Tout luisait autour de Windane. Le monde n’était plus que lumière d’ivoire, l’air n’était plus qu’un bain d’énergie protectrice. Les flammes se dessinaient en cercle d’or autour d’elle. Elles avaient troqué le rouge pour un feu mordoré, pareil à un trésor. Windane leva la main, fascinée, sans oser aller au bout de son geste. Son bras la tiraillait, son ventre lui criait de tendre les doigts, mais son esprit refusait de franchir la distance. Le brasier continuait sa danse, n’attendant plus qu’un mot de sa part.
Un autre se chargea de parler, un homme dont le timbre était calme et bienveillant. Son timbre grave, profond, semblait surgir du temps pour s’adresser directement à son cœur. Même si Windane ne pouvait comprendre le sens de ses mots, ils la rassuraient. Pourquoi avait-elle eu peur ? La magie était sa vie, son sang. Elle ouvrit le poing et laissa les flammes venir à sa rencontre.
Le feu plongea dans sa paume offerte et pénétra son bras avidement, comme un enfant courant dans les bras de sa mère. Windane esquissa un sourire quand elle sentit la brûlure délicieuse remonter ses veines et inonder ses épaules. Des vagues dorées dansaient sous sa peau tandis qu’il s’étendait pour retrouver sa place. Il se lovait dans sa poitrine, il s’étirait dans chacun de ses membres pour leur redonner vie. La chaleur enveloppait sa hanche meurtrie, caressait la plaie de son bras, effaçait la rougeur de son front.
Alors les voix se joignirent au murmure des flammes.
— Jael na win ! Jael na win !
Ouvrant les yeux au matin, Windane se retrouva nez à nez avec le visage d’Estelon penché sur elle. Un grognement échappa de ses lèvres alors qu’elle bondissait hors de portée.
— Vous tenez vraiment à rencontrer mon poing ou vous êtes juste incapable d’apprécier les distances ?
Il passa une main honteuse dans ses cheveux tandis que le rouge lui montait aux joues.
— Pardon, je ne voulais pas… Je venais vous réveiller, mais j’ai vu… Votre front !
Elle porta la main à son visage, caressa la peau du bout des doigts. Pas une égratignure.
— Votre pommade est plus efficace que prévu, fit-elle d’un haussement d’épaules.
Il secoua la tête, interdit, avant de suggérer qu’elle lui montre son bras. Elle opina, considérant qu’elle devait dans tous les cas en changer les pansements. Estelon écarquilla de nouveau les yeux devant la plaie résorbée. Il ne restait qu’une fine entaille, en voie de cicatrisation.
— C’est impossible, souffla-t-il. Aucun humain ne guérit aussi vite !
Windane rabattit sa manche et le foudroya du regard. Il comprit en la voyant se relever pour le fuir qu’il l’avait à nouveau offensée.
— Non, attendez ! Ce n’est pas ce que je voulais dire…
Elle lui offrit un silence assassin en rejoignant Lyron.
— Quand partons-nous ?
— Je vois que tu es pressée de t’éloigner de notre ami, remarqua-t-il d’un sourire. Tu devras hélas supporter sa compagnie : j’ai laissé le cheval d’attelage à Honri, Automne va devoir le remplacer…
— Ça vous amuse de me torturer, avouez-le.
Lyron leva les yeux au ciel et indiqua le chariot d’un signe de tête encourageant. Elle se résigna, marquant tout de même sa réticence d’un soupir. Automne semblait tout aussi indigné, frappant le sol de ses sabots. Elle passa une main compatissante sur son cou avant de grimper aux côtés du milicien et de rabattre sa capuche. Ils reprirent la route en silence, Lyron en tête. Estelon attendit un moment avant d’oser parler à nouveau.
— J’ai été maladroit et sans nul doute inconvenant, reconnut-il. Je ne voulais pas vous offenser, je n’aurais pas dû me pencher sur vous comme l’un de mes sujets… Il s’avère que j’ai un peu étudié les Protecteurs au cours de mes années de formation, et votre particularité m’a fasciné en me faisant oublier toute bienséance. Je vous en demande pardon.
