Chapitre 19 - Valbe

Par Froglys

Je n’avais pu dormir que quelques heures avant que l’on ne me réveille pour mon tour de garde. Entre mon estomac qui grondait famine et Thalion qui s’était levé deux fois pour faire un tour, dormir s’était révélé difficile. Je devais avoir l’air pitoyable.

Je sortis le miroir brisé pour me recoiffer. Il m’était vraiment très utile en fin de compte.

— Besoin d’aide peut-être ? lança une voix masculine assez aiguë.

Je tournai la tête vers Kay qui se tenait contre un arbre. Sa faux dans les mains, il paraissait tout petit à côté.

— Eh bien si tu pouvais tenir le miroir ce ne serait pas de refus.

Déposant son arme, il entreprit de récupérer le miroir et de le lever assez haut pour que je puisse m’y voir. Pendant que je tressais mes cheveux, je le questionnais sur toutes ses étrangetés.

— Comment es-tu devenu une « âme » ?

— Ce n’est pas très intéressant, tu sais. Un simple accident. La chimie n’était apparemment pas mon point le plus fort.

Son sourire forcé me faisait bien comprendre que le sujet ne lui était pas vraiment favorable. J’aurais aimé en savoir plus, notamment sur le point de la mort. De ce que me racontait mon père, beaucoup dans le monde racontait à qui voulait l’entendre que l’âme était une partie de notre corps qui survivait à la mort de notre corps. Mais selon lui notre âme, n’ayant plus d’attache terrestre s’envolait et disparaissait. Il était donc compréhensible de vouloir savoir comment Kay avait pu faire une telle chose. Même par accident.

— Et pourquoi cette arme ? Tu veux devenir faucheur dans les champs ? lançai-je pour plaisanter malgré le fait que je voulais vraiment savoir.

—  Je cueille les céréales lorsqu'elles sont à point. C’est ma spécialité, confirma-t-il.

Mon sourire s’étendit. S’ensuivirent une bousculade de questions. Autant lui que moi, nous nous entendions bien. Je retins que Léoni et lui étaient de vieux amis ayant grandi dans le même village. Il ne m’en appris pas plus sur notre ami épéiste à mon grand désarroi mais notre discussion fut plaisante et je fus bien plus à l’aise avec lui par la suite.

Il fut alors temps de mettre les voiles. Chacun vêtu de sa veste d’invisibilité, nous traversâmes le portail de Kay, et une longue marche commença.

 

En deux jours, nous avons réussi à parcourir la distance qui nous séparait de la capitale. En alternant entre marche et portails, et sans courir de risque en passant par les villes, nous avons fini par arriver à destination. Nous pouvions à présent apercevoir au loin l’une des portes d’entrée dans la capitale. Notre cocher, Nathan, ne devrait pas être bien loin non plus. Les routes du royaume étaient tout de même assez sûres si vous ne vous trimballiez pas deux types qu’un mystérieux groupe de mercenaires voulaient tuer… De plus, Jegal s’était occupé de lui trouver deux chevaliers pour l’accompagner jusqu’à la capitale où il leur avait promis qu’ils seraient payés une fois arrivés à la capitale. 

Au fur et à mesure que nous avancions vers la porte, Fallon ralentissait la cadence. Enfin, sans explication, alors que je n’avais plus l'œil sur lui, il disparut. Lorsque je tournai la tête m’attendant à le voir à mes côtés, il n’était plus là. Et nulle part ailleurs autour de nous. Il était simplement parti. Je me jurai de le lui faire payer la prochaine fois que je le rencontrais.

Quoi qu’il en était, nous finîmes par nous présenter à l’entrée de la capitale. Une longue file de carriole et de gens attendaient que les gardes les fassent entrer. Il était normal que les gardes fassent attention à qui laisser entrer mais cela devait être bien long pour ces pauvres gens.

Surtout quand nous nous sommes approchés de l’un des gardes posté en retrait. Appuyé contre le mur extérieur de la ville, il se redressa pour nous interpeller.

