14 | La Poétique (1/2)

Notes de l’auteur : Chapitre mis à jour le 13.09.23.

NOVA  ELLÉE.

Ciel étoilé, les lampadaires cerclent les trottoirs en orange. En short et tongs, je roule mon vélo à mes côtés et contemplette les murs colorés de la Ville Grisère. Toujours plus elle s’habille de graffitis, ceux de l’Onde qui ont posé un tas d’affiches et annoncé : chaque nuit depuis solstice d’été jusqu’au 23 juillet, ils barbouilleront un bout de béton pour noblir le signe du Cancer, soi-disant maudit. Aujourd’hui, c’est la nuit du 23 juin, à peine trois minuits que déjà, ici là-bas, nos quartiers de la Houle, on reperd des endroits où l’Onde ouvre la bouche, crache des mots-pigments, des pas-d’accord ! en bleu, rouge, jaune, orange, vert, l’infinie palette des vies-graffitis. Peintres-virtuoses, ils écrivent ‘crivent crient : à vous les Cancer, nous ne vous oublions pas, ni vous ni les Scorpions ni les Poissons. Le changement arrive. Le vent s’élève, nous affluons l’enlace sous soleil, tout éclate.

RÉNOVE CAMARADE, LE MONDE EST HORS SERVICE

qu’ils graffi’crivent.

SOUS LES PAVÉS, LA MER

qu’ils apportent en Ville.

Des vagues, des voiliers, des oiseaux-liberté, partout ils dessinent. Tout ça pour qu’à la petite aube, on y surprenne des Grisœils rincer les graffitis, transformer la color’nuit en un grise-mine matin. Mais au crépuscule suivant, ça y est ! Ça ne s’incline pas et voilà que ça recommence ! Encore plus fervent qu’avant, olé-hop haut les coeurs l’endiable ! D’autres colères et d’autres coloridées ·  ̇ · . ·

LE MONDE EST MA REPRÉSENTATION, PAS LA VÔTRE

LA VIE EST MON ÉVEIL, PAS MON DÉCLIN

Et j’y comprends mieux, à présent que j’ai découvert l’existence des mivages, que l’Onde ne s’oppose pas uniquement à l’extermination des idéelles. C’est… tout le reste, en fait. Tout un tout, le combat ne change rien du piaf entre le Sublunaire et l’Eurythmie. Que ce soit ici ou là-bas, on nous étrique et cloisonne la tête, on nous mange les évasions. Certes, je n’ai pu me faire qu’une idée vague de l’Eurythmie, j’en ai toutefois assez vu pour avoir la rebute face à ses Maisons astrologiques, assez entendu pour vomir des Lois de l’esprit qui barrièrent « impossible ! » tout ce que, dans un mivage, on aurait pourtant pu créer de « possiblé-oué ! » et de « pourquoi pas, tsé ? » La résistance sonne d’autant plus similaire que ce sont les exactes mêmes personnes au pouvoir, de ce que me disaient Michio et Séphora. L’Eurythmie – l’Observatoire. L’Observatoire – l’Eurythmie. Que du même à la gouvernance.

S’OPPOSER SANS SE MASSACRER

SE DONNER SANS SE SACRIFIER

Et même… même ! L’Onde va tellement plus loin qu’une simple lutte politique ! Parce qu’enfin, j’y ai trouvé dans ma chambre le « petit livre bleu » de l’Onde, cet ouvrage qui avait beaucoup circulé durant la Belle Guerre et qui parle révolte existentielle. Et bien sûr je ne sais pas qui l’a déposé là – hey c’est d’autant plus extraordifou que l’O.V.E.A. en a brûlé le moindre exemplaire ! Et bien sûr je me doute que c’est cette même personne qui m’a donné la boussole – hey merci coupaine mais qu’est-ce que tu veux me faire signifier par là ? Est-ce que tu ne pouvais pas me laisser un mot comme la dernière fois, même si c’est pour me dire que mes mamas sont suspicieuses, et m’aiguiller un peu, hhm s’il te pôlait ? Et bien sûr c’est une multitude de questions mais c’est surtout ma nouvelle conception de la viva… vie !

