Peter

Notes de l’auteur : Désolé pour le petit retard. Un petit problème de commentaire. Bonne lecture !

PETER

Alors que je sors de ma chambre en compagnie de Camille, j’aperçois quelqu’un allongé sur un brancard, qui sort du bureau du Docteur Martins. Je me met à courir en reconnaissant la personne allongée et agrippe les barreaux du brancard.

 

— Qu’est ce que tu as, Emma ? demandé-je, inquiet. 

 

A ce moment-là, plein de choses me viennent en tête. Elle a tenté de se suicider ? Elle s’est scarifiée ? Est ce qu’elle est transférée dans un autre centre ? Non, elle ne peut pas. 

 

— Rien, ne t’inquiètes pas. J’ai juste fais un petit malaise et il m’oblige à aller aux urgences mais je serais sûrement de retour ce soir. Essayez d’aller voir Soraya, elle a besoin de réconfort.

 

Je les regarde, elle et Magalie, quitter le service, Camille à mes côtés.

 

— Ne t’inquiète pas Peter, me dis la psychologue. Je suis sûr que ce malaise n’est pas grave. Elle reviendra vite. 

 

Elle me donne une tape sur l’épaule et retourne dans son bureau. 

 

— On essaie d’aller voir Soraya ? m'interroge Camille.

 

Je me remet de mes émotions, même si une pointe d’inquiétude persiste. Je hoche la tête et nous nous dirigeons vers la chambre de Soraya et d’Emma. Je laisse Camille toquer, puisqu’il faut taper avec une vitesse de je ne sais plus combien de kilomètres par heures pour qu’elle nous entende. Du grand Camille. Alors qu’il ouvre la porte et commence à s’engouffrer dans la chambre, un infirmier nous interpelle.

 

— Sylvain, je sais qu’on a pas le droit mais elle a besoin de nous. S’il te plaît, juste 5 minutes. Je te jure qu’on fais vite.

 

— Désolé les gars, mais c’est non. Par contre, vous pouvez vous retrouver ailleurs.

 

On entend du bruit dans la chambre. Soraya est venu nous rejoindre, probablement sans comprendre pourquoi la porte s’est ouverte mais que personne n’est venue la voir.

 

— Désolé les garçons, mais j’ai envie d’être seule. On se voit demain, nous annonce Soraya.

 

Alors qu’elle commence à s’enfoncer dans la pénombre de sa chambre, je l’interpelle violemment, sans trop le contrôler.

 

— Rendez-vous dans 10 minutes dans notre espace. Emma nous as confiée une mission et j’ai bien l’intention de m’y tenir. Si tu ne viens pas, je te sortirais de là de force. C’est clair ?

 

Plus personne n’ose prononcer un mot. 

 

— Très bien Colonel Peter, laissez cette charmante demoiselle. Tu la verras demain, elle ne bouge pas d’ici. Et toi non plus, sauf si tu as prévu de fuguer cette nuit. Allez, trouver quelque chose à faire les garçons, nous dit Sylvain.

 

L’infirmier s’éclipse pendant que nous nous dirigeons vers l’espace détente. Nous discutons de tout et de rien, mais à force d’être enfermé ici, on a facilement fait le tour des conversation. Alors que nous commençons à juger les voitures garées sur le parking, une voix féminine nous parvient.

 

— Me voilà, Colonel Peter, dit Soraya, d’une petite voix. Emma n’est pas là ?

 

— Non. Elle est aux urgences. Apparemment, elle aurait fait un malaise pendant une séance avec la psy. Magalie est avec elle. Elle devrait revenir ce soir ou dans la nuit, annoncé-je. 

 

Elle hoche de la tête, le regard dans le vide. Elle vient s’asseoir à côté de moi. Je dois avouer qu’elle a une sale tête. Il y a des résidus de larmes sur ces joues pâles, et ces yeux sont rouges. 

 

— En fait, Emma nous as dit que tu avais besoin de réconfort. En quoi on peut t’aider ? demandé-je.

 

— En rien, mais c’est gentil de penser à moi. J’ai pas vraiment la force de parler.

 

— Tu sais, on n’est pas obligée de parler. 

 

Nous regardons le couloir principal. A cette heure-ci, tout est calme. Camille revient, après s’être éclipsé un instant, avec son cahier de mathématiques et s’installe sur une table. A partir de ce moment, je sais qu’on ne va pas l’entendre pendant 30 minutes. Je tourne ma tête pour observer la beauté de Soraya, toujours sans un mot, lorsqu’elle pose sa tête sur mon épaule.

