S.T.R.E

 

Après un long moment, Louis parvînt à rassurer Ophélie et à la convaincre de traverser le salon pour aller dehors, ce qu'elle fit presque en courant. Une fois dehors, elle resta plantée au milieu du jardin à regarder tout autour d'elle.

-Je ne pense pas qu'elle se remontrera devant toi de sitôt, fit-il.

-C'est pourtant ce qu'elle vient de faire, répliqua-t-elle. Bon sang, comment tu peux vouloir discuter avec elle ? Moi, j'ai juste envie de m'enfuir le plus loin possible !

-Je ne sais pas, admit Louis, j'ai toujours peur, mais, d'un autre côté, je … j'ai envie de l'aider…

-De l'aider à quoi ?

-A comprendre pourquoi elle est encore là ?

-Ça fait longtemps que tu la vois ?

-Avec celle du salon, à l'instant, c'est la troisième fois.

-C'est dément, fit-elle en le regardant, je vis là depuis que je suis toute petite et je ne l'ai jamais vu. Toi, t'es là depuis même pas une semaine, tu l'as déjà vu trois fois et elle vient te voir sous la douche !

Louis ébaucha un sourire en l'entendant.

-Pourquoi tu souris ? Parce que je flippe ? se vexa-t-elle.

-Pas du tout, non ! C'est quand tu as dit qu'elle venait me voir sous la douche…

Ophélie lui rendit son sourire :

-Ce qu'elle a vu a dû lui plaire parce qu'elle ne te lâche plus.

Entendre la jeune fille plaisanter sur le fantôme rassura Louis, elle avait l'air d'aller mieux et elle le lui prouva :

-Bon, je peux t'aider ?

-M'aider ?

-Avec… elle.

-Tu es sûre ? Il n'y a rien d'obligatoire.

-Ecoutes, Louis, fit-elle en se rapprochant. Ma mère n'a que ce gîte en terme de revenu, s'il y a un fantôme qui se balade et qui, d'après ton expérience, se montre quand même assez facilement, je te raconte pas la pub que ça va nous faire. Bientôt, on n'attirera plus que les dingues du paranormal et de pseudos chasseurs de fantômes. Je pense que tu peux comprendre que ça ne sera pas très bon.

-Oui, non, ça je suis d'accord, mais tu es sûre de vouloir m'aider parce que ça implique que …

-Que je vais sûrement la revoir, oui, je m'en doute, mais si t'es là, ça va aller. Tout à l'heure, tu me tenais la main et je n'ai pas paniqué. Donc, c'est que ça doit marcher.

-Ça va lui faire plaisir.

-Quoi ? Que je t'aide ?

-Avant qu'elle ne parte, elle t'a regardé et j'ai vraiment eu l'impression qu'elle regrettait de t'avoir effrayé.

-Elle m'a regardé ?

-Je te signale que c'est une de tes grand-tantes.

-Pas faux, mais tu crois qu'elle le sait ?

-Je pense, oui, sans compter qu'après tout, elle a aussi vécu ici.

 Ophélie fit quelques pas, une main dans ses cheveux :

-Dire que je passais de bonnes vacances, j'étais tranquille et voilà que miss Casper décide que c'est le bon moment pour élucider le mystère de sa mort…

Souriant de la formule, Louis la regarda.

-Ok, se décida-t-elle en lui rendant son regard, je marche, mais je ne veux pas la voir sans toi, sinon, je vais me mettre à hurler.

-Je ne voudrais pas t'effrayer, mais, malheureusement, je ne peux rien te promettre. Je ne contrôle pas les lieux où elle apparaît ni quand elle décide de le faire… Mais, je reconnais que pour l'instant, elle a très bien choisi ses moments.

-Génial, soupira-t-elle. Bon, est-ce qu'on sait comment elle est morte ?

-Je ne pense pas que ce soit sa mort qu'il faille élucider.

-Pourquoi ?

-Parce que tout à l'heure dans le salon, elle me l'a fait comprendre et pendant que je triais les photos avec ta mère, j'ai aiguillé le sujet sur Angeline. Elle est morte en se faisant renverser par une voiture en revenant du village.

