Elle courait, elle hurlait, elle cherchait à le prévenir. Elle s'interposait entre cette foutue flèche et lui, entre la mort et la vie. Elle courait, elle pivotait, écartait les bras, et recevait son dû.
Là, fichée en plein cœur, fauchée en pleine course, la vie dont elle avait tant rêvé s'évaporait, s'étirait et s'étiolait. Ne demeurait que l'espoir qu'il puisse s'enfuir, qu'il puisse choisir une vie, choisir sa vie, ainsi elle ne se serait pas sacrifiée en vain. Qu’importe que son dernier souffle soit pour maintenant, du moment que le sien ne se produise pas avant très longtemps. Son dos heurta le sol à la pierre si froide, lui coupant un souffle qui lui faisait déjà cruellement défaut.
Dans un dernier effort, elle voulut tourner la tête vers son foyer, vers cette masse au loin qu'elle avait tant observé depuis ces remparts, mais ce fut le visage d’Olimp qui emplit tout son champ visuel rétrécit. Fuis ! Fuis ! Elle n'arrivait même plus à produire le moindre son. Il arracha la flèche, et plaqua ses mains contre son sein. Elle ne sentait rien, elle ne sentait absolument plus rien. Ni son contact si particulier, ni la moindre douleur.
La souffrance s’envolait. Bientôt, ce serait sa vie. Alors que le calme s'emparait d'elle, elle observa ses grandes mains ensanglantées venir chercher son visage, le caresser, le souiller, et son visage à lui se déformer sous l'effet de la colère, de la terreur, de l'impuissance. Il ne pourrait pas la sauver, pas cette fois. Peut-être aurait-il pu se sauver lui-même, mais c'était trop tard.
Dans son dos, le soldat les avait rattrapé, et puisqu'il n'avait d'yeux que pour elle, il ne le vit pas brandir son arme, bander les muscles de ses bras, et d'un mouvement vif et enragé, l'abattre contre son crâne. Elle ne sentit pas le poids de son corps tant aimé s'affaisser contre le sien, ni sa tête rouler contre son cou. Elle n'avait plus conscience que de cet homme, ce soldat qui la surplombait. Son regard si sombre croisa le sien, l'amertume qui s’y lisait, et ces traits qu'elle imprimait dans sa mémoire, qu'elle y gravait pour ne jamais oublier le visage de son bourreau, le visage de celui qui lui avait tout dérobé, son amour, sa vie, son dernier souffle.
Ne pas oublier, ne surtout pas oublier, ne plus jamais oublier... À l'époque, elle ne connaissait pas son prénom, aujourd'hui, elle l'appelait... Pierre.
Un petit songe tout court, et la révélation / confirmation du "méchant", Pierre, AH AH ! Tu es fait, petit bonhomme ! quoique, sans Syssoï elle ne va pas s'en souvenir, zut.
Est-ce lui qui l'a enlevée, du coup ? Bon, je vais aller voir ça :p