De retour dans sa chambre, Sally regagna ses draps avec suspicion.
Mais la femme qui l’avait trouvée semblait se préoccuper sincèrement de son sort. C’est pourquoi elle ne disait rien et l’observait, à distance. Elle était vêtue d’une blouse et d’une coiffe blanches.
Tout était blanc ici. Comme sa mémoire.
Pour compenser le silence de sa patiente, l’inconnue parla. Elle souhaitait combler le malaise de Sally jusqu’à envahir les murs de paroles qu’elle souhaitait réconfortantes :
"Sally, c’est moi, Jeanine. Jeanine Ledoux ! Je suis votre voisine ! Votre amie !... Et accessoirement votre infirmière aussi !
De toute façon, vu votre état… et ce qui vous est arrivé… je n’aurais laissé à personne d’autre le soin de veiller sur vous !
Ah quelle tragédie ! ”
Elle se tut dans l’attente d’une réaction. Mais Sally semblait méfiante.
“À vos expressions, je vois bien que vous semblez perdue… ”
Elle voulu prendre les mains de Sally qui recula d’un geste instinctif.
“Vous souvenez-vous de l’incendie ?”
Sally tenta de se remémorer quelque chose… en vain. Elle secoua la tête négativement.
Jeanine en semblait peinée mais trancha : “Pour l’heure, le plus important c’est votre guérison ! Car vous revenez de loin, ma chère... ” Elle employa toute la douceur possible avant de se rapprocher une nouvelle fois de Sally qui se laissa faire cette fois.
“Ciel ! Vous êtes glacée ! Tenez, prenez cette bouillotte ! Pas à main nue, attention ! Cela ne ferait qu’aggraver votre peine…”
En effet, Sally grimaça de douleur. La chaleur ravivait ses sensations et elle préférait les oublier. Mais il n’était pas question non plus de mourir de froid.
“Attendez, je vais la glisser pour vous dans la taie de votre oreiller. Serrez-la contre vous à votre convenance. Elle vous réchauffera sans vous brûler. "
Elle resta quelques minutes à l’observer avant d’ajouter :
“Visiblement, vous n’êtes pas tout à fait vous-même… Mais peut-être que la visite de M. votre mari vous remettrait les idées en place ?”
Sally eu un frisson dans le dos. Elle ne se sentait pas prête à affronter un parfait inconnu comme mari. Et devant cette expression d’effroi, Jeannine se repris :
“Quelque part, il ne serait pas bon que vous receviez la visite de quiconque dans votre état.”
Sally acquiesca et la regarda avec reconnaissance.
“Je vous laisse vous reposer. Et surtout, ne quittez pas votre lit, ou je serais obligée de me fâcher !"
Sa mine sévère ne dura qu’un instant et se mua en une expression extrêmement triste.
"Je vais tout de même prévenir M. Lockheart de votre réveil et je reviens. Si la douleur se manifeste à nouveau, sonnez la cloche à votre chevet. J’arriverais aussitôt pour m’occuper de vous."
Une fois seule, Sally n’avait aucune espèce d’intention de dormir. M. Lockheart, Jeanine avait-elle dit ? Ce nom devait être celui de son mari... et accessoirement le sien. Mais il s’embrouillait dans sa tête. Quelque chose la chiffonnait et elle n’arrivait pas à mettre le doigt dessus. Bien qu’ayant perdu la mémoire, il semblait qu’elle avait oublié quelque chose de primordial !
Une nouvelle inspection de la chambre lui indiqua qu’un journal avait été jeté négligemment dans la corbeille. Une photo d’elle y figurait.
Elle s’en empara aussitôt avant de parcourir les colonnes avidement.
“Tragédie au domaine Padwell.
Tandis qu’il recevait à dîner toute une famille d’amis, M. Henry Padwell ainsi que la famille Lockheart s’est trouvée coincée à l’intérieur lors d’un incendie. Sally Lockheart, sa fille Lucy ainsi que leur hôte : Henry Padwell se trouvent aujourd’hui encore dans un état critique.”
