La première fois que j’ai vu ta maison, elle m’a inspiré tant de tristesse que j’ai voulu m’approcher de toi. Contre quel terrible ennemi te protégeais-tu ? Ton habitation était si bien gardée que pendant des heures j’ai pu déambuler, indécise. Tes bêtes avaient l’air cruel, en effet, mais j’ai passé sans qu’elles daignent même me regarder. J’ai poussé ta porte et j’ai découvert un désordre épouvantable dans lequel tu restais prostré, appuyé à la table, le visage caché dans tes mains. Tu paraissais méditer ou rêver. J’ai enfin rompu ce silence trop pesant pour te demander contre qui tu te défendais ; tu t’es levé et tu m’as répondu : « Je crains le temps et ce qu’il construit. »
Tu vivais seul dans un rêve. Les yeux dirigés dans le vague, tu semblais voir quelque chose de lointain, quelque chose que personne ne pouvait discerner. Toi-même, tu me semblais lointain, voire abstrait…
Soudain, tu t’es tourné vers moi et tu m’as regardée : « L’humain a deux façons d’être malheureux : vouloir ce qu’il n’a pas et posséder ce qu’il désirait. Je ne possède rien ; que ma pensée. Ma maison ne m’appartient pas et moi je ne m’appartiens pas non plus… Chacun est seul au monde, je le sais, et je n’estime pas faire partie de l’espèce humaine. Mais je suis heureux d’être triste et seul.»
Je t’ai averti que je ne te comprenais pas et tu as remarqué : « Moi non plus... »
Tu ne m’as jamais dit qui tu étais, tu ne m’as jamais appris à te connaître mais tu m’as renvoyée avec ces paroles : « Ma solitude est un puits profond et noir dans lequel je m’enfonce de plus en plus… Tu ne devrais pas rester ici. Retourne près des tiens et près du bonheur… »
Tu t’es tu. Tu attendais en m’observant. Je t’ai quitté mais je reviendrai, car personne ne voudra chercher ton esprit perdu dans l’irréel…
Merci d’être passé par là et d’avoir commenté ce texte avec un regard plus positif que le mien. :-)