Retrouvailles au parc

Lorsque Axel croisa M. Langlois le lendemain au même endroit, il était en compagnie de sa fille. Il leur serra la main. Le petit chien fit le tour d’Axel pour le renifler, jusqu’à ce que ses maîtres le ramènent à leurs pieds d’un coup de laisse.

– Vous êtes partout ! s’amusa le bourgeois.

– J’aime ce parc. C’est l’endroit le plus naturel de la ville.

– On peut difficilement considérer un parc comme étant naturel, remarqua Madeleine. Regardez ces plates-bandes bien ordonnées, les allées ratissées, même les vénérables érables ou le bassin, trop rond pour n’être point artificiel. Ne croyez-vous pas ?

– De la même manière, Madame, répondit Axel sans réfléchir, que nous imaginons souvent les campagnes comme l’endroit de la nature alors qu’elles sont façonnées par le travail de nos paysans. Pensez-vous que les champs rectangulaires de blé soient moins artificiels que votre lac ? Dans ce parc, on voit le ciel à travers les branches des arbres et on entend les oiseaux, cela change des toitures d’immeubles et du fracas des roues des calèches.

Elle lui adressa un regard appréciateur de sous son large chapeau, et reprit d’un ton curieux.

– Cela doit vous faire étrange, n’est-ce pas ? Ce n’est pas ici que l’on va croiser beaucoup de vaches ou de poules…

– Les animaux ne me manquent pas particulièrement. Ils sont bruyants et odorants. Je suis très heureux d’acheter mon beurre sans avoir besoin de le baratter moi-même.

– J’imagine ! s’exclama-t-elle dans un éclat de rire. Je ne peux pas me représenter la chose. Les plats me sont toujours arrivés tout prêts sur la table.

– C’est à ça que servent les filles de ferme, fit remarquer Axel. N’imaginez pas ma mère seule à labourer son champ ; on emploie du monde pour tous ces travaux éprouvants.

– Ce serait intéressant de lire une description de vos campagnes, intervint M. Langlois. Vous faites partie de l’empire depuis peu de temps et on est toujours empreints de ces imaginaires du barbare. Il serait temps de rétablir la vérité.

– En voilà une bonne idée, papa. (Elle se tourna vers Axel.) Qu’en pensez-vous ? Seriez-vous capable de me donner suffisamment de détails ?

– Je peux vous noter des idées, proposa-t-il.

– Vraiment ? Ce serait gentil à vous, dit-elle, l’air ravi. Vous n’avez qu’à venir demain matin, après dix heures, je serai disponible pour la rédaction.

Il lui répondit d’un signe de tête, dissimulant son sourire satisfait.

– Ce serait avec plaisir, madame.

– Eh bien, vous tombez bien, jeune homme, constata M. Langlois, et pour la deuxième fois en deux jours !

– Il faut croire que c’est un don, monsieur.

Langlois gloussa et sa fille lui sourit. Il lui sourit en retour. Le petit chien, lassé d’attendre la suite de sa promenade, se tourna à demi vers son maître et jappa.

– Mais oui, mais oui, Oscar, on y va. Voulez-vous nous accompagner, Mondamoiseau Ingasson ?

– Volontiers, monsieur. Nous partons dans la même direction.

Il croisa le regard de Madeleine et dut faire appel à tout son sang-froid pour ne pas rougir de son mensonge. Elle lui prit le bras et lui glissa avec un regard rieur en direction de M. Langlois :

– Savez-vous pourquoi nous avons appelé le chien Oscar ? C’est une histoire plaisante.

– Voyons, Madeleine ! protesta son père.

En vain, puisqu’elle raconta son anecdote aussitôt. Axel devait bien avouer qu’elle avait du piquant. Comme s’il savait qu’on parlait de lui, ledit Oscar menait la voie, remuant fièrement la queue. Ils firent ainsi le tour du parc, devisant gaiement.

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Louise Montclar
Posté le 22/11/2024
Ce passage illustre une rencontre qui pourrait évoluer vers une relation plus profonde, qu'elle soit amicale ou romantique. Les dialogues révèlent un jeu d'attractions intellectuelles et personnelles, ancrées dans une ambiance presque bucolique.
ClaireDeLune
Posté le 22/11/2024
Bon résumé, mais encore ?
JeannieC.
Posté le 18/08/2023
Hello !
Je poursuis tranquillement ton histoire. Petite rencontre dans le parc où on fait un peu plus connaissance avec Monsieur Langlois, avec Madeleine. Deux petits chipotages de forme :
>> "Vous êtes partout ! S’amusa le bourgeois." > pas de majuscule au verbe d'incise, "s'amusa"
>> "J’imagine ! S’exclama-t-elle dans un éclat de rire. Je ne peux pas me représenter la chose." > Idem ici, et j'en ai repéré un troisième vers la fin du post.
Sinon, je serais pour un petit peu plus de descriptions entre certaines répliques, pour habiller davantage le dialogue. Les expressions faciales, les intonations, les gestuelles, et peut-être aussi ce qui se passe autour d'eux. Des passants, le temps etc ?
"Les animaux ne me manquent pas particulièrement. Ils sont bruyants et odorants. Je suis très heureux d’acheter mon beurre sans avoir besoin de le baratter moi-même." > Oh ça en dit long sur le Monsieur ahah x) Il veut le produit des animaux sans l'effort et le contexte qui permet d'avoir ces produits, on laisse ça aux fermiers / ouvriers etc. Bon, c'est cohérent avec le personnage, bourgeois, ambitieux, citadin.
Je repasserai =)
ClaireDeLune
Posté le 18/08/2023
Les majuscules, c'est mon traitement de texte qui me les ajoute... Et je ne les enlève pas ^^"
Je suis contente que le texte te plaise - et que le caractère des personnages "passe" bien !
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