’une tempête qui aurait pu leur être fatale. En effet, il y a dix-espt ans de cela, toutes les anciennes générations vivaient non pas à Hure, mais à ce qui était autrefois Rashtrapati Bhavan, dans la région morte, à côté de la mer Thalassienne. Les gens du village racontent qu’il est presque sorcier, sans vraiment connaître, sans doute, la véritable nature de ses dons. Le même esprit de fraternité régnait à l’époque, que présentement à Hure. Personne n’était dans le manque, ni la misère. Le travail n’était fait que pour vivre, sans fatigue excessive ou tyrannie. Les villages où demeuraient encore la paix ainsi, se faisaient de plus en plus rare en ce pays. Les habitants en étaient conscients et priaient pour que jamais le malheur ne les frappe. Le danger qui rôdait autour fut tout autre pour Rashtrapati Bhavan. Durant plusieurs semaines, Bariza ne bougeait plus de chez lui, envahit, paraît-il, de visions incompréhensibles. Il ne mangeait plus, ne dormait plus. Un médecin était venu de la ville pour l’examiner, mais bien évidemment n’avait rien su déterminer. À la veille du désastre, malgré sa faiblesse physique, Bariza s’était levé pour avertir les habitants. Doué de prestance et d’éloquence, il avait convaincu les habitants de la menace imminente. Avant même que la tempête n’éclate, il avait réussi à faire évacuer le village pour éviter tout danger, se fiant à ses intuitions. Homme de confiance, les villageois l'avaient cru sur parole. Bien leur en fut, car jamais le pays ne connut un tel déchaînement des eaux et des vents. La mer était sortie de son lit, ravageant toutes les habitations par la puissance dévastatrice des cyclones. Les toits des maisons cédèrent devant une telle force, des arbres furent déracinés et les plus grands bâtiments s’effondrèrent. Même la foudre fut de partie, mettant feu aux champs, d’ordinaire si secs. Toute la région Thalassienne subit ce fléau, ravageant toute la vie qui y habitait. Rien n’avait subsisté. En revenant quelques jours plus tard, les habitants ne virent que la destruction. Rashtrapati Bhavan ressemblait à des ruines datant de plusieurs siècles. Le sel de la mer avait recouvert les plantations, rendant désormais impossible toute culture. Personne ne possédait plus rien. La décision fut prise de s’installer dans les montagnes, loin des tourments de cette région. C’est ainsi que naquit Hure, après ce grand malheur. Les villageois surmontèrent malgré tout cette épreuve, perpétuant leur mœurs dans la région Bounaise. Pour les avoir sauvés, Bariza fut tout désigné pour être le chef du village. Certainement que cet homme a un passé, rempli d’aventures que nombre d’enfants rêveraient d’entendre. Mais voilà, aujourd’hui il se contente de l’administration du village, de régler quelques litiges et de cultiver la terre de Sauteras qu’il aime tant.
C’est dans ce climat-ci que, comme tous les jours, après le déjeuner, les enfants s’affairaient de quelques corvées, pendant que leurs parents se reposaient. Jamais rien d’inhabituel n’avait perturbé ce quotidien tranquille. Et qui un jour pourrait penser le changer ? Mais certainement, c’est ainsi que commence une aventure…
Hermance prit avec elle deux seaux, et se dirigea vers le puits du village, au bord de la falaise. Elle, elle savait en faire un bon usage ! Jamais elle ne pourrait comprendre les fantaisies de sa sœur… Heureusement, sa robe avait séché, comme l’avait rassuré sa mère. À travers les rues pavés, elle respirait le doux parfum des pins. L’air était si bon ! Ce travail n’était pas des plus agréables, mais enfin il fallait bien que quelqu’un s’en charge. En tant qu’aînée, pensait-elle, c’était son devoir. Elle accrocha le seau à la chaîne et la déroula jusqu’à atteindre le fond. Elle fit de même avec le second, puis, tirant une dernière fois, elle le ramena, en prenant garde de ne pas le faire chavirer. Elle redressa la tête. Au loin, au sud-est de la Potame, un énorme nuage de poussière se déplaçait à une vitesse alarmante.
Ici, on est dans une vie ou les uns et les autres sont attaches a une vie honnete,authentique ou chacun se devoue aux autres en toute simplicite. On se demande comment ces deux univers vont se rencontrer et ce qu'il en resultera. Tu eveilles tres bien cette curiosite indispensable dans une histoire !
J'apprecie aussi la facon dont tu decris les maisons et nous fait comprendre la personalite de ceux qui l'habitent, et l'atmosphere qui y regne.
Petites remarques et suggestions au fil de la lecture :
Les mots échangés n’étaient que douceur sur les lèvres, et d’une banalité aberrante pour les oreilles étrangères qui les entendraient. > ca m'a vraiment amuse! Comme c'est vrai, ceux qui ne sont pas les destinataires de mots tendres les trouvent banales a mourir!
Elle reprit la route de son logis, ayant servi pour la farce. > ... son logis, qui avait ete le cadre de cette farce? ... ou alors : "ou la farce avait eu lieu" ?
Hermance accouruT derrière,
rues pierreuses > des rues pavees de grosses pierres? Cet adjectif me semble curieux mais je me trompe peut-etre...
une femme d’une trentaine d’années > elle est la mere d'une fille de 17 ans. Elle est plus proche de la quarantaine que de la trentaine, non? A moins qu'elle soit devenue mere quand elle etait encore une jeune ado...
En effet, les ressources ne manquaient pas et il n’y avait donc pas besoin de sortir. > sortir me semble se referer a sortir d'une maison, plutot que d'un village? pas besoin de voyager jusqu'a une ville plus importante?
Cet homme réservé et de quelque peu stoïque, se trouvait totalement détaché du matériel et du confort. > "se trouvait" me donne l'impression qu'on parle de l'endroit ou il se trouve. Peut-etre "ne se souciait pas de son confort ou de preoccupations materielles."?
prenant son calme impérial comme du mépris. > interpretant a tort que son calme imperial cachait un mepris pour autrui?
Changement de temps dans le paragraphe suivant : tu changes de temps dans ce paragraphe, et cela donne une impression bizarre. Ca se passe dans cette phrase :
Elle *s’était fiée* à la profondeur plutôt qu’à l’apparence, si facile à juger. Son caractère doux mais aussi exigeant *a fait d’elle* (et non avait fait d'elle) une personne toute désignée pour devenir institutrice.
Et par la suite, tu passes du passe compose au present. A mon avis, il faut que tu prennes la decision du temps que tu veux employer dans le chapitre et que tu t'y tiennes.
Distinguée, gracieuse, en la voyant on pourrait croire à une princesse. > quiconque la voyait pouvait imaginer qu'elle etait une princesse ?
Bien qu’assez douée pour se faire aimer des enfants, sa sœur Adélaïde vint lui briser tous ses nerfs. > Bigre, quelle intensite, briser tous les nerfs? :-)
Bien qu'elle ait toujours fait des efforts pour se faire aimer des enfants, avec succes la plupart du temps, sa soeur Adelaide l'exasperait au plus haut point. Un vrai cauchemar !
Les amis sont assez durs à se faire pour lui, mais sa timidité ne le rend que plus sympathique. > Il a du mal a se faire des amis mais sa timidite....
C’est ainsi que naquit Hure, après un tel malheur. > Hure naquit de ce grand malheur?
Encore une fois, ce chapitre est vraiment reussi. Tu decris beaucoup de personnages et on les trouve attachants, on a envie de savoir ce qui va leur arriver ! Bravo.
Je ne manquerai pas de retoucher ces phrases !