-C'est triste.

-Oui et le pire, c'est qu'elle avait mon âge. Tu te rends compte, elle avait juste 17 ans.

-C'est atroce et pour ses parents, ça a dû être affreux.

-Oui, d'ailleurs sa mère serait devenue folle après l'accident, il paraît qu'elle n'arrêtait pas de délirer en lui demandant pardon.

-Alors si ça n'a rien d'un meurtre et que c'est juste un horrible accident, qu'est-ce qu'on fait ?

-J'en suis là, répondit Louis.

Ophélie soupira :

-Faut reconnaître que t'es doué pour captiver les filles, fit-elle avec un demi-sourire. Elle est pas du tout glauque ton histoire.

-Désolé.

-Au fait, comment tu sais que sa mère est devenue dingue ?

-Ta mère m'a dit qu'elle avait un journal intime. Elle a promis de me donner ses carnets.

-Si ça se trouve, c'est sa mère qui l'a tué…

-Qu'est-ce qui te fais dire ça ?

-Tu dis qu’elle n’arrêtait pas de demander pardon… Si elle a renversé et tué sa propre fille, il y a largement de quoi péter un plomb.

-Peut-être, fit Louis, j'avoue que je n'y avais pas pensé.

-Faudra vraiment qu'on puisse jeter un œil à ces carnets, ça pourrait se régler assez vite.

-Oui, enfin, j'ai quand même un doute. Je ne sais pas, mais j'ai l'impression que c'est bien plus compliqué que ça.

-Des fois, il ne faut pas chercher trop loin.

 

A ce moment, la voiture des parents de Louis franchit le portail.

-On ne dit rien à ma mère, c'est ça ? murmura-t-elle.

-Je préférerais éviter.

-On est d'accord.

-Quand à Ethan…

-Lui non plus, je ne suis pas certaine que ce serait une bonne idée de l'inclure dans le secret, cela dit sans te vexer. J'apprécie ton frère, mais…

-Oui, je sais, mais il risque de ne pas nous lâcher.

-Il se fera une raison et je pense qu'il trouvera bien à s'occuper sans moi.

Louis lui jeta un regard intrigué, mais n'eut pas le loisir et le courage de l'interroger.

-Ethan n'est pas là ? demanda son père.

-Il est parti se promener par le sentier, expliqua rapidement Ophélie, très naturelle.

-Ah, fit reprit sa mère tandis que son regard passait de Louis à la jeune fille. Visiblement surprise de les voir ensemble et d'apprendre qu'Ethan était parti seul.

-Je peux vous emprunter votre fils une minute ? reprit-elle.

-Bien sûr, oui.

 

Ophélie s'éloigna suivit de Louis qui sentait presque les regards de ses parents dans son dos.

-Par quoi on commence ?

-Aucune idée.

-Et elle ne peut pas nous aider ?

-Angeline ?

-Bah oui, elle doit bien pouvoir nous donner un coup de main quand même. C'est elle la morte qui veut qu'on l'aide !

-Je sais, mais on dirait que pour l'instant du moins, elle ne parvient à dire que mon prénom.

-Oui et c'est pas du tout flippant de l'entendre.

-Donc, tu l'as bien entendu ?

-Oh oui et avec ce que j'ai vu, je risque d'en faire des cauchemars pendant un moment...

-Si ça peut te rassurer, je te garantis que la nuit suivant la douche, je n'ai pas pu fermer l'œil.

-Ça ne me rassure pas du tout.

-Rien ne t’empêche de dormir la lumière allumée…

-C'est très mature comme geste, rétorqua-t-elle en souriant.

-C'est pas moi qui me moquerais de toi.

À ce moment, son sourire s'effaça et elle se rapprocha de Louis :

-À ce propos, je voulais … m'excuser de t'avoir insulté et surtout de ne pas t'avoir cru.

-Aucune importance.

-Si, fit-elle, c'est hyper important, au contraire. Ta crise de panique était vraiment sérieuse, j'aurais dû comprendre que ce ne pouvait pas être une ombre qui te mettes dans un tel état.