L’ACCESSIBLE EST UN CHEMIN VERS L’INACCESSIBLE

Cet ouvrage oh! ce que j’aime la philosophie « flomade » sur laquelle se base tout le mouvement de l’Onde. Les pages sont gonflégondolées, certaines déchirées, il me manque plusieurs bouts mais j’arrive néanmoins à reconstituer l’essentiel. Déjà : le livre d’origine a été écrit par les fondateurs de l’Onde, Noée Elévie et Jules Orion. Le bouquin a connu de nombreuses rééditions par la suite, celui que je possède date d’il y a quelques années à peine. Ensuite, tout ce qu’on y raconte : selon Noée et Jules, le monde serait recouvert d’une couche de pensées qui serait comme un flot d’idéelles en mouvement perpétuel, nommé le « Flux ». Wowiwow c’est un méli-mélow de toutes les consciences ! Et  le plus beau, là-dedans : Noée et Jules soutiennent que l’état naturel de tout être vivant serait celui de voir, d’entendre, de ressentir le Flux. Ah la majesté de la chose ! Hélas l’Observatoire, en interdisant la perception des idéelles depuis la Grande Correction, a déformé notre façon d’être. Non seulement il nous a lobotomisés, verrouillant notre esprit de l’intérieur, dès lors bridé dans ses capacités extraordinaires, mais il nous a enlevé notre moyen d’expression et de communication le plus précieux. Et nous nous sommes renfermés sur nous-même. Et nous en sommes venus à croire que nos pensées, nos émotions, doivent rester « privées ». Bloquées en nous. Et nous sommes devenus incapables de communiquer et de nous comprendre. Et nous nous endormons dans la dépression et nous mourons de l’intérieur et personne pour s’en soucier, personne sauf peut-être…

FIE-TOI À TON VIVÈME

RYTHME PRIMITIF QUI PULSE DU DEDANS

FILE TISSE TA VITAPOÉSIE

… l’Onde ! Heureusement, l’Onde est là pour nous ramener aux sources, à cet Âge de « l’Or-pensée » où nous étions en parfaite communion avec le Flux. L’ouvrage parle même d’une Poétique à suivre : c’est une pratique consistant à explorer le Flux, et où les personnes qui parcourent ce flot d’idéelles et qu’on nomme des « flomades » essaient de comprendre les forces qui le traversent. Le processus est vu comme un chemin à parcourir tout au long de sa vie, sans début ni fin, et dont la visée serait celle de se libérer à travers une plus juste connaissance de soi et des autres. Toutefois ! Cela n’est pas sans danger : à partir du moment où l’on s’ouvre au Flux et devient Pensif, il est facile de s’égarer, mal interpréter nos idéelles, ne plus distinguer l’idéel du réel, sombrer dans la folie… Aïo-aïe ! Raison pour laquelle chaque Pensif a besoin d’un « maître-flomade » pour le guider dans le Flux.

Ah ce que j’aimerons en avoir un ! Lui qui enseigne à son élève la Poétique, soit à arpenter le Flux, l’aide à débrider son esprit et vlop-voilou ! Qu’on apprend à penser de manière élargie, déployer son propre flux, atteindre un état d’ « hyper-pensée » où nous redeviendrions une puissance active et créative. C’est l’ouverture à tous les changements ! qu’ils disent, et un enseignement qui arrive à son terme lorsque l’élève trouve son « vivème ». De ce que ça raconti-raconta, il s’agit d’une phrase de vie comme notre raison de vivre que tout un chacun possède. Ah la beautia du truc ! Surtout qu’il est possible d’extérioriser son vivème : une fois prononcé à voix haute, il se visibilise en idéelle, devient un « Anima », notre nouveau compagnateur de vie. Voilà pourquoi, d’ailleurs, on considère que l’élève en sait suffisamment sur la Poétique dès lors qu’il a animé son vivème pour que son maître le libère : il a su trouver un allié en lui-même et personne ne peut comprendre sa perception du Flux mieux que lui-même. Marchant loin toujours plus loin, flomade accompli qu’il est devenu, yopi-yes !