— Vous devez attendre. Vous ne pouvez pas passer comme ça.

— Navré de vous importuner. Voici mon badge d’identification, dévoila Jegal en présentant au chevalier une petite bille de couleur bleue.

Celui-ci la saisit et l’examina avant de la rendre à son propriétaire.

— Pardonnez-moi, monsieur. Nous ignorions que vous étiez sorti. Ces jeunes gens sont-ils avec vous ?

— Oui.

L’homme nous demanda alors de le suivre et nous conduisit à travers la foule. Le passage dans la muraille était gigantesque et l’épaisseur du mur devait faire au moins quarante mètres. Ce fut au bout de ce mur de pierre qu’il nous laissa pour retourner à son poste.

— Qu’est-ce que c’était la petite bille ? demandai-je à l’intention du stratège.

— Pour moi, un laissez-passer, mais réellement un moyen d’identification de haute technologie. Il communique l’identité de la dernière personne à l’avoir saisi.

Thalion s’éloigna de nous un instant. J’en profitai pour admirer l’endroit dans lequel je me trouvais.

J’avais entendu des récits à propos de la capitale. Immense, animée, lumineuse et agréable. Je ne fus pas déçue.

La ville était divisée en trois parties, aussi nommées cercles. Chacun possédait sa propre autonomie, ses particularités, loisirs et fonctions. Hormis le Palais Royal, la Grande bibliothèque et l’académie magique Clerfort qui étaient uniquement présents dans le premier cercle, chacun possédait ses écoles, ses commerces, ses habitations, ses castes et ses temples. Le prix des habitations dépendaient évidemment des cercles étant donné les protections attribuées à chacun. Mais il n’y avait pas uniquement des nobles dans le premier cercle. Chacun possédait un taux de nobles et de roturiers à peu près égal. Cela était notamment dû aux maisons de noble qui étaient construites en petite quantité dans chaque partie de la ville. Cela laissait ainsi aux plus modestes de s’installer où ils le souhaitaient dans le reste de la ville.

— J’ai trouvé une calèche qui peut nous amener jusqu’au premier cercle. Par contre, n’ayant pas de dérogation, il ne pourra pas nous conduire plus loin, nous annonça Thalion en revenant vers nous.

— Pourquoi faut-il une dérogation ? le questionna intelligemment Kay.

— Le premier cercle est principalement une aire piétonne donc la circulation est très contrôlée. Le roi attribue des dérogations à ceux dont il juge la nécessité.

Kay acquiesça et je pris mentalement note de l’information. La capitale était décidément gorgée de complexité.

Suivant ensuite Thalion, nous prîmes place dans la carriole avant que les chevaux ne commencent à avancer. 

L’air y était bon, la circulation sur la route n’était pas trop encombrée et je pus enfin me détendre. J’étais très heureuse et excitée à l’idée de me trouver dans la capitale. C’était vraiment un monde différent. Bruyant surtout, je n’avais pas l’habitude.

Malgré l’étendue de la capitale, nous étions parvenus à l’entrée du premier cercle en moins d’une heure et demie. Cela semblait apparemment être un exploit dû aux routes peu encombrées de calèches à cette heure-ci.

Tout le monde descendit et Jegal paya le cocher pour nous avoir conduit jusque-là.

— J’ai contacté le Palais tout à l’heure, un fiacre devrait nous attendre. Dans moins de trente minutes nous devrions être arrivés au Palais.

Je fronçai les sourcils. Certes, j’avais bien compris que nos parents connaissaient le roi de par la noblesse de mon père, que Léoni et Jegal y travaillaient, voire même y résidaient, mais pourquoi Thalion et moi y allions-nous également ? Mon frère serait-il en contact avec notre famille vivant à la capitale ? Et celle-ci serait-elle toujours proche du roi ?

— Ayant accompli ma mission première, je vais vous abandonner ici, intervint alors Kay.

