(proposition indécente)

Notes de l’auteur : Comme d'habitude, Yann exagère ;)
 
 

 

- Je vous présente mon colocataire, Yann.

- Ha oui, c'est la personne que tu loges chez toi ! Enchanté ! Cet appartement était vraiment trop grand pour toi en effet !

Le premier jeune homme, un mec châtain clair au sourire moqueur, mesure au moins deux mètres, entre Liam et lui, Yann se trouve un peu diminué.

- Vous habitiez où avant ? demande un second camarade sur un ton pédant. Un blondinet décoloré et hautain au look sportswear.

- Dans un foyer de jeunes travailleurs Basques ! sort Yann sans faire de manières.

Après tout comme le dit Marie il n'y a pas de honte à avoir ! Il se force à être aimable, un peu fatigué de sa matinée à mettre les petits plats dans les grands, il parle sans réfléchir.

- Yann travaillait en cuisine, il a perdu son emploi et du coup sa chambre avec. Mais il a de suite retrouvé du travail ! essaie de dédramatisé Liam, un peu gêné pour lui.

- Je n'ai pas retrouvé de travail, j'effectue un stage en boulangerie, lâche l'intéressé que le comportement de Liam indispose sans comprendre de suite pourquoi.

- Ha ha ! C'est un bosseur, ajoute le blond en voyant les têtes alertées, de ses anciens copains.

Tout cela est bien loin d'eux. Liam est surpris de la précision de Yann, il pensait qu'il s'agissait d'un « vrai » emploi.

- Tes muffins sont d'ailleurs extraordinaires ! continu-t-il en se tournant vers un Yann de plus en plus incommodé par les œillades méprisantes et les moues dédaigneuses.

L'on se gausse et Yann sent déjà la colère monter. Le pire étant sans doute Liam qui cherche à sauver les apparences, ne remarquant rien de son malaise.

- Et vous faites comment pour vivre avec ça ? l'interroge hilare et sceptique le grand gaillard.

- Rien d'étonnant à ce qu'on ne vous loue pas, Paris est cher, surenchérit l'autre prétentieux.

Yann ne répond plus, Liam quand à lui, plisse les yeux et réfléchit, comme si les deux gus venaient de mettre le doigt sur une question importante.

- C'est vrai ça, tu as un job pour arrondir tes fins de mois ? le questionne-t-il aussitôt, honnêtement inquiet, si naïf, à la limite de la bêtise.

Yann le dévisage stupéfait. Le manque total de confiance de Liam, voilà ce qui le blesse le plus finalement.

- Que croient-ils tous ? Sales petits fils de bourges ?!  Et lui, pour qui me prend t-il, cet imbécile demi-mondain ?

Il affiche alors son plus bel air narquois, sort son fameux sourire en coin et décide qu'il va : « Mettre un peu d'ambiance dans cette soirée de coincés du cul et leur donner ce qu'ils attendent, du glauque et du sensationnel ! »

- Avec le corps ça se devine non ? Ha haha ! se moque-t-il d'un ton se voulant léger.

L'information est prise au sérieux, les deux hommes le fixe un instant sans voix et Liam blêmit en quelque secondes.

- Co... comment ? bégaye-t-il-t-il d'une voix blanche.

- Ho ! Un artiste qui pose ? Non ? Ne me dites pas que vous faites du strip dans les boites quand même ? ! s'exclame le blond, mi moqueur, mi incrédule.

- Ces types sont pires que ce que je croyais. Ma biche, j'ai plus assez de force après mon taf pour ça ! Nan, je me contente de quelques passes en matinée et le weekend !

Et se retournant vers Liam en particulier, il ajoute :

- Ne t'inquiète pas mon choux, je fais ça chez les clients, pas ici !