Et là où c’est intéressia (hé dans le sens : vraiment intéressons-je !), c’est que pour l’Onde, suivre la Poétique est une manière d’apprendre à penser par soi-même et à se libérer des carcans de pensées qu’on nous pressure là sur nous. C’est questionner nos modèles de société et se délivrer des mivages lorsqu’ils nous cadenassent la vie. Bewé ! Un flomade possède une telle connaissance de soi et des idéologies qui meuvent le Flux qu’il parvient à les dépasser. C’est du moins ce qu’on raconte sur Noée Elévie et Jules Orion qui ont poussé leur exploration mentale si loin qu’elle leur a été émancipatrice. Libérés de l’Eurythmie, ils sont même parvenus à créer un nouveau mivage : « Achronie ». Hélas évaporé avec les années… il n’existait pas assez d’Achroniens… personne pour prendre la relève… l’Eurythmie était trop forte… encore de nos jours… hélas oui… mais tout espoir n’est pas complètement flétrissé ! Si l’Onde initie ses membres à la Poétique aujourd’hui, c’est dans l’espoir qu’un jour, l’un d’entre eux arpente le Flux avec une telle finesse, profondeur, poésie, qu’il retrouve Achronie et en guide d’autres d’autres… d’autres flomades le plus de flomades possibles dans ce nouveau monde où convivialité serait le maître-mot et où toustes on serait ivres de vie-vréole !

Et bordel ce que ça m’attire, et bon sang comme ça m’éveille l’oeil des curiosités. S’évader de l’Eurythmie, et si je pouvais m’évader de cette Eurythmie qui n’est rien d’autre que l’idéologie de l’Observatoire poussée à son extrême ? Et si je pouvais suivre la voie flomade et devenir voyaflux, je verrai je voyagerai dans l’horizon de ma tête, éveillant la comète en moi et exploitant tout mon potentiel d’ondoie-vie ? Ressentir toujours plus d’idéelles ? Sillonner le Flux ? Et si… et si… ? Retrouver Achronie ? Rejoindre l’Onde oui là tout de suite ?

Surtout que, eh ! À force de lire tout ça, j’ai commencé à voir l’enfant-idéelle différemment, acquérant la certitude qu’il est un Anima. Après tout, je l’ai toujours perçu comme étant plus qu’une idéelle, qu’il soit un Anima expliquerait beaucoup de choses… comme : son individualité, pourquoi il me tourne constamment autour, là où les idéelles ne nous considèrent guère. N’en reste pas moins que ça m’interroge : pourquoi j’en ai hérité ? Comment j’en ai hérité ? Est-ce que cela signifie que Léon Ariel fut flomade un jour ? Qui était-il vraiment ? L’Onde sans aucun doute pourra me donner des réponses à toutes mes interrogeons-nous !

Et vlop que je laisse trainer mes doigts sur les murs qui ont pris la parole… rêverie-marche tout au long de la mer-graffiti, yalilala, tout en flot-glissage, un brin déception de ne croiser toujours personne. Épaules courbettes. Comme Michio doit s’absenter à l’Aska ces prochaines nuits, m’ordonnant de rester au terrier avec Séphora en attendant qu’il revienne, je me suis dit que c’était l’occasion idéal pour faire des virées nocturnes en Sublunaire et entrer en contact avec l’Onde, comme ils graffi’graffent pendant la nuit. Mais personne… personne… Léger soupir. Frotte mes paupières fatiguées sous mes lunettes. La lueur-lune glisse sur mon visage. Les roues de mon vélo grincent. Et Léon là-bas, affublé de son bandana bleu nuit, son cache-oeil, sa marinière d’azur, il surfe-skate en souriant à la démesure, bienheureux de vivre vadrouillance ce soir. Il erre émerveillance avant de subité freiner s’arrêter (quoi qu’est-ce qu’il a vu ?) devant un graffiti et aussitôt me jeter un regard par-dessus son épaule. Intriguère je le rejoins, des petites pupulses dans le ventre, et vois alors :

