Un voile s’est posé sur ses yeux. Non pas noir, ni gris, ce fut un voile si léger et imperceptible que personne n’était susceptible de l’apercevoir. Sauf elle, pour elle il est bien présent, pesant sur ses paupières qu’elle peine à tenir grande ouverte. Elle ne se souvient plus quand il a commencé à lui peser sur les épaules, sur ses yeux jusqu’au creux de ses mains et aux longs de ses bras. Elle se sent si lourde.
« Tes mains sont pourtant si petites ! Comme celle d’une princesse ! »
C’est vrai qu’elles sont petites, de chétives mains d’enfants dont le corps aurait grandi trop vite. Ses yeux ont gardé le voile de l’enfance, celui qui s’est posé là pour les recouvrir et ne plus jamais repartir.
« Il ne peut pas ou tu ne peux pas ? Ou tu ne le veux pas ? L’incapacité et la volonté ne font pas bon ménage ma petite étoile. Tu sais, s’il y a bien une seule chose qui te différencie des autres c’est que tu sais pourquoi tu es devenu comme ça et comment tu le resteras si tu ne fais rien. Et pourtant, tu sais pertinemment comment tout relâcher voir ce qu’il adviendra si tu le décides. Au bout du compte tous les choix sont entre tes mains. »
Il a raison et elle ne le supporte pas. Si elle lui dit qu’il a raison, alors il aura ce regard supérieur accompagné de son sourire - ce sourire !- qu’elle déteste tant. A quoi bon savoir ? Si elle sait en quoi les choses changeront ? On ne change pas les choses comme ça, surtout si elles puent la mort comme cette chose-là. Oui, elle suinte la mort à en vomir. Si elle garde ce voile, c’est qu’il suffit à la protéger, derrière lui elle peut pleurer à son aise. Elle peut hurler, incendier le monde pour ensuite lui sourire de ses lèvres rose. Il ne faut pas qu’ils la voient implorer ce Dieu invisible. Elle ne le supporterait pas. Ça non plus, non jamais, par pitié, pas encore !
Elle ne pourrait pas, elle n’y parviendrait pas. Ses larmes sont rouges, ses cris aussi rauques que les hurlements d’une louve sauvage affamée. Elle a faim. Non pas de cette douce faim facilement rassasiée. Elle a faim de cette violence qu’elle a cent fois reprîmée jusqu’au fond de ses entrailles. Quand elle explosera, que cette faim s’exposera au monde, ce sera fini pour elle, pour eux et pour toi : maman.
Pardonne-moi, je ne le puis plus. Je sais que je suis toi et que tu es moi, mais je ne le supporte plus. Pas encore, ni jamais, non je ne le puis plus. Pars sans moi. Laisse-nous derrière. Encore un peu, encore un pas. Tu vois que ce n’est pas si difficile.
Adieu.
Un texte très joli, terriblement mélancolique, tout particulièrement la fin qui pousse et acte une séparation. J'ai beaucoup aimé cette idée du "voile", que j'ai interprété au fur et à mesure presque comme une sorte de masque ou d'armure pour se protéger de l'autre et de l'ailleurs.
Merci pour le partage.
J'espère que les examens se sont bien passés et que l'inspiration est revenue !
A bientôt !
Ravis de te revoir, et merci pour ton commenraire ^^ Les examens terminés je vais pouvoir recommencer à vous partagez quelques textes !
Celui-ci était en effet très mélancolique x) Je ne m'en écarte que très rarement malheureusement ou heureusement...
Merci encore et à bientôt !
Acantha