XXVII • La chute

Je marche sur la nappe immaculée, déterminée à rencontrer mon ennemie. Elle traverse le brouillard pour me provoquer d'un regard hautain et vicieux. Fée des neige tombe soudainement à genoux, les yeux remplis de douleur.

— Non. Cela ne peut être toi...

La stupeur me saisit. Il ne peut s'agir de l'amour dont Fée des neiges me parlait. Comment aurait-elle pu commettre un acte aussi épouvantable ? Je reprends mes esprits.

— Où se trouve Kamyl ?

— Qu'importe. Donne-moi la lyre.

— Je ne l'ai pas.

— Si, tu l'as. C'est pour cela que tu es venue, dryade. Faisons un échange : la parure contre la lyre.

— Comment savoir si tu tiendras parole ?

— Je ne peux rien te promettre.

— Alors, je ne peux te faire confiance.

— Si tu ne m'arrêtes pas, Dryade, ce sera la fin de tout. Si tu me donnes la lyre, je pourrai ressusciter toutes les créatures dont j'ai ôté la vie.

— Je t'arrêterai. Mais pas seule.

— Un griffon, une fée et une petite dryade. Vous êtes si pathétiques.

— Tu as assassiné Umi, tu as pris sa parure, mais tu n'as pas cherché les autres présents, ni à assassiner Shamsyn. Pour quelle raison ?

— Parce que tu as été assez sotte pour me les amener. Avec la parure, je suis sûre de pouvoir les posséder grâce à vous. Et je n'avais nullement envie de m'épuiser à m'occuper d'un ivrogne pleurnichard.

— Pas si on t'en empêche, dit Fée des neiges en brandissant l'épée du vent, la voix tremblante.

Le griffon saisit la lanterne et s'envola au-dessous de nous, dissipant ainsi la tempête de glace et réduisant de fait la force encore tenace de la nymphe.

— Je sais qui tu es, nymphe, dis-je calmement.

— Et qui suis-je ?

— Tu n'es pas une nymphe.

Elle garde le silence.

— Seul un démon peut détenir un tel poignard, et surtout l'utiliser. Tu n'es pas une nymphe. Quel est ton véritable but, démon ?

Le démon laisse apparaître sa véritable forme.

— Bien vu. Connaître mon objectif ne changera rien à la situation.

— Aurais-tu peur de répondre à ma question ?

— Je veux ramener mon jeune frère à la vie. Est-ce trop demander ? Seules les divinités devraient avoir le luxe de posséder le pouvoir de vie ou de mort sur toutes les créatures ? Je me refuse de plier face à une telle injustice. Seule la lyre peut réaliser ce souhait qui m'est si cher. S'il faut sacrifier le monde pour cela, alors je le ferai sans hésiter. L'ère des ténèbres est révolue, mais elle demeure toujours en mon cœur.

— Les divinités sont bien plus sages pour conserver de tels objets et sauront en faire bon usage. Ce n'est pas en massacrant tout ce qui vit que tu apaiseras ton chagrin. Rends la parure, et nous pourrons tenter de sauver ton frère.

— Comment faire confiance aux amis de ces créatures immondes que l'on nomme humains ? Peu m'importe. Je ne reculerai devant rien. Qu'importe le sort du monde, ou l'issue de ce combat, je réaliserai mon rêve le plus doux et le plus précieux.

Fée des neiges l'affronte. Alors que le démon déploie toute sa férocité, bravant les bourrasques de l'épée de son adversaire, je me glisse derrière lui, furtivement, et de mes racines, j'attrape la parure. Avant qu'il ne puisse m'attaquer, j'ouvre le livre, mes doigts caressant déjà les cordes de la lyre. La partition est jouée.

Pour me protéger, la Fée brandit de nouveau l'épée. Le démon tombe alors de la falaise enneigée.

 

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SinnaraAstaroth
Posté le 19/05/2024
On sait enfin la véritable identité de la nymphe (en fait démon) et ses motivations, mais cela apporte d'autres interrogation : qui était son frère et que lui est-il arrivé ?

Je trouve la fin un peu abrupte, le démon tant redouté a été vaincu bien rapidement, à moins que ce ne soit qu'un leurre.
noorlayluna
Posté le 23/05/2024
Le chapitre a été modifié, je le trouvais bien pauvre par rapport à ce que je voulais transmettre. Pour son frère, les réponses sont dans les autres recueils (en partie) et le reste paraîtra dans des nouvelles qui font partie du même univers ^^
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