ELÉVIE & ORION

LEUR PENSÉE-VIE

RÉSISTE RÉSISTERA

À TRAVERS LE TEMPS

L’épée de Léon se lève, se pointe à côté des prénoms d’Elévie et Orion. Ma frissonnette. Il m’avait déjà fait le coup il y a trois jours à peine, lorsque l’Onde avait vagué ses couleurs à la Fontaine Astrale, sans que je ne saisisse où il voulait en venir. Mais aujourd’hui… je comprends ! Et ma main qui presse la boussole dans ma poche. Et mon corps qui réagit à l’instantané : il soupire de contentement, il tremble vertigé, et mes yeux qui se ferment… et… et…

Depuis ma conversation avec Milan à l’Arbolifère, et ses prévenances, son refus de m’avouer ce que contient la boussole, si ce n’est ma « vérité », je n’ai cessé d’écouter l’amulette. Encore et encore… et bien sûr il y a ce désir mon désir tout gros tout immense de savoir ce qu’on me cache, mes mères peut-être… et Milan aussi… et en même temps, il y aussi… je ne sais... mais c’est juste que… enfin voilà… pas une heure ne passe sans que je ne pense à elle. Siffle-chuchotante au fond de la poche, elle s’est alourdie, refroidie… si glaciale qu’elle me laisse des ecchymoses sur la cuisse, et m’appelle… m’appelle… m’aspire presque… son susurrement s’accensourde encore et encore… et encore… vaguée d’idéelles qui me procurent des sensations de bien-être… comme là, maintenant… et j’entends… comme souvent… Elévie et Orion jouer, ô ce qu’ils jouent ensemble ces mômes, capi-capitaines ou pira-pirataines d’un navimer ! Et Ariel qui aimerait se joindre à eux… Et c’est ce qu’il avait voulu me dire à la Fontaine, ce qu’il me dit encore aujourd’hui… Lui il a connu ces personnes lorsqu’elles étaient enfants… Lui il a voulu jouer avec eux… Mais il a été repoussé. Encore. Et encore. Et encore. Et c’est d’une violence, d’une virulence que je ne comprends de moins en moins.

Rouvrant les paupières, j’examine Léon qui s’en est allé tenter des figures de skate sur son trottoir, tout esseulé tout étristé, tandis que la boussole continue à m’envoyer ses souvenirs et émotions et que… oh bon sang je la sens tellement intense sa solitude… et je ne peux avoir aucune certitude qu’il s’agisse vraiment de ses souvenirs mais qu’est-ce que ça pourrait être d’autre… ? Il s’exprime Léon il s’exprime à travers eux… trois jours à peine que j’éprouve sa vie et que je… je…

Parfois, ce sera juste des vagues. Bleu marine ou bleu safre, un vent-murmure, brise-sel, coulée saphir. Agréables et berceuses. Lorsque Léon joyance ! D’autres fois, ce sera une torrée-tourbillonne, comme la mer qui tempête et violence, juste violence. Sa seule brutalité pour force-vie. Des poignes au ventre qui me donnent des subites lancées d’énergie. Lorsque Léon colère ! Et il y aura aussi ces idéelles âcres et désolantes, plus pâteuses en bouche, qui me donnent, aussitôt éprouvées, des hauts-le-coeur et des envies de fuite tant elles m’évoquent la fossoyée des gens-sous-tombe, croupissant sous les épaisses mouches et la morose pluie d’un ciel-hécatombre. Lorsque Léon rancune ! Lorsque Léon mormonne, lorsque Léon horreur, lorsque Léon tristesse, lorsque Léon haine, lorsque Léon pourrit de l’intérieur, exactement comme là…