 

Nous restons là, assis à regarder le vide pendant un moment. A ce moment, c’est comme-ci que mon corps se met hors circuit. Tout disparait autour de moi, sauf un halo de lumière braqués sur Soraya. Je sens mon cœur battre dans ma poitrine, comme s’il allé exploser, j’ai des papillons dans le ventre et toute mes pensées se dirigent vers elle. J’oublie les murs de l’hôpital et le passage constant des infirmières. Je nous imagine sur une colline, loin d’ici, en train de pique-niquer. Le vent fait valser ces cheveux blonds et elle rit aux éclats, oubliant toute la souffrance qu’elle a vécu.

 

 Pendant ce temps, je sors un carnet à croquis et des crayons. Je la dessine, elle. Son sourire, son teint pâle, les montgolfières colorées derrière elle. Tout est parfait. Jusqu’à ce que Camille me ramène à la réalité.

 

— Peter, je vais rendre mon manuel et il faut que je vois le Docteur Martins. A tout à l’heure. On se rejoint tous à 16h à la cantine.

 

Je hoche la tête et Soraya relève la tête de mon épaule. En regardant les crayons et les feuilles blanches posées sur la table basse, je me rappelle que j’ai une surprise pour elle.

 

— Suis moi. Il faut que je te montre quelque chose. Je suis sûre que tu vas adorer.

 

Je lui attrape délicatement la main, et la conduit jusque dans ma chambre. Étant donnée qu’elle n’a pas le droit d’entrer dans la chambre des garçons, je la fais patienter sur le seuil de la porte. Elle reste là, debout. J’attrape mon carnet et retourne vers elle.

 

— Je l’ai fais un soir où je ne trouvais pas le sommeil. Tu es l’élément central et je sais que tu as vécu des choses compliquées. Tu veux que je t’explique la signification ?

 

Elle hoche la tête, attrapant délicatement la feuille et la fixant. Je vois ces yeux s’humidifier.

 

— Au centre, il y a toi, avec tes magnifiques cheveux blonds mais la peau grise. Tu avais perdu toute forme de vie, avant d’arriver ici, et même en étant ici. Tu as des ombres noires, qui représentent tes démons intérieurs. On en a tous, et je pense que c’est à ça qu’il ressemble. Mais derrière toute cette noirceur, il y a 3 personnes qui tiennent à toi et qui ajoute de la couleur à ta vie. Grâce à elle, tu retrouves la joie de vivre.

 

Je m’arrête et constate qu’elle pleure. Gêné, je ne sais pas si je dois l’enlacer ou la laisser pleurer.

 

— Merci Peter. Ce dessin est très beau. Tu as vraiment un don. J’aimerais tellement savoir dessiner comme toi. Je n’ai pas de don particulier, moi.

 

— Si tu veux, vu qu’on a un peu de temps, je peux t’apprendre 2-3 trucs. J’attrape mes crayons et on va dans l’espace détente. Ça te dis ?

 

Elle hoche la tête et me rend le dessin.

 

— Je te l’offre, dis-je, un sourire béat plaqué sur mon visage.

 

Elle hoche timidement la tête, ces joues rougissent. Je me dirige vers l’armoire et attrape ma grosse mallette de crayons de couleurs ainsi que du papier Canson. Les bras chargés de mon matériel, nous nous dirigeons vers l’espace détente. Il y a une sorte de tension entre nous, mais rien de désagréable. Je sens qu’elle me regarde, même si elle essaie d’être discrète. Nous arrivons et le papier Canson glisse de mes mains moites. Nous nous installons autour de la table.

 

— Dans le dessin, ce qui compte, c’est ce que tu veux exprimer. On s’en fiche que ce soit beau ou moche.

 

Je me sens complètement dans mon élément. J’agrippe un crayon lui montre petit à petit ce qu’elle doit faire. Elle reproduit la même chose que moi, un vieux personnage de BD que j’ai inventé étant enfant. Nous nous étalons sur la table si bien que l’une des gommes tombent au sol. Je me penche alors pour la ramasser en même temps que Soraya, et nous nous cognons l’un dans l’autre.

 

— Oh mince. Désolé. Ça va ? Tu n’as rien ?

