Arrivées au bureau de Sebastian, Lucie et Anne ne perdirent pas de temps à le trouver. Ignorant vivement sa secrétaire qui criait qu’il était en réunion, elles ouvrirent calmement la porte et virent la surprise, puis la colère, et enfin la frustration traverser les yeux du PDG en les voyant.
« Agent Play, que puis-je faire pour vous cette fois-ci ? » demanda-t-il en croisant les bras.
« M. Simy, savez-vous que mentir à un agent est passible d’un emprisonnement ? On peut y rajouter le fait de faire entrave à une enquête… »
« Je ne vois pas de quoi vous parlez. J’ai répondu à vos questions… »
« Pourquoi n’avoir pas dit que vous faisiez partie des brutes qui s’en prenaient à Zack au lycée ? » questionna Anne avec détermination.
« Ou que vous aviez des histoires à régler avec lui ? » suivit Lucie avec un petit sourire.
Face aux femmes, Sebastian comprit qu’il était piégé par son passé. Serrant la mâchoire face aux questions, l’homme garda tout de même son calme.
« C’est vrai, j’étais un des garçons qui s’en prenaient à Zack. Mais j’étais jeune. J’ai fait des erreurs que je regrette aujourd’hui. À l’époque, je ne comprenais pas réellement ce que signifiaient ces attaques », répondit-il presque en chuchotant.
« Quelle était la raison de celles-ci ? »
« Des histoires d’adolescents, rien de plus. »
« Il nous en faudra plus pour nous convaincre », rétorqua Lucie en croisant les bras.
« Des rumeurs disaient qu’il était amoureux de ma petite amie, je devais donc lui donner une leçon. »
« Comme quoi ? »
« Le frapper… et… »
« Et ? »
« Le menacer », soupira-t-il en se frottant le front. « Mais j’étais jeune ! Je sais que je n’aurais pas dû, mais… »
« Que s’est-il vraiment passé ce soir-là ? »
« Rien ! J’étais allé le voir sur le parking de la bibliothèque pour lui parler et on s’est fait kidnapper ! »
« Pourquoi ne pas l’avoir dit à la police ? »
« Parce qu’ils m’auraient suspecté alors que je n’ai rien fait ! »
« Quel est le nom de cette petite amie ? »
« Elle n’a rien à voir là-dedans ! »
« Ça, c’est à nous de le vérifier. Alors, soit vous nous le dites, soit on va le découvrir nous-mêmes », répondit Lucie.
« Alors, nous en avons fini ici. Je refuse de continuer sans la présence de mes avocats », déclara Sebastian en se levant de sa chaise. Voyant qu’elle ne pourrait rien retirer de plus de l’homme, les femmes hochèrent la tête avant de commencer à faire demi-tour vers la sortie. Mais avant qu’elle ne puisse fermer la porte, Anne prit la parole :
« Appelez-les, parce que la prochaine fois qu’on viendra, ce sera avec un mandat », déclara-t-elle, ne voulant pas quitter la pièce avant d’avoir dit une dernière chose, surprenant au passage Lucie et l’homme.
Voyant qu’il n’y avait plus rien à ajouter, elles refermèrent la porte, laissant Sebastian dans sa colère. Mais alors qu’elles attendaient l’ascenseur dans le hall, la voix de la secrétaire attira leur attention.
« Mme Simy, votre mari peut vous recevoir, excusez le dérangement », dit-elle à une personne.
Se retournant pour mieux voir celle-ci, Lucie et Anne virent une petite femme asiatique se diriger vers la porte du bureau.
« Asiatique… »
« Femme… » finit Lucie en ne quittant pas la concernée du regard jusqu’à ce que la porte se ferme.
« Pourquoi ai-je un pressentiment ? » demanda Anne tout en reportant son regard sur les portes de l’ascenseur qui s’ouvrirent.
« Parce que tu commences à cerner le boulot », répondit Lucie tout en rentrant dans l’ascenseur, jetant un dernier regard à la porte du bureau.
