13- Sous le palais

Notes de l’auteur : Bonne lecture


 

Nour manqua de tomber à la renverse. Elle connaissait peu de chose sur sa grand-mère, mais à en croire sa maman Mahaut était une femme fantastique. Oren vit son teint blémir et se précipita pour la soutenir.

Pourquoi le chambellan lui révélait donc tout cela ? Comment en savait-il autant ? C'était un homme sympathique mais que lui voulait-il vraiment ? L'aider à rentrer sur Terre, elle ne le croyait pas.

– Je n'en reviens pas que tu sois de la même famille que La Tamlin, fit Oren abasourdi par une telle nouvelle.

– J'en reviens pas non plus, avoua Nour. La Tamlin est ma grand-mère, souffla-t-elle.

Le dire à voix haute lui fit tout bizarre. Sa grand-mère était d'un autre monde, c'était une fugitive et elle possédait un médaillon magique. Tout ça était incroyable. Et pourtant...

– Ca ne m'étonne pas plus que ça, dit nonchalemment Elijah. La Tamlin est une criminelle et toi une terrayenne, c'est du pareil au même non ? Le mieux pour tout le monde serait qu'elle retourne avec toi en Terra.

– Elle n'est peut-être pas une criminelle après tout, lança Azénor. Qu'en pensez-vous ? demanda-t-elle au chambellan.

– Les criminelles pour les uns sont des héros pour d'autres, répondit-il, énigmatique. Quoi qu'il en soit il est bon pour chacun de nous que tu la retrouves. J'ai dis tout ce que j'avais à vous dire, il est maintenant temps pour vous de vous retirer.

– J'aurais aimé présenter la terrayenne à Mère, dit Elijah avec impatience.

– La reine n'est pas au palais malheureuseument. Tu la verras peut-être en fin de semaine. Sa dragonne vient d'avoir un petit, pourquoi n'iriez vous pas les voir. On ne voit pas un dragonneau tous les jours.

Le sourire d'Oren s'étala sur son visage. Son vœu le plus cher allait se réaliser. Il avait envie de prendre Nour dans ses bras, tout ça c'était grâce à elle.

– Tu as mené ta mission à bien et je suis fier de toi, le flatta le chambellan. La reine sera mise au courant.

 

Ils quittèrent le bureau de la tour. Nour faisait triste mine, elle redescendait l'escalier de la tour d'un pas lourd, l'empressement de voir une dragonne et son petit ne parvenait pas à chasser la pensée qui l'envahissait tout entière. Mahaut Tamlin est ma grand-mère tournait en boucle dans sa tête. Elle craignait de rencontrer cette femme. Croirait-elle qu'elle lui avait volé le bijou ? Qu'en ferait-elle si elle avait de nouveau en sa possession ? Son cœur s'emballa. La Tamlin pourrait-elle lui faire du mal ? Si le médaillon était sa seule chance de rentrer chez elle et que Mahaut refusait de l'aider.

– Dire que le chambellan croit qu'on est amis, lança Azénor. C'est n'importe quoi.

Nour sortit enfin de ce moment d'angoisse. Elle observa Azénor. La jeune fille était forte et courageuse, elle n'avait peur de rien ni de personne. Nour se prenait parfois à la prendre pour exemple.

– Oui, c'est aberrant, répondit Elijah.

– Pourtant vous avez un point commun, tenta Oren pour calmer les hostilités.

– Ah bon, lequel ? demandèrent-ils au même instant.

– Vous avez tous les deux des familles compliquées.

Le silence se fit dans l'escalier en calimaçon. La petite fille du conseiller Hiver et le prince elfique étaient bien trop fiers pour avouer leurs faiblesses. Nour eut de la peine pour eux, Oren avait raison les relations familiales étaient toujours compliquées.

 

Ils traversèrent une cour intérieure où un chêne trônait au beau milieu. Elijah raconta qu'il avait plus de cent générations élfiques. A l'époque, le palais était déjà construit et le chêne avait poussé là où était mort un de ses aïeux, un illustre roi. Les elfes qu'ils croisaient avaient la grâce de danseurs, et comme Elijah ils avaient la peau sombre qui luisait sous la lune et leur donnaient des reflets de bronze.

– Vous avez un plan pour vous rendre au hameau des tourmenteurs ? demanda Elijah.

– Nous allons mentir à nos familles, prendre un sac et une carte du pays et nous y rendre, c'est ça le plan, déclama Azénor.

– Ah bon, c'est ça le plan, s'étonna Nour.

