« Je suis désolé de vous l’annoncer, mais en ce qui concerne mon mari vous venez dix ans trop tard. »
« Nous sommes au courant Mme Mulfort, toutes nos condoléances… » s’excusa Lucie tout en fixant la femme âgée en face d’elle. Toutes les trois étaient actuellement assises dans le salon. « Ce que nous aimerions savoir, c’est si la phrase « Le monde aura beau changer, les chats ne pondront jamais » vous dit quelque chose ? » demanda-t-elle tout en tendant la carte
« Je n’aurais jamais cru l’entendre ou la lire un autre jour. »
« Madame, savez-vous ce qu’elle signifie ou qui aurait pu l’envoyer à votre fille ? » questionna cette fois-ci Anne
« Aucune idée, nous ne l’utilisions qu’entre nous trois, occasionnellement. Et de ce qui est la signification, c’était une promesse d’être toujours là les uns pour les autres. »
« La vie n’était pas facile ? »
« C’est le moins qu’on puisse dire. Il y a trente ans, l’entreprise pour laquelle Robert travaillait a fait faillite. Après cela, notre famille a sombré dans l’alcoolisme et la drogue. Zack était encore jeune quand c’est arrivé et je n’ai rien fait pour l’aider. C’est ce que je regrette le plus aujourd’hui... » avoua-t-elle avec quelques larmes aux coins des yeux.
Anne, se sentant touchée par l’histoire, baissa la tête tandis que Lucie repris avec d’autres questions.
« Mme Mulfort, comment était Zack avec sa sœur ? »
« Malheureusement, je ne m’en souviens pas clairement… »
« La drogue » affirma Lucie sans sourciller d’un pouce tandis que la plus âgée détourna le regard.
« Je n’étais pas la mère idéale, je l’admets, mais j’aimais mes enfants. »
« Nous ne vous contredisons pas madame… ce que nous aimerions savoir c’est comment cette phrase s’est retrouvée dans cette lettre, et si elle pouvait nous aider à arrêter son tueur ? » reprit Anne en lançant un regard d’avertissement à Lucie. Mais celle-ci ne fit que froncer les sourcils en réponse.
« Quand...quand les choses allaient mal à la maison. Quand Robert devenait violent… avant la naissance de Jaimie, j’avais l’habitude de me cacher avec Zack dans un placard, et pour le calmer je lui répétais cette phrase. Pour lui faire comprendre que je serais toujours avec lui. Je suppose qu’il faisait pareil avec sa sœur. »
« Comment était-il au lycée ? » demanda Lucie tout en notant ce qu’elle venait de dire dans son carnet
« De ce que ses professeurs ont pu me dire, il était calme, introverti… sans amis » déclara la mère en baissant une nouvelle fois la tête face au passé de son fils
Avant que Lucie ne puisse reprendre là où elle était, la porte d’entrée s’ouvrit, laissant entrer Jaimie Cryphyte.
« Maman, je suis de… Agent Play que faites vous ici ? » demanda Jaimie en voyant les trois femmes assises ensemble.
« Bonjour… nous ne faisions que poser des questions à ta mère concernant l’affaire de ton frère » répondit Lucie avec un petit sourire.
« Vous enquêtez à nouveau ? »
La lueur d’espoir dans la voix de Jaimie fit momentanément tressaillir Lucie. L’affaire n’était qu’à son début, mais elle avait déjà cerner l’ampleur de la difficulté qu’il faudrait pour la résoudre. Elle ne voulait en aucun cas donner de faux espoir à la jeune femme.
« Pouvons-nous parler toutes les deux quelques minutes ? »demanda l’agent en faisant signe à Anne de continuer avec la mère. Ceux à quoi tout le monde hocha la tête.
Une minute plus tard, Lucie et Jaimie se retrouvèrent assises à la terrasse de la maison. Face à face, l’agent ne savait pas réellement par où commencer, mais heureusement pour elle, la femme prit la parole.