Il vit le velours s’incliner vers lui, signe qu’elle l’écoutait. Après un moment, elle prit la parole à son tour.
— Vous avez déjà vu une magie comme la mienne ?
— Les Protecteurs guérissent toujours plus vite que la moyenne… mais ce dont vous êtes capable en une nuit, je ne l’ai encore jamais vu. Vous êtes exceptionnelle !
Estelon espérait avoir été pardonné, mais elle ne répondit rien et resta cachée dans sa cape.
— J’ai un jeune frère du nom de Calen. Il est Protecteur lui aussi.
Il sut qu’il avait attisé sa curiosité lorsqu’elle releva la tête et qu’il put distinguer enfin une partie de son visage. Il poursuivit.
— Mon père est Porteur de septième génération, alors on croyait la magie disparue de notre lignée. Les dons de Calen ont été une véritable surprise. Il n’avait que neuf ans quand il a commencé à produire de la lumière entre ses mains…
La fierté retomba, laissant place à une ombre. Il était si proche que Windane percevait sans mal la tristesse cachée dans son silence. Elle glissa un regard sous le tissu.
— Depuis combien ne l’avez-vous pas vu ?
— Trois années, soupira le soigneur. Tous les ans, au début du Printemps, il y a une cérémonie pour présenter les jeunes Protecteurs au Duc de Tyzleg. C’est là que nous avons fait nos adieux à Calen. Il était si frêle, au milieu de ces gens ! Je sais qu’il est heureux à l’Académie… Mais je regrette qu’il n’ait pas eu votre chance.
Était-elle chanceuse d’être devenue l’élève d’un Maître de la Pléiade ? Windane n’avait jamais considéré les choses sous cet angle car, en réalité, elle n’avait pas eu le choix : après ce qui s’était passé à Belledanne, jamais les siens n’avaient pris le risque de la conduire à la cérémonie de présentation.
— Maître Lyron est certainement un grand professeur, poursuivit Estelon. Vos parents doivent être rassurés de vous savoir sous sa protection… C’est lui qui vous a offert le collier, j’imagine ?
Il s’empourpra lorsqu’elle tourna brusquement le visage vers lui, les sourcils froncés.
— Non pas que je vous épie… bredouilla-t-il aussitôt. Je n’ai pas pu m’empêcher de le remarquer, quand je veillais sur vous… C’est une Rochelave, n’est-ce pas ? Je n’en avais vu que dans les livres !
— C’est si rare que ça ?
— Vous l’ignoriez ? En fait, personne n’a jamais trouvé le filon dont elles étaient extraites. Les collectionneurs se les arrachent à prix d’or, il est presque impossible d’en trouver dans le commerce de nos jours ! On dit qu’elles éloignent le danger… J’imagine que c’est pour vous protéger que Maître Lyron vous l’a confiée ?
— J’imagine, oui… murmura-t-elle en portant son regard sur la cape violine qui allait au-devant du chemin.
Le vent était tombé, la poussière avec lui, mais le soleil cognait toujours aussi fort dans leur dos. Ils ne furent par mécontents quand Lyron annonça un détour en fin d’après-midi pour rejoindre un point d’eau. Les quelques pluies des derniers mois avaient dévalé les crevasses jusqu’à rejoindre un bassin, à peine assez profond pour leur arriver aux chevilles. Quelques plantes avaient poussé sur les bords, si maigres qu’elles ne tiendraient pas une saison de plus. Automne s’en contenta s’en rechigner, avant de galoper avec délectation dans l’eau tandis qu’ils installaient de quoi camper contre un repli de roche.
— Vous trouverez des gentianes en abondance derrière cette butte, indiqua Lyron à l’attention d’Estelon.
Le soigneur sauta sur l’occasion pour remplir ses réserves, remerciant le Protecteur de son attention. Windane jeta un regard étonné à Lyron, qui répondit d’un clin d’œil complice. Il y avait autant de fleurs sur les roches près du bassin, mais cela leur garantissait un long moment sans les regards en coin du jeune homme.