 

Alors qu’elle ouvre la bouche pour essayer de parler, un filet de sang en sort. Je m’en veux terriblement. Je suis constamment obligée de tout gâcher.

 

— Tu ne pensais quand même pas que j’allais te laisser avoir un rencard avec cette fille sans tout gâcher. Si elle était assez idiote pour s’intéressait à toi, maintenant, ce n’est plus le cas. Sois en sûre. Personne ne peux aimer un garçon imprévisible et dangereux.

 

Paniqué, j’attrape son bras pour la faire se lever et nous nous dirigeons vers le bureau des infirmières.

 

— Je suis tellement désolée, Soraya. Je me voulais pas te faire mal. Je m’en veux tellement.

 

Elle me regarde et acquiesce, je ne sais pas vraiment pourquoi. Nous arrivons au bureau des infirmiers où Sylvain grignote des bonbons.

 

— Que s’est-il passé ? me demande t-il, paniqué à la vue du sang qui sort de la bouche de Soraya.

 

— On s’est baissé pour ramasser une gomme et on s’est cogné. Elle saigne et ça ne veux pas s’arrêter. 

 

Nous nous asseyons dans les fauteuils de bureaux et Sylvain me donne une poche de glace à mettre sur ma tête, avant de s’occuper de Soraya. Je reste là, à regarder le gros coton imbibé de sang qui sort de sa bouche.

 

— Bah alors, il s’est passé quoi ? nous demande Magalie et Emma, fraîchement revenu des urgences. 

 

— On s’est cognés, c’est tout. Et toi, ça va ? demandé-je, pour vite changer de sujet et oublier cette gêne.

 

— Comme je l’avais dis je vais bien. 

 

Un sourire moqueur s’affiche sur le visage d’Emma tandis que Magalie se dirige vers Soraya. 

 

— Vous n’avez pas fait semblant, mais ça arrêté de saigner. C’est bon signe. Tu devrais aller t’allonger un peu avant de dîner, Soraya. Tu pourras retirer la compresse avant de manger. 

 

Nous remercions les infirmiers, puis nous nous dirigeons chacun dans notre chambre. Alors que je retourne dans l’espace détente, je sens que quelqu’un me suit. Et cette personne n’est vraiment pas discrète.

 

— Alors, vous vous êtes cognés par “accident” ? Me demande Emma, sur le ton d’une petite fille adorable.

 

— Oui. On a voulu ramasser une gomme qui est tombé et on s’est cogné. Il n’y a rien d’étrange.

 

— Mais oui. Et juste avant ça, vous étiez juste tous les deux en train de dessiner sachant que Soraya ne dessine pas ?

 

Elle fait un cercle avec ces doigts désignant la table sur laquelle sont posée tous mes outils de dessins. 

 

— Soraya voulait que je lui montre quelques astuces en dessin. Je pourrais t’en montrais aussi, si tu veux.

 

Elle commence à rire de bon cœur.

 

— Sans vouloir être vexante, Peter. Tu n’est pas mon genre de garçon. Réserve toi pour Soraya.

 

Je lève brusquement la tête, mon teint devient pâle.

 

— Au lieu de débiter des âneries, pourrais-tu m’aider à ranger ?

 

— Laisse moi réfléchir un instant.

 

Il y a un silence de quelques secondes.

 

— Non. Tu assumes les conséquences de ton rencard. Si tu veux, je peux voir avec elle si tu lui plais.

 

Elle s’installe dans un ces canapés, me regardant ranger ce bazar.

 

— Non merci. Mais ta gentillesse me touche, dis-je, sur un ton sarcastique. Et ce n’était pas un rencard. Juste une activité entre deux amis. On s’ennuie tellement ici. Et c’est toi qui m’a dit de la réconforter, je te signale.

 

Elle se lève brusquement.

 

— La réconforter, pas la draguer. Elle est au plus mal, et il n’a pas besoin d’une histoire d’amour en ce moment. 

 

Alors que je reprends mon rangement, j’aperçois qu’elle a laissée le dessin que je lui ai fais sur la table. Je l’agrippe, le regarde longuement puis le tend à Emma. 

 

— Tu peux donner ça à Soraya, s’il te plaît ? 

 

Elle me prend le dessin des mains, le fixe longuement et son visage plein de colère s’adoucit. Elle me jette un dernier coup d’œil et quitte la pièce.

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