Tout le monde se tourna vers lui. Il n’avait aucun bagage et il avait dissimulé sa faux avec un enchantement un peu avant d’arriver en ville.

— Tu as un endroit où aller ? s’assura Léoni.

Il hocha la tête.

— Zacarías m’a cédé les droits de propriété d’un appartement dans le deuxième cercle. Il m’a aussi dit qu’il s’occuperait de tout pour que je puisse entrer à Clerfort. Ça ne devrait pas être trop difficile étant donné mes capacités.

S’éloignant dans les rues de la capitale, il ne se retourna pas et disparut plus loin. Quant à nous, nous rejoignîmes notre nouveau moyen de transport et arrivâmes en peu de temps devant le majestueux Palais dont le royaume s’émerveillait tant de la modernité.

Un bruit de métal semblait s’approcher sur le chemin pavé à l’extérieur. Un chevalier s’approcha de la porte de l’habitacle dans lequel nous étions mon frère et moi et l’ouvrit.

L’armure ne couvrait pas entièrement son porteur comme le ferait une armure classique. En bronze, elle était composée uniquement d’un plastron, de bottes, d’épaulettes et également de plaques au niveau des coudes et des genoux. Dessous, on devinait une forte musculature sous la côté de maille qu’il portait. Seul, il se posta sur le côté et aida chacun d’entre nous à descendre.

— Rufin ! s’exclama Léoni en descendant. Je suis content de te revoir !

— Ravi aussi, petit. J’ai été prévenu de votre retour par l’entrée Est. Nous avons tous été surpris quand vous nous avez appelés pour nous dire que vous vous absentiez un moment. Surtout un duo aussi atypique.

Léoni rit. Il semblait heureux et à l’aise devant ce soldat. Je me demandais si Léoni n’était pas son apprenti.

— Ravi de tous vous revoir également, s’adressa-t-il à Thalion et Jegal.

Ils avaient l’air de bien se connaître. Mon frère avait-il réellement un lien étroit avec le Palais Royal ? Si c’était le cas, cela expliquait notre présence ici mais j’étais tout de même de plus en plus perdue. J’eus pensé qu’il serait temps d’arrêter de me poser toutes ces questions. En plus, il semblait que j’allais enfin avoir quelques réponses.

— On m’a chargé de vous emmener voir la duchesse de Dvareine.

— Je vais vous laisser dans ce cas. De nombreuses tâches doivent m’attendre dans mon bureau, se retira notre stratège.

Puis, suivant notre guide, il nous mena vers le Palais.

Devant nous se dressait l’immense demeure du roi d’Orane, Émile Gambail. J’avais entendu dire de lui qu’il était un excellent roi. A part son Palais qui regorgeait d’employés, de chevaliers et de membres éminents de la noblesse, il vivait de la même manière que son peuple. Il ne taxait pas plus que nécessaire et s’assurait de lui-même payer ses impôts. Le royaume était paisible sous son règne.

Toutefois, j’avais également entendu des histoires sur son arrivée au pouvoir. Il paraîtrait qu’il n’avait pas toujours été le bon roi sage qu’il était à cette époque. Il aurait lui aussi eu sa période frivole où, de ce temps, il profitait pleinement de son pouvoir et de sa fortune. Il envoyait ses soldats au combat pendant que lui se prélassait chez lui.

Mais ces dernières informations le concernant semblaient peu nettes et surtout dépassées, puisqu’à l’heure actuelle le royaume se portait très bien. Il était même devenu le pays le plus influent au monde, suivi de près par l’empire d’Iragua qui était une immense puissance économique.

Je regardais toujours le château qui se tenait devant moi, se situant au sommet d’une cinquantaine de marches composant un escalier de marbre, il était très imposant.

Parvenant au bout de cette épreuve, j’aperçus Léoni discuter allègrement avec le chevalier. Ils avaient rapidement monté cet escalier avec Thalion et m’attendaient.

— Notre tante nous attend, on ne devrait pas traîner sinon elle risque de me le reprocher, m’annonça mon frère.