Certes il s’amusi-skate mais je sais, il y a le poids du passé sur son dos, le poids d’un mur où on a inscrit le prénom de deux personnes qu’il… adulait ? haïssait ? jalousait ? Sa solitude subité bouffée par les voix de la boussole… les voix… que j’ai commencé à entendre ce matin et qui… oh ces voix… chuchoterresses… naïennes… me font peur en même temps qu’elles me cassent le coeurtout ce qu’elles souffrent… ces voix de porte-chaos… soulevées en bas fond… Naïa Naïa Naïa… et cette colère cette injustice cette si-vous-croyez-que-vous-pouvez-nous-massacrer-comme-ça… cette envie irrésistible de se venger, refuser qu’on nous ravage et exécute par milliers, tout ce qu’a porté Léon Ariel, et garder l’espoir... toujours… Naïa Naïa… un ultime espoir de reconstruction… un monde où toustes nous serions égaux et libres et heureux… à se demander soudain ce qu’est Naïa… si vraiment elle est aussi diablesse que ce qu’on dit d’elle ? Et si Naïa… et si sa souffrance était telle que ses actions on pourrait–

Petite crispation lorsque, à m’avancer dans la rue, mon oeil capte le visage de Léon. Il avait soudainement tourné la tête dans ma direction et me scrutait maintenant de ses yeux ambres, si marquants, qui irisent la lumière. Les fluvios d’eaux arabesquent sur sa peau chaude, son sourire s’élargit à l’extrême candeur et gonfle ses joues rondouillettes. Heureux, il est rayonneux que je m’interroge sur Naïa, lui qui m’a clairement fait comprendre à travers la boussole qu’il est partisan naïen et qu’alors ma penchée pour l’Onde il n’approuve rien du tout.

C’est vrai qu’on en a beaucoup discuté et que ça l’a pas mal encoléré. Combien de fois je lui ai lu le petit livre bleu pour lui montrer qu’on peut se libérer en empruntant une autre voie que celle de la vengeance. Et lui qui secouait sa tête à la frénétique, levant son épée en bois avec vigueur, et moi qui me demandais s’il a vraiment participé à des actions révolutionnaires ou s’il n’était qu’un enfant protégé par le mouvement ? Quoiqu’il en soit, je le pardonnais parce qu’enfin il n’est qu’un gamin, il ne savait pas il ne sait pas, encore aujourd’hui, dans quel tourbillon il s’est engagé. Répondre à la violence par la violence est une réaction tout ce qu’il y a de plus enfantin, et lui insistait en noircissant son regard, quand il ne m’ordonnait pas de suivre l’aiguille de la boussole visant la Flave. Tout en sourire peiné, je réagissais non, je n’irai pas là où crèche le mouvement néonaïen. Ça le mécontentait, il fermait son visage, croisait ses bras et s’en allère bouder dans son coin. Pas étonnant alors qu’il vibrance à la joie au moment où je me questionne sur Naïa !

Hélas copain ! Tu ne comprends pas. Je ne suis pas en train d’adhérer à son idéologie, c’est juste une part de moi qui… et je m’approche de lui et je m’accroupis, et il me regarde et il me sourit, ses cheveux obscurité plaqués à son front… C’est juste une part de moi qui peux comprendre qu’on en arrive à ce genre de grandes extrémités. Une part de moi qui entend ta souffrance, celle des Naïens, tout porte-chaos que nous sommes, une part de moi qui conçoit qu’on s’allie dans une lutte commune, et qu’on refuse, et qu’on se révolte, et qu’on veuille renverser des mondes entiers comme ça, mais ça ne veut pas dire que je souscris à la violence de Naïa ni à ses désirs de vengeance.