-Avec la raison que je t'ai donné, il y avait de quoi être sceptique…

-C'est vrai, mais j'aurais dû au moins te laisser le bénéfice du doute, te laisser une chance de m'expliquer au lieu de me moquer tout de suite comme je l'ai fait.

-Tu ne me connais pas vraiment.

-C'est pas une excuse et puis, d'après ce que m'a dit Ethan, t'es un garçon sérieux, intelligent et réfléchi. Pas le genre à inventer des histoires pareilles…

-Ethan dit ça sur moi ?

-Ça te surprend ?

-Un peu, oui.

 

Louis n'en revenait pas. Ethan et lui étaient certes proches, mais il avait plutôt l'impression que son grand frère le considérait un peu comme un boulet pas très sociable, ce qui tranchait avec son attitude à lui, bien plus ouvert.

-Bon, reprit Ophélie, si on se mettait au boulot… Comment on peut aider Angeline à trouver le repos et, accessoirement, ne plus se balader chez moi ? Tu dis qu'on doit l'aider, ok, mais apparemment, si sa mort n'a rien d'un mystère, qu'est-ce qu'elle attend de nous ?

-Je ne sais pas. À la bibliothèque, ce matin, je me suis renseigné et les fantômes ne cherchent pas obligatoirement à élucider leur mort.

-Qu'est-ce qu'elle pourrait vouloir alors ?

-Ça peut être tout autre chose. Comme un message à délivrer à leur descendants, par exemple…

-Sauf que là, ça ne peut pas être ça, puisqu'on ne l'a jamais vu, ni moi, ni ma mère.

-Tu es sûre ?

-Je te le garantis, oui.

-Même pour ta mère ?

-Evidemment.

-Bon, ok. À certaines occasions, ils veulent réparer des injustices…

-Là, je ne vois pas ce que ça pourrait être.

-Et, sinon, dans les hypothèses les plus courantes, il peut aussi s'agir d'un objet auquel Angeline pourrait être attachée, comme une bague, une robe … ou n'importe quoi.

-N'importe quoi ? C'est bien, c'est très précis, soupira Ophélie.

Louis réfléchit :

-Il pourrait s'agir du vieux banc.

-Celui qui est tout démoli ? Qu'est-ce qu'il a de particulier ? Et quel lien il aurait avec Angeline ?

Sans lui répondre, tout à son idée, Louis fila vers le bosquet et en fit le tour.

-Louis.

Ophélie tressaillit en entendant la voix résonner et agrippa la main de Louis, ravi :

- Nom de dieu, ce n’est pas vrai, elle ne va pas nous lâcher ! C'est la troisième fois aujourd'hui…

-On dirait que je ne me suis pas trompé.

Comme Ophélie commençait à lui broyer la main, il la rassura :

-Elle n'est pas là.

-Tu promets ?

La voyant seulement les yeux fermés, il la rassura :

-Promis.

Elle ouvrit les yeux avant de lâcher la main de Louis :

-Pfouu, soupira-t-elle une fois les alentours inspectés. Si ça continue, je ne vais plus pouvoir me promener chez moi sans que tu sois là.

-Ça risque de poser des problèmes de temps en temps, rétorqua Louis sans réfléchir.

-Oui, bah, tu fermeras les yeux. J'ose même pas imaginer si elle se pointe pendant que je me douche…

Louis se demanda un bref instant si elle était vraiment sérieuse… Elle n'envisageait quand même pas…

-Bon, trêves de plaisanteries, pourquoi elle nous a amenés ici ?

La remarque de la jeune fille le fixa.

-Peut-être à cause de l'inscription, hasarda-t-il.

-Quelle inscription ?

Louis la lui montra et lui expliqua la version de sa mère et de sa grand-mère. A son grand soulagement, Ophélie ne parut pas plus convaincue que lui :

-C'est complètement idiot de graver une heure sans la date ! C'est forcément l'année ! Et je suis certaine que ce n'est pas Angélique Lamastre qu'il y a de marqué, mais Angeline quelque chose. A mon avis, vu là où c'est écrit, c'est forcément un graffiti d'amoureux.