La vision qui s'impose à Liam le révulse. Comment n'a-t-il pas compris cela avant ? Son jeune et bel andro entre les mains de... Il s'en veut de ne pas avoir su deviner la détresse, car sûrement il y en a. Il en tremble et regrette de suite d'avoir presque forcé celui-ci à répondre à leur "interrogatoire". Yann va-t-il lui en tenir rigueur ? Il commence à connaitre les comportements du bassiste. Lui qui avait imaginé, enfin, la hache de guerre enterrée. Quand aura donc lieu sa prochaine explosion ? L'androgyne remarque la mine affectée de son hôte, quand aux regards médusés des deux autres, ils l'amusent au plus au point.

- Je te choc ? Je te dégoute peut-être ? demande-t-il, faussement embêté, au maitre des lieux.

- Non... Je... Enfin Yann, c'est super dangereux ! l'alerte Liam dans un murmure en le prenant par le coude afin de l'éloigner du groupe.

Il l'entraine à l'autre bout de la salle, laissant en plan les deux autres devant les amuse-gueules. Le réunionnais le suit de bonne grâce un petit instants, avant de dégager son bras, s'éloignant, en ricanant.

- Je suis capable de me défendre mon petit loup, tu as oublié ?

Liam dont le visage ne porte plus que depuis peu, les traces de leur dernier "échange", comprend de suite à quoi, il fait référence.

Il se contente de le suivre au travers de la foule, jusqu'au buffet froid. Une fois de plus, il vérifie que personne n'est susceptible de les entendre pour reprendre la conversation plus bas en se penchant carrément à son oreille. Il trouve Yann étrangement serein et nullement honteux ni mal à l'aise malgré la situation, contrairement à lui-même.

- Tu te protèges au moins ? Dis-moi que tu fais attention à toi !

Est-ce de l'inquiétude dans la voix de l'autre ?

- Il n'est pas très malin mais au moins il est véritablement attentionné. Je ne sais pas pour qui il me prend cet imbécile cela dit Marie a raison, il n'a pas un mauvais fond.

Yann se tourne pour voir au loin les deux autres. Ils ont certainement continué à les observer bien que dès qu'il croise leurs regards, ils l'ignorent, arborant tout deux, une mine arrogante.

- Il n'est pas comme eux en tout cas. Chéri, mon corps est aussi pur de virus ou de maladies que celui d'une vierge ! Je ne laisse plus personne me toucher sans protection, rassuré ?

Devant la mine déconfite de Liam, Yann glousse tapant à présent tranquillement dans les petits fours. Cette soirée est finalement bien amusante.

*

Le lendemain soir Yann le retrouve en train de l'attendre, debout dans le salon, l'air grave.

- Ha ! Tu es rentré, je voudrais te parler, tu as cinq minutes ?

- Hoo ! Chéri, cette tête d'enterrement ! Tu vas m'annoncer un souci ? Si je n'ai plus ma place ici, c'est pas grave hein ! Je me débrouillerais. Je comprends que ma vue te dégoute. Je suis sincèrement désolé d'avoir incité tes deux amis d'hier à fuir , vraiment !

Yann en rajoute. Il est à ce moment-là, persuadé que Liam a, depuis, compris la "plaisanterie". Il s'attend à se faire remonter les bretelles et devoir expliquer son comportement d'une minute à l'autre. Il n'espère que ça pour enfin balancer ce qu'il a également sur le cœur. Mais Liam est plus crédule que prévu.

- Non, ne dis pas d'âneries. Et ce ne sont pas des amis, juste d'anciens camarades de classe. Des connaissances utiles pour le travail c'est tout. Rassures-toi, tu peux rester aussi longtemps que tu le désires, je te l'ai dit déjà.

- Alors quoi ?

- C'est à propos de... Enfin tu vois, ta façon de joindre les deux bouts.

Yann est abasourdi, le petit Liam y croit encore ? Pire, à en voir sa tête, l'information a sans doute dû lui retourner la cervelle jusqu'à l'empêcher de dormir.

