Régicide

Par Sebours

Le régicide désigne l'assassinat d'un monarque, ainsi que l'auteur de cet acte. La victime peut être un roi, comme le suggère l'étymologie du mot, mais aussi un empereur ou tout autre prince régnant.

Chez les elfes, le régicide est puni par la crucifixion en sacrifice aux dragons.

Chez les nains, la peine est semblable au parricide d’un chef de clan. Le coupable se retrouve la main droite coupée en signe d'expiation suivie d’une décapitation.

Chez les gnomes, le régicide est puni par écartèlement.

Chez les satyres, l régicide est enseveli jusqu’à la tête t celle-ci est enduite de miel près d’une fourmilière.

Pour les orcs, le régicide n’existe pas juridiquement. Il ne se différencie pas des luttes entre chefs et factions rivales. Orroko a dû tuer deux rois pour accéder au trône de l’Orcania.

Historiquement, aucun régicide n’a été répertorié chez les fées et les dryades. Par conséquent, aucun jugement et aucune peine ne sont associés à ce crime.

Le régicide

Encyclopedia Gnomnica

Gal était en train de mobiliser ses troupes lorsqu’on lui apporta le message d’un pigeon voyageur. Ugmar le traître se manifestait. Il fixait un objectif secondaire à la mission du chef de guerre. Tous les éléments étaient en place. Il était temps d’enclencher le grand plan secret.

Le nouveau général pourpre confia la défense d’Udgog à ses fils, Gadnak et Nakok. Pour cette opération cruciale, il ressentait le besoin d’être accompagné de ses fidèles lieutenants. Vlad apportait sa rassurante force et son ardeur au combat. Borg demeurait un esprit vif et avisé, toujours de bon conseil. Gal ne concevait pas de partir sur cette mission sans ses deux compagnons de toujours. Il demanda aussi à Broar de mobiliser les hybrides. Le temps était venu pour ces semi-orcs, ces « gris » de venir s’exposer sur le devant de la scène. Le chef d’Udgog désirait affirmer sa supériorité militaire à la face du bouclier-monde. Tous le craindraient bientôt, amis comme ennemis.

Sous les ordres de Broar, les semi-orcs avaient creusé un passage de fortune pour contourner les portes bloquant l’accès aux territoires nains. Pour la première fois, Gal guidait son armée dans l’infra-monde. Pour la première fois, la solitude ne l’accompagnait pas dans les galeries obscures creusées par les nains. Obscures, les galeries menant à Kur-Dhural ne l’étaient plus. Nomrad, la matriarche du clan des Marteaux d’Airain avait tenu parole. Des mousses phosphorescentes jalonnaient le trajet et éclairaient ces lieux souterrains d’un faible halo blanchâtre. Le pas cadencé des soldats résonnait contre les parois des tunnels. On avait l’impression qu’un orage grondait au sein même de l’inframonde. De toute manière, la discrétion n’était plus de mise. Une nouvelle guerre lemniscate débutait et seule comptait la capacité à s’armer pour gagner.

La horde vrombissante arriva à l’entrée de Kur-Dhural. Gal savait parfaitement où se diriger. Il prit deux fois à gauche, engagea son armée dans un long couloir, tourna à droite puis fit signe de stopper à ses troupes. « Rrrr ! Attendez-moi ici. » Le général pourpre plaça un foulard sur ses yeux et reprit la route. Il connaissait ce dédale par coeur pour l’avoir parcouru maintes fois dans l’obscurité totale, d’un temps d’avant la magnificence de Kur-Dhural. Après trois nouveaux virages, il tomba devant les gardiens de son arsenal secret, de terribles gorgones dépêchées par Nomrad.

« Halte ! Qui va là ?!! »

« Rrrr ! Je suis le général Gal du Udgog. Je viens récupérer MES armes stockées dans cet arsenal ! »

« Toi, un orc ! Tu serais propriétaire de cet entrepôt ! Impossible ! »

D’un coup sec, Gal brisa la cordelette de cuir qui maintenait une clef à son cou. Il présenta celle-ci aux deux vigiles.

« Rrrr ! Si je ne suis pas propriétaire de lieux, comment expliquez-vous que j’en possède la clef ? Rrrr ! Allez donc prévenir vos semblables de se mettre en place pour protéger Kur-Dhural ! C’est sans doute la consigne qu’on vous a donnée dans le cas où je viendrais récupérer mon bien ! »

Bien qu’aveuglé par son foulard, Gal perçut que les gorgones s’apprêtaient à croiser le fer. Leurs mains se crispaient sur les hampes de leurs lances. Un bruit furtif lui indiqua que trois autres ennemis arrivaient par sa gauche. Sans doute deux nains et une nouvelle gorgone. Le puissant orc dégaina son épée avec un calme olympien. Ces fous ne savaient pas qu’ils couraient vers une mort certaine s’ils entamaient le combat.