— Mieux vaut éloigner toute distraction avant de reprendre tes exercices de méditation !
L’attaque du canyon avait prouvé qu’elle pouvait contrôler son pouvoir. Il lui restait donc à apprendre à l’immobiliser. Avec assez de maîtrise, pensait Lyron, Windane serait sans doute capable d’effacer sa propre présence. Elle s’obligea à essayer encore. Les yeux fermés, le buste droit, elle respirait profondément en concentrant son attention sur ce tourbillon hurlant au creux de son ventre. Pendant un instant, il sembla s’apaiser et se plier à sa volonté, puis il lui échappa et une vague d’écaille explosa sur ses bras. Windane secoua la tête en frottant sa peau, comme si la caresse pouvait aider à lui redonner son aspect initial.
— Tu y arriveras un jour, j’en suis certain, la rassura Lyron.
Elle pinça les lèvres, sceptique, avant de relever les yeux vers lui.
— C’est pour me protéger que vous voulez m’apprendre à disparaître, n’est-ce pas ? Si jamais d’autres découvrent…
— Nous n’avons de comptes à rendre à aucun homme, qu’il soit Roi ou Protecteur, tant que nous accomplissons la volonté des Fondateurs, trancha Lyron. Les Dieux m’ont choisi pour devenir ton Maître, je fais simplement de mon mieux pour accomplir la tâche qui m’est confiée.
Ce n’était pas vraiment une réponse, pourtant elle s’en contenta. Un autre sujet l’intéressait. Elle porta la main à son collier, résistant au frisson qui remontait son bras.
— Estelon m’a parlé de la Rochelave, aujourd’hui…
Elle se félicita de ne pas avoir lâché Lyron des yeux, sans quoi elle aurait pu manquer le tressaillement infime qui l’avait parcouru à ces mots.
— Il m’a dit que c’était un talisman contre le danger, très rare…
Il soupira devant son regard insistant et finit par céder.
— Je l’ai eu en Terres du Nord, avoua-t-il. La Rochelave est ce qui se vend le plus cher, là-bas, mais j’ai trouvé celle-ci par hasard dans la jungle. J’avais été envoyé pour surveiller les avancées de Logas quand je suis tombé sur les traces d’un groupe d’exploration. Ils s’étaient enfoncés trop loin en territoire de magie-flamme…
Lyron se souvenait encore très bien du jour où il avait découvert leur piste, car il avait été incapable de dire s’il s’agissait de logasars. Il avait remonté la jungle à leur recherche, suivant les plantes écrasées, les arbres éraflés. C’était les seuls indices qu’il avait pu identifier, car aucun fantôme n’était venu à sa rencontre. Que faisait cette troupe au milieu des terres sauvages ? Les empreintes indiquaient une bonne dizaine d’hommes et un attelage si large qu’il écorchait les troncs sur son passage. Il n’avait jamais su ce qu’ils étaient venus chercher, car les démons les avaient trouvés avant lui. La nuit avait résonné de cris et de rugissements aussi violents que le tonnerre, avant que d’intenses déflagrations viennent étouffer la jungle d’un silence de mort.
Aucun homme n’avait survécu à l’explosion, aucun spectre n’avait accroché son ombre au terrain. Le feu avait emporté la magie tout autant que les vivants. Seules restaient les armures et les épées brisées, parsemées de vestiges de corps calcinés… et cette pierre, si rouge, qui luisait comme un soleil au milieu d’une terre de cendres fumantes.
— J’ai pensé à toi en découvrant ce collier, reprit Lyron. Je crois que les Fondateurs m’ont guidé jusqu’à lui tout comme ils m’avaient guidé jusqu’à toi… Tu es mon élève, Windane, et tu es de mon sang. Alors oui, il est de mon devoir de te protéger.
La sincérité de ses mots se logea en boule dans la gorge de Windane. Elle baissa les yeux, émue, avant de relever un détail de ses paroles.
— Vous avez été envoyé en Terres du Nord ? C’est ce que vous avez dit. Je croyais que les Protecteurs n’avaient de compte à rendre qu’aux Fondateurs ?
