Lettre 3

Chère Amie, Cette lettre ô combien passionnante m’a redonné le sourire. Après un si long silence, voilà que vous me revenez, désirable, enjouée et divinement adorable. Vos jeux audacieux se retourneront contre vous, sachez-le ma douce mais malgré tout, je dois avouer que ma personne se divertit de vos stratagèmes. Je dois vous apprendre que notre chère Madame de Marsault, dans ses atours de reine déchue s’est empressée de me rendre visite après son avilissement durant la soirée que donna le dauphin. Je ne fus donc guère surpris lorsque je lus cette anecdote for distrayante dans votre lettre. Elle arriva, ravissante dans son habit, céleste dans sa tristesse, redoutablement exquise dans son manteau de tristesse. Je la priai de s’asseoir à mes côtés, curieux d’apprendre ce qui la troublait. L’anxiété me taraudait, je craignais que ma Lucile ne rentre de sa balade et se heurte à mon passé à travers cette chère Madame de Marsauld. Je ne désirais point que ma jeune amie rencontre cette créature qui en aurait lâchement profité pour publier les nombreuses mésaventures qui étaient d’usage à Paris et dont je me félicite d’avoir fait parti. En effet, Ma Lucile, loin d’être pour ce Libertinage dont nous louons les mérites, abomine cet état.Mon ancienne maitresse, alors qu’elle me narrait ses malheurs, se penchait vers moi, désireuse de me montrer toute son affection retrouvée. Je me gausse de ce que vous pensez, de cette hargne, de ce plaisir que vous avez pris à la détruire, jalouse créature que vous êtes, je vous félicite même pour ce plan admirable mais ce soir-là, je me vengeais moi-même. Je me vengeais, non pas d’elle, mais de vous. Ayant demandé à la domesticité de surveiller les lieux, je l’entrainai dans le deuxième salon. Nous soupâmes et passâmes la soirée ensemble. Consumée de désir, au matin, je la renvoyais. Ma surprise vous a-t-elle plu ? Avez-vous apprécié la visite, dans votre demeure, de notre aimable Madame de Marsault ? En effet, je n’ai en aucune façon à rougir de ma conduite. Si je vous ai ombragé, mon délicieuse amour, en demandant à Madame de Marsault de vous raconter notre charmante soirée, je m’en excuse mais ce n’est qu’une réponse à votre propre témérité. Me blesser ainsi ne faisait pas partie des règles de notre petite affaire et j’ai pris la liberté vous rendre la pareille.Malgré tout, je vous informe de la suite des événements. Je sais que votre orgueil se remettra de cet affront et que bientôt, vous serez mienne. Notre douce Lucile durant ces quelques jours, a jouie d’une certaine innocence que je compte lui ravir. Vaguant à ses plaisirs, se divertissant dans les champs, protégée par les enfants Diane, chérie par les nymphes, réchauffée dans l’étreinte de Morphée, je n’ai pu que l’observer de loin. Croyant que la sorcière ne songeait plus à moi, mon âme s’arma d’un courroux effroyable et alors que je m’en allais la rejoindre, je reçus une brève missive de sa part que je vous ai retranscris :Cher Monsieur, Je vous pris de m’excuser. Alors que vous m’aviez proposé de me faire visiter les lieux, je ne vous ai pas répondu, préférant fuir cette douceur dont j’ignorais tout. Par mégarde, mon cœur a battu la chamade, alors que vous dérobiez mon âme. Depuis, je ne songe qu’à vous, alors que la campagne ne peut me divertir. Me soustraire à ces instincts me parait terrible et je vous supplie d’accorder un peu de temps à la misérable femme que je suis. Je prie le ciel que vous répondiez à cette épître, dans le cas contraire, je me plierais à vos désirs en tentant, vainement, de vous oublier. Que votre réponse ne tarde pas.Avec ma tendre affection Lucile de Gerry.Quelle maladresse! Vous conviendrez que c’est avec maestria que j’ai rendu cette enfant parfaite. Quelle divine petite fille. Comme je le désirais, elle est ouverte à tout amour, prête à s’abandonner toute entière, avec volupté à ses désirs. Je la possèderai. Bientôt, après avoir régler cette petite affaire qui me comble de joie, je reviendrais à Paris, où vous m’attendrez dans le lit nuptial. Attendez-moi. Le dauphin, quant à lui, ne vous dérobera pas à moi. Qu’il cesse de s’immiscer dans notre société. Ce serait comme rendre ma douce Lucile aussi voluptueuse que vous. Je vous désire, vous me désirez et le monde tourne ainsi. Je songe d’ailleurs, que Mademoiselle de Gerry séduirait le dauphin avec grande facilité, lorsque je l’aurais instruite sur les mœurs libertines. Qu’en pensez-vous ? Ne serait-ce pas distrayant de voir le trône d’Agnès d’Ezenay usurpé par une enfant ?Je me languis de vous ma douce. Que vos enfantillages cessent dès à présent.

Thomas Des Grieux.

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