-C'est ce à quoi j'ai tout de suite pensé et c'est même pour ça que je suis allé en parler à ta mère, je voulais savoir ce qu'ils étaient devenus.

-Apparemment, ça n'a pas super bien tourné pour eux, bon, peut-être que notre fantôme privé veux savoir ce qu'est devenu son mec.

-C'est possible, mais ça risque d'être chaud. Près de 180 ans plus tard, alors qu'on a rien sur lui, même pas son prénom…

-Ah non, là tu te plantes, fit-elle, on a les quatre dernières lettres de son prénom : s.t.r.e.

-On va aller loin avec ça…

-Mon cher Louis, je crains qu'il ne te faille examiner de près les dessins que ma mère t'a fait descendre du grenier.

-Comment tu veux que ça nous aide ? On n'a rien sur lui et aucune idée de ce à quoi il pouvait ressembler.

-Non, mais j'y ai jeté un œil l'autre jour et j'ai vu qu'au dos de chacun, il y avait écrit les prénoms et les événements, on peut commencer par là. Sans compter que des prénoms qui se terminent par ces lettres-là, je n’en connais pas des masses…

-"On" ?

-Tu crois pas que je vais te laisser chercher tout seul ? On fait équipe maintenant.

-Ta mère risque de se demander pourquoi tu décides soudain de nous aider, sans compter qu'il y a ton concours.

Le regard noir qu'elle lui jeta fit comprendre à Louis qu'il avait gaffé.

-Tu ne vas pas t'y mettre, toi aussi ! s'exclama-t-elle. Merde, je m'en fous de ce concours, je ne même pas sûre d'avoir encore envie de la faire cette école !

-Excuse-moi, répondit-il précipitamment, je ne voulais pas …

-Ça va, c'est bon, mais évites le sujet.

-Ok, ok.

-Et pour te répondre, je fais ce que je veux. Je peux très bien en regarder quelques-unes en passant, je ne vois pas en quoi, ça serait gênant.

-Pas faux.

-Bon, allez, on rentre, sinon, pour le coup, ils vont vraiment se poser des questions.

 

En arrivant, ils virent qu'Ethan était revenu et tous les dévisageaient. Assis dans le salon extérieur, les conversations s'étaient arrêtées. Suivant l'exemple d'Ophélie, Louis s'assit tranquillement avant d'accepter un verre de sirop de Christine. La discussion finit par reprendre sans qu'on leur pose de questions mais le regard d'Ethan passait toujours de l'un à l'autre.

 

Et dès qu'ils regagnèrent leur chambre, Louis fit les frais de la colère d'Ethan :

-Bon, c'est quoi ton truc ? Qu'est-ce que tu comptes faire avec Ophélie ?

-Moi ? Rien du tout ! On…

-Commence pas à me raconter des salades ! Jusqu'à cet après-midi, vous vous parliez à peine et là d'un coup, elle veut passer du temps avec toi, t'emmène dans un coin du jardin et quand vous en revenez, vous avez des tronches de conspirateurs… C'est quoi le plan ? Tu veux me la piquer ?

- Arrêtes ! Non mais franchement, tu la vois avec moi ? Faut être sérieux deux secondes… je te garantis qu'on ne fait que parler, c'est tout.

-Ouais, je trouve très bizarre la façon dont elle s'intéresse brutalement à toi. D'un coup, elle ne veut plus me voir ! Si c'est un moyen de me faire payer, je trouve que c’est vraiment pas classe !

-Qu'est-ce qu'elle voudrait te faire payer ?

-Rien, rien…

-Là, c'est toi qui me caches des trucs.

-Bah, comme ça, on est à un partout.

-Les garçons, moins de bruit, fit soudain leur père, en ouvrant la porte.

-Désolé, p'pa, fit Louis.

Mais Ethan ne répondit même pas et fila dans la salle de bains. Son père jeta un regard à Louis qui préféra ne rien dire.

-Vous réglerez vos affaires demain, compris ? Là, il est temps de dormir.

-Ouais, fit Ethan en réapparaissant en caleçon avant de se coucher, visiblement furieux.

-Ethan, le rabroua son père. Tu devrais te calmer.

