« Nos traces ne nous permettront pas de revenir en arrière. »
Devise des Marteaux d’Airain
« Ha ! Matriarche Nomrad ! J’ai à vous entretenir d’une affaire de la plus haute importance ! »
L’irruption inopinée de Krim à la table de Nomrad incommodait celle-ci. Elle ne pouvait pas tranquillement se saouler seule dans son auberge favorite pour oublier sa solitude ! Pourquoi son fils avait-il quitté ses affaires d’espionnage ? Quelle raison si importante l’autorisait à déroger au protocole et d’évoquer l’affaire lors du conseil du clan en présence de Tordur ? Enfin, pour une fois ce satané gamin respectait l’usage et mettait les formes pour s’adresser à sa mère. La matriarche avait envie de lui dire de s’en aller, mais il faisait pour une fois tant d’effort que s’était impensable.
« Viens boire avec moi, mon fils ! Alors, que me vaut le plaisir de ta venue ? »
Krim prit place face à sa mère. Il se pencha pour lui glisser à voix basse son information secrète avec la certitude de n’être entendu que d’elle.
« Par ma hache ! Mère, mes espions ont fait une découverte primordiale ! Le roi Garrak détient des skavens prisonniers ! Ha ! »
« Quoi ! Des skavens ! Je croyais que notre peuple les avait éliminés depuis la guerre des goules ! Nunn a offert à notre bannière ces créatures dévoreuses d’âmes pour cela ! »
« Par ma hache ! C’est ce qu’on a voulu nous faire croire ! Les goules, les clans les ont utilisés pour séquestrer les nains-rats dans les tréfonds de l’infra-monde ! Ha ! Sauf qu’à présent, les goules veulent venir chez nous, dans le territoire qui n’existe pas ! ...Et elles m’ont confié ce secret ! »
« C’est moi qui suis saoule et c’est toi qui divagues Krim ! De toute manière, même si c’était vrai, que comptes-tu faire de ce secret ? Tu veux faire chanter le roi ? Jamais les clans ne te croiront ! Il faut des preuves mon petit ! D’ailleurs, ils doivent être dans la confidence. De plus, révéler l’existence de skavens au grand jour liguerait automatiquement toutes es bannières du bouclier-monde contre les nains ! Tu n’es pas assez stupide pour ne pas y avoir pensé Krim ! »
« Ha ! Non mère ! Mais par ma hache, je préférerais avoir ces nécromanciens dans notre camp que dans celui de mes adversaires ! Tant que nous ne devenons pas un clan officiel et reconnu nous ne pouvons pas prendre ce risque ! Ha ! »
Nomrad désirait un peu moins retrouver sa solitude alcoolisée. Enfin, son fils unique pensait à l’intérêt du clan avant sa petite personne ! Elle n’était plus ce capitaine d’un navire sans équipage ! Certes, elle avait déjà le fidèle Tordur pour l’assister, mais le sang des Marteaux d’Airain ne coulait pas dans ses veines. Alors la matriarche ne voulait pas freiner le bel élan participatif de Krim.
« Tu as peut-être raison mon fils ! Que proposes-tu de faire ? »
« Ha ! Nous pourrions envoyer nos limiers sur les traces de ces skavens. Je dispose déjà de nombreuses pistes concernant les nécromanciens. Mais par ma hache ! Il y aurait une solution encore plus efficace ! Si nous développons un nouveau territoire, encore plus grand pour les goules, avec des âmes à dévorer, je suis certain qu’elles nous offriraient ces nains-rats sur un plateau ! »
« Offrir les âmes de nos défunts à l’appétit vorace des goules ! Tu n’y songes pas sérieusement Krim ! »
« Par ma hache ! Non mère ! Pas les âmes des nains ! Nous possédons des esclaves en pagaille ! Pour une fois qu’il y a possibilité de tirer parti de leur existence éphémère ! Ha ! Nous pouvons accoler les territoires des goules aux réserves des derniers nés de Nunn. Qu’en pensez-vous ? »
« Ma foi oui, pourquoi pas. Je demanderai à Tordur de s’en occuper. »
La mère et le fils poursuivirent leurs échanges sur les perspectives d’évolution du clan jusque tard dans la nuit. Les paroles réchauffèrent le cœur de Nomrad autant que les brocs de bière. Le lendemain matin, la matriarche avaient presque tout oublié des skavens et du projet de son fils. Trois semaines plus tard, Krim revint à Kur-Dhural accompagné d’un étrange personnage.
