Tu sais qui je suis. Je sais que tu sais qui je suis.
Je sais que lorsque tu liras cette lettre il fera nuit. Une nuit dégagée, claire, sans nuages. Alors j’aimerais que tu lèves les yeux. Lève les yeux et regarde. Tu vois toutes ces étoiles ? Toutes ces petites lumières dans le ciel ? Eh bien si tu les vois, c’est qu’elles te voient aussi. Elles te voient, tu comprends ? Toutes les nuits. Chaque soir, chaque minute, chaque seconde.
Tu ne me crois pas… Tu t’apprêtes à lâcher cette lettre, à la jeter comme un vulgaire déchet, hein ? Si j’ai bien raison, aie au moins le courage de lire ces mots jusqu’à la fin. Ne sois pas un pleutre jusqu’au bout.
Et puis, les mots n’ont jamais agressé personne, n’est-ce pas ?
Les étoiles savent. Elles savent tout de toi. Et c’est pour cela que moi aussi, je sais tout de toi. Tout ce que tu fais, depuis toujours.
Tu ne me crois pas ? Et si je te dis que je suis au courant pour la petite caisse de bois peinte en rose ? Et pour le petit crochet de métal ? Ah, cela te fait quelque chose, n’est-ce pas ? Tu as peur, peut-être ?
Ah, mais non, c’est stupide comme question. J’avais oublié : tu as TOUJOURS peur. Excuse-moi, je suis distrait.
Et… que sais-tu de moi ? Hein ?… Je te laisse réfléchir…
Rien ! Tu ne sais RIEN de moi ! Ah, c’est beau !
Alors, qu’est-ce que ça fait d’être impuissant, soudainement ? Ah, ce n’est pas agréable, non… Eh bien, maintenant tu sais ce qu’ils ressentent. Ce qu’ils éprouvent tous à cause de toi. À cause de TOI ! Et tu ne te sens pas coupable ? Ah, si, ça te fait quelque chose, tout à coup… Eh bien tu sais quoi ? Tu peux bien souffrir maintenant. Je ne t’aiderai plus. Tu as fait ton choix.
Bientôt ils arriveront. Pas eux, les autres. Eh oui, c’est à ça que servait cette lettre. Et je parie que tu l’as lue sans jamais te rendre compte que durant tout ce temps ils entouraient ta maison. Tu es cerné.
Tu viens de regarder par la fenêtre, n’est-ce pas ?
Je te l’ai dit, je sais tout de toi.
Maintenant, tu as certainement arrêté de lire. Tu as tort, mais je n’y peux rien… Lorsqu’on a été faible, on ne peut pas s’empêcher de l’être encore…
Pourquoi tu as tort ? Parce que ce que je viens de te dire est faux, mais que tu ne pourras pas t’empêcher de fuir. Je te l’ai dit, tu as peur. Tu es faible.
Tu va partir, loin. Et c’est ça que je veux. C’est ça qu’ils veulent. Que tu les laisses enfin en paix. Alors maintenant, cours ! Pars sans te retourner !
Si tu avais lu cette lettre jusqu’au bout, alors je ne regretterais pas d’avoir détruit mon mensonge. Je ne regretterais pas, car cela aurait signifié que tu étais plus intelligent que je le pensais.
Mais tu ne l’as pas fait. Tant pis pour toi.
Je te souhaite un voyage constructif.
M.
On ressent beaucoup de colère face au destinataire.
C'est prenant.
Mais qui est cette personne tant détestée?
Des phrases courtes, fortes et efficaces. Tout ce que j'aime.
Encore une fois, ça me touche beaucoup que l'on prenne le temps de me lire :))
Oui, c'est sûr que l'on ne sait pas tout, mais libre à toi de t'imaginer le reste ;)
Encore merci hihi^^
Et qui est « M. » ? Avec le destinataire, sont-ils des antagonistes, sont-ils complémentaires ?
L’accusé incarnerait-il la peur, qui torture tant de gens, et M. la raison, l’intelligence ? Il serait alors absurde que M. espère trouver cette dernière qualité chez son adversaire… Et dans cette interprétation, « eux » seraient les gens qui ressentent la peur et veulent s’en débarrasser, et « les autres » représenteraient ce qui provoque la peur (ce qui fait de la peur, le destinataire, ce qu’elle est (ce qui fait peur à la peur ?)).
La petite caisse peinte en rose, elle, me fait penser à un cœur — celui du destinataire. Et le petit crochet est la seule chose qui empêche tout ce qu’il contient d’être révélé et de se répandre…
Plus j’y réfléchis et plus les questions apparaissent. Puis, on voit vraiment la scène se dérouler, alors qu’elle reste hypothétique, puisqu’il ne s’agit « que » d’une lettre. Le mystère, l’atmosphère glauque, les impressions fortes sont réussis !
J’ai vu quelques fautes :
« j’aimerais que tu lève les yeux » => lèves
« aies au moins le courage » => aie
« ce qu’il ressentent » => ils
« Que tu les laisse enfin en paix » => laisses
Merci beaucoup d'avoir pris le temps de commenter mon texte, et d'avoir partagé tes impressions ou questions à son sujet ! :) En effet, le contexte est flou, tout comme les personnages, et cela offre une grande marge d'interprétation. Cela me touche que tu apprécies l'atmosphère du texte, merci encore pour ce retour :))
Et merci pour les petites erreurs haha ;)
Cette lettre m'a fait pensé à un conquistador qui doit retourner chez lui alors que les indigènes le menacent. Ils ne savent rien mais ont le devoir d'obéir. Puis les étoiles... Et si l'auteur de cette lettre était la lune, par exemple ? Ou même simplement la nuit ?
Je ne sais pas mais toutes ces interrogations m'ont moins perturbées que les autres, car je me suis rapidement identifiée à quelque chose.
En tout cas, bravo !
Un conquistador ? Je n'y avais pas du tout pensé... mais c'est une interprétation très intéressante !^^
Oui, je pense que tu as raison, les imprécisions laissées ici ne sont pas forcément gênantes. Je me demande d'ailleurs si c'est en partie lié au type de texte : une lettre, qui ne nous est pas adressée... Il est donc logique que l'on ne connaisse pas tout de l'histoire se déroulant autour d'elle.
Encore merci pour ce commentaire et les précédents ! Cela me touche beaucoup, merci d'avoir pris le temps de parcourir ces trois textes !^^
À... bientôt peut-être ? ;)