— Et c’est vrai, aucun homme ne donne des ordres aux Protecteurs, car ce serait une atteinte aux Fondateurs eux-mêmes. Mais nous avons également des obligations, une mission envers le peuple à qui nous devons assistance. Après tout, c’est le peuple lui-même qui nous verse une pension à travers l’impôt du Roi… C’est pour cela que nous nous arrêterons dans chaque cité que nous traverserons pour apporter notre aide.
— Ça ne répond pas à ma question, remarqua-t-elle. Qui vous a envoyé en Terres du Nord ?
Il soupira, amusé par son regard noir braqué sur lui. Elle avait déjà compris, sans doute.
— Le Roi Thylmor, répondit Lyron. C’est la contrepartie qu’il a exigée avant de me donner le titre de Maître de la Pléiade.
— Vous avez prêté serment à Thylmor !
Il acquiesça.
— Je n’aurais pas pu prendre en charge ta formation sans ce titre, Windane. Les Maîtres, d’ordinaire, sélectionnent leurs successeurs parmi leurs élèves de l’Académie… Je suis l’un des rares à en avoir fait la demande directement auprès du Roi. Il ne l’offre qu’aux Protecteurs les plus puissants, et en lesquels il a toute confiance. Alors, oui, j’ai prêté serment d’allégeance à Thylmor, et je l’ai servi pendant six ans en Terres du Nord. J’ai fait ce qu’il fallait pour servir les Fondateurs.
Pour servir les Fondateurs… et pour la protéger, elle. Les joues de Windane avaient pâli sous le poids de cette révélation. Six ans en Terres du Nord, à parcourir des terres infestées de démons, cela relevait autant du record que de la folie. Dire qu’elle lui en avait voulu d’être parti ! Mais c’était pour elle qu’il l’avait fait. C’était pour elle qu’il avait prêté allégeance et renoncé à la liberté.
— Alors vous portez la marque du Roi, fit Windane.
— Le tatouage ? Oui, c’est vrai.
Elle secoua la tête et insista.
— Ce n’est pas un simple tatouage, n’est-ce pas ? Naelle m’en a déjà parlé. C’est ce qui scelle le serment et vous oblige à obéir.
— Ce n’est pas si horrible que ça en a l’air, fit Lyron. C’est un dessin apposé par Osmund, un Protecteur de la Garde du Roi. Il ne lui permet pas de prendre le contrôle de mon esprit ou de mon corps. Ce n’est rien de plus qu’une ancre, un signal pour nous rappeler auprès du Roi. Mais rassure-toi, j’ai servi assez longtemps pour obtenir le droit de m’éloigner de Solastène… et puis, je saurais bien avant lui quand Thylmor aura besoin de mes services !
Cette dernière remarque, il l’avait ajoutée pour la rassurer, autant que pour changer de sujet. La conversation avait ravivé la marque incrustée dans sa peau. Le soleil symbole du royaume encerclait de ses rayons dorés les armoiries du Roi, gravées en runes sombres entre ses omoplates. Il se souvenait très bien du jour où Osmund avait percé sa peau pour y graver son dessin. Ce n’était pas un souvenir qu’il souhaitait partager avec Windane. Mieux valait qu’elle ignore la véritable nature de ce tatouage qui pouvait, par la seule volonté d’Osmund, le supplicier jusqu’à la mort. La douleur était supposée telle qu’aucun homme n’avait résisté plus de quelques secondes à la volonté du Protecteur. Plus ils approchaient de Solastène, plus Lyron ressentait le poids dans son dos, comme si la marque s’éveillait en approchant de son maître. La sensation n’était ni agréable, ni douloureuse, mais elle se renforçait chaque jour, tout comme le murmure de Felyen à ses oreilles.
Protège-la.
Lyron avait espéré qu’il suffisait de sortir des Collines Mortes, que le retour à la fraîcheur des bois et au souffle de la magie étoufferait son inquiétude. Pourtant, sitôt que l’herbe se déploya de nouveau sous les sabots de sa jument, il entendit de nouveau sa voix. Les spectres se dessinèrent enfin, fantômes d’hommes et de femmes de toutes époques, qui rampaient hors du désert où s’avançaient pour y mourir. Lyron tira sur les rênes d’Ébène et se retourna.