« Rrrr ! Déguerpissez ! Rrrr ! Quittez vite ces lieux avant que je ne vous tue tous ! Rrrr ! Je ne veux que ce que Nomrad, la matriarche des Marteaux d’Airain m’a promis ! »

Même les yeux bandés, à cinq contre un, Gal était sûr de sa force. Les heures passées à arpenter l’inframonde dans le noir avaient développé chez lui un sixième sens. Sa résistance à la douleur lui permettait d’encaisser au moins trois coups sans broncher. Le combat devait être rapide pour qu’il s’assure la victoire. Il attendait l’attaque de ses adversaires. Le général pourpre siffla. Pour ce faire, il utilisa le code d’Udgog. Il demandait à Borg d’envoyer des archers lorsque les hostilités exploseraient.

Cela ne tarda pas. Comme Gal s’y attendait, le nain situé dans son dos lança la première charge. L’orc percevait un mouvement du haut vers le bas. Sans doute l’adversaire cherchait-il à lui fendre le crâne avec sa hache. L’oniromancien plaça sa lame à l’horizontal au dessus de sa nuque pour bloquer le coup. Le bruit de l’acier contre l’acier résonna dans toute la caverne. Le puissant guerrier rouge pivota autour du nain et lui planta sa lame dans le dos. Il envoya alors une fente vers la gorgone à sa droite. Son épée rebondit sur une paroi dure, sans doute un bouclier. Les adversaires de Gal n’eurent pas le temps de répliquer. Une pluie de flèches les transperça. Borg avait parfaitement manoeuvrer en profitant de l’attention que les gorgones portaient sur le général pourpre. Celui-ci retira son bandeau et ramassa sa clef. Il déverrouilla le cadenas et ouvrit grand les portes de l’arsenal.

Tels des vampires, les archers se ruèrent sur les cadavres de leurs victimes et leur arrachèrent le cœur. Ils voulaient les avaler pour acquérir la force de leurs adversaires. Cris et grognements explosèrent. Les guerriers se disputaient les meilleurs morceaux comme une meute de lions.

Le clan des Marteaux d’Airain avaient bien respecté leur part du marché même si apparemment, ils ne comptaient plus honorer le contrat ! L’immense caverne-entrepôt contenait des centaines de milliers d’armes du meilleur acier. Toutes semblaient adaptées aux dimensions des orcs. Ces haches immenses, ces épées à deux mains, ces masses d’armes hérissons et ces pilums allaient donner aux troupes de Gal une supériorité inégalée face aux autres bannières. Cependant, ces terrifiants pourfendeurs de mort s’avéraient trop encombrant pour la mission à accomplir aujourd’hui. Le chef de guerre donna ses instructions.

« Rrrr ! Semi-orcs ! Ne prenez que les armes de combat rapproché ! Poignards et haches de jet. Vous venez avec moi pour atteindre l’objectif ! Rrrr ! Borg tu m’accompagnes aussi avec ta compagnie ! Rrrr ! Gardez des flèches orques à pointes d’obsidienne ! Nous récupérerons les pointes d’acier au retour ! Rrrr ! Vlad ! Tu restes ici avec les autres pour sécuriser le site et organiser le transfert de l’arsenal à Udgog ! »

Gal guida en silence ses troupes dans une nouvelle infinité de galeries. Il pensa qu’il avait bien fait de ne pas s’encombrer des minotaures, des loups-garous et des gobelins. Les hybrides marchaient moins vite que les orcs purs et le chef de guerre devait adapter son allure, ce qui l’exaspérait au plus haut point. La proximité de la rage des combats l’exaltait. Il voulait courir, mais il devait se réfréner pour attendre les gris. Le général pourpre avait placé la compagnie d’archers de Borg en arrière garde pour assurer une arrivée groupée sur l’objectif. Mal lui en avait pris. Les bruns grognaient contre les gris pour leur manque d’endurance et de célérité. La tension montait et la moindre anicroche risquait de provoquer une échauffourée. Pourtant, le chef de guerre ne chercha pas à calmer les esprits. Il comptait sur la surexcitation de ses soldats pour mener encore plus efficacement à bien la mission planifiée de longue date. A marche forcée, l’armée parvint rapidement au point de contact. Le général pourpre passa dans les rangs en prodiguant ses consignes à mi-voix.

« Rrrrr ! Nous attaquerons au cœur de la nuit ! Rrrr ! Je ne veux aucun bruit ! Égorgez-les comme des porcs dans leur sommeil ! Rrrr ! Borg ! Tes archers doivent tuer un maximum de sentinelles pour empêcher l’alerte ! »

A l’heure dite, Gal actionna le mécanisme de la porte secrète. Comme attendu, la cellule du fin fond de la forteresse des trois oliphants était libre et ouverte. Il demanda à Borg de faire attendre les troupes, le temps qu’il parte en reconnaissance. Il avança dans les couloirs logiquement déserts puisqu’il devait être deux ou trois heures du matin. Personne ne se doutait de leur présence. A pas de loup, l’oniromancien revint sur ses pas et commanda le déploiement des troupes. La nature demeurait étrangement muette. Pas un hululement de chouette ou un champ d’insecte ne troublaient la quiétude de la nuit.

