Newton n’en croyait pas ses yeux. Un écureuil !
— Hey, toi ! Sors de là tout de suite ! aboya le détective.
Le petit animal, aussi surpris que Newton, sauta prestement de l’étagère. Il se réceptionna sur le plan de travail et renversa un pot rempli d’ustensiles de cuisine. Ils se déversèrent sur le sol dans un tintamarre assourdissant. Puis, l’écureuil bondit à nouveau avant de ricocher de part en part de la cuisine : contre un mur, sur le buffet, sur la table ! Newton avait du mal à le suivre des yeux et cela nourrissait son agacement. À chaque envolée, la moutarde lui montait un peu plus au nez.
C’est alors que le petit animal, lancé à toute vitesse, fonça dans sa direction. Le détective se saisit du premier objet qui lui tomba sous la main. Il empoigna donc une passoire comme un joueur de tennis aurait attrapé sa raquette.
— Rubie ! cria Newton, ce soir, c’est frites d’écureuils pour tout le monde !
Un sourire malin s’étira alors sur les lèvres du rongeur.
— Sssa, mon lapin, sss’est pas demain la veille ! lui rétorqua le rongeur dont les S sifflaient comme si un cheveu s’était collé sur sa langue.
Loin de se montrer intimidé, il redoubla même d’audace et, d’un saut leste, il bondit sur le dos du détective. Celui-ci abattit son arme sans attendre.
Loupé.
Le temps de faire volte-face, l’écureuil s’était mis à sautiller gaiement en direction de la chatière qui perçait la porte de service. Il s’y engouffra tel un lion traversant un cerceau de feu, l’odeur de poils grillés en moins.
Toute cette histoire avait mis le détective de méchante humeur. Newton était en train de se dire que la journée ne pouvait pas plus mal se finir quand il sentit tout à coup ses pattes se décoller du sol.
Il avait été trop absorbé par ce maudit rongeur pour se rendre compte que Winnie et Stuart, son père, étaient rentrés. Ce dernier, qui avait attrapé le géant des Flandres par les oreilles, adressa un regard suspicieux à la passoire qu’il tenait encore en patte avant de s’attarder sur le bazar laissé par l’intrus à la queue en panache.
— Winnie, il me semblait avoir été clair la dernière fois…, commença son père. Tu dois toujours fermer Newton dans sa cage quand tu pars à l’école. Regarde-moi l’état dans lequel il a mis la maison !
L’air renfrogné de Newton se mua alors en moue ahurie. Stuart ne croyait quand même pas qu’il pouvait être l’auteur de cette pagaille ? C’est une œillade implorante, une de celles dont il avait le secret, qu’il adressa alors à sa petite maîtresse.
Pour toute réponse, Winnie s’empara de Newton en le saisissant sous les aisselles. On n’a pas idée de tenir un lapin par les oreilles ! Dans les bras de la fillette, son corps semblait dégouliner de toute part tant il était gros. Mais c’était bien là que Newton se sentait le plus invincible et, si tant est que les lapins puissent se montrer arrogants, c’est avec cette étincelle dans le regard qu’il fixait Stuart. Jamais Winnie ne le forcerait à rester enfermé une journée entière dans une cage qui, de toute façon, était devenue bien trop petite pour lui.
— Pour ce soir, reprit Stuart, je veux qu’il reste dans sa cage. Nous allons ranger tout ça.
À contrecœur, Winnie conduisit son compagnon jusqu’à sa chambre où elle l’installa avec difficulté dans son clapier.
— Je fais vite. Je te le promets Newton, chuchota la fillette en lui grattant le menton.
Newton n’aurait jamais pensé pouvoir détester un écureuil qui zozote plus que le colonel Doug, dont les chiens lui menaient pourtant la vie dure, mais ce soir-là, il fut surpris du contraire.
C'est rigolo cette idée que les animaux vivent une double vie, tu la mènes bien :)
Si j'avaisbun truc à dire, ce serait que je ne sais pas trop où tu veux aller (au sens d'intrigue principale) mais c'est pas grave, je suivrai. <3
J'adoore, c'est super bien rythmé, très bien écrit, très drôle et tout choupi, je prends un plaisir fou à suivre ces petites aventures du quotidien. J'ai hâte de découvrir la grande enquête à venir ; )