Sur la charrette qui le suivait, Estelon levait les bras en décrivant la cité de Tyzleg pour attirer l’attention de Windane. Lyron la voyait aussi nettement que toujours, peut-être plus encore. Sa cape violine semblait luire dans la lumière, son visage rayonner dans le présent. Il intensifia son regard pour tenter d’apercevoir au-delà, à la recherche d’un indice. Le sang pulsait dans ses tempes, apportant l’énergie jusqu’à ses yeux.
Les ténèbres avalèrent le désert qu’ils venaient de quitter. L’ombre s’étendit autour d’eux, dévorant les collines et leurs broussailles jusqu’à encercler leur convoi. Windane restait immobile, le visage offert au soleil, sans prendre conscience du danger qui la guettait. Sur sa droite, l’obscurité engendrait un bras informe qui s’étirait, se tordait, s’extirpait de l’ombre pour avancer vers sa proie. Ce n’était qu’une tache de néant glissant sur le sol. Les roues de l’attelage disparurent dans son manteau, puis les pieds des passagers. Les ténèbres s’infiltrèrent dans la cape violine, coulèrent le long du tissu en remontant ses bras, enveloppant le corps entier de Windane. Son visage se perdait dans le néant, ne restaient bientôt plus que ses yeux.
— Maître Lyron ? Devons-nous nous arrêter ?
Lyron rassura Estelon et pressa le flanc d’Ébène pour reprendre la route. La vision s’était dissipée sans lui donner plus d’indices. Les Fondateurs cherchaient-ils à le mettre à l’épreuve, encore une fois ? D’ordinaire, il ne craignait guère ces mises en garde, aussi vagues fussent-elles. Cependant c’était la première fois qu’une telle vision ciblait son élève.
— Il faut aller plus vite, déclara-t-il.
Windane tira sur le bord de sa cape pour cacher le souffle chaud qui glissait dans sa nuque et soulevait ses mèches en bataille. Lyron n’avait rien dit, mais elle avait perçu l’énergie de son regard. La magie battait à ses tempes, concentrée dans ses yeux. Le feu s’agitait en réponse à son inquiétude.
— Vous devez avoir beaucoup trop chaud avec ça.
Elle tourna la tête du côté d’Estelon, qui désignait le velours d’un sourire amusé.
— Je supporte très bien la chaleur, répliqua Windane.
— J’ai déjà pu voir votre visage, vous savez ? Et croyez bien que je ne risque pas de l’oublier, même si vous continuez de le dissimuler… Vous comptez rester cachée toute votre vie ?
— Vous savez parfaitement pourquoi je me cache.
— J’ai beau le savoir, je ne comprends pas l’intérêt, rétorqua Estelon. Ne serait-il pas plus simple de voyager sans la cape violine, de vivre à visage découvert ?
Elle secoua la tête.
— Lyron a été autorisé à quitter Solastène uniquement pour prendre un apprenti. Si les Maîtres de la Pléiade apprenaient qu’il n’avait pas tenu parole, il pourrait être accusé de trahison… Et de toute façon, je serais incapable de cacher la magie, avoua-t-elle dans un souffle.
Estelon suivit son regard penché sur ses poings serrés. La magie. Oui, il avait beau n’être qu’un Porteur de huitième génération, il percevait quelque chose en elle. Était-ce son air mélancolique, l’ombre dans ses yeux ? Il se sentait soudain jaloux de tous ces Protecteurs qui auraient pu, contrairement à lui, user de magie pour lire dans ses pensées. Le silence était retombé entre eux, imposant une distance qu’il n’osait pas franchir. Seule l’apparition de la ville put la tirer de son mutisme.
La cité de Tyzleg avait été fondée à la rencontre des affluents de l’Oranielle. C’était le point de départ de nombreux chalands, des bateaux de voyage qui emmenaient en quelques jours seulement à Solastène. On devinait leurs voiles par-delà l’enceinte de granit rose et les tuiles qui surplombaient les rues pavées.