Notre tante ? La sœur de notre père ? Était-ce la duchesse dont le nom avait précédemment été mentionné par le garde ? J’étais de plus en plus curieuse à l’idée de vivre à la capitale. Rencontrer ma famille ? Bien sûr que j’étais partante !

Le chevalier Rufin ouvrit la porte d’entrée du Palais et nous fit entrer. A l’intérieur, un nouvel escalier se présenta face à nous. Une femme  habillée d’une élégante robe bleue qui paraissait vraiment chère en descendait. Son regard se posa d’abord sur le chevalier pour le remercier d’un sourire avant de se poser sur moi. Son sourire se dissipa. Sa bouche s’agrandit surprise et elle porta sa main à sa bouche. Ses yeux brun clair pétillaient, elle semblait bouleversée. Etait-ce elle, notre tante ? Elle était magnifique.

Je retrouvais dans ses traits une ressemblance frappante avec mon père. Bien plus que ce à quoi l’on pourrait s’attendre.

— Thalion, dis-moi que c’est vraiment ta sœur, s’enquit-elle sans me quitter du regard.

Je le vis hocher la tête et la jeune femme retenir un hoquet. Sans attendre plus longtemps elle souleva les pans de sa robe pour accourir dans notre direction. Là, elle s’arrêta devant moi. Ses traits fins, ses yeux droits, sa carrure fine et noble, tout me le rappelait. Également de part ses cheveux soyeux, elle était la version féminine de mon père.

Debout devant moi, elle était assez loin pour que je me sente assez loin et assez près pour que je puisse voir des larmes perler à ses yeux. C’était donc cela qui brillait tant dans son regard.

— Je suis ravie de faire ta connaissance, Anthéa. Tes parents m’ont beaucoup parlé de toi. Je suis vraiment soulagée et heureuse de te savoir en vie et de retour parmi nous, commença-t-elle. Je suis Lisabeth, la sœur de ton père.

Je ne savais pas trop quoi dire. Mes lèvres étaient comme scellées. C’était la première fois que je me retrouvais devant un membre de ma famille. Quelqu’un qui avait bien connu mon père, et même ma mère, avant que je ne naisse. Avant qu’ils ne s’installent loin de la ville.

Heureusement pour moi, je n’eus pas à faire quoi que ce soit. Mon frère intervint en s’approchant de la tante que lui connaissait.

— Lisabeth, je pense que Théa a besoin de temps. Elle vient tout juste d’arriver. Laisse-lui le temps.

Celle-ci se tourna vers lui.

— Elle a le même regard incorrigible que sa mère.

Thalion hocha la tête. Lisabeth me quitta alors définitivement pour l’enlacer comme le ferait une mère. Affectueusement.

En même temps que mon estomac se dénouait, mon cœur se serrait en voyant mon frère recevoir l’amour d’une mère alors qu’il avait perdu la sienne. Je voulais moi aussi ce genre de câlin. Je me sentais mal. Mal de ne pas avoir pu réagir alors qu’elle n’attendait que ça. Je regrettais amèrement mon inaction.

Desserrant son étreinte sur mon frère, elle s’adressa par la suite au jeune épéiste.

— Léoni, la princesse patiente dans le premier salon, tu pourrais les y emmener ? Elle a hâte de revoir son cher Thalion, le somma-t-elle avant de s’adresser au brun.

Son cher Thalion ? Pardon ? Manquai-je de m’étouffer.

— Il faut dire que tu n’as pas perdu ton temps pour partir dès lors que le banquet organisé pour fêter votre réussite fut terminé.

— Je n’avais qu’une hâte, c’était de m’enfuir. Et puis, je suis tombé sur Théa alors quoi de mieux ? répliqua avec ce léger sourire qui lui allait si bien malgré sa rareté d’apparition.

Obéissant ensuite à la duchesse, il m'attrapa par la main et m’entraîna à la suite de notre ami pour rejoindre la fameuse princesse.

