Anouar passe le barrage. De l’autre côté, il ramasse un paquet rouge.
Anouar : Une balle, et puis plus rien. La dernière image qu’il a emportée était celle d’un canon braqué contre lui, et puis c’était le néant, l’indifférence, le silence. Je me demande à quoi il a dû penser, parce que moi, je n’arrive à penser à rien. Si ce canon était braqué sur moi, je ne penserais à rien. C’est triste de se dire qu’avant même que notre corps ne tombe, notre pensée s’est déjà éteinte. C’est comme si ces quelques secondes qui précèdent le coup fatal étaient les seules qui comptent, et qu’au final, elles n’auraient servi à rien.
Yacine : Je ne suis plus seul. Je sens une main serrer la mienne. Mon visage ne touche plus la terre, il a été recouvert d’un voile, celui de la justice, celui de la miséricorde ?
Salim : M’sieur Anouar, c’est bien vous ? Qu’est-ce que vous faites ici ? Comment avez-vous fait pour forcer le barrage ? Ils bloquaient tout le monde.
Anouar : Je l’ignore, Salim. La police a chargé. J’ai essayé de m'enfuir, et je me suis retrouvé de l’autre côté.
Salim : Vous avez sûrement dû croiser Hamza et Imane, ils étaient de l’autre côté.
Anouar : Il y avait des manifestants de l’autre côté. Je l’ai croisé, oui.
Salim : Hamza avait un colis, un colis qu’il devait nous rapporter. Il nous faut ce colis.
Anouar : Qu’est-ce qu’il contient, ce colis ?
Salim : Vous avez le colis ?
Anouar : Qu’est-ce qu’il y a dedans, Salim ?
Salim : Vous comprenez pas, il nous faut ce colis !
Anouar sort le colis et l’ouvre.
Anouar : Une arme ? Mais qu’est-ce que vous avez dans le crâne ?
Salim : Question de sécurité. Ils ne veulent pas rendre le corps de Yacine, et la police les regarde sans rien faire. On ne peut pas le laisser dans la rue.
Anouar : Il est hors de question que je te donne cette arme, Salim. Je vais la remettre aux flics, et n’essaie pas de m’en empêcher.
Salim : Et si je vous disais que c’est m’dame Samira qui la demande.
Anouar : Quoi ? Samira ? Où est-elle ?
Salim : Là où elle doit être, auprès de Yacine.