Yann regrette un peu et a envie de s'excuser, de s'expliquer, Liam ne lui en laisse pas le temps.

- Je connais du monde qui pourrait t'aider et si tu as besoin d'un autre job...

- Heu, c'est gentil mais je n'ai pas besoin d'aide.

- Écoute, je suis sérieux, il n'y a pas de mal à se faire aider, j'ai jamais été en bas de l'échelle, je n'ai jamais manqué de rien. C'est vrai, je ne sais pas grand-chose de ta situation mais enfin, tu pourrais chercher un autre travail !

- En bas de l'échelle ? De quelle échelle il parle ce con ? Sa putain d'échelle sociale c'est ça ?

Plus vexé que la veille, il s'emporte.

- Écoute, j'ai pas besoin de toi, j'ai pas besoin de ton aide !

- Tu ne te respectes pas !

- Parce que toi tu me respectes sans doute ? Garde tes leçons de morales pour les gens de ton espèce !

- Pardon ?

Il fait volte face et se dirige d'un pas rapide vers l'escalier de la mezzanine. Seulement Liam ne veut pas lâcher l'affaire, il a passé des heures à l'imaginer entre les mains d'étrangers. Rien que l'idée le rend malade. Il se souvient de jeunes du centre, qui viennent à l'association, victimes de coups, à force de trainer dans la rue. Certains disparaissent pendant des semaines, réapparaissant dans un état pitoyable, quand ils ne tombent pas dans la drogue. Pour tout dire, tout cela est bien trop proche de la réalité qui est la sienne, celle de l'animateur radio qui recueille les centaines de confessions de jeunes homos en difficultés, pour qu'il puise prendre du recule.

- COMBIEN ?!

Liam cri sa question, Yann qui a déjà refermé la porte de sa chambre, s'y laisse glisser à terre, entendant l'autre monter à son tour. Il n'avait pas imaginé, que tout cela irait jusque-là.

- Combien gagnes-tu de cette manière ? Combien ? Je te les donne.

- Lâche-moi, j'ai pas besoin de ton fric, je bosse pour gagner ma vie !

Liam réfléchit un instant et une folie lui passe par la tête, puisqu'il n'a pas la possibilité de l'en empêcher peut-être est-il possible d'éviter qu'il ne couche avec n'importe qui.

- OK ! Si vraiment tu veux le gagner, fait le avec moi !

Yann sursaute.

- De quoi ? Qu'est ce qu'il raconte ?

Une lueur de compréhension vient d'illuminer l'esprit de Yann. Il en sourit.

- Il est jaloux ? C'est pas que je me vende pour de l'argent qui le dérange ma parole mais que je couche avec d'autres ! T'as envie de te payer une pute ? Pourquoi ça ? Je suppose, vu ta jolie petite gueule, que tu n'as pas besoin de payer pour baiser.

- Je veux que tu arrêtes, tu vaux mieux que ça et si c'est la seule manière... Je te donne la même sommes que tu gagnes habituellement au total, en échange tu... tu ne... plus avec d'autres.

Liam avale sa salive avec du mal lorsque la porte s'entre-ouvre.

- Et ça va changer quoi ? Que je baise toutes les nuits avec toi ou avec d'autres, au final ça revient au même non ?

Liam se sent pris au piège.

- C'est toi qui refuse que je t'en fasse cadeau.

Yann referme la porte de sa chambre, laissant l'autre derrière sans lui avoir donné de réponse. Allongé sur son lit, il écoute à présent s'égrainer les notes de musique de son groupe préféré et tente de remettre ses idées en place.

- Tout cela va beaucoup trop loin.

Il en a conscience, pourtant c'est un moyen assez amusant d'obtenir ce qu'il attend de Liam sans s'engager à quoi que ce soit. À bien y réfléchir, ce serait une bonne leçon pour ce petit fils à papa un peu trop ingénu.