— Je me rends souvent au quartier des apothicaires, de ce côté, indiqua Estelon en désignant une rue qui partait vers le sud. Et là-bas, c’est le théâtre dont je vous ai parlé !
— De toute évidence, le Duc de Tyzleg ne souffre pas trop de la sécheresse…
Elle n’en revenait pas de voir tant de façades décorées, tant de flambeaux de bronze drapés des armoiries du Duc. Estelon approuva d’un signe de tête tandis qu’elle tirait sur le velours de sa cape. Avait-elle jamais vu autant de monde réuni en un seul endroit ? Le parvis du Temple était si bondé qu’ils durent contourner par le port pour rejoindre le quartier des commerçants. Le temps qu’ils parviennent à l’entrepôt d’eau thermale, le soleil était tombé vers l’ouest, et l’enthousiasme d’Estelon avait plongé dans l’ombre avec lui.
— C’est donc ici que nos chemins se séparent…
Ils étaient parvenus devant le manoir du Duc, les gardes n’attendaient plus qu’un signe pour le conduire auprès du seigneur des lieux. Estelon serrait le coffret entre ses bras, jetant un dernier regard vers les Protecteurs. Il avait espéré passer plus de temps en leur compagnie, mais Lyron ne voulait pas s’attarder.
— Avec Rashad, Serval et Aluin dans les parages, la ville compte assez de Protecteurs. Nous allons profiter de la fraîcheur du soir pour continuer vers l’Est.
— Et votre bras, Maître… Windane ?
La jeune femme haussa un sourcil amusé et secoua la tête.
— Je guéris plus vite qu’aucun humain, répondit-elle. Je devrais m’en sortir.
Il lui confia néanmoins quelques bandages supplémentaires, avant de les saluer d’un sourire triste.
— Ce fut un honneur de faire route à vos côtés, Maîtres. J’espère que nos chemins seront amenés à se croiser de nouveau !
Les capes violines s’inclinèrent une dernière fois puis, trop vite à son goût, elles se fondirent dans la foule.
Le chapitre fait globalement plus chapitre de transition je trouve. Après, c'est pas un reproche, c'est bien d'avoir des pauses de temps en temps, pour bien assimiler ce qui se passe ^^
Le rêve du début est très intéressant je trouve ! Comme ça, ça me donne un peu l'impression d'une secte cheloue qui a fait des expériences encore plus cheloues sur des bébés à base d'incantations et que c'est comme ça que Windane a récupéré ses pouvoirs ='D Bon, je me doute que c'est pas ça, mais l'imagine me faisait rire donc j'ai voulu partager ^^
Le coup du tatouage, et des sacrifices faits par Lyron, j'ai trouvé ça touchant, et je ne m'y attendais pas. Par contre, clairement, ça sent la merde, parce que bon, je sens que le tatouage va être utilisé au pire moment pour jouer avec nos petits nerfs/coeur, vile autrice que tu es !
Par contre, petite remarque négative, je trouve ce chapitre moins abouti que les autres. Là on saute d'un point de vue à un autre entre les personnages, chose que tu évites soigneusement d'habitude, et parfois, j'ai trouvé la transition pas très claire. Pareil, il y a des ellipses dans le chapitres, mais parfois j'ai mis un peu de temps à comprendre qu'il y avait eu une ellipse et ça m'a un peu perturbée ^^"
Après, ça reste un bon chapitre hein =D C'est juste que j'ai trouvé certaines transitions maladroites par rapport aux autres chapitres ^^ En tout cas, je suis toujours curieuse de voir ce que va donner la suite ! =D
J'aime beaucoup l'hypothèse de la secte cheloue XD
Concernant le chapitre en lui-même, mouais je ne suis pas trop fière de moi non plus, je sens bien que ça ne colle pas mais je n'arrivais pas à voir ce qui n'allait pas. J'essaye de montrer différents points de vue en trop peu de temps, il va falloir que je corrige ça !
Merci encore de ta lecture :)