En montant l’escalier je me demandais à quoi pouvait-elle bien ressembler et surtout comment était-elle. Dans les contes pour enfant, les princesses étaient nobles, gentilles et bonnes. Pourtant dans l’histoire préférée de ma mère, la princesse y était décrite comme suffisante voire méprisante. Odieuse avec les autres, elle s'était enfuie avec le fiancé de son amie.

Pourtant, la jeune princesse d’Orane avait été jugée digne de devenir l’héritière du royaume après l’abandon du second prince qui s’était éloigné pour réaliser son rêve et devenir mage. Quant au premier prince, il était issu d’une union non approuvée lors de la période  de désinvolture du roi.

Léoni nous conduisit à une grande porte que deux gardes royaux ouvrirent après que l’apprenti chevalier leur ait fait un signe de tête.

Une pièce lumineuse, soignée et extraordinairement précieuse se dévoila derrière les deux battants. Deux canapés disposés l’un en face de l’autre trônaient en son centre. Sur celui de droite, une jeune fille vêtue d’une robe rouge chic et travaillée y patientait. En nous voyant entrer, elle se leva et nous invita à avancer. Ses longs cheveux châtain pâle coulaient sur ses épaules et s’accordaient merveilleusement avec sa peau blanche et ses joues roses.

— Enfin vous êtes de retour ! Quand Jegal a appelé père pour lui expliquer ce qu’il se passait, il était très inquiet ! Tu es parti sans rien dire et on nous informe que tu as manqué de mourir parce que tu as été attaqué. Et là, la bombe, Léoni m’informe que tu as retrouvé ta sœur ! s’empressa-t-elle d’énoncer avec une distinction royale.

J’avais l’impression d’assister à une scène entre une femme et son mari. Sortaient-ils vraiment ensemble ? Avec toutes ces allusions je commençais vraiment à le penser.

— Et puis pas moyen de te joindre ! Silence radio. Où est ton miroir ?

Elle s’exprimait vraiment fort, personne n’avait le droit de crier après mon frère comme ça. A part moi, bien évidemment.

Elle arrêta de s’égosiller lorsque son interlocuteur, silencieux et calme comme toujours, me pointa du doigt avec la main qui ne tenait pas la mienne. Le regard noisette de la jeune femme se posa sur moi et elle sembla se détendre. Un peu.

— C’est elle qui a ton miroir ?

Elle m’examina d’un peu plus près puis plaça ses mains sur mes joues.

— Mais oui ! Mais bien sûr !

Elle se recula, ayant l’air de comprendre une chose que je n’avais pas saisie.

— Tu es Anthéa ! Thalion t’a donné son miroir et tu as essayé de me contacter pour apprendre à l’utiliser, c’est cela, n’est-ce pas ? s’adressa-t-elle plus à ce cher Thalion qu’à moi.

— Vous contacter ? Non, je n’ai pas…

Soudain j'ai réalisé. C’était elle qui m’avait répondu lorsque j’avais tenté de joindre les autres à Bolstrit. Elle avait ce même ton autoritaire que j’avais pu ressentir à travers même de simples messages écrits.

— Je vois. J’ai en effet essayé d’utiliser le miroir de mon frère pour les retrouver. Mais je comptais avoir Léoni, pas vous, m’étais-je clairement faite comprendre.

Non loin de prendre cela pour une insulte, un sourire éclatant se dessina sur ses lèvres rosées.

— Bien sûr. Je suis navrée de ne pas avoir pu t’aider outre mesure.

M’aider ? Elle semblait seulement inquiète de savoir qui utilisait le miroir lorsque je l’avais jointe.

— Bonjour à toi aussi, Liane, se mêla alors l’épéiste qui était sûrement un peu vexé de l’ignorance que la princesse lui accordait.

— Oui, oui, ravie également. Léandre est dans sa chambre, le médecin s’occupe de lui, dit-elle en balayant l’air de sa main pour lui indiquer qu’elle était occupée.

— Il lui est arrivé quelque chose ? s’enquit la voix grave de mon frère.

