Lorsqu’elle parlait, il lui arrivait souvent de ne pas répondre. Il ignorait ses questions. Tournait la tête. Faisait mine de ne pas l’entendre. Elle ne se vexait pas. Elle n’avait jamais pris ça pour une attaque personnelle. Elle se disait qu’il pensait à autre chose. Qu’il n’était pas intéressé. Qu’il s’était paumé. Entouré des cauchemars qui lui servaient de rêveries. Des fumées qui lui servaient d’oxygène. Elle n’était pas blessée par son silence.
En réalité, même la tête pleine de brouillard, même les yeux flous, sa voix était l’une des rares choses qu’il entendait toujours. Ses questions traversaient tous les troubles. Mais il n’y répondait pas.
Il ne les comprenait pas. Il ne savait pas comment répondre à sa poésie. Il n’arrivait pas à voir un quart de tout ce qu’elle voyait. De tout ce qu’elle imaginait. Lui, ne voyait que du gris, du noir et du rouge. Alors il n’était jamais sûr de la comprendre. Jamais sûr de savoir quoi répondre. Il ne voulait pas prendre le risque d'abîmer sa poésie. De recouvrir de noir ses couleurs. D’assombrir ses illusions. Alors il préférait le silence.
Répondre à ses questions était la seule chose pour laquelle il n’avait pas suffisamment d’audace.
Peut-être parce qu’elle était l’une des seules choses qu’il ne voulait pas risquer d’abîmer.