Le silence de son fils aîné fut assourdissant mais il n'insista pas. Dès qu'il fut parti, Louis se coucha à son tour.

-Je sais qu'il y a quelque chose entre vous, fit Ethan au bout de quelques minutes. Et je trouve dégueulasse que tu me poignardes dans le dos. Je pensais qu'entre frères, on se serrait les coudes, j'avais tort on dirait…

-Dis donc, fit Louis, au lieu de m'accuser de n'importe quoi, tu ferais mieux de balayer devant ta porte ! C'est avec toi qu'elle semble avoir des soucis, moi je n'y suis pour rien. Alors, ne me balances pas tout sur le dos.

-Mais oui, t'es un saint ! Tu parles, tu caches bien ton jeu !

-Mais arrêtes, je n'ai aucune intention de te la piquer comme tu le dis !

Leur discussion fut soudain interrompue par la porte qui s'ouvrit à nouveau sur leur père :

-Bon, cette fois, ça suffit ! fit-il. Louis va dormir avec ta mère, moi je reste ici !

-C'est bon, on n'a plus cinq ans, marmonna Ethan.

-C'est ce que je croyais aussi, répliqua leur père, et je ne te demande pas ton avis.

Penaud, Louis obéit sans discuter et gagna la chambre parentale où il trouva sa mère, visiblement furieuse, elle aussi :

-Je peux savoir ce qui vous prend ? D'habitude, vous vous entendez mieux que ça ! Là, on dirait que vous êtes comme chien et chat ! C'est à cause d'Ophélie ?

Louis soupira :

-Non, d'habitude, chacun reste dans son coin. Je reste avec mes bouquins, tandis qu'Ethan drague à tout va. Mais, là, il s'avère que j'empiète un peu sur son territoire. Du moins, c'est ce qu'il croit, mais il se fait des idées. On a simplement discutés.

-Oui, enfin, elle a préféré rester avec toi au lieu de l'accompagner lui…

-Il te l’a dit ?

-Rapidement, mais sans entrer dans les détails.

-Je ne peux pas t'en dire plus.

-Non, répliqua-t-elle d'une voix ferme, tu ne veux pas, nuance. Mais il est évident qu'il s'est passé quelque chose entre Ophélie et toi…

-Il n'y a rien eut entre nous, je te promets. Mais, on a …vu quelque chose et Ophélie a voulu en savoir plus, c'est tout. Elle a beaucoup insisté et du coup, on en a parlés, sans Ethan.

-Qu'est-ce que vous avez vu ?

C'est seulement à cet instant que Louis comprit que sa mère lui tirait habilement les vers du nez. Il en avait déjà beaucoup dit.

-T'inquiètes, rien de très grave.

Comprenant que son fils ne dirait rien de plus, sa mère se tut, mais Louis savait qu'elle n'allait pas en rester là.

 

La nuit se passa sans autre incident, mais le lendemain, le regard noir d'Ethan lui fit comprendre qu'il n'avait rien oublié. Pour couronner le tout, quand Ophélie se montra, il apparut qu'elle n'avait pas beaucoup dormi : ses yeux rouges et son silence le prouvait clairement. Elle déjeuna en silence, les yeux dans le vague avant de regarder Louis :

-On peut se voir ?

-Bah tiens, marmonna Ethan, mais vous êtes inséparables, ma parole.

Comprenant le problème de la jeune femme, Louis acquiesça silencieusement sans tenir compte de la remarque venimeuse de son frère. Il repartit dans sa chambre et prit une douche rapide avant de redescendre.

Fort heureusement, les parents décidèrent sagement d'emmener Ethan avec eux pour une promenade jusqu'au village tandis qu'Ophélie restait au gîte. Dès que le petit groupe se fut éloigné, elle vint le chercher une feuille à la main.

-Mal dormi ? demanda-t-il.

-J'ai l'impression que chez vous non plus, ça n'a pas été génial.

-On s'est engueulés hier soir avec Ethan. C'est marrant, on dirait qu'il est …

-Jaloux ? Ouais, bah, ça lui fera les pieds. Bon, en attendant, nous faut qu'on avance, regardes ce que j'ai trouvé, fit-elle en dépliant la feuille.