– J'imaginais quelque chose de plus élaboré, avoua Oren. Si seulement on pouvait voyager en dragon.

– Pourquoi on peut pas ? demanda Nour qui jusque là ne s'était jamais posé la question.

– Myrrdin l'avait décrété, expliqua Azénor. Il tenait à ce que les drahons soient parfaitement indépendants et aient leur propre territoire.

– Mère s'est liée d'amitié avec cette dragonne et sa famille, répondit Elijah anticipant la question. Ils sont cinq à vivre parmi nous et décident eux-même qui peut les monter. C'est une question de confiance.

– Les dragons sont très intuitifs, ajouta Azénor.
 

La dragonne se trouvait dans une grotte sous le palais. Dans l'obscurité les parois rocheuses émettaient une lueur douce, des cristaux incrustés dans les formations calcaires projetaient des reflets scintillants.

Au cœur de la caverne, la dragonne reposait sur un lit de paille fraîche. Son corps imposant était d'un bleu profond, avec des reflets dorés qui semblaient s'animer au moindre mouvement. Ses ailes repliées créaient une ombre protectrice sur le petit dragonneau resplendissant de la même palette de couleurs que sa mère.

– Je me demande si je pourrais préléver un peu de salive, se demanda Azénor à voix haute. La salive des dragons a des propriétés curatives exceptionnelles, se justifia-t-elle quand Oren lui lança un regard de biais.

La dragonne observait tendrement son nouveau-né d'un regard empreint d'amour maternel. Ses yeux, d'un bleu étincelant, étaient empreints de sagesse et de bienveillance. Avec une délicatesse infinie, elle passait son museau sur les écailles du dragonneau, l'enveloppant de chaleur et d'affection.

Elijah s'approcha en silence, avant de faire un signe pour qu'on le suive. Oren retenait sa respiration, Nour avait les yeux écarquillés. Le dragonneau, encore couvert d'une fine pellicule d'œuf, émettait des petits gazouillements joyeux, découvrant peu à peu le monde qui l'entourait. Sa petite queue s'agitait maladroitement, et ses ailes, bien que frêles, semblaient déjà prêtes à prendre leur envol. La grotte résonnait doucement des bruits apaisants du dragonneau, mêlés aux murmures rassurants de sa mère.

– C'est extraordinaire, chuchota Oren.

Il ne parvenait à s'empêcher de sourire. Nour dût l'admettre, être en présence d'une dragonne et de son petit était fabuleux, jamais elle n'aurait pu imaginer une chose pareille. La dragonne les observa tour à tour, et comme ils étaient calmes et silencieux elle approcha son museau pour les sentir. Elijah y posa la main le premier, bientôt imité par Oren, qui retint un cri quand elle souffla. La peau était rugueuse sous les doigts.

– Tu la déjà monté ? demanda Azénor.

– Non, répondit sèchement le prince.

– Je parie qu'elle passe plus de temps avec elle qu'avec toi, lâcha-t-elle sans animosité.

Pourtant le petit prince lui lança un regard noir.

Le dragonneau s'approcha à son tour, sous l'oeil d'abord méfiant de sa mère. Mais elle le laissa faire. Il sentit la main de l'elfe, poussa un soupir d'aise, et mordilla sa manche.

– Le petit à l'air de bien t'aimer, remarqua Nour.

– Tu crois ? demanda l'elfe qui n'y connaissait pas grand-chose en relation humain.

– Mais oui regarde, il te renifle et se frotte, c'est un signe qui trompe pas, expliqua Oren.

Nour vit le petit prince esquisser un sourire pour la toute fois. C'était drôle comme cela lui transformait son visage.

 

Le retour de Lunadin fut étrangement silencieux. Elijah resta en retrait, il ne leur parla pas non plus les jours suivants. Oren avait de la peine pour lui, être prince n'était visiblement pas le conte de fée qu'il imaginait. Nour ne parvenait pas à excuser sa méchanceté et ce n'était pas sa préoccupation de moment, ce qui la questionnait c'était les motivations du chambellan. Devenue aussi suspicieuse qu'Azénor elle se persuadait que quelque chose se tramait. Pourquoi un homme qu'elle ne connaissait pas voudrait l'aider ? C'était louche. Après réflexion elle décida qu'elle n'aimait pas le chambellan, et de ce qu'elle en avait vu il utilisait Elijah. Dans quel but ? Mystère.

 

Etre auprès des dragons apaisa son esprit tourmenté. La dragonne, imposante et majestueuse avait le don de sonder l'âme, et pouvait agir sur les esprits.

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