— Il raconte qu’il est simplement tombé d’un arbre et qu’il s’est pris une branche. Mais personne de censé le connaissant n’y croirait. Enfin, je vous laisse en juger par vous-même.

Elle semblait à son tour vexée par le jeune mage prodige qui accordait plus d’importance à un autre qu’à elle. Tant mieux, je ne l’appréciais pas beaucoup.

— Nous allons te laisser dans ce cas-là. Nous sommes épuisés et ton père risque d’organiser un dîner ce soir pour le retour de Thalion. Tu sais à quel point il l’adore.

Léoni reculait à pas discret vers la sortie. Thalion commença à faire de même et, non sans me guider dans sa démarche, nous finîmes par sortir de la pièce.

— Revenez me voir quand vous voulez !

— Bien sûr, on n’y manquera, grogna mon frère subrepticement avant de suivre Léoni, déjà bien avancé dans sa fuite.

— Vous ne l’aimez pas ? les questionnai-je lorsque nous étions parvenus à son niveau.

Léoni porta sa main à son menton et semblait hésiter quant à quoi me répondre.

— Elle n’est pas méchante. C’est une bonne héritière et elle fera beaucoup de bien au royaume si elle en devient la reine. Mais… Elle s’est entichée de Thalion et elle nous fait bien comprendre que tant qu’il est dans les parages elle sera bien ennuyeuse, finit-il par déclarer.

Thalion à mes côtés hocha vivement la tête avec une grimace.

Marchant dans les couloirs et montant les nombreux escaliers, je ne pus m’empêcher d’admirer l’architecture de l’endroit. L’espace était lumineux, il y avait des fenêtres partout et nous étions même passés dans un hall dont le plafond était transparent, nous laissant apercevoir ciel et soleil. Les escaliers étaient faits en marbre et des décorations étaient taillées à même la pierre.

Nous finîmes par arriver devant une pièce que Léoni nous présenta comme notre résidence temporaire avant de s'éclipser, comme il l’avait dit, dans sa propre chambre située avec ses meilleurs amis pour la vie, plus communément appelés, chevaliers.

Thalion lâcha alors finalement ma main et ouvrit la lourde porte qui nous séparait de mon paradis. A savoir, un lit.

J’entrai dans une pièce dont le mur face à moi était entièrement fait d’une verrière. Un salon simple occupait le centre de l’appartement et de chaque côté, deux portes qui devaient certainement mener aux chambres.

Je ne perdais pas plus de temps en voyant nos bagages déposés près des canapés, j’attrapais le mien.

— Parfait, j’espérais qu’il ait pu arriver avant nous. Prends la chambre que tu veux. Tu peux aller te reposer, te doucher et te changer. Ensuite, nous irons voir le roi.

Prenant cela comme une bénédiction, je me ruai vers la porte la plus proche.

L’intérieur était similaire au reste du château. Par contre, hormis une porte vitrée, il n’y avait pas plus de fenêtres que ça. D’un dizaine de mètres par côté, le lit semblait minuscule au milieu malgré ses dimensions incroyables.

Je déposai rapidement mon sac et sortis une robe simple, bleue et blanche et de nouveaux sous-vêtements avant de filer dans ce que je devinais être la salle de bain. Une fois à l’intérieur, je me déshabillais devant l’immense miroir au-dessus d’un bac de pierre rempli d’eau chaude. J’étais sale et fatiguée mais, contrairement à ce que mon reflet m’avait montré à l’infirmerie lorsque le mage soigneur Daniel Scott m’avait soignée, ça allait. Ma cicatrice, une longue estafilade blanche et large, barrait mon ventre sur le côté gauche. Ce n’était pas très joli mais je m’estimais encore chanceuse. Sans plus m’attarder sur ce qui me rappelait la mort de mes parents, j’entrai dans le bassin et activai la rune d’où en sortit une eau chaude relaxante.

Vous devez être connecté pour laisser un commentaire.
Vous lisez