Ainsi donc, elle avait une fille aussi… et elle ne s’en souvenait même pas !
Était-ce la petite fille qui l’avait scrutée depuis sa chambre ? Une révélation d’une aussi grande importance justifiait sa mauvaise impression.
Elle ne savait pas ce qui était le plus triste. Savoir que sa fille était entre la vie et la mort ou qu’elle ne s’en souvienne même pas. Une larme roula sur sa joue. Mais une larme de colère contre cette situation injuste.
Elle semblait résolue à repartir voir la petite fille lorsque, Jeanine, qui était revenue, s’annonça de quelques tocs à la porte. “Je vous défends d’aller plus loin !”
Devant l’expression déterminée de Sally, elle ajouta : “ Du moins, sans moi !”
Elle avait apporté un fauteuil roulant et des plaids.
“Je savais que étiez capable de repartir derrière mon dos. Vous êtes d’ailleurs capable de tout. Du meilleur comme du pire. Et...”
Sally la coupa : “Comment va Lucy ? ”
Jeanine souria de cette réplique, l’air heureuse d’entendre le son de sa voix avant de répondre sombrement :
“Elle n’a pas repris conscience, la pauvre enfant. Souhaitez-vous la voir maintenant ?” Sally hocha de la tête.
“Dans ce cas, installez-vous confortablement. Et en avant la visite !”
Alors j'ai lu ces trois chapitres avec beaucoup d'intêret (avec une préférence assez marquée pour le chapitre deux, que ce soit pour son étrange créature qui n'est pas humaine ou pour la ville que tu présentes).
Je n'ai pas de critique particulière à faire sur l'écriture, mais je trouve que tu additionnes trop de fois des sensations de flous les unes sur les autres pour créer une sensation d'ambiguïté et au bout, en tant que lecteur, j'avoue me sentir parfois perdue (par exemple au début du chapitre 2 +++).
J'ai également un sentiment mitigé vis vis de l'infirmière Jeanine qui est parfois effrayante. Par exemple, il arrive au moins deux fois qu'elle fixe Sally pendant plusieurs minutes (imagine qu'on te fixe si longtemps alors que tu es à l'hôpital) avant de mettre à lui parler fébrilement.
Du coup, si l'intention est de montrer un décallage ça marche très bien, mais si ton désir est de créer une infirmière normale, il y a des maladresses.
J'ai lu dans notre QG B) que tu n'étais pas encore bien sûre de où tu allais, ce qui justifie peut-être l'impression de flou général et peut-être que ça sera naturellement plus stable quand tu en sauras plus et après quelques retouches.
En tout cas, pour l'instant, je te souhaites plein de courage pour la suite :D
Loup
ça me fait plaisir de savoir que j'ai réussi à intriguer dès les premières lignes : c'était mon but. Pour la sensation de flou, je sais que le début de mon récit est méga abstrait... Je vais attendre d'en dévoiler davantage avant de modifier quoique ce soit. (Car pour le moment, il faut avouer que je n'ai pas dévoilé grand-chose).
Pour ce qui est de Jeanine, elle a une position délicate à retranscrire. Elle pense être du côté de l'héroïne et se doute que "Sally" lui cache quelque chose. C'est pourquoi elle l'observe attentivement. Ce qui est sûr, c'est qu'elle a un côté envahissant et la délicatesse d'un éléphant dans un magasin de porcelaine par certains moments. D'un côté, elle s'inquiète et voudrais tirer les vers du nez de l'héroïne, de l'autre, elle veut respecter son silence.
Enfin, tu as raison : je suis en pleine phase de tâtonnement. Et pour ce qui est de la description de l'univers, je vais essayer d'être plus précise et de me faire plaisir :3
Pour ma part, il y a beaucoup de choses que j'aimerais modifier déjà (mais je me retiens parce que sinon je sais que je n'avancerais pas du tout dans l'écriture). Notamment certains noms (que je voudrais franciser); le style (qui manque de personalité);la description (qui n'est pas assez présente parfois); les dialogues (qui sonnent faux)... etc.
(Bref, il y a quasi tout à reprendre TTvTT)