« Elle a changé, vous savez » déclara-t-elle avec une pointe de nostalgie dans la voix
« Votre mère »
« Oui… après la mort de Zack, tout a changé… ça a été un vrai choc pour tout le monde en particulier pour ma mère. Mon père lui n’a pas vraiment… ou du moins, il ne le montrait pas. »
« Alcool ou drogue ? »
« Drogue pour ma mère, et alcool pour mon père plus les jeux d’argent. » répondit Jaimie en se frottant nerveusement les mains, le passé de ses parents la hantait toujours aujourd’hui.
« Comment réagissait Zack face à ça ? »
« Mal. Avec moi, il était toujours attentionné, même avec notre mère. Mais quand mon père revenait du travail ça virait vite à la dispute. Il ne se laissait pas faire. Courageux à la maison, mais traité de lâche au lycée, une vraie blague… »
« Il avait des soucis là-bas ? »
« Pas de gros problème, du moins, de ce qu’il me disait. Mais des brutes du lycée ne le lâchaient pas… »
« Vous savez pourquoi ? » demanda Lucie intriguée par cette information, sachant qu’elle n’était pas dans le dossier.
« Une marque de naissance au-dessus du sourcil droit… un critère idiot »
« Et il vous a dit qui le brutalisaient ? »
« Nan, juste que c’était comme dans les films, les populaires contre les autres. Vous pensez que l’un d’eux a pu le tuer et m’envoyer cette lettre ? »
« On ne peut rien assurer maintenant, mais je creuserais… »
Plus loin, dans le salon, des sanglots pouvaient être entendus. Reportant son regard sur Jaimie, Lucie la vit retenir ses propres larmes, tout en serrant ses mains le plus fort possible.
« Mes parents n’étaient pas les meilleurs du monde, mais mon frère lui l’était. Ça n’aurait jamais dû lui arriver. » déclara-t-elle d’une voix rauque tout en verrouillant son regard sur celui de la femme.
« Je suis désolée… »
« Le plus ironique, c’est qu’il m’avait promis d’être là le jour de mon mariage, et maintenant ça… » à cela, Lucie ne sut quoi répondre et garda le silence.
Une heure plus tard, la femme s’affala sur une chaise près de la machine à café de l’immeuble fédéral. Quelques secondes plus tard, Anne la rejoignit en lui tendant un café, qu’elle accepta avec joie. Soupirant de soulagement à la boisson chaude, elle ne tarda pas à débuter leur conversation.
« Alors comment s’en est sorti le stagiaire ? »
« Et bien, je n’ai reçu aucunes plaintes donc je dirais qu’il fait du bon boulot pour l’instant et toi… comment tu vas ? »
« J’ai la tête en vrac… de toutes les personnes possible, il fallait qu’on tombe sur le timide du lycée… bon sang, c’est horrible de dire ça » dit-elle en se massant les tempes. « Encore désolée de t’avoir embarqué là dedans, c’était soit ça, soit un des amis de Monier… »
« Aucun problème, je comprends, heureusement que notre bureau est assez laxiste sur ça… »
« Si tu le dis… » gémit Lucie, laissant cette fois-ci sa tête tomber sur la table en métal. Le froid soulageant son début de migraine.
« Dis moi, pouvons-nous parler de ton comportement vis-à-vis de Mme Mulfort plus tôt ? » demanda calmement Anne sans quitter des yeux son amie. Ce qui lui permit de ne pas manquer le petit tressaillement de celle-ci.
« Non »
« Bien… alors rentre chez toi, on verra la suite demain. »
« C’était un gamin il avait pas à vivre tout ça… encore moins en partie à cause de ses parents… » déclara Lucie en gardant la tête baissée et les yeux face à la table. À ses côtés, Anne qui avait commencé à se lever, tapa gentiment la table tout en chuchotant :
« Rentre chez toi... »
Voila une histoire bien rondement menée de ta plume acérée
Tenant ton lecteur en haleine de le voir combler ses peines
Me voilà haletante, impatiente de lire la suite
Amicalement,
Roxy