Le dessin, incroyablement précis, représentait un groupe de jeunes gens hilares autour d'une machine agricole. Louis examina le dessin et découvrit une liste de prénoms ainsi que la date : 1836.

-Regardes l'avant-dernier.

-Sylvestre.

-S.T.R.E, triompha Ophélie.

-Tu crois que c'est lui ?

-Ça me paraît évident.

Louis réfléchit un court instant :

-Donc, tu penses que notre Angeline est tombée amoureuse de ce Sylvestre au cours de l'été 1836 ?

-Ça se tient, non ?

-Ok, admettons qu'on a trouvés à quoi correspond l'inscription du banc, à quoi ça nous amènent ?

-A chercher ce qu'il est devenu… supposa Louis. Mais on n'est pas arrivés. On a déjà de la chance d'avoir son prénom, à l'époque les ouvriers agricoles, ça passaient très vite.

-Je sais, oui.

-Aujourd'hui, on pourrait trouver des bulletins de salaire, mais là…

-Autant laisser tomber cette idée tout de suite.

-En revanche, le propriétaire du domaine devait bien garder un registre avec les noms de ses employés, même temporaires.

-Ça se tient, mais si longtemps après, tu crois qu'il aurait été conservé ?

-On ne peut que l'espérer… mais, il n'y a qu'une seule façon de le savoir.

-Ma mère. Oui, je peux toujours lui demander.

-Non, osa Louis, c'est à moi de le faire. Je l'aide déjà à trier les photos, je peux dire que je m'intéresse à la vie de l'époque et lui demander si elle a de vieux documents, cela n'aura rien de surprenant.

-Tu as complètement raison et je reconnais que mon brusque intérêt pour l'histoire de la famille risque de l'intriguer. Alors que toi, en bon passionné, ça passera sans problème. Ok et pendant que tu lui donneras un coup de main, moi, j'essaierais d'arrondir les angles avec ton frère.

Louis ne répondit pas, mais aurait bien aimé continuer avec elle. Ophélie l'écoutait, respectait ses idées et lui donnait raison sans douter de lui. De plus, ils partageaient un secret et s'étaient rapprochés. Sans compter que c'était la seule fille à le prendre en considération et surtout à rechercher sa compagnie. Autant de raisons qui faisaient qu'il craignait un départ définitif de la jeune femme.

-En revanche, fit-elle, tu n'as pas intérêt à me cacher tes infos. Je ne veux pas être mise sur la touche.  Je suis sérieuse, Louis.

Rassuré sur la suite de leur collaboration, il promit. 

-Bon, fit-il, je vais aller voir si je trouve autre choses.

-Et moi, je file dans ma chambre, je vais essayer de bosser un peu.

Se rappelant la réaction violente qu'elle avait eu, Louis opta pour la prudence :

-Bon courage.

Elle lui sourit, mais ne répondit rien.