À mes pensées, le regard ambre de Léon se durcit, comme souvent ces derniers temps. Ses traits fins ses pommettes relevées s’obscurissent, et tout que ça me froisse qu’il m’observe avec la couleur de l’animosité. Et la boussole qui me catapulte soudain une embrasée d’idéelles rouges, colérantes, douloureuses. Si fulgures que ça me brûle la cuisse et me déséqui ibre accroup   je  tombe lâch  m n vélo il s’ croule  ur le côté. Et je rouspète, et je me relève fissa, mon vélo avec moi. Je dépoussière ma chemise fleurie, dévisage Léon plus qu’avec sévérité, la colonne toute droite toute redressée, n’aimant pas qu’il m’humilie ainsi et n’acceptant pas qu’il me blesse outch! la boussole se glace m’écchymose la cuisse. Et les voix continuent à glisser dans mes veines, elles m’éprouvent des émotions comme Tu ne comprends pas Tu ne comprends pas Tu ne comprends pas Tu ne comprends pas Tu es comme eux Tu es comme eux Tu es comme eux Tu es comme eux Et encore on m’abandonne Et encore on m’abandonne Et encore on m’abandonne Et encore on m’abandonne. Léon m’endure sa vie au point que ça me vrille les yeux d’humidité mais je ne cède pas à ses caprices. Tout à la contraire, j’en ressors encore plus détermination à rejoindre l’Onde et lui prouver que la Poétique est la voie la plus libératrice qui existe. Je lui promets même de ne pas le rejeter, non jamais. Parce qu’enfin, ce n’est pas parce que nous ne sommes pas d’accord que je ne te comprends pas ou que je t’abandonne. Noée et Jules t’ont peut-être repoussé en fondant l’Onde de leur côté, ça ne signifie pas que je vais faire de même. Alors cesse d’être aussi éfurié contre moi, je te prie ? Je ne suis pas en train de te trahir !

Gonflant le buste avec toute ma plus belle des splendeurs, ignorant la colère de Léon, je reprends ma chasse à l’Onde et m’avance m’avance extra ténacité. Une demi-heure… une heure… deux heures… Vélo grinçant, main lasse dans les cheveux. Hélas je dois me rendre à l’évidence : personne ici, personne là-bas. Aucun artiste qui graffe dans ce coin-là de la Ville Paupière. Je devrais peut-être rentrer, dormir malgré tout ? Yeux ensommeillés. Séphora doit s’inquiéter que je ne me réveille pas en Eurythmie ! Bon. Je retenterai une balade à la nocturne demain ! No souçaille ! Mes doigts effleurent la boussole, passage furtivité : la mer roule à mes oreilles. Bien ! Léon qui me suit à l’arrière s’est calmé. J’enfourche mon vélo. J’allais glisser en bas la rue, mais un mouvement là-bas, entre deux lampadaires, attire mon attention.

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Edouard PArle
Posté le 08/11/2023
Coucou Louison !
Si j'ai bien compris, l'Onde est un mouvement de résistance auquel a participé Léon et qui l'a laissé dans un état assez déplorable. La description que tu en fais donne l'impression d'avoir affaire à un drogué qui préfère se réfugier dans des illusions perdues plutôt que de faire face à un présent dont il ne veut pas.
Quant à la description de la "doctrine" de l'Onde elle est vraiment bien faite, on sent d'un côté le côté un peu sectaire / potentiellement dangereux du mouvement et en même temps le rêve qu'il peut incarner, la fascination qu'il peut inspirer à ses membres. D'ailleurs, je trouve ça très sympa le vocabulaire que tu emploies / inventes pour faire référence à l'Onde et plus généralement aux Idéelles. On y croit.
J'aime beaucoup le paragraphe où Nova s'adresse intérieurement à Léon, montrant ce qu'elle voudrait lui dire. Curieux de voir ce qu'il va se passer entre eux dans la suite du chapitre.
Un plaisir,
A bientôt !
Louison-
Posté le 13/11/2023
Hello Edouard !
Merciii pour ton com' <3

Oui pour l'Onde t'as tout bien compris ! Je suis contente si tu perçois le côté sectaire et qu'en même temps le mouvement inspire des idéaux qui font rêver, j'aime bien creuser ces formes de tensions qui peuvent exister entre la fascination et le danger qu'on éprouve à l'égard de certains idéaux :)
Chouette aussi si tu as apprécié l'adresse de Nova à Léon, leur relation va un peu s'approfondir dans la suite mais j'ai conscience qu'il faudrait peut-être que je la retravaille davantage, même si c'est pas dans mes plans de modification immédiats ^^

Merciii encore une fois, et à vite ! ;D J'essaie de passer par chez toi dans la semaine ^^
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