- Il va encore devoir patienter une nuit haha ! Je vais être un peu sadique !

*

Lorsqu'il rentre chez lui le lendemain soir, Liam trouve l'appartement dans la pénombre, Yann assis torse nu sur un tabouret de la cuisine, regarde le soleil se coucher.

Ils ne se sont pas revus depuis leur discussion de la veille. Le blond craint les réactions de Yann. Il parle d'une voix feutrée et n'ose pas allumer la lumière.

- Bonsoir.

- ...

Il ne peut s'empêcher d'admirer cette silhouette une fois de plus, ses cheveux teints en noir très courts en l'air, se redressant dans tout les sens, leurs légères racines rousses dont la repousse brille d'une lueur dorée, ce torse si fin mais noueux de muscles et aux pectoraux étrangement volumineux, ses bras blancs, sa taille de guêpe et ses abdos bien dessinés, quel curieux mélange que cet être là.

- Ça va ? Il y a un souci ? insiste Liam ennuyé par son silence.

Il repense à toute cette histoire et l'imagine une fois de plus entre de nombreuses mains. 

- Ce corps...

Rien que d'y penser cela lui donne envie de vomir et le cloue de peur.

- J'ai réfléchi à ta proposition d'hier, commence Yann d'une voix voilée.

Lorsqu'il s'adresse à lui avec ce drôle de ton, Yann l'inquiète d'avantage. Liam se dit que chaque jours, toutes sortes de choses peuvent lui arriver, aujourd'hui même, peut-être ? Et dans son esprit toutes sont plus affreuses les unes que les autres. Son travail à l'association ne l'aide pas beaucoup à prendre de la distance. Il en a tellement vu déjà. Pendu à ses lèvres le blond le fixe.

- Ha oui ? Et ? s'empresse-t-il de lui demander.

L'androgyne prend grand soin de choisir ses mots.

- Je suis ok pour passer toutes mes nuits avec toi et ne coucher avec personne d'autre en dehors de toi.

Il ne réussi pas à masquer son petit sourire en coin. Liam lui, garde un air calme, sérieux et réservé. Yann a bien pris garde de ne nullement parler d'argent, Liam ne se doute pas qu'il s'agit, ce soir, d'une manière, plus que détournée, de l'inviter à sortir avec lui, tout simplement.

Le blond est complètement paniqué à l'idée de la prochaine nuit qui déjà se profile, incapable de réfléchir et de comprendre le véritable enjeu de la proposition.

Va-t-il falloir qu'il "baise" Yann ? Est-il capable de ça ? Comment doit-il se comporter ? Va-t-il le laisser l'embrasser ?

- Lui faire l'amour comme un vrai amant, est-ce que ça lui irait ? Est-ce que je pourrais?

Proposer ça afin de le retirer du circuit et ainsi le protéger est une chose, prendre la place des ces "clients" en est une autre. Voyant que son futur amant ne réplique rien, Yann s'alarme un peu.

- Tu as changé d'avis ?

- Non, Et comment est-ce que je...

Il se tait, la peur de le contrarier à nouveau.

- De quoi ?

- Comment être sûr que tu n'auras que moi ?

Yann le fixe d'un petit air de défit.

- C'est qu'il est vraiment jaloux !  Tu ne me fais pas confiance ?

Il saute en bas du tabouret avec la souplesse d'un chat et passe nonchalamment devant lui.

- Autant laisser tomber alors. Je ne peux rien te prouver, juste te dire que je bosse de quatre heure du mat' à seize heures en semaine, que je ne reviens pas pour mes pauses à cause de la distance mais que je serais ici le reste du temps. Si ça ne te convient pas...

- ça me va !

Son  visage aux trais féminin, prend un air de victoire.

- J'vais prendre une douche alors ! dit-il, se retournant dans une sorte de révérence.

Il y a bien longtemps que Yann ne s'était pas autant amusé, trop longtemps à vrai dire...

 

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