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Jowie
Posté le 26/08/2018
 Et bim ! commentaire numéro 3 à la suite, parce que pourquoi pas ? :D
Dans ce chapitre-ci, on voit que les dialogues entre Ophélie et Louis sont beaucoup plus naturels, du tac-au-tac et spontanés. Leur complicité grandit et ça fait plaisir de les voir enquêter ensemble comme une vraie équipe ! Par contre, je plains un peu Ethan qui est laissé de côté et qui n'a plus l'air de susciter beaucoup d'intérêt pour Ophélie. Ou alors, celle-ci craint pour la santé mentale d'Ethan et préfère ne pas l'impliquer dans cette histoire qui la fait paniquer, elle ! C'est drôle mais, même si tu ne donnes pas souvent des indications de qui parle dans les longs dialogues entre Ophélie et Louis, on sait exactement qui parle ! Ils ont tout leur deux leur façon de parler et ça se sent à la lecture ^^
Je comprends la réaction d'Ethan. Le pauvre, il ne comprend plus rien à rien. Apparemment, Ophélie a de quoi lui reprocher, car elle voit ce coup de froid comme une sorte de vengeance, on dirait. Tout de même, je pense qu'il devra être informé des événements, car tout le monde, même les parents des garçons, commencent à soupçonner Louis... on verra ce que ça donnera par la suite !
En tout cas, je suis toujours autant prise par l'enquête et j'ai hâte de continuer ma lecture:)
à tout bientôt et bonne semaine !
REMARQUES
Louis parvînt → parvint
Ecoutes, Louis → Écoute
elle t'a regardé → regardée
elle m'a regardé → regardée
c'est sa mère qui l'a tué → tuée
à leur descendants → à leurs descendants
mais évites le sujet → évite
Arrêtes → Arrête
ne me balances pas tout sur le dos → balance
Mais arrêtes, → arrête
On a simplement discutés. → discuté
on en a parlés → parlé
T'inquiètes, → t'inquiète
regardes ce que j'ai trouvé → regarde
Regardes l'avant-dernier. → regarde
admettons qu'on a trouvés → trouvé
à quoi ça nous amènent ? → amène
à l'époque les ouvriers agricoles, ça passaient très vite. → ça passait très vite // D'ailleurs, je ne suis pas sûre de bien comprendre la phrase. Qu'est-ce qui passait très vite ? La vie ? Ou alors le prénom se passait facilement d'une génération à une autre ? (Jowie est un boulet xD)
je trouve autre choses. → autre chose
<br />
Jowie
sidmizar
Posté le 26/08/2018
Bah oui, un 3e com', pourquoi pas ?
Donc, je suis très content que tu puisses identifier Louis et Ophélie dans les dialogues. Bon, ça ne ^devrait pas m'empêcher de mettre des indications, mais s'ils se distinguent par leur façon de parler, c'est bon signe. Flatté que tu trouves mes dialogues spontanés et naturels.
Sinon, oui, Ethan est laissé de côté, mais il faut reconnaître qu'Ophélie est en train de découvrir un vrai mystère, alors, c'est vrai qu'elle le laisse un peu de côté.
Sinon, pour ce qui est d'informer les autres, je n'ai pas pris cette option pour qu'ophélie et louis enquêtent ensemble : une facilité d'auteur... Mais aussi pour éviter que les parents de Louis, effrayés, ne veuillent quitter le gîte...
Sinon, dans tes remarques, ce sont les ouvriers agricoles qui passaient vite. Souvent, ils n'étaient là que le temps des moissons, des vendanges, etc... à peine quelques semaines.
Voili, ravi de voir que l'enquête te tiens toujours en haleine et à bientôt pour la suite !  
Anna
Posté le 09/02/2017
Urg ... j'ai craqué, j'ai tout lu !
Franchement l'histoire est très prenante, les apparitions vraiment flippantes grâce à tes descriptions, et j'aime vraiment bien le duo Ophélie/Louis. Je ne vois pas vraiment ces deux là ensembles, mais ça doit faire du bien à Louis d'avoir de l'attention.
Je me demande vraiment quel est le problème du fantome (bien pensé je dois dire, les larmes qui restent).
Bravo, je suis rarement scotchée devant une histoire en ligne x) 
sidmizar
Posté le 09/02/2017
Merci du com', Anna !
Scotchée ! Carrément ?
les descriptions surnaturelles m'ont donné du souci dans le sens où je ne cherchait pas à effrayer le lecteur mais à lui faire partager la peur de Louis. Un juste milieu vraiment pas facile à trouver. Lors du dernier Pano, j'avais posté la scène de la douche dans les extraits. On m'avait reproché de trop accentué la frousse de Louis, j'ai essayé de corriger ça... On dirait que c'est réussi.
Pour les larmes, je dois dire que l'idée ne m'appartient pas totalement. J'avais lu une histoire de fantôme où les yeux restaient visibles quand le reste s'évanouissait. j'ai un peu adapté pour faire ressortir le chagrin du fantôme au travers de ses larmes.
Quant à son problème, je ne spoilerais pas, mais elle n'a pas eu une vie facile, loin de là... Mais ça tu le découvriras plus tard...
En tout cas, je te remercie du passage, c'est très gratifiant que tu n'ai pu te retenir à tout lire. ;)
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