Poignards en main, les hybrides par groupes de quatre se tenaient prêts à bondir à l’intérieur des chambrées. A travers les fenêtres des coursives, les archers se partagèrent les cibles. Gal eut l’étrange impression de vivre un instant suspendu, comme dans les rêves que lui envoyait le maître. Puis tout s’accéléra. En un instant, les semi-orcs se ruèrent sur leurs victimes et maculèrent de sang les draps blancs des trop insouciants dormeurs. Les tireurs de Borg atteignirent plus des deux tiers de leurs cibles avant toute réaction de l’ennemi. Puis des cris d’alertes déchirèrent la nuit. Ceux-ci s’avérèrent vains. La caserne n’abritait plus que des cadavres égorgés. Les orcs, à dix contre un, éliminèrent les derniers elfes encore debout sans connaître la moindre perte.

De ce carnage, il ne restait que trois survivants conformément aux consignes données par Gal. Broar amena lui-même les trois prisonniers à son général. Il s’agissait du roi Roll, de son fils, le prince héritier Sirius, ainsi qu’un dernier né de Nunn, le seul présent dans cette citadelle.

« Rrrr ! Voyez donc qui va là ! Le roi des elfes en personne ! »

« Vous payerez pour ces actes ignobles, monstres ! » asséna en guise de réponse le souverain.

« Rrrr ! En temps de guerre, l’ignominie est le lot quotidien du guerrier, roi Roll ! »

« Que voulez-vous ? Pourquoi avez-vous assailli ma forteresse ? Comment ? »

« Rrrr ! Je ne veux qu’une chose, exterminer votre monarchie pour la grandeur de l’Orcania !Rrrr ! C’est bien votre fils qui vous accompagne ? »

Le ton mielleux qu’employait Gal jurait avec les intentions de ses propos. Sirius se mit à pleurer et s jeta aux pieds de son tortionnaire.

« Pitié ! Ne me tuez pas ! Mon père est riche ! Il vous donnera tout ce que vous voudrez ! »

« Rrrr ! Ce que je veux, je le prends, chien ! Tu n’as rien à m’offrir ! » feula le terrible orc rouge en écartant sa victime d’un coup de pied.

La lâcheté de l’héritier dégoûtait le général pourpre au plus haut point. Comment les elfes pouvaient-ils rester une nation dominante avec un prince incapable de faire dignement face à la mort ? Le chef d’Udgog aurait compris, voir préférer un acte rébellion désespéré. Mourir en combattant les armes à la main restait tout à fait honorable. Par contre, les supplications suraiguës et pleurnichardes ne générait en lui qu’un profond mépris. Gal saisit le chouinard dégoulinant de morve par la gorge et serra sa carotide. Siruis se débattait dans le vide sans pouvoir atteindre son agresseur.

« Rrrr ! Vois ! Rrrr ! Regarde la déchéance de ton héritier, roi des elfes ! Rrrr ! Voilà où s’arrêtent tes rêves d’empire ! »

« Sirius ! Non ! »

Le roi Roll tenta de se débattre pour libérer son fils, mais deux solides hybrides continrent ses ardeurs. Sirius commença à convulser. Son visage virait au violet. Ses yeux s’exorbitaient. Ses membres battaient l’air à la recherche d’un appui, d’une solution miraculeuse. Il ne trouva nul salut et brutalement, tout mouvement s’évapora. L’orc régicide cassa la cage thoracique de sa victime d’un coup de poing puis planta ses griffes dans la poitrine pour en arracher le cœur. Gal mordit dedans en lançant un regard provocateur au souverain elfe. Bien qu’une larme coulait sur sa joue, le roi Roll sera les dents et ne dit rien.

« Rrrr ! Tu mérites une belle mort, roi Roll ! Rrrr ! Qu’on lui donne une épée pour qu’il tombe les armes à la main ! »

Les guerriers de l’Orcania formèrent le cercle rituel et y poussèrent le roi des elfes. On jeta à ses pieds une lame récupérée sur la dépouille d’un soldat. Le bon et bienveillant Roll se contenta de regarder l’arme tandis que le général pourpre s’avançait avec l’allure du jaguar en chasse.

« Rrrr ! Ramasse-la et bats-toi ! »

« Non ! Je ne céderais pas à la fureur du dieu de la guerre ! Batum-Khal est mon seul maître. Si tu veux me tuer, fais-le ! Je quitterai le bouclier-monde en pleurant mon fils, pas en célébrant Abath-Khal ! »

« Rrrr ! Comme tu voudras ! »

Gal effectua un tour sur lui-même et décapita le roi des elfes. Il se délecta du cœur du dernier représentant de la famille régnante de Batumia. Il poussa ensuite du pied la tête du souverain devant le dernier né de Nunn effrayé par la scène à laquelle il venait d’assister.

« A présent, je vais m’occuper de ton cas, Ome, tribun de la plèbe et représentant des derniers nés! » Le prisonnier le regarda avec stupeur. « Oui ! Je connais ton nom ! Nous avons un « ami » commun ! »

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