Une heure plus tard, elles étaient à nouveau assises au bureau de l’accueil. Apportant un autre café à Lucie, Anne lança un coup d’œil discret à Lucas qui était un peu plus loin sur son ordinateur, avant de reporter son attention sur les images étalées sur la table.
« Jolie... » déclara-t-elle sarcastiquement face aux photos du cadavre de Zack. « Pourquoi regardes-tu ces photos ? »
« Pour y déceler quelque chose qu’on aurait loupé. Un objet peut-être, ou je ne sais pas… une fracture... »
« Tu sais que tu n’es pas légiste ? Rassure-moi... »
« Je sais, c’est pourquoi je les ai données à une amie qui l’est. Peut-être qu’elle pourra y voir quelque chose... »
« Jessica ? »
« Non, Martha… tu sais, celle qui nous a aidées pour le chien l’année dernière. »
« Ah oui, c’est vrai. Pauvre chien. »
« Pauvre chien », répéta Lucie en commençant à boire le café. « Tu as du nouveau concernant la petite amie ? »
« Nan, rien pour l’instant. Le stagiaire m’aide à chercher quelle fille aurait pu être la petite amie de M. le PDG, mais nada. »
« Le stagiaire t’y aide ? »
« Quoi ? Ah non, tu n’as pas le droit de me juger, je te rappelle que je travaille avec toi sur cette affaire alors que ce n’est pas mon boulot ! »
« C’est vrai, le tien c’est d’indiquer les bons étages, et de prendre des rendez-vous… c’est tellement plus passionnant... » se moqua Lucie en prenant une gorgée.
« Aha, et toi du côté de l’amie de la victime ? »
« Quinze filles étaient du type asiatique dans ce lycée. J’ai demandé à Jaimie si elle avait des photos de son frère au lycée, elle devrait m’envoyer ça dans pas longtemps. »
« Donc, pour l’instant, on est au point mort... »
« Ça s’appelle enquêter... » répondit Lucie en commençant à lire une nouvelle fois le dossier.
Près de deux heures plus tard, le stagiaire et Anne revinrent en courant vers Lucie qui était en train de regarder les photos que Jaimie lui avait envoyées.
« On a trouvé quelque chose ! » s’exclama Anne en posant l’annuaire du lycée au-dessus des papiers étalés sur la table. L’autre femme, surprise, ne fit que froncer les sourcils avant de se concentrer sur le livre. Face à elle, une image était légendée comme l’équipe de football après avoir gagné un match en 1999.
« Qu’est-ce que je suis censée voir ? » demanda-t-elle en lançant un regard aux deux autres.
« Ici, regardez bien ! » dit Lucas tandis qu’Anne pointa du doigt deux personnes.
« C’est Simy et… » commença Lucie en plissant les yeux pour mieux voir.
« Sa petite amie… » continua l’homme.
« Asiatique », finit Anne avec un sourire. Mais avant que Lucie ne puisse dire quoi que ce soit, son téléphone vibra. Le déverrouillant pour savoir de quoi il s’agissait, elle ne fit pas attention à Lucas et Anne qui avaient commencé à se parler.
« La femme de Simy est asiatique ! » déclara la femme.
« Il se pourrait que ce soit la même fille », continua l’homme en sortant son téléphone pour chercher la femme en question. Une seconde lui suffit avant de la trouver sur une photo publique au côté de son mari. « Son nom est Chao Simy. »
En entendant cela, Anne commença à fouiller l’annuaire une nouvelle fois avant d’arriver sur la photo d’une jeune fille asiatique. « Voici Chao Lin, petite amie de Simy en 1999. »
« Et amie de Zack », déclara Lucie en attirant leur attention. Tournant son portable vers eux, elle montra une photo du garçon au côté de Chao vingt ans plus tôt.
« Donc Zack connaissait Chao... » affirma Anne.
« Elle était à l’époque la petite amie de Simy », suivit Lucas.
« Et maintenant sa femme, d’où la raison de sa non-coopération », finit Lucie avec fatigue.