C’était un nain horriblement voûté Tellement voûté qu’il ne tenait debout que grâce à un bâton de plélerin. Il portait une robe de bure sans âge dont la capuche lui masquait le visage. Seules dépassaient des doigts crochus aux griffes acérées. L’invité se déplaçait difficilement, comme s’il était perclus d’arthrite. Sur le qui-vive, il lançait des regards en tous sens. Il sentait autant la misère et la crainte que la puanteur de la charogne. Lentement il prit place autour de la table du conseil du clan. Il se décapuchonna, laissant apparaître un visage ridé au milieu duquel ressortaient deux incisives jaunes.
« Je ne vous ai pas invité à prendre place ! La moindre des choses serait de vous présenter ! »
« Hiii ! Désolé Matriarche Nomrad. Mon grand âge lié à mes conditions de détentions déplorables ne me permettent plus pour l’instant de me tenir debout. Je suis Saga le morbide, Maîtremort de l’ordre des nécromanciens. Je n’aurais jamais suffisamment de mots pour exprimer toute ma reconnaissance envers votre clan ! Votre fils m’a libéré d’un emprisonnement injustifié et injustifiable ! »
« Ha ! Par ma hache ! On en a chié pour vous sortir de là, Saga ! Un vrai bourbier ! Gloire à Dmor-Khal, on a pu s’arranger avec les goules ! Ha ! Mais par contre, vous ramener jusqu’à ici sans se faire chopper, c’était une autre paire de tenaille ! Ha ! »
« Hiii ! Les Marteaux d’Airain peuvent être assurés de ma fidélité sans limite. Si vous m’aidez à libérer mes semblables, nous dresserons pour vous des armées avec lesquelles vous conquérez le bouclier-monde ! »
« Ainsi, c’est vrai ! Nunn a bien transformé les nécromanciens en nains-rats pour les punir de leurs agissements contre-nature ! Je croyais que les clans vous avaient exterminé jusqu’au dernier ! »
« Hiii ! Les nains n’ont éliminé que nos exécutants ! Les sept clans territoriaux, avides de leur pouvoir nous considèrent moi et mes semblables, les quatorze mages noirs de la confrérie des enfants de la mort comme des trésors et des armes potentielles ! »
« Par ma hache ! Quatorze nécromanciens ! Deux par territoire ! Ha ! Voilà pourquoi j’avais des difficultés à les repérer mère ! Mais à présent, je sais où chercher. J’ai mis nos meilleurs cartographes sur le sujet et dès ma première investigation, j’ai libéré le Maîtremort des nécromanciens, Saga le morbide. Ha ! J’ai eu la main heureuse. »
« Et qu’attendez-vous de notre collaboration, cher Saga ? »
« Hiii ! J’aspire simplement à retrouver avec mes semblables une place dans la société. Nous pouvons nous révéler comme un atout majeur en cas de conflit. Délivrez mes compagnons et nous nous affairerons pour la guerre ! Vous voulez devenir un clan officiel et les membres du Thing nous craignent ! Avec nous à vos côtés, votre reconnaissance n’en sera que plus aisée. »
Encore une fois, après l’esclavage, pour parvenir à son but ultime, l’officialisation du clan des Marteaux d’Airain, Nomrad transgressait l’un des pires tabous de la culture naine. Tel était le chemin pour parvenir à la reconnaissance ultime. En ce jour fatidique, la matriarche inventa la devise de son clan qui correspondait à sa démarche depuis l’origine : Nos traces